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A sauts et à gambades - Page 183

  • Aux frontières de l'Europe - Paolo Rumiz

    L'Europe l'Europe l'Europe 

     

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    Dans mon triptyque européen voici le deuxième élément. 

    Après le journaliste historien voici l'amoureux des voyages, des frontières, des grands espaces. Normal me direz-vous pour un homme né à Trieste ville chargée de la folle histoire européenne. Autrichienne du temps de l’empire austro-hongrois, flirtant avec les Balkans.

     

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                                 Trieste © Kevin Galvin/Alamy

     

    "Agrippée à l'extrémité septentrionale de la mer Méditerranée, Trieste, ma ville, est un sismographe, une balustrade vers d'autres horizons. Dans les cafés, il était normal de parler de ce qui se passait à l'étranger. Les hommes qui sont nés à mon époque ont été nourris au pain de la géopolitique."

     

    En un long périple de 6000 km de la mer de Barents à la mer Noire, il effectue une traversée verticale de l’Europe et comme il ne craint pas les zigzags, on le suit de la Norvège du Cap Nord à Odessa en passant par la Biélorussie, l’Ukraine.

    Journaliste un peu désabusé après avoir couvert la guerre des Balkans c’est pour lui l’occasion de vivre à son rythme. amoureux des confins, il a choisi de nous mener au plus proche de « l’âme slave »
    Un mois de pérégrinations, le passage des frontières de dix pays sac sur le dos, carnet et crayon en main pour satisfaire sa curiosité, son goût des rencontres. 

     

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                           Ferme de Mazurie  © Przed 

     

    Il traverse des territoires qui ont changé de nom, des contrées oubliées par l’histoire, des pays tout nouvellement créés, des villes aux noms imprononçables et magiques,« ces anciennes provinces frontalières englouties par la géopolitique »  la Carélie, la Courlande qui porte un nom de princesse, la Bucovine, la Mazurie et ses lacs...

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               Sur le lac Onega © Christine Barber

    « c'est ici que bat le coeur, à des centaines de km au-delà de l'ex-rideau de fer, entre les bouleaux et les grands fleuves méandreux, dans une terra incognita faite de périphéries oubliées.» 

    Paolo Rumiz préfère les trains bringuebalants au TGV, les horaires improbables et les correspondances impossibles qui obligent à demander l’hospitalité. Au gré des rencontres son périple nous fait prendre  « un bain d’humanité » : Un prêtre orthodoxe qui fut soldat dans les forces spéciales russes, des moines et des vieux-croyants,  l’écrivain Mariusz Wilk qui a choisi de vivre au bord du lac Oniega, Allia et ses blinis, les vieux juifs de la synagogue de Grodno.

     

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                   Synagogue de Grodno en Biélorussie © Thierry Jamard

     

    Son regard est sensible, plein de curiosité, de chaleur humaine qui s’épanouit dans les rencontres, il est à classer dans la famille des grands écrivains voyageurs, celle des Colin Thubron, des William Darymple. En le lisant on pense au Danube de Magris, à  L’usage du monde  de Bouvier. Des estampilles bien tentantes non ?

     

    A l’origine ce texte a été publié en feuilleton dans la presse italienne, et c’est bien d’un feuilleton qu’il s’agit car on attend avec impatience le passage de la prochaine frontière, si vous ne fermez pas ce livre avec du vague à l’âme ou l’envie de partir je suis prête à manger mon chapeau !!

     

    Une interview de l’auteur dans Courrier international.

     

    L'avis de miriam dans ses carnets de voyages

     

    Le livre :  Aux frontières de l’Europe - Paolo Rumiz - Traduit par - Editions Hoëbeke

     

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    Paolo Rumiz n’est pas un étranger pour moi car je l’ai déjà suivi sur les traces d’ Hannibal avec grand plaisir 

  • Voyage d'un européen à travers le xx ème siècle - Geert Mak

    L'Europe l'Europe l'Europe 

     

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    Sur le thème de l’Europe il est bon de commencer par l’histoire. Quand elle est vue par un journaliste on s’éloigne des livres lourds et un peu ennuyeux pour plonger immédiatement dans un reportage large, embrassant le siècle. 

    Le voyage s’ouvre avec l’ Exposition universelle de 1900 et se ferme en 1999 à Sarajevo. Geert Mak entre temps aura porté ses pas sur les bords de la Sprée, du Danube, de la Seine, bref dans la plupart des villes européennes témoins des événements qui ont fait le turbulent XX ème siècle.

