Voilà un livre qui m’a touché d’une forte façon.
Bon j’ai déjà pas mal lu sur le Goulag mais jamais je n’avais imaginé qu’une femme détenue pendant plus de dix ans pourrait nous donner à lire et à voir ce que fut ce goulag, ce que furent ces années de souffrance et de déchéance.
Euphrosinia Kersnovskaïa nait en 1907 à Odessa. Elle est fille d'un juriste. En 1919 sa famille doit fuir la Révolution en Bessarabie.
La Bessarabie c’est aux confins de la Russie et de la Roumanie, ces territoires dont on connaît le nom mais que l’on a du mal à placer sur une carte.
La famille se convertie à l’agriculture et leur ferme fonctionne bien sous la houlette d’Euphrosinia.
Lorsque en 1940 la Russie envahie le territoire, la ferme est séquestrée, les propriétaires sont considérés comme Koulaks par les soviétiques et soumis à une collectivisation forcée.
Euphrosinia est arrêtée, s’évade, est reprise et condamnée à mort puis voit sa peine commuée en dix ans de travaux forcés avec cinq ans de privation de droits civiques.
Elle a trente-deux ans et ne recouvrira la liberté qu’après dix ans de camp et ne reverra sa mère que dix-huit ans plus tard.
Elle passe de camp en camp, les déplacements se faisant toujours à pied dans la neige et le froid ou sous un soleil de plomb.
Elle travaille à l’abattage du bois en Sibérie. Elle s’évade et passe plusieurs mois dans la Taïga.
De nouveau arrêtée elle est envoyée dans des mines de charbon.
Son récit ressemble aux récits d’autres Zeks, ce qui en fait sa particularité c’est qu’il est écrit par une femme ce qui est très rare avec ce type de documents et surtout ce sont les illustrations dessinées par l’autrice, il n’y a pas loin de 200 dessins ce qui en fait un document tout stupéfiant.
La vie au Goulag est vu sous l’angle féminin et fait tout le prix de ce récit, la maltraitance des femmes, la violence des gardiens, les viols, les maternités non voulues, les accouchements dans des conditions terribles.
Le reste est semblable aux récits des hommes bien entendu : la faim, les combats pour du pain, la terreur toujours présente, les dessins donnent force au récit et le rende parfois insoutenable.
Elle écrit « Dante dans son Enfer, n’était pas allé jusque-là »
Bessarabie
Ludmilia Outlitskaïa qui a écrit la préface du livre dit « Pas un scénariste, même le plus inventif ne saurait imaginer une vie comme celle qui fut le lot d'Euphrosinia Kersnovskaïa »
Une destinée rare, un récit fort, émouvant, juste et qui je l’avoue m’a touché fortement.
Ce livre est une coédition et il faut saluer les deux éditeurs pour cette réussite : Sophie Benech la traductrice et fondatrice d’Interférences et les éditions Christian Bourgois.
Le Livre : Envers et contre tout Textes dessins et peintures -Euphrosinia Kernovskaïa - Traduit par Sophie Benech – Éditions Interférences et Christian Bourgois
Commentaires
Je ne connaissais pas du tout cette femme, merci de nous en parler. Je le note, pour un moment où je me sentirais bien prête à affronter son témoignage.
Merci de ton billet qui me donne très envie de découvrir ce témoignage malgré son terrible sujet.
Bonne fin de semaine
Anne
Bien sûr je ne connaissais pas, une découverte originale, textes et dessins
Merci Dominique. Trés interessée et je découvre qu'il est en 2 ex dans la bib de ma ville.
Merci de partager tes découvertes
Je ne connaissais pas non plus cette femme. En tout cas, les illustrations doivent lui donner une force de témoignage très touchante. A voir si les médiathèques de ma ville l'ont en rayons.
Je ne connaissais pas cette femme, c'est un livre qui pourrait me plaire, merci !
Son courage est impressionnant... Gustav Herling, dans "Un monde à part", avait évoqué le destin des femmes au Goulag et avait parlé aussi des viols...
je n'ai qu'une envie tout arrêter et trouver ce livre pour le lire au plus vite merci Dominique !
Quelle volonté de vivre, et libre!
Essentiel d'avoir un témoignage féminin de ces temps horribles, merci
Les dessins doivent être, à en juger par ces deux-là, beaux et très forts.
un témoignage rare!