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Littérature de l'antiquité

  • Beau comme l'antique

    Savez-vous d’où vient cette expression Beau comme l’antique ?  Et bien je vais détruire le mythe, cela n’a rient à voir avec Rome ou l’antiquité mais tout à voir avec …Napoléon, ben oui !! C’est le peintre David qui utilisa l’expression pour parler de l’empereur.  Enervant non ?

     

    Revenons à Rome

    Je vous ai présenté une partie de ma bibliothèque consacrée à l'antiquité, il me reste à vous inviter dans ma bibliothèque romaine.

    Je m’aperçois qu'elle est sous la coupe d’Ovide manifestement. 
    Son oeuvre majeure, Les Métamorphoses dont j’apprécie la traduction de Marie Cosnay aux Editions de l’Ogre. C’est très réussi et  magnifiquement mis en page. 

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    J’avais fait un billet sur les Métamorphoses il y a quelques années dans lequel j’évoquais deux livres autour de l’oeuvre d’Ovide, je vous laisse vous y reporter si vous le souhaitez.

    Mais je n’ai pas fini avec ce diable d’homme car ce qui m’a toujours attaché à l’homme c’est son destin d’exilé et ses lettres, certes parfois un rien larmoyantes, mais toujours d’un style époustouflant, ses lettres d’amour et lettres d’exil sont superbes. 

    Alors bien sûr j’ai lu des biographies et essais et je vous en recommande deux; celui de Xavier Darcos et un essai assez récent et Avec Ovide de Nicolas Gardini, tout en finesse et érudition. 

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    Ensuite il y a Virgile, pour lui j’ai fait une petite folie avec l’édition en Pléiade et un Virgile de Xavier Darcos que j’apprécie beaucoup, vous allez croire que je fais une fixation sur le ministre, non pas du tout mais que voulez-vous il n’y a pas beaucoup d’essais sur Virgile qui soient facilement accessibles et il en fait partie.

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    Puis il y a Sénèque, qui pourrait être dans mon rayon philo. J’ai ses oeuvres complètes en numériques mais j’ai surtout un livre vieux d’environ 20 ans qui a souffert de mes nombreuses lectures, c’est Apprendre à vivre chez Arléa une éditions des Lettres à Lucilius que j’ai lu et relu et dans lesquelles je viens piocher quand je lis Montaigne adepte s’il en est de Sénèque. 

    Son compagnon d’étagère c’est l’empereur, je veux dire Marc Aurèle, je l’aime mais nettement moins que Sénèque. 

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    Avant de passer au dernier des auteurs romains de ma bibliothèque je fais un petit détour par Pompéi, avec un livre promenade dans le temps et l’espace, qui m’a enchanté et qui est un livre monde puisque l’auteur Claude Aziza nous balade dans les essais, les romans, les films qui ont été écrits sur Pompéi, depuis Chateaubriand à ………C’est réussi je vous le conseille si vous allez un jour à Pompéi.

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    Enfin le dernier mais pour moi le premier, mon préféré : Lucrèce

    Tout ça c’est la faute à ma fille ainée qui a eu De rerun natura au programme de sa classe de prépa, ça m’a agacé de ne l’avoir jamais lu, puis vinrent Jean Salem, Marcel Conche  et André Comte-Sponville qui ont alimenté ma curiosité  sur Lucrèce 

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    Ensuite ben ….ensuite il y a Montaigne, à force de voir les citations cela a fini de m'agacer de ne pas mieux connaitre l’auteur alors j'ai lu et relu le texte.

    Et depuis peu il y a la formidable éditions de Bernard Combeaud aux Editions Mollat, j’en conviens j’ai fait une folie car c’est une édition de luxe mais oh combien satisfaisante que ce soit pour la qualité du livre, pour la traduction et les commentaires de B Combeaud. Un must. 

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    Voilà mon dernier conseil pour ceux qui aiment écouter, les versions audio que j’ai présenté ici dans un billet il y a peu . 

    Je ne jure pas que cette bibliothèque se maintiendra ainsi, je vais sans doute y faire quelques rajouts mais attention il va falloir que s’en en vaille la peine !