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                       Du Verdun d'aujourd'hui 

     

    Il observe les traces d’hier dans les villes d’aujourd’hui, il s’intéresse aux bibliothèques, aux cafés, aux tracteurs dans les champs, aux passagers des trains. Il cherche les fils qui relient une capitale à un coin de campagne, qui tissent un réseau très fin entre les nations, les personnages et les guerres.

    Il arpente d’anciens champs de batailles, des villes martyres, des camps de funeste mémoire, des tranchées de la Grande Guerre à Check Point Charly, de la ligne Maginot aux Pays Baltes.

    Tout est bon pour enrichir ce parcours, les récits autobiographiques, les coupures de journaux. Il interroge, interviewe. On croise des poètes, des écrivains, des historiens, il mêle les témoignages rares à l’histoire connue de tous.

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                        Aux forêts de Lituanie © Miriam Panigel

     

    Il brosse à la fois le destin collectif des peuples et les destins individuels, ceux de héros inconnus qui ont tenté un jour d’aider leur prochain y laissant parfois la vie, ceux qui ont subi les événements sans pouvoir s’y soustraire comme ce petit fils de Guillaume II,  réfugiés, exilés, population sous les bombardements à Londres ou à Dresde. Ceux qui ont fait preuve de courage comme ces journaliste du Münchner Post qui tinrent tête à Hitler.

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                               De  Guernica 

    Ce qui rend le livre passionnant c’est que la rigueur et la méthode se cachent sous les raccourcis qu’il prend, les chemins de traverse qu’il emprunte,  en voici quelques exemples pour vous mettre un peu l’eau à la bouche :

     - A Sarajevo en 1914 voyez l’Archiduc François Ferdinant

    « Dans le col de l’uniforme qui est à droite, on distingue près de l’étoile de général, un petit trou de quelques millimètres. C’est tout. »
     

    - Le voyage de retour vers la Russie d’un Lénine qui fait ses premières armes au pays de la bureaucratie en  décidant qu’il est interdit de fumer sauf aux toilettes et tant pis pour les embouteillages à la porte 

    « Lénine résolut le problème en instituant des laissez-passer : les fumeurs eurent un laissez-passer de deuxième catégorie, les autres un laissez-passer de première catégorie. »

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    A Moscou 

     - Une visite du Berlin de l’entre-deux guerres où se regroupent des réfugiés de toutes provenance
    « Quand les chauffeurs d’autobus s’arrêtaient près de la Bülowstraße, ils s’écriaient : « Russie !» La ville comptait vingt librairies russes.»
     

    - Un cimetière enneigé de la banlieue de Linz en Autriche, Geert Mak est à la recherche d’une tombe
    « Voilà que je tombe dessus, d’un seul coup. Et fait étrange, ce n’est pas du contentement que j’éprouve, mais de la peur. La pierre, ornée d’une grande croix noire, penche un peu. Sur la fosse s’élève un énorme sapin. Les petits portraits en émail des défunts ne sont que trop connus. Alois Hitler (...) Frau Klara Hitler » 

    - Ou encore cette crèche épatante et vide
    « Dans les placards de la crèche les petites chaussures d’enfants sont encore dans la position où elles ont été laissées il y a treize ans » nous sommes à Pripiat, à quelques kilomètres de Tchernobyl le « Pompéi du vingtième siècle »

    Lecteur pressé passe ton chemin, ici on s’arrête sur des détails, des personnes que la célébrité ne touchera jamais, ce sont mille pages où les langues se mélangent, où l’on entend la voix des sans grades et de leur famille.

    On ressort assez estomaqué par la très large culture de l’auteur, sa connaissance de l’histoire : quelle leçon !

     

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                                      ou à la chute du mur de Berlin 

     

    L’auteur de ce livre indispensable nous dit que l’espace économique européen est insuffisant, qu’il faut y ajouter la culture, la coopération, la solidarité, des projets en commun. Qui peut en douter aujourd’hui ?

     

    Ce voyage c’est notre histoire et en cette période agitée où la destinée de l’Europe est interrogée, lisez Geert Mak !!

     

    L'avis tout aussi enthousiaste de Luocine 

     

    Le livre : Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle - Geert Mak - Traduit du néerlandais par Bertrand Abraham - Editions Gallimard

  • Littré L'humaniste et les mots - Alain Rey

    Des mots, encore des mots, toujours des mots

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    C’est quelqu’un qui me connait bien qui m’a offert ce livre.
    Pensez  le roi du dictionnaire mis en musique par le prince des mots !  Curieux, tout le monde connaît LE Littré mais on connaît bien peu la vie de son auteur, un illustre inconnu en quelque sorte.

