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Littérature française et francophone - Page 10

  • La Carte postale Anne Berest

    Un livre que je n’ai pas lâché et pour moi en ce moment cela tient de l’exploit. Foin du battage médiatique autour de ce livre, sachons reconnaitre la sagesse de la jeune génération qui a couronné ce livre du Goncourt des lycéens.

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    Anne Berest lit un extrait de son livre 

    Une carte postale jetée dans une boite aux lettres sans âge chez Lelia la mère de l’auteure.
    Nous sommes en janvier 2003 et sur la carte quatre prénoms Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques
    Le père, la mère et leurs deux enfants, tous morts en déportation à Auschwitz.

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    Comprendre la provenance de cette carte, la relier au passé, reconstruire petit à petit l’histoire de la famille Rabinovitch, c’est ce que vont faire Anne la fille, aidée de Lelia Picabia la mère afin de suivre le fil rouge vers les grands parents Rabinovitch, les oncles et tantes disparus mais aussi ceux qui ont survécu comme Myriam celle dont le prénom n’est pas sur la carte postale et qui sont passés entre les mailles du filet.

    shoah

    Aujourd’hui tout lecteur intéressé par la Shoah sait que longtemps le silence s’est fait autour de la déportation, autour du retour des camps, autour de la responsabilité des autorités. 
    Mais en voir l’implication directe, non pas pour une entité floue « les juifs » mais pour des personnes nommées, décrites jusque dans leurs défauts, leur beauté, leur maladresse c’est tout autre chose.

    Anne Berest à travers sa quête fait entendre la voix des exilés, des oubliés, des disparus, des victimes mais aussi la voix de ceux et celles qui ont tendus la main.
    Si vous avez lu Les Disparus de Daniel Mendelsohn, vous reconnaitrez ici la même quête, le même souci et la même interrogation face à l’identité juive.

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    J’ai aimé ce livre pour sa richesse, il m’a rappelé un livre lu il y a longtemps mais qui est aujourd’hui encore dans ma bibliothèque : Adieu Volodia de Simone Signoret qui décrivait si bien ces immigrés fuyant les pogroms et tentant vaille que vaille de « s’assimiler » persuadés que la France était leur salut.

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    le rêve sioniste 

    Le lecteur traverse le temps des années 20 à aujourd’hui mais aussi toute l’Europe malmenée de la Russie à la Pologne, de la Lettonie à la France, le lecteur rencontre le rêve sioniste en Palestine qui n’a pas toujours des couleurs joyeuses.

    Collaborateurs et résistants se mêlent, bêtise et malhonnêteté administrative des autorités d’après guerre qui refusent le terme de déporté, qui nie les faits et leurs conséquences et chape de plomb qui recouvre les crimes pendant des années.

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    Les Rafles

    J’ai aimé la façon qu’a l’auteur de dire le plus difficile en peu de mots. Elle sait nous transmettre cette inquitétude qui se transforme en peur puis en panique devant la montée de l’horreur. 
    Elle sait parfaitement nous transmettre la colère, l’incrédulité, la sidération, puis après, le mutisme de ceux qui sont revenus.

    J’ai aimé la construction et l’apparition de personnages comme Irène Némirovski ou Grabrielle Buffet et Vicente Picabia ou même André Gide.

    J’ai aimé la démarche d’Anne Berest qui dit « Je me reconnais enfin : je suis fille et petite fille de survivants » 

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    Le Film Les Guichets du Louvre 

    J’ai aimé la façon qu’à l’auteur de rythmer son récit par des dates qui touchent la famille Rabinovitch mais aussi tout citoyen de l’époque : 30 janvier 1933,  juillet 1942 et la rafle du Vel d’hiv qui pour moi est illustré par le film  Les Guichets du Louvre  le film de Michel Mitrani où l’on voit à la fois le zèle d’une police aux ordres et le courage de ceux qui surent désobéir.

     

    Une remarque :  parfois il y a confusion entre qui parle et de qui on parle. Mais est ce un petit défaut ou une volonté de l’auteure car c’est bien le propre de ce genre de quête d’être en permanence dans le flou, l’incertain, le rêve mêlé au cauchemar. 

    Lisez et faites lire ce livre, offrez le aux plus jeunes, une jolie façon de tisser le lien entre un passé douloureux et un futur que l’on voudrait meilleur.

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    Pour poursuivre cette lecture vous pouvez aussi lire Les Disparus de Daniel Mendelsohn, La Rafle du Vel d’Hiv  de Claude Levy et Paul Tillard

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    Le livre : La Carte Postale  - Anne Berest  -  Editions Grasset

     

  • Bribes et brindilles de la cabane

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    « Cette plantation d’épinettes poussées en orgueil et fières comme des montagnes est un temple du silence où se dresse ma cabane. Refuge rêvé depuis les tipis de branches de mon enfance. »

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    « Je reste ici à manger du riz épicé près du feu, à chauffer la pièce du mieux que je peux et à appréhender le moment où je devrai braver le froid pour remplir la boîte à bois. »

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    « Le thé noir à la cardamome bout sur le poêle. J’ai la langue brûlée à force d’espérer que le baume des Indes coulant dans ma gorge saura réchauffer mes os. Ou redonner à mon squelette une posture moins accablée. »

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    « Moi aussi, je mènerai un combat, mais sans armes, sans vandalisme, sans sensationnalisme. Dans les limites légales de la désobéissance civile et dans la sagesse de Thoreau. Je planterai des arbres par milliers, je sèmerai des fleurs pour nourrir les rares abeilles, je vivrai de ma terre en métamorphosant la plantation d’épinettes en