    Les Livres et Livres audio

    Ovide - Lettres d'amour et d'exil - Editions Thesaurus Actes Sud 
    Ovide - Les Métamorphoses - Traduction Marie Cosnay - Editions de l'Ogre
    Xavier Darcos - Ovide - Editions Fayard
    Nicolas Gardnini - Avec Ovide - Editions de Fallois
    Xavier Darcos - Notre Virgile - Editions Fayard
    Virgile - Editions de la Pléiade
    André Comte-Sponville - Le miel et l'absinthe - Editions Herman 
    Lucrèce - La Naissance des choses - Traduit par Bernard Combeaud - Editions Mollat 
    Ovide - Les Métamorphoses lues par Michel Vuillermoz Editions Frémeaux 
    Lucrèce - La naissance des choses  lue par Denis Podalydès Editions Frémeaux 

  • La nuit des orateurs — Hédi Kaddour

    Nous sommes à Rome et je vous propose de rencontrer Publius Cornelius Tacitus, bref Tacite vous l’aurez compris. 

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    Tacite 

    Tacite n’a encore rien écrit, les Annales viendront plus tard. Il est le mari de Lucretia Agricola, femme de haute noblesse, elle est l’amie de Domitien l’empereur actuel, cette proximité va t elle suffire à protéger Tacite de la colère de l’empereur ? 

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    Domitien 

    Quel est le tord de Pline, de Senecio et de Tacite ? Celui d’avoir défendu une province mise en coupe réglée par un préfet aux ordres de Domitien. 

    C’est suffisant pour compromettre les trois hommes et risquer la colère de l’empereur qui « tue comme il éternue » 

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    Pline le Jeune

    Tout peut passer pour un crime de lèse-majesté : un mot de trop, une référence littéraire, un geste, alors avoir pris fait et cause pour un opposant !!!
    C’est peut être la nuit qui précède leur arrestation, la mort dans l’infamie 

    L’entourage de Domitien est là pour le servir et même pour anticiper sur ses désirs, Norbanus le préfet de sa garde prétorienne est près à toutes les bassesses.

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    La garde Prétorienne

    Lucretia va combattre contre Domitien à fleuret moucheté, contre Flavie la maitresse en titre de son mari, c’est une longue nuit qui s’avance.

    Une superbe réflexion sur le pouvoir et ses dérives.
    Rumeurs, complots, dénonciations, tout sent la pourriture, le danger, la mort.
    C’est violent, noir, une réflexion sur le pouvoir sans concessions aucunes.
    Le roman prend des allures de manuel de survie par temps de tyrannie.

    L’écriture m’a plu, la fin n’est pas tout à fait réussie, c’est un péché véniel par rapport à l’art d’hédi Kaddour pour nous transporter en un siècle plein de fureur et de bruit 

    Si vous voulez avoir un aperçu du règne de Domitien je vous renvoie à Lucien Jerphagnon et à son histoire de Rome 

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    tacite

    Les livres 

    La nuit des orateurs  Hédi Kaddour  Editions Gallimard
    Histoire de la Rome antique  Lucien Jerphagon  Editions Hachette pluriel 
    Les Divins Césars  Lucien Jerphagnon Editionts  Tallandier 

  • Sur les étagères de ma bibliothèque

    Beau comme l’antique 

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    L’antiquité pour moi c’est : 

    Jupiter faisant retentir le tonnerre, une mère qui mange ses enfants, un homme condamné à l’exil loin de Rome, un empereur regardant Rome brûler, un vieil homme tentant d’échapper à une coulée de lave, un jeune homme poussant devant lui des éléphants, un fils assassinant son père tu quoque fili mi, un empereur guerrier et philosophe, un mur large comme l’Angleterre, un guerrier rendant les armes à Alésia, l’épouse du héros défaisant la nuit le travail de la journée, un père venant réclamer le corps de son fils, un fil qui conduit à un monstre, un poète qui nous raconte tous les mythes et leurs métamorphoses, le père de l’histoire, un poète qui aime les abeilles, une ville engloutie sous les cendres …..et bien d’autres choses encore 

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    Je n’ai pas le prétention de tout passer en revue, ma bibliothèque a évolué au fil du temps, aujourd’hui il ne reste que l’essentiel, la substantifique moelle si l’on peut dire.