    Il pris son temps pour atteindre la notoriété, c'est la publication de son dico à partir de 1863 qui le fit atteindre la notoriété Je vous l'accorde Littré n'a pas une tête de rigolo, c'est un sérieux cet homme, un bosseur, un érudit austère et tolérant à la fois, un bourreau de travail. Et puis d'abord qu'est ce que vous avez contre les lunetteux ?

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                                                      Emile Littré par Nadar

    Son père imbu des idées révolutionnaires de l'époque et un peu obsédé par les études, envoya son fils dans un lycée de prestige, Emile fréquenta donc  Louis le Grand , son père  mis à sa disposition une excellente bibliothèque.  
    Quand fut venu le temps de choisir une voie professionnelle  Littré  choisit la médecine. Il est prêt à passer son doctorat quand son père meurt et la famille restant sans ressources il va donner des cours de Latin et de Grec et entamer une carrière de journaliste pour gagner sa vie.

    Il entre comme journaliste au journal Le National. Plus tard il reprend ses études et assiste à des conférences qui lui permettront de livrer des articles à des revues spécialisées sur des sujets aussi variés que les épidémies ou les découvertes de Cuvier.

    Il va s'atteler à la rédaction d'un livre sur Hippocrate qui lui ouvrira les portes de l’Académie des inscriptions et belles lettres. Le début de la célébrité. Bien sûr pour nous il reste le père du dictionnaire qui porte son nom, mais avant cela il est aussi un traducteur, il maîtrise rien moins que le latin et le grec évidemment mais aussi l'anglais, l'allemand, l'italien et un peu de sanscrit pour faire le bon poids.
    Il travaille d'abord à un dictionnaire de médecine et de chirurgie. Puis il conçoit son grand projet qui va être accepté par les éditions Hachette, Louis Hachette  a été un condisciple de Littré à Louis le Grand.
    Son grand oeuvre l'occupa de 1847 à 1865 !!! Une méthode de travail parfaite, une érudition sans faille, et un travail de titan vont faire du dictionnaire un événement littéraire. Un travail de lexicographe patient, complet, sûr. L'usage de chaque mot est détaillé, les divers sens sont passés en revue et sont étayés d'exemples pris dans les meilleures oeuvres de la langue française.  Au mois d'août 1870, Littré fit transporter tous ses documents soit  415 636 feuillets et huit caisses de bois blanc pour les mettre à l'abri dans les sous-sols de la maison Hachette hors de portée des obus allemands. 

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    Ce travail méritait bien un siège à l'Académie Française, oui mais Littré est un républicain et un athée farouche. Pour les milieux bien-pensant il est le diable. Le très fameux Mgr Dupanloup s'oppose à son admission (rappelez vous le père de Marcel Pagnol se moquant de Mgr Dupanloup dans "la gloire de mon père") et Littré échoue.

    Il prendra sa revanche sur le saint homme et entrera  sous la Coupole le 30 décembre 1871. Littré n'était peut être pas toujours un homme exemplaire du moins si l'on en croit cette anecdote rapportée par Alain Rey 

    «Littré se livre à des débats indécents avec une domestique, qu'on imagine jeune et accorte. Sa sérieuse épouse s'en avise et, choquée, mais sans perdre son sang-froid: Monsieur, je suis surprise!
    A quoi le philologue réplique : Non, madame, vous êtes étonnée. C'est nous qui sommes surpris.
    » 

    Le 8 juillet 1875, Il est reçu au Grand Orient de France en même temps que Jules Ferry, une grande publicité fut faite à l'évenement. A la fin de sa vie il réaffirme ses convictions matérialistes et agnostiques sans jamais chercher à dénigrer la foi  

    « je suis sans regret d'être en dehors de ces croyances, et ne puis découvrir en moi aucun désir d'y rentrer. » 

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    C'est ce qui rend très suspecte sa soi disante conversion orchestrée par sa femme et sa fille toutes deux ferventes catholiques.
    Il fut enterré au cimetière Montparnasse. 
    Pour les amateurs de mots cette biographie se lit d'une traite. Alain Rey nous dit que Littré avait " une obsession : connaître "  et qu'il mérite le beau nom d'humaniste.

    Le Littré en ligne 

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    Le Livre : Littré L'humaniste et les mots - Alain Rey - Editions Gallimard

  • Lire, écrire - Paul Willems

    Des mots, toujours des mots, encore des mots...

     

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    Un livre en deux parties, une consacrée à la lecture et une à l’écriture.

    Les plus belles pages à mon goût sont consacrées à la lecture. C’est superbe et il est difficile de ne pas transformer ce billet en une longue page de citations choisies.

