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A sauts et à gambades - Page 212

  • En Egypte avec Pierre Loti

    Dans la série Tour du monde et pour suivre un peu l'actualité direction l'Egypte

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    J’ai lu beaucoup sur les voyages en Egypte car c’est une destination qui m’a toujours fait rêver. Alors bien sûr j’ai lu Flaubert, Théophile Gautier ou Lady Gordon Duff.
    Je n’ai pas résisté à Pierre Loti qui vient d’être publié dans une toute nouvelle collection de récits de voyage.

    Nous sommes au début du siècle et Pierre Loti amoureux de l’orient voyage en Egypte, il n’est pas un voyageur ordinaire, d’abord sa plume est celle d’un véritable écrivain mais surtout il a un regard très particulier sur ce qui vient de naitre en Egypte : Le tourisme

    Il arpente l’Egypte du Caire à Assouan, de Thèbes aux rives du Nil,  de Louxor à Philæ.
    Tout son voyage est marqué par le terrible constat, les beautés naturelles, les paysages, les sites : tout va disparaître. L’Egypte et les Egyptiens vont perdre leur âme, en Inde l’auteur avait déjà eu la dent dure contre les anglais, mais ici c’est un réquisitoire en règle, tout y passe : le vol des oeuvres d’art, les maladies apportées à la population, l’exploitation des sites par « les désoeuvrés, les parvenus du monde entier » et que dire des hordes de touristes qui grâce à Monsieur Cook envahissent le désert « jeunes anglaises phtisiques, ou vieilles anglaises simplement un peu gâteuses ».

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                                                                 Philae  au temps de Loti

     

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    philae aujourd'hui

    Le paroxysme est atteint avec l’île de Philae « L'embarcadère pour Philae. Quantité de barques sont là prêtes, car les touristes alléchés par maintes réclames, affluent maintenant chaque hiver en dociles troupeaux. Toutes, sans en excepter une, agrémentées à profusion de petits drapeaux anglais, comme pour quelque régate sur la Tamise; il faut donc subir ces pavois de fêtes foraines, - et nous partons avec une nostalgique chanson de Nubie que les bateliers entonnent à la cadence des rames. »

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    les pages de Miriam sur Assouan et Philae

    Il écrit en polémiste et il invite les Egyptiens à se rebeller  « Réagissez avant qu’il soit trop tard (...) tout ce qui fut la grâce et le mystère de votre ville.(...) il y va de votre dignité nationale. »
    Dans beaucoup de pages c’est son amour du pays, de la population, son admiration qui l’emportent.
    Sa visite à Al-Azhar la mosquée Fatimide et son université « Cette cour, où le soleil de onze heures darde son feu blanc, est un enclos sévèrement et magnifiquement arabe ; il nous a isolés soudain du temps et des choses ; il doit porter à la prière musulmane, de même que jadis nos cloîtres gothiques portaient à la prière chrétienne. Il est vaste comme un carrousel » il est sous le charme puissant de l’endroit  « Malgré soi on lève la tête, fasciné par toute cette beauté qui est en l'air : rien d'autre pourtant que ce carré de ciel merveilleux, sorte de limpide saphir tout enchâssé dans des crénelures d'Al-Azhar, et où montent se perdre les si audacieuses tours fuselées »

     

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    Al-Azhar

    Pourtant ici aussi la critique n’est pas loin devant le comportement des touristes  « Dans n’importe quelle église d’Europe, où des hommes prieraient agenouillés, je voudrais voir comment seraient accueillis des touristes musulmans, qui par impossible, se tiendraient aussi mal que ces sauvages là. »

    Pierre Loti est un bon guide et l'alernance entre admiration et colère rend le livre très actuel.Un beau voyage, un livre à glisser dans ses bagages lors d’une croisière sur le Nil.

    Pour compléter des pages et photos d’une exposition sur le voyage en Orient
    les pages de Miriam sur Assouan et Philae

    Le livre : La mort de Philae - Pierre Loti - Editions François Bourin

    L’auteur :
    loti.jpgPierre Loti (1850-1923) officier de marine et écrivain, a cultivé toute sa vie la passion du voyage. De l'Inde à Tahiti, de la Turquie au Sénégal, des déserts du Sinaï à ceux de Galilée, les inlassables pérégrinations de cet arpenteur des océans ont nourri une œuvre riche (Vers Ispahan, Aziyadé, Le roman d'un spahi ou encore Madame Chrysanthème) qui contribua à faire de lui, de son vivant, un romancier à succès et un mondain courtisé. (l’éditeur)


  • Le dernier bateau - Siegfried Lenz

    Un récit qui deviendra sans doute un classique de la littérature allemande

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    Un court et beau roman de Siegfried Lenz qui m’avait marqué par sa  Leçon d’allemand  ce qui m’a fait acheter ce livre là les yeux fermés.
    Arne a douze ans et il a déjà connu le pire, la perte de sa famille, un ami de son père l’accueille chez lui, il est le chef d’un chantier de démolition dans le port de Hambourg. Arne va désormais vivre avec Hans le fils aîné de dix sept ans, Lars le plus jeune et Wiebke la soeur de Hans.
    " Ce jour-là, Arne, ce jour d'hiver, nous t'avons vu pour la première fois, nous n'avions d'yeux que pour toi, debout dans la neige sale devant le hangar, résigné, perdu, comme si tu t'étais égaré dans notre univers"

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    "Loin sur l'Elbe, un de ces immenses cargos porte conteneurs a demandé le passage et son signal était si grave, si puissant qu'on aurait dit que toute la terre autour du fleuve tendait l'oreille"

    Une amitié se noue immédiatement avec Hans, il est en sécurité avec lui et la chambre qu’ils partagent est un territoire quasiment magique, Arne est " figé d'étonnement, en découvrant ma chambre ; elle était aménagée comme une cabine de bateau. Les étroites couchettes avec leur planche de sécurité relevée, les fauteuils capitonnés à trois pieds pour limiter l'encombrement, les tables de bois tropical et les deux cloches de laiton ballantes : tout provenait de navires dégréés, tout avait été mis à l'abri, réparé, astiqué et transporté chez nous sous la surveillance de mon père "

    Arne s’apprivoise, curieux de tout, il apprend le finnois et les noeuds marins, il a une petit bibliothèque bien à lui, il est doué pour les langues et réussit très bien à l’école. Mais si l’amitié avec Hans est facile, il a du mal à s’intégrer hors de la maison, Lars et Wiebke sont un brin hostiles. Arne est souvent auprès de Kalluk, le gardien du chantier de démolition, originaire d'Estonie, taciturne et secret. Mais c’est la bande d’adolescents du quartier qui l’attire, en faire partie devient son rêve, il va par tous les moyens tenter de se faire accepter.
    Ses efforts seront vains et vont entraîner un drame.

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    Le récit extrêmement prenant est construit sur un lent retour en arrière, les personnages sont peu à peu dévoilés, les mots de Lenz sont d’une grande sobriété et d’une totale simplicité. Un beau récit sur l’exclusion, l’amitié, la marginalité et la solitude.
    Le port de Hambourg, les brumes de l’Elbe, l’atmosphère du chantier et son attrait, tout est rendu proche par le talent de l’auteur.
    Siegfried Lenz dans ce roman comme dans  La leçon d’allemand  sait rendre les sentiments de l’adolescence et l’intimité de la vie familiale avec une immense sensibilité.
    Ce livre a obtenu le Prix Goethe, mais récompense ou pas je vais lui faire une place dans ma bibliothèque.

    Le livre : Le dernier bateau - Siegfried Lenz - Traduit de l'allemand par Odile Demange - Editions Pavillons poche Robert Laffont

    lenz.jpegL’auteur
    Auteur d’une centaine de romans, d’essais et de pièces de théâtre, traduit en trente langues, Siegfried Lenz est devenu un auteur classique. Né en 1926 à Lick, en Mazurie, région de Prusse-Orientale qui allait devenir polonaise à la fin de la guerre.
    Il vit aujourd’hui à Hambourg. Siegfried Lenz a une notoriété comparable à celle d'Heinrich Böll ou Günter Grass.

  • Le Jardin d'Epicure

     

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    Demander une morale à la science, s’est s’exposer à de cruels mécomptes. On croyait il y a trois cent ans, que la terre était le centre de la création. Nous savons aujourd’hui qu’elle n’est qu’une goutte figée du soleil. (...) Mais en quoi notre morale a-t-elle été changée par de si prodigieuses découvertes ?

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    L’intolérance est de tous les temps. Il n’est point de religion qui n’ait eu ses fanatiques. Nous sommes tous enclins à l’adoration. Tout nous semble excellent dans ce que nous aimons, et cela nous fâche quand on nous montre le défaut de nos idoles. Les hommes ont grand-peine à mettre un peu de critique dans les sources de leurs croyances et dans l’origine de leur foi.

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    Gravure représentant la chasse aux sorcières de Salem en 1692.

    L’ ignorance est la condition nécessaire, je ne dis pas du bonheur, mais de l’existence même. Si nous savions tout, nous ne pourrions pas supporter la vie une heure. Les sentiments qui nous la rendent ou douce ou du moins tolérable, naissent d’un mensonge et se nourrissent d’illusions.

    Le livre : Le Jardin d’Epicure - Anatole France - Editions Coda

  • Le Pays oublié du temps - Xavier-Marie Bonnot

    Papou quoi ?

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    Très déçue par toute une série de polars je n’avais plus rien lu depuis des semaines. Et voilà un bon livre du genre que je vous recommande.
    Tout d’abord dire qu’il s’adresse à ceux et celles qui aime les bonnes histoires, bien ficelées, des personnages bien campés qu’on ne détesterait pas rencontrer à nouveau au détour d’un livre.
    Un récit qui va vous emporter de Marseille en Papouasie....où ça ?? oui en Papouasie Nouvelle-Guinée, je vous avoue que j’ai fait une petite recherche géographique car si je situais bien ça dans l’Océan Indien après ...c’était nettement plus flou.
    Tout commence en Nouvelle- Guinée en 1936, deux explorateurs,  Robert Ballancourt et Fernand Delorme remontent des rivières, sont accueillis dans des villages, ils sont à la recherche d’objets rares et surtout de têtes, de crânes, car ils sont ici au pays des coupeurs de têtes et accessoirement au pays des cannibales.

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    Un grand bond dans le temps pour nous retrouver à Marseille, au domicile de Fernand Delorme qui vient d’être assassiné. Michel de Palma, dit « Baron » flic très compétent et amateur d’opéra, est chargé de l’enquête.
    Très vite l’enquête va s’orienter vers le marché de l’art et ses circuits parallèles. Ce n’était que le premier meurtre, d’autres vont suivre.

    Voilà la trame, elle va vous faire voyager du Musée des Arts Premiers aux quartiers si pittoresques de Marseille, de Freud aux peuplades d’Océanie, de la goélette la Marie-Jeanne, à Port Moresby.

    C’est intelligent, stimulant, Lévi-Strauss dans un polar ce n’est pas courant et ça déclenche la curiosité. 
    Un seul conseil : embarquez sur la Marie-Jeanne vous ferez un voyage très sympathique. Moi j’ai déjà prix un ticket pour les autres polars de l’auteur.

    Si vous voulez faites un petit tour au Musée

    Le livre :  Le pays oublié du temps - Xavier-Marie Bonnot - Actes Sud 2011

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  • Ararat - Frank Westerman

    Une étape de mon tour du monde  à la fois réel et imaginaire.

    Le déluge, l'arche de Noé, je vous emmène vers un lieu mythique

     

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    Le mont Ararat : un lieu mythique qui a tout à voir avec la religion, qui est depuis des décennies un enjeu entre des pays ennemis, le sommet qui sera le plus élevé d’Europe (5165 m) si la Turquie intègre l’Union Européenne, voilà ce qui m’a poussé à lire ce livre.

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    Frank Westerman fait un voyage en Arménie en 1999 comme correspondant d’un journal, à Erevan le Mont Ararat est omniprésent, « Son image se trouve sur les billets de banque, les timbres et en hologramme sur les cartes de crédit  » oui mais on ne peut atteindre le sommet qui est sur le sol turc.
    Elevé d’une façon assez stricte, il a reçu une éducation religieuse, il a grandi dans le respect des textes sacrés et celui du déluge est un de ceux qui dont le souvenir est vivace, il comprend donc parfaitement les arméniens qui « habitaient le pays de Noé, où pour la première fois était apparu un arc-en-ciel. Comme dans la Bible, ils croyaient qu’une arche avait existé, longue de trois cents aunes, large de cinquante et haute de trente, un bateau de sauvetage enduit de goudron dans lequel hommes et bêtes avaient survécu à l’inondation du globe terrestre tout entier »
    Frank Westerman est étonné « Je ne m’étais encore jamais fait la réflexion qu’il existait des lieux bibliques que l’on pouvait tout bonnement aller visiter » et c’est ce qu’il entreprend.
    La quête de l’auteur va passer par tout une série de rencontres. Scientifiques quand il retourne voir son vieux prof de math, un géologue spécialiste des éruptions volcaniques, ne pas oublier qu’Ararat est un volcan ! Sans oublier les alpinistes car l’ascension n’est pas un promenade du dimanche et exige matériel et préparation.


    A la fois récit de voyage et interrogation personnelle, ce livre, entrepris au moment où l’auteur devient père, est tout à fait original. L’auteur s’interroge sur la foi qui l’a quitté, sa pratique religieuse d’enfant, ses doutes ou questions d’adulte. Il va se frotter aussi aux conflits qui sont à peine éteints aujourd’hui : la question arménienne, le conflit kurde, une petite poudrière aux portes de l’Europe.
    Le récit est agréable à suivre, les rencontres de l’auteur sont empreintes de chaleur et parfois de cocasserie.  

    Le livre : Ararat - Frank Westerman - Traduit du néerlandais par Danielle Losman - Editions Chrisitian Bourgois 2010

  • Ma vie à Saint Domingue - Jean-Jacques Salgon

    Un an après le séïsme et alors que l’on voit parader devant les télévisions le dictateur Duvallier, j’ai eu envie de lire un livre sur Haïti qui réponde à certaines de mes questions.

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    Ni livre d’histoire, ni roman, le livre de Jean-Jacques Salgon a été un guide parfait. Il dédit son livre « A tous ceux que cette catastrophe a meurtris dans leur chair et dans leur âme »

    Pourquoi un ardéchois « coeur fidèle » viendrait-il parler d’Haïti ?
    c’est que son histoire personnelle va croiser à un moment celle de l’île, il va ainsi par de fréquents allers-retours nous transporter des côtes africaines à Saint Domingue, des ors de Louis XIV aux apparats de l’Empire napoléonien.
    Ce livre pour l’auteur répond à son besoin de savoir, de comprendre cette histoire d’Haïti et dresse le portrait d’un homme extraordinaire : Toussaint Louverture.

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    Son histoire commence sur les côtes africaines où son père va se faire enlever, capturer par des négriers et être envoyé en esclavage.
    Toussaint naît en 1743. On suit la vie de l’esclave affranchi et éduqué, le fin statège qui va à la tête de ses troupes devenir le héros de Saint Domingue. Fidèle à la France jusqu’à l’aveuglement, croyant aux promesses de Bonaparte « Vous lui direz que moi, premier magistrat du peuple français, je lui promets protection, gloire et honneur »
    Il n’aura que le temps de croire à l’indépendance, ses enfants Isaac et Placide seront reçus par le Premier Consul mais « Bonaparte va le faire jeter comme un brigand au fin fond d’un Jura couvert de sapins et de neige et vitrifié par le froid »
    Toussaint Louverture est mort oublié au fond des geôles françaises en 1802. L’esclavage et la traite des noirs sont rétablis à la Martinique et à la Guadeloupe

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    Toussaint Louverture aujourd'hui à Haïti

    Jean-Jacques Salgon à vécu, travaillé dans plusieurs pays dAfrique, sa curiosité, sa sensibilité personnelle, transparaissent dans les pages où il revient sur son expérience. Comment il est passé des peintures de Jean Michel Basquiat à ses recherches sur Toussaint Louverture, comment il a élargi son point de vue par les détours de l’histoire (guerre d’Algérie, Mai 68) pris des chemins peu fréquentés, explorant le passé de cette ïle.

    Son voyage est un voyage dans le temps et l’on part à la rencontre de figures de l’histoire de Haïti, certains peu connues, des hommes au destin parfois tragique,
    les souvenirs de l’auteur faisant écho aux événements. Il garde un certain optimisme car dit-il « J’ai pu constaté combien la France, en dépit de tous les abus propres au régime colonial; pouvait encore être aimée » qu’il attribue à l’apport de la lecture, de la culture, moyens d’émancipation.

    J’ai aimé ce livre court et dense, l’oeil bien ouvert de l’auteur, sa façon bien à lui de nous rappeler un passé qui peut nous rendre honteux mais dont parfois on peut être fier. j’ai aimé une franche simplicité doublée d’une hauteur de vue, le tout servi par des phrases parfois mordantes ou d’une douceur trompeuse.
    Un excellent moment de lecture, de ceux qui vous donnent l’impression d’être un peu plus intelligent.

    Le livre : Ma vie à Saint-Domingue - Jean-Jacques Salgon - Editions Verdier 2011