    Je n’ai pas la prétention de vous dire « c’est ce qu’il faut lire » mais plutôt voilà ce que moi j’aime, ce qui m’a enrichi, a répondu à ma curiosité, m’a fait parfois rêver ou bondir ou changer mon regard.

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    Certains livres sont classés en histoire et là je vous recommande Lucien Jerphagnon, un formidable passeur, avec lui vous saurez tout sur l’histoire romaine et ses empereurs qui ont fait sa gloire ou son malheur ou si vous préférez un livre plus récent choisissez Mary Beard 

    Je vous recommande Moses Finley et son formidable Monde d’Ulysse ou bien son essai On a perdu la guerre de Troie avec son érudition formidable, une admiration que partage mon amie de Bonheur du jour 

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    Dans ma bibliothèque commençons par les dictionnaires, certains sont indispensables à qui aime l’antiquité.

    Il y a ainsi le dictionnaire amoureux de la Grèce de Jacques Lacarrière, vous n’êtes pas étonnés de trouver ce nom ici car c’est un auteur que je lis et relis depuis de nombreuses années.

    Plus savant si l’on peut dire, il y a le Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine de Pierre Grimal, une somme qui nous fait connaitre ces personnages humains et divins, ces lieux mythiques, ces symboles de notre humanité, ces « marionnettes éternelles » 

    Mais vous pouvez faire plus simple avec le livre d’Edith Hamilton que l’on trouve en poche et aussi en version audio que je vous recommande lu par Thierry Janssen avec brio.

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    Il y a pour les non latinistes comme moi le Dictionnaire des sentences latines et grecques de Renzo Tosi, le genre de livre que l’on ouvre et dans lequel on tombe comme dans un puit sans fond 

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    Enfin il y a le dictionnaire amoureux de la Rome antique, ne vous arrêtez pas au fait que son auteur fut ministre, il faut bien pardonner les fautes non ?  C’est un petit réservoir d’histoire, d’anecdotes, de personnages, je l’ouvre toujours avec plaisir 

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    Bon maintenant attaquons le coeur du sujet 

    Il y a environ trente ans ( ah oui je suis désolée mais …) j’ai lu des grands classiques grecs grâce à Jacqueline de Romilly, j'ai lu sa biographie d'Hector ou d'Alcibiade, aujourd’hui certains la regarde comme une figure un peu ringarde mais les gens qui lui doivent des lectures hors sentiers battus sont nombreux et j’en fait partie.

    Grâce à elle j’ai lu, parfois en sautant des passages la Guerre du Péloponnèse, il faut dire que j’avais un souvenir splendide de mon année de sixième grâce à un formidable prof d’histoire qui m'a transmis sa passion de l'antiquité.

    J’ai maintenant dans ma bibliothèque grâce aux éditions numériques Arvensa tout Eschyle, Euripide et Epicure.

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    J’ai lu plus tard bien entendu Xénophon et sa célèbre Anabas, rappelez vous : Thalassa Thalassa, le livre est encore dans ma bibliothèque dans un format un peu curieux mais qu’importe.  

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    Retraite des Dix Mille - Adrien Guignet - Musée du Louvre 

    Ensuite c’est ouvert à moi le Monde d’Ulysse, j’avais 15 ans et j’avais choisi au lycée une option Textes anciens, pour moi qui malheureusement n’avais pu étudier ni le grec ni le latin, ce fut le bonheur, c’est ainsi que j’ai découvert Achille et Patrocle, Nausicaa, Calypso et Pénélope et bien sûr Ulysse

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    Beaucoup plus tard est venu la version de l’Odyssée traduite par Philippe Jaccottet qui est pour  moi indépassable et depuis je navigue de livre en livre en audio, d’essais sur le sujet comme ceux de Pietro Citati ou Alberto Manguel 

     

    Même si vous n'avez jamais lu Hérodote, vous avez peut être vu Le Patient anglais et donc vous savez qu’Hérodote fut un grand conteur, son livre porte plusieurs titres, celui que je préfère c’est Enquête, car même si l’auteur se laisse aller à quelques traits de son imagination, la plupart du temps il a à coeur de nous dire, ce qu’il a vu, ce qu’il a entendu, ce qu’il a compris, et pour ça tout historien aujourd’hui lui est redevable. 

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    J’ai en complément le livre de J Lacarrière : En cheminant avec Hérodote, une façon d’être accompagné sur le chemin.

    Pour terminer cette chronique un livre à mi-chemin entre la mythologie et la philosophie, que j'aime beaucoup, que je feuillette souvent c'est le livre du Luc Ferry, une mine pour comprendre les mythes, leur influence, ce qui perdure d'eux aujourd'hui encore et pourquoi. 

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    Une chronique déjà bien longue et je crois que je vais arrêter là mon bavardage et vous donner rendez-vous à Rome d’ici quelques jours 

    Les Livres 

    Jacques Lacarrière - En cheminant avec Hérodote - Editions Hachette pluriel 

    Luc Ferry - Mythologie et Philosophie le sens des grands mythes  grecs - Editions Plon

    Herodote - Enquête en trois tomes - Editions Paléo 

    Alberto Mangueo - L'iliade et l'Odyssée - Editions Bayard

    Pietro citati - La pensée chatoyante - Editions gallimard

    Xenophon - lAnabase - Edition ancienne mais à trouver chez Flammarion ou Classiques Garnier 

    Renzo Tosi - Dictionnaire des sentences latines et grecques - Editions Jérôme Millon

    Xavier Darcos - Dictionnaire de la Rome antique - Editions Plon

    Jacques Lacarrière - Dictionnaire amoureux de la Grèce - Editions Plon

    Pierre Grimal - Dictionnaire de la mythologie grecque et latine - Editions PUF

  • Bribes pour une amie de blog

    « La psychologie de l’Odyssée n’est guère moins profonde, riche et compliquée que celles d’Henry James ou de Proust ; simplement, les sentiments restaient implicites, cachés : une forêt de secrets derrière chaque mot » 

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    « L’Odyssée - dressée là, à l’aube de la littérature, comme un livre idéal pour enfants, une sorte de Pinocchio et que tous les enfants peuvent comprendre, avec ses Phéaciens, ses Cyclopes, Charybde et Scylla - est l’un des livres les plus mystérieux qui aient jamais été écrits. »

     

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    « L’Odyssée nous apprend à accepter la réalité comme elle est : Ithaque.
    Aucun autre livre d’Occident ne possède cette force grandiose.»

    « A Ithaque la vie est prospère et heureuse : il y a des poiriers, des figuiers, des vignes, des oliviers, qui mourront et seront remplacés par d’autres poiriers, figuiers, vignes et oliviers, selon le cycle de la nature. »

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    « Ulysse meurt vieux. Comment meurt-il ? »

    « La mort d’Ulysse est douce comme la main d’Aphrodite. Peut-être de cette mer qu’Ulysse a tant parcourue, tant aimée et haïe, une vague s’élève-t-elle, lente, immense, infiniment suave (…) et emporte à jamais l’homme plein de couleurs et de douleurs; »

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    Le livre : La Pensée chatoyante Ulysse et l’Odyssée - Pietro Citati - Traduit par Brigitte Pérol - Editions Gallimard 

  • Le Démon de Saint Jérôme - Lucrèce Luciani

    Une auteure que j’ai apprécié, un éditeur qui mérite d’être connu, c’est pas mal non pour un tout petit livre.

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    Saint Jérôme - Leonello Spada 

    Même si depuis quelques temps j’ai un peu perdu mon envie de lire, il faut bien que j’avoue que j’ai le vice de la lecture, celui que Larbaud dénommait Ce vice impuni. 
    Sans vouloir faire de comparaison, je n’oserai pas, voilà un autre adepte de ce vice.

     

    Saint Jérôme, érudit absolu, lettré magnifique, était parmi ses contemporains une exception, celui qui a tout lu, tout absorbé et qui bientôt sera celui qui traduit.

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    Saint Jérôme   Albrecht Dûrer 

     « Jérôme lisait Cicéron le jour et Platon la nuit, les préférant au style négligé des livres saints »,  

    Et voilà le problème qui surgit, grand lecteur certes mais qui avait un préférence pour Cicéron plutôt que pour les écrits des livres saints c’est plutôt mal vu ça.

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    Saint Jérôme  - Simon Vouet

    « Jérôme n’en fait qu’à sa tête. Il lit ce qu’il veut, il écrit ce qu’il veut, de la satire à la caricature en passant par la polémique ou la dogmatique, dans une liberté totale et sans partage. »

     

    Il va rater d’un cheveu la tiare de Saint Pierre, voilà où mène la lecture !! Il aura sa traversée du désert qui l’emmènera à Bethléem. Mais comme on ne se refait pas il emporte Virgile avec lui.

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    Au désert - Lorenzo Lotto 

    Il faut dire que d’après Lucrèce Luciani, notre Jérôme était un rien ombrageux, colérique, préférant la solitude à ses contemporains, mettant toute sa hargne et sa passion dans ses lettres. Saint Augustin un de ses destinataires n’a pas vraiment apprécié.

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    D'irréductibles ennemis : Saint Augustin et Saint Jérôme 

    Pour l’époque Jérôme fait figure d’exception, il est trilingue et outre la latin qui est sa langue que l’on peut dire maternelle, il maitrise le grec et l’hébreu qu’il a apprit au prix d’efforts héroïques.
    Lucrèce Luciani dit de lui qu’il est « philosophe, rhéteur, grammairien, dialecticien »

    A la lire on peut ajouter qu’il était un polémiste opiniâtre, un styliste magnifique, un traducteur qui a laissé une trace indélébile avec sa traduction de la Bible.

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    Vu par Le Caravage

    « Chez Jérôme, la lecture engendre la lecture. Elle est en amont et en aval de lui, comme une eau qui l’entoure, le baigne, le pénètre et passe sans cesse dans le moulin de son esprit »

    Elle profite de cette sorte d’écrit biographique pour nous introduire dans la fabrique des livres de l’époque, le travail des copistes qui copient et recopient, une période nous dit-elle qui est comme « l’acte de naissance de la littérature occidentale ».

    J’ai découvert le rangement des livres , à plat ou vertical, la naissance des bibliothèques personnelles que l’on retrouvera chez Montaigne.

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    La bibliothèque d'Ivre de livres 

    Lucrèce Luciani à sa façon de ranger « Le rangement de ma bibliothèque c’est une longue guerre amoureuse, ceux qui enchantent, ceux qui procurent du plaisir, ceux que l’on peut oublier, ceux que l’on relira à coup sûr »

     

    Ce petit livre est à la fois érudit, drôle, impertinent, passionnant. D’une richesse qui vous embarque immédiatement vers cette naissance de l’écrit qui ne sera dépassée que par celle de l’imprimerie. C’est une ode à la passion de lire, aux livres, aux bibliothèques.

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    Vu par Antonello da Messina

    « Un lettré au milieu de ses livres qui lit et écrit comme il respire »

     

    Petit livre rare qui va trouver sa place naturellement dans ma bibliothèque.
    Et qu’on se le dise Saint Jérôme est le patron des traducteurs 

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    Le livre : Le Démon de Saint Jérôme - Lucrèce Luciani - Editions La Bibliothèque 

  • Le Silence des vaincues - Pat Barker

    « Chante, divine muse, la colère désastreuse d’Achille…»

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    L'Iliade tout le monde connait même ceux qui ne l’ont jamais lu !
    L
    ’Iliade chante la colère d’Achille, le héros dont les décisions vont touchées les deux camps de la guerre. 
    C'est un poème sur la guerre, la lutte pour le pouvoir, la vengeance, la haine, l’envie, tout est là.

    Si vous l’avez lu vous avez certainement remarqué que les voix sont toutes masculines, rois, guerriers, vainqueurs et vaincus, combattants courageux ou lâches, père ou mari, des hommes rien que des hommes. Seule au loin la silhouette d’Andromaque qui fait ses adieux à Hector avec « un rire en pleurs »

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    Pat Barker casse le mythe et déplace le coeur du roman vers l’expérience des femmes. Elle écrit l’Illiade du point de vue des femmes capturées vivantes dans le camp grec.
    Les femmes livrées comme butin aux mains des hommes, devenues esclaves par la loi de la guerre. Pour les femmes c’est le début de l’horreur.

    Le roman est à la première personne, c’est Briséis qui s’exprime
    Elle est l’archétype de ces femmes à qui la parole n’est jamais donnée.
    Elle a déjà enduré le sac de sa ville natale par Achille, et a vu le massacre de son père et de ses sept frères et l'esclavage de sa mère. 

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    Briséis rendue à Achille  Pierre Paul Rubens

    Gagnée par Achille le vainqueur, elle est d’abord son trophée puis est finalement attribuée comme un lot de consolation à Agamemnon le roi tout puissant . On lui a enlevé Chriséis, il va réclamé réparation et s’empare de Briséis.

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    Achille et Briséis   Fresques de Pompéi

    On s’éloigne à grands pas du récit homérique. Il n’est pas question du Divin Achille « nous l’appelions « le boucher » un mixte de brutalité et de courtoisie, voilà qui est clair.

    Briséis va se trouver prise entre deux feux, le roi tout puissant Agamemnon et la juste demande d’Achille qui refuse de combattre si on ne lui rend pas son « butin » 

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    Achille réclamant son dû     Tableau d'Antoine Coypel

     

    Pat Barker fait entendre la voix des femmes réduites au silence, femmes violées et asservies, veuves ou orphelines, voyant périr père, frère époux dans des scènes déchirantes qui devraient inspirer pitié et compassion.

    Elle manie bien l’art des métaphores  « ce moment brillant, quand le vacarme de la bataille s'estompe et que votre corps est une tige reliant la terre et le ciel »
    Elle évoque très bien la vie quotidienne : la nourriture et le vin, les bruits, les cris, la douleur des plaies, le sang qui coule.

     

    Elle nous renvoie l’image du  vieux roi Priam qui se fraye un chemin, seul et non armé, à travers le camp ennemi, pour implorer Achille de lui rendre le corps mutilé d’ Hector., passage qui rappelle le magnifique roman de David Malouf : la Rançon
    Homère fait dire à Priam « Je fais ce qu'aucun homme avant moi n'a jamais fait, j'embrasse les mains de l'homme qui a tué mon fils. »

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    Priam devant Achille  Alexandre Ivanov  Galerie Tretyakov 

     

    Ce passage grandiose est battu en brèche par Briséis pour qui il n’y a que perte et chagrin. 
    Elle riposte aux paroles de Priam, comparant cette rencontre  entre hommes à la myriade d’horreurs insoupçonnées subies par les femmes pendant la guerre. 

    « Je fais ce que d'innombrables femmes avant moi ont été forcées de faire. J'ai écarté les jambes pour l'homme qui a tué mon mari et mes frères ».

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    Le roman de Pat Barker est un message féministe très clair sur la lutte des femmes pour s’extirper des récits dominés par les hommes. Elle offre des portraits de personnages nuancés et complexes 

    C'est un roman fort et poignant, un livre passionnant et qui nous impose de réfléchir à notre façon de raconter des histoires

    « Les vaincus entrent dans l'histoire et disparaissent, et leurs histoires meurent avec eux »
    L’auteur nous invite à écouter ces voix silencieuses, ces voix oubliées.

    On est loin de l’héroïsme du champ de bataille, c'est un chant intemporel où l’emporte le chagrin, la douleur, le silence des vaincues, assez loin de la légende d’Homère. 

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    Le livre : Le Silence des vaincues - Pat Barker - Traduit par Laurent Bury - Editions Charleston