     

    Dans ces pages pleines de lumières Paul Willems nous fait cadeau, car c’est un cadeau, de sa façon de lire, lire au lit, un grand classique, mais surtout lire en train

    « Voilà plus de trente ans que je prends tous les jours l’omnibus à Hove, près d’Anvers, et que je descends à Bruxelles. Quarante minutes de solitude protégée par la foule des voyageurs et rythmée par les roues sur les rails »

    Il ne parle avec personne car « Tous les matins je glisse un livre dans ma serviette. À ce geste, je sens déjà monter en moi la joie de la lecture. »

    Quand il lit il se transporte loin et peut par l’imagination « aller au bois de Boulogne où Odette de Crécy passe au grand trot de ses chevaux. »

    Mais le lieu plébiscité c’est la bibliothèque du domaine de sa famille, Missembourg , sa mère a écrit sur ce domaine, son étang, ses bois. Dans la bibliothèque « le temps est immobile » Là Paul Willems lit « les pieds aux chenets » et tente de retrouver « les traces du temps » qui ont été déposé entre les pages, languettes de papier jauni, trèfles à quatre feuilles ou encore « ces fleurs cueillies un soir d’été, et qui laissent une auréole jaune sur la page »

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                         Le domaine familial 

     

    La seconde partie s’attache à l’écriture et on y retrouve les mêmes thèmes que chez Claude-Edmonde Magny

    La douleur de l’enfantement n’est pas absente « Ce n’est pas la page blanche qui donne le vertige, c’est la page noircie, souillée de mots.  »

    Le thème de l’effort permanent que Willems se retrouve chez ses écrivains préférés 

    « L’effort est immense. Les plus grands écrivains y ont sacrifié leur vie. Balzac et Proust ont succombé au travail. Kleist, Nerval et Artaud se sont suicidés. D’autres se sont systématiquement détruits comme Rimbaud  » 

     

    Le doute ici aussi « L’acte d’écrire est dangereux parce qu’il fait douter de soi. » mais pour autant écrire est un acte vers lequel on est poussé par une force irrépressible un acte « mû par le désir, la peur, l’inquiétude, la joie, la colère ou par la nostalgie de l’horizon »

     

    En cinquante pages Paul Willems nous livre son paradis et son enfer ! Ami lecteur si tu as aimé les pages de Proust sur la lecture, ce livre est pour toi, le livre idéal pour commencer une année de lecture.

     

    L’auteur : Paul Willems est un dramaturge Flammand qui écrit en langue française, il est le fils de Marie Gevers poète belge de la première moitié du XX ème siècle. Lisez le billet de Tania pour en savoir plus.

     

     

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    Le livre : Lire, écrire - Paul Willems - Editions Fata Morgana 

  • Lettre sur le pouvoir d'écrire - Claude-Edmonde Magny

     

     Des mots, toujours des mots, encore des mots...

     

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                        « Nul ne peut écrire s'il n'a le coeur pur  » 

     

    Ce tout petit livre qui est dans ma bibliothèque depuis 1993, était épuisé depuis longtemps. Les éditions Flammarion ont l’excellente idée de le rééditer, il sortira fin d’août. 

     

    1943. Un jeune homme qui a fui la dictature espagnole se sent invité par l’écriture. Cet homme c’est Jorge Semprun « la langue française est devenue  ma seconde patrie  » dit-il mais il se sent des scrupules et a des doutes sur sa vocation littéraire.

    Une aide et des réponses à ses questions, à sa quête,  vont venir sous la forme d’une lettre, d’une femme, critique littéraire, Claude-Edmonde Magny. 

     

    Que dit-elle dans sa lettre ? 

    Elle dit la foi qu’elle a en la valeur des livres, une foi « tenace ».

    Elle se désole de ces écrivains qui n’ont qu’une hâte c’est en avoir fini avec l’acte d’écrire, de « soupirer vers l’instant où l’on sera , enfin, par delà les mots. »

    Elle met en garde contre l’impression de simplicité de l’acte d’écrire, par exemple croire à la lecture de Laura Malte Brigge « que Rilke n’a eu qu’à y verser telles quelles les angoisses qu’il avait éprouvées à se promener dans les rues de Paris »

    Elle le met en garde envers toute facilité qui peut venir à celui doté d’un trop grand talent, car écrire nécessite un engagement, écrire c’est « se rattacher en quelque façon que ce soit à ce qu’il y a d’essentiel en vous. »

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                                    « La magnificience de Balzac »   

                          

    Cette lettre ne renferme pas uniquement des conseils.

    C’est à une belle balade en littérature que Claude-Edmonde Magny convie le futur écrivain, elle va lui fournir les armes à « une offensive vers la création littéraire » Elle se fait aider par Balzac, Kafka,DH Lawrence, Gide, Cocteau et Proust.

    Ses convictions, ses préférences éclatent à chaque page « Ecrire est une action grave, et qui ne laisse pas indemne celui qui la pratique. » Avis aux amateurs !!!

     

    Cette lettre ne parviendra qu’en 1945 à Jorge Semprun lorsque qu’il rentrera de Buchenwald et qu’il ira frapper à la porte de Claude-Edmonde Magny.

    Cette lettre le suivra partout, mais, pour survivre alors, il choisira de s’éloigner de l’écriture, pourtant la lettre restera pour lui « le seul lien, indirect, énigmatique, fragile, avec celui que j’aurais pu être : un écrivain » 

    L’oeuvre que Semprun écrira ensuite fut une belle réponse à Claude-Edmonde Magny. 

    C’est un texte tout de passion et de sincérité. Un petit livre dont on a aucune envie de se défaire une fois lu. Faites lui une place dans votre bibliothèque.

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    Le livre : Lettre sur le pouvoir d’écrire - Claude-Edmonde Magny - Editions Climats 1993 ou Flammarion 2012

  • Journal de l'année du désastre - Kressmann Taylor

    Mon dernier rattrapage au un parfum d'Italie

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    Un dernier rattrapage, celui-là appartient au genre  jamais traduit.
    Dieu sait que l’auteur est aujourd’hui célèbre après la publication de Inconnu à cette adresse, mais saviez-vous que Kressman Taylor a vécu à Florence et qu’elle y était présente la première semaine de novembre 1966, l’année du désastre ?

    Selon votre âge c’est un événement dont vous avez vaguement entendu parlé ou alors comme moi, vous gardez un souvenir précis des images de Florence sous les eaux dans la presse et à la télévision.
    En novembre 1966 l’Arno sortit de son lit et plus encore ! Florence fut submergée en quelques heures, des habitants perdirent la vie, bon nombre de florentins perdirent tout leurs biens, musées, églises, palais, bibliothèques, tout se retrouva sous les eaux.
    C’est cet épisode que retrace le livre de K Taylor. Elle le fait avec un luxe de précisions que lui permet sa situation privilégiée, hôte de la pensione Consigli et elle a une chambre avec vue sur l’Arno.

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    Le 3 novembre au soir rien ne laisse présager du désastre imminent
    « Six heures du soir à Florence. Une foule d’imperméables regagne ses pénates par les ruelles étroites du centre ville. »
    Mais le lendemain matin la chanson a changé de registre :
    « Ma première vision est un ciel noir de suie et toujours ces trombes d’eau. L’instant d’après je contemple la rivière bouche bée »
    Et oui l’Arno est devenu un fleuve furieux, un torrent qui crache des flots de boue, de déchets, de mazout, d’objets
    « Un fauteuil voguant paisiblement, calme et droit  » et le flot s’accentue toujours plus au cours des heures «  Dans un enchevêtrement de branches vertes passe une vache rouge et blanc »
    C’est l’horreur pour cette ville qui est un joyau, la ville « la plus rare, la plus intime »  l’eau déferle à 60 km/heure , les habitants sauvent ce qu’ils peuvent, à la pensione Consigli tout le monde monte d’un étage et K Taylor s’endort écoutant « dans un demi-sommeil le grondement de l’Arno »

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    Le lendemain c’est un sentiment de désolation qui l’emporte, les ponts endommagés ou emportés, les boutiques dévastées « Le coeur de la belle Florence n’est plus qu’une morne décharge. »
    K Taylor, amoureuse de l’Italie, de Florence va faire le récit des jours suivants, ceux du bilan terrible pour la ville et toute la région, des jours où la ville est coupée du monde, ceux ou les florentins vont devoir avec dignité et courage, faire face au désastre :  6 000 familles sans abri, 6 000 boutiques balayées, 1 300 oeuvres abîmées ou perdues.
    Elle va assister à des scènes de désespoir mais aussi de solidarité, voir la vie reprendre le dessus envers et contre tout.

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    Paru quelques mois après l’inondation en anglais, c’est une excellent chose que les éditions autrement choisissent de traduire et éditer ce livre car le récit est très vivant, toujours plein d’empathie pour la population et son courage extraordinaire. Les anecdotes sont parfois drôles, parfois émouvantes et l’on est aux premières loges. Amoureux de l’Italie ajoutez ce livre à votre bibliothèque.

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    Le livre : Journal de l’année du désastre -Kathrine Kressmann Taylor - Traduit par Olivier Philipponnat- Editions Autrement 2012