Dans la série Tour du monde et pour suivre un peu l'actualité direction l'Egypte
J’ai lu beaucoup sur les voyages en Egypte car c’est une destination qui m’a toujours fait rêver. Alors bien sûr j’ai lu Flaubert, Théophile Gautier ou Lady Gordon Duff.
Je n’ai pas résisté à Pierre Loti qui vient d’être publié dans une toute nouvelle collection de récits de voyage.
Nous sommes au début du siècle et Pierre Loti amoureux de l’orient voyage en Egypte, il n’est pas un voyageur ordinaire, d’abord sa plume est celle d’un véritable écrivain mais surtout il a un regard très particulier sur ce qui vient de naitre en Egypte : Le tourisme
Il arpente l’Egypte du Caire à Assouan, de Thèbes aux rives du Nil, de Louxor à Philæ.
Tout son voyage est marqué par le terrible constat, les beautés naturelles, les paysages, les sites : tout va disparaître. L’Egypte et les Egyptiens vont perdre leur âme, en Inde l’auteur avait déjà eu la dent dure contre les anglais, mais ici c’est un réquisitoire en règle, tout y passe : le vol des oeuvres d’art, les maladies apportées à la population, l’exploitation des sites par « les désoeuvrés, les parvenus du monde entier » et que dire des hordes de touristes qui grâce à Monsieur Cook envahissent le désert « jeunes anglaises phtisiques, ou vieilles anglaises simplement un peu gâteuses ».
Philae au temps de Loti
philae aujourd'hui
Le paroxysme est atteint avec l’île de Philae « L'embarcadère pour Philae. Quantité de barques sont là prêtes, car les touristes alléchés par maintes réclames, affluent maintenant chaque hiver en dociles troupeaux. Toutes, sans en excepter une, agrémentées à profusion de petits drapeaux anglais, comme pour quelque régate sur la Tamise; il faut donc subir ces pavois de fêtes foraines, - et nous partons avec une nostalgique chanson de Nubie que les bateliers entonnent à la cadence des rames. »
les pages de Miriam sur Assouan et Philae
Il écrit en polémiste et il invite les Egyptiens à se rebeller « Réagissez avant qu’il soit trop tard (...) tout ce qui fut la grâce et le mystère de votre ville.(...) il y va de votre dignité nationale. »
Dans beaucoup de pages c’est son amour du pays, de la population, son admiration qui l’emportent.
Sa visite à Al-Azhar la mosquée Fatimide et son université « Cette cour, où le soleil de onze heures darde son feu blanc, est un enclos sévèrement et magnifiquement arabe ; il nous a isolés soudain du temps et des choses ; il doit porter à la prière musulmane, de même que jadis nos cloîtres gothiques portaient à la prière chrétienne. Il est vaste comme un carrousel » il est sous le charme puissant de l’endroit « Malgré soi on lève la tête, fasciné par toute cette beauté qui est en l'air : rien d'autre pourtant que ce carré de ciel merveilleux, sorte de limpide saphir tout enchâssé dans des crénelures d'Al-Azhar, et où montent se perdre les si audacieuses tours fuselées »
Al-Azhar
Pourtant ici aussi la critique n’est pas loin devant le comportement des touristes « Dans n’importe quelle église d’Europe, où des hommes prieraient agenouillés, je voudrais voir comment seraient accueillis des touristes musulmans, qui par impossible, se tiendraient aussi mal que ces sauvages là. »
Pierre Loti est un bon guide et l'alernance entre admiration et colère rend le livre très actuel.Un beau voyage, un livre à glisser dans ses bagages lors d’une croisière sur le Nil.
Pour compléter des pages et photos d’une exposition sur le voyage en Orient
les pages de Miriam sur Assouan et Philae
Le livre : La mort de Philae - Pierre Loti - Editions François Bourin
L’auteur :
Pierre Loti (1850-1923) officier de marine et écrivain, a cultivé toute sa vie la passion du voyage. De l'Inde à Tahiti, de la Turquie au Sénégal, des déserts du Sinaï à ceux de Galilée, les inlassables pérégrinations de cet arpenteur des océans ont nourri une œuvre riche (Vers Ispahan, Aziyadé, Le roman d'un spahi ou encore Madame Chrysanthème) qui contribua à faire de lui, de son vivant, un romancier à succès et un mondain courtisé. (l’éditeur)