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Histoire

  • Un livre cathédrale : Les très riches heures du Duc de Berry

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    Je suppose que comme moi vous avez en peinture des œuvres un peu fétiches. Peu importe le genre ces œuvres vous ont plu immédiatement et sont donc restées dans vos mémoires.

    Pour moi il y a Les Riches heures du Duc de Berry. Je me souviens encore du moment où j’ai feuilleté un livre dans la boutique du Musée du Louvre, livre aujourd’hui indisponible. J’étais restée devant pendant plus d’une heure, le prix à l’époque m’avait fait reculer évidemment.

    Aujourd’hui j’ai mis dans ma bibliothèque un petit livre accessible par tous sur cette œuvre.

    Le Musée Condé de Chantilly présente l’œuvre pour plusieurs semaines.
    Ce livre de prières tout enluminé a été réalisé par les frères Limbourg et les artistes de leur atelier. Si vous avez la chance d’aller voir cette exposition je vous envie.

    Aujourd’hui vous pouvez admirer les pages les plus belles de ce manuscrit et le découvrir en compagnie d’Alberto Manguel.
    Manguel vous le connaissez et sa plume est parfaite pour vous parler de cette œuvre que l’on appelle « La Joconde des manuscrits »

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    La Chute des anges

    Ce livre d’heures est fait en particulier des douze enluminures pour les douze mois de l’année. Les pages les plus célèbres de ce « Livre cathédrale ».
    Manguel consacre un chapitre à chaque mois et croyez-moi on ne se lasse pas une seule minute.

    Pour chaque mois les détails abondent qui vous permettent de fureter dans le tableau en comprenant bien ce que vous voyez, ce qui se cache derrière un animal, un personnage.

    Les dessins sont magnifiques de finesse, les couleurs sont magiques, beaucoup de bleu, pigment qui à l’époque était très couteux et très rare.

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    Lapis Lazuli

    La fascination éprouvée tient beaucoup je crois à la finesse et aux couleurs magnifiques des pages.
    Quelle est la place des personnages, des animaux et des plantes, et que sont ces châteaux aperçus dans le lointain On est aussitôt pris par ces images d’un calendrier qui met en avant les paysans et leurs travaux, les nobles et leurs châteaux

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    Vaisselle d’or, banquet de riches, dans le bas du tableau le lévrier qui évoque la Divine Comédie de Dante, le château est peut-être celui de Bourges.
    « Loin derrière la table, une tapisserie imposante représente des scènes de la guerre de Troie. »

     

    Février

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    Manguel nous dit qu’il y a là un appel à François Villon « Frères humains qui après nous vivez »
    « bien que la charité ne soit pas le fruit de l’hiver lui-même, elle apparaît dans l’âme comme un miroir inversé de la saison : plus le cœur de l’hiver est froid plus le cœur du bon chrétien doit être chaud. »

     

    Avril

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    « Floraison et renaissance. Avril est la saison des fiançailles. »
    Le tableau fait aussi penser aux poèmes de Christine de Pizan.
    « Dans la société française du XVème siècle, cueillir des fleurs n’est pas pour une femme un passe-temps oisif ; c’est la preuve d’un esprit curieux ouvert à l’art et au métier de la poésie. »

     

    Juin

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    « Les couleurs estivales se déclinent progressivement du vert à l’or, de l’or au blanc crayeux, du blanc au bleu clair et à l’azur profond. »
    En arrière-plan Paris et la cité, les toits de la Sainte Chapelle

     

    Septembre

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    En arrière-plan le château de Saumur.
    « Nous sommes à la fois dans un monde féérique et dans celui bien réel, où la menace de guerre et le changement des saisons sont constants. »

     

    Sur le site du Musée de Chantilly allez feuilleter ce livre magnifique
    https://les-tres-riches-heures.chateaudechantilly.fr/

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    Le Livre : Les très riches heures du duc de Berry – Alberto Manguel – Éditions Invenit

  • L'Ami du Prince - Marianne Jaeglé

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    12 avril 65 après Jésus-Christ, dans les environs de Rome.
    Des soldats en armes envahissent la villa de Sénèque, porteurs d’un ordre de l’empereur Néron: le philosophe doit se donner la mort.

    L’autrice laisse la parole à Sénèque, dans une longue lettre à son ami Lucilius il raconte et tente de faire comprendre les difficultés qui se sont présentées.

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    Après avoir passé huit ans exilé en Corse, Sénèque est rappelé par Agrippine pour faire de Néron son élève.
    Les premières années il a appris à son élève le b.a. ba de la réflexion, de la pensée politique
    « Mon élève, à qui j'ai appris à raisonner, à mettre ses pensées en mots (…) prend conscience du poids du pouvoir, en éprouve la terrible responsabilité et formule cela avec une modestie touchante… oui, je peux le dire, ce jour-là, Lucilius, j'exulte. J'ai le sentiment que tous mes efforts portent leurs fruits. »

    Il détaille la transformation de l’adolescent maladroit, la lente ascension du Prince, ses changements, les manœuvres de sa mère, les complots, les meurtres devant lesquels Sénèque a fermé les yeux et parfois joué un rôle.
    Il fut un temps fier de son élève mais le temps passant il s’est aveuglé et bien pire il s’est compromis.

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    Agrippine


    L’ami du Prince a envie de comprendre, comment son élève docile est devenu cet homme sanguinaire.
    « Lis-moi sans trop me juger, Lucilius, et rends-moi cette justice : demande-toi, en toute honnêteté, ce que tu aurais fait à ma place, et si tu aurais su réussir là où j'ai échoué. Voilà l'ultime faveur que je te demande. Ensuite, tu brûleras cette lettre, si tu tiens à ta sécurité. »

    Il a beau avoir été trop naïf et lâche, on a de la peine pour Sénèque, sa franchise le rend attachant.
    Lui qui a tenté d’enseigner la responsabilité et la droiture, la magnanimité  se retrouve compromis et coupable d’avoir donné naissance à un tyran.
    « Mais qui peut comprendre à quoi rêve les princes ? ».

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    L'écriture est parfaite, juste assez exigeante pour la crédibilité, sobre et fluide pour donner du plaisir au lecteur.
    Parsemée de jolies citations et d’un zeste de latin : juste ce qu’il faut pour que le texte soit accessible et passionnant.

    Une franche réussite. Après, et bien après allez lire les Lettres à Lucilius, enfin les autres …

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    Le livre : L’ami du prince – Marianne Jaeglé – Éditions Gallimard l’Arpenteur

  • Les Fossoyeuses - Taina Tervonen

    guerre des balkans

    Faire parler les morts : est-ce vraiment un métier ? un but ?
    L’une est anthropologue judiciaire, elle s’appelle Senem, l’autre est enquêtrice et se nomme Darija.
    Deux femmes qui travaillent avec et pour les morts, mais aussi pour les familles et les institutions. Ont les appelle des fossoyeuses.

    guerre des balkans

    La guerre des Balkans ( 1992/1995 ) vous vous souvenez ?
    Plus de 100 000 morts, 30 000 disparus, des corps dans des charniers, des crimes de guerres, des frères contre des frères, des orthodoxes contre des musulmans, des Bosniaques contre des Serbes, des Serbes contre des croates et au milieu des casques bleus spectateurs impuissants.
    En 2013 il y a encore 10 000 hommes, femmes et enfants dont on ne sait rien.

    guerre des balkans

    L'auteur

    Taina Tervonen, journaliste, va faire connaissance avec ces deux femmes, comprendre leur travail respectif, identifications des victimes dont on a retrouvé les ossements, prélèvement des ADN dans les familles, écoute de la parole des familles décimées.

    guerre des balkans

    Ce travail qui peut paraître macabre, il est pourtant indispensable à la fois pour avoir un bilan juste des massacres, mais surtout pour les familles, leur permettre de savoir ce qui s’est réellement passé, où sont les corps de leurs disparus.

    Les massacres sont tabous, la guerre a touché toutes les familles, le silence s’est installé.

    guerre des balkans

    Srebrenica

    Comment survit-on après pareilles atrocités ?
    Les moyens alloués à ceux qui œuvrent pour mettre des noms sur des os sont ridicules, les politiques voudraient bien réécrire l’histoire.
    « L’identification, c’est comme un point que les familles arrivent à mettre au bout d’une phrase longue de plus de quinze ans »

    guerre des balkans

    Sarajevo

     J'ai beaucoup aimé ce livre écrit par une journaliste occidentale et qui dresse deux magnifiques portraits de femmes.
    Senem et Darija ont sur leurs épaules l’attente de milliers de familles pour qui la quête n’est pas terminée.

    Elles se sentent un devoir envers les vivants, elles accomplissent une réparation indispensable et il faut les saluer très bas.
    « Tant qu’il y a des personnes qui font ce travail, qui réparent ce qui a été détruit et piétiné, quelque chose de notre humanité à nous tous est préservé. »

    Retrouver l’auteur et le livre dans l’Humeur vagabonde

    Ce livre a réactivé mes souvenirs de cette guerre, des heures que j’ai passé devant les reportages de l’époque à tenter de comprendre.
    Aujourd’hui ces pays sont devenus touristiques, lieux de vacances, il est bon de ne pas oublier à quel prix cela s’est fait.

    Taina Tervonen est documentariste, elle travaille pour la presse finlandaise et française.

    Elle a reçu le Prix Louise Weiss du journalisme pour son travail.

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    Le livre : Les fossoyeuses – Taina Tervonen - Éditions Marchialy

     

  • Pompéi la magie des ruines - Gabriel Zuchtriegel

     

    pompéï

    Bon j’avoue Pompéi me fascine depuis toujours. J’ai déjà lu sur le sujet bien sûr mais je ne peux m’empêcher d’en rajouter une couche quand l’occasion se présente.

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    un Boulanger

    Là c’est un livre écrit par le récent directeur du Parc archéologique de Pompéi.
    Un homme aux premières loges et j’ai été séduite par son rapport à l’archéologie qui sort un peu des sentiers battus.

    pompéï

    Parlant de chantiers de fouilles il dit : « Nous fouillons, c’est votre histoire ! » il ajoute que ce sont des laboratoires à ciel ouvert et l’occasion pour le visiteur de corriger un peu sa vision du monde antique.

    pompéï

    C’est un beau voyage que propose Gabriel Zuchtriegel, il est très convaincant dans son rôle de passeur.
    J’ai été stupéfaite par les entraves que connaissent les chercheurs, budget mais ça on s’y attend mais aussi une compétition acharnée pour savoir qui déterre quoi !!

    pompéï

    J’ai appris en souriant un brin qu’au temps de Pompéi on avait déjà envisagé la restauration rapide, antique ne veut pas nécessairement dire intelligent !! et aussi prévu les passages piétons histoire de ne pas se faire écraser par un char, celui de Ben Hur cela va de soi.

    pompéï

    Par contre les bains étaient privés …c’est à dire pas du tout pour vous et moi, non réservés à l’élite, je suis certaine que le Musk ou le Poutine local y avait sa place.

    pompéï

    Arrêtons de plaisanter, j’ai été sensible aux dernières découvertes et d’autres sont certainement à venir. Les photos sont parlantes donne une belle idée de ce que fut la vie en ces lieux aux alentours de l’automne 79.

    C’est une balade passionnante et instructive parce que le passé a encore des choses à nous apprendre.

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    Le Livre : Pompéi, la magie des ruines - Gabriel Zuchtriegel – traduit par Tina Calogirou   - Éditions Alisio

  • Envers et contre tout -Euphrosinia Kernovskaïa 

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    Voilà un livre qui m’a touché d’une forte façon.

    Bon j’ai déjà pas mal lu sur le Goulag mais jamais je n’avais imaginé qu’une femme détenue pendant plus de dix ans pourrait nous donner à lire et à voir ce que fut ce goulag, ce que furent ces années de souffrance et de déchéance.

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    Euphrosinia Kersnovskaïa nait en 1907 à Odessa. Elle est fille d'un juriste. En 1919 sa famille doit fuir la Révolution en Bessarabie.

    La Bessarabie c’est aux confins de la Russie et de la Roumanie, ces territoires dont on connaît le nom mais que l’on a du mal à placer sur une carte.

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    La famille se convertie à l’agriculture et leur ferme fonctionne bien sous la houlette d’Euphrosinia.

    Lorsque en 1940 la Russie envahie le territoire, la ferme est séquestrée, les propriétaires sont considérés comme Koulaks par les soviétiques et soumis à une collectivisation forcée.

    Euphrosinia est arrêtée, s’évade, est reprise et condamnée à mort puis voit sa peine commuée en dix ans de travaux forcés avec cinq ans de privation de droits civiques.

    Elle a trente-deux ans et ne recouvrira la liberté qu’après dix ans de camp  et ne reverra sa mère que dix-huit ans plus tard.

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    Elle passe de camp en camp, les déplacements se faisant toujours à pied dans la neige et le froid ou sous un soleil de plomb.

    Elle travaille à l’abattage du bois en Sibérie. Elle s’évade et passe plusieurs mois dans la Taïga.

    De nouveau arrêtée elle est envoyée dans des mines de charbon.

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    Son récit ressemble aux récits d’autres Zeks, ce qui en fait sa particularité c’est qu’il est écrit par une femme ce qui est très rare avec ce type de documents et surtout ce sont les illustrations dessinées par l’autrice, il n’y a pas loin de 200 dessins ce qui en fait un document tout stupéfiant.

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    La vie au Goulag est vu sous l’angle féminin et fait tout le prix de ce récit, la maltraitance des femmes, la violence des gardiens, les viols, les maternités non voulues, les accouchements dans des conditions terribles.

    Le reste est semblable aux récits des hommes bien entendu : la faim, les combats pour du pain, la terreur toujours présente, les dessins donnent force au récit et le rende parfois insoutenable.

    Elle écrit « Dante dans son Enfer, n’était pas allé jusque-là »

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    Bessarabie

    Ludmilia Outlitskaïa qui a écrit la préface du livre dit « Pas un scénariste, même le plus inventif ne saurait imaginer une vie comme celle qui fut le lot d'Euphrosinia Kersnovskaïa »

    Une destinée rare, un récit fort, émouvant, juste et qui je l’avoue m’a touché fortement.

    Ce livre est une coédition et il faut saluer les deux éditeurs pour cette réussite : Sophie Benech la traductrice et fondatrice d’Interférences et les éditions Christian Bourgois.

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    Le Livre : Envers et contre tout Textes dessins et peintures -Euphrosinia Kernovskaïa  - Traduit par Sophie Benech – Éditions Interférences et Christian Bourgois



     

  • L'Amérique éclatée - Romuald Sciora

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    Vous êtes-vous déjà demandé si vous ne vous laissez pas influencer par l’ensemble des médias, par le buzz fait autour d’un événement ?

    Je me suis dit « arrête de taper sur Trump » lis plutôt sur le sujet.

    sciora

    Romuald Sciora

    J’ai lu L’Amérique éclatée,Un livre écrit par un essayiste franco-américain directeur de l'Observatoire politique et géostratégique des États-Unis Politologue et documentariste franco-américain spécialiste de l’ONU, des relations internationales et des Etats-Unis.

    Je le dis tout de suite le livre se lit très facilement, je l’ai lu d’une traite seul le chapitre 3 est un peu long mais il peut tout à fait se lire par tranche ou on peut le lire rapidement et revenir sur les points particuliers abordés en fonction de vos intérêts personnels.

    Par exemple : l’éducation, la défense, la pauvreté, l’environnement etc…

    sciora

    Jamestown

    Le livre remonte loin en arrière, à la création des USA et à la naissance de sa Constitution. C’est un résumé rapide certes mais qui permet de de faire immédiatement des liens avec l’état actuel des USA.

    sciora

    Romuald Sciora déroule l’histoire américaine, les débuts, la guerre de Sécession dont on voit qu’elle a laissé des traces jusqu'à nos jours, le New Deal, la Seconde Guerre,la guerre froide et l’explosion économique des années 50 à 70 ,les dérives de la société vers un état qui crée à la fois la richesse pour un petit nombre et la pauvreté pour beaucoup.

    sciora

    Pour les débuts on est vite rappelé à une réalité un peu trop souvent oubliée : la plupart des hommes politiques de l’époque étaient de fervents esclavagistes !!

    A ses débuts l’État américain a fait « ce qu’il faut bien appeler la plus grande spoliation de terres de l’histoire des temps modernes » en  privant les nations indiennes de leurs terres.

    sciora

    Les nouveaux arrivés sur la terre américaine vont ériger une statue au dieu Dollar et s’éloigner petit à petit des notions écrites dans la constitution : « la dignité essentielle de l’individu, l’égalité fondamentale de tous les hommes » mais en privilégié certaines comme « le droit à la propriété. »

    sciora

    L’auteur s’interroge : « comment la société américaine qui dans les années 1950 faisait rêver (…) avec son Américan way of life a-t-elle put devenir la société la plus inégalitaire qui soit » ?

    sciora

    Comment accepter les dérives de la vie politique avec des fraudes, des manipulations des électeurs, la démission d’un Président, des campagnes électorales qui frisent l’indécence. ?

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    Comment les articles de la Constitution interprétés de la façon la plus aberrante qui soit aboutissent au fait que « les habitants des Etats-Unis possèdent près de la moitié des armes à feux détenues par des civils dans le monde » ?

    sciora

    Une Amérique ébranlée par la crise de 2008 et celle de Covid-19
    Une nation qui a perdu son unité et qui fait apparaître des fractures profondes au sein de sa population, fractures qui menace l’avenir.

    Un essai qui peut effrayer si les scénarios les plus inquiétants que Romuald Sciora décrit venaient à se concrétiser.

    Je vous recommande ce livre, à plus forte raison si comme moi vous ne reconnaissez plus ce pays.

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    Le livre : l’Amérique éclatée – Romuald Sciora – Éditions Armand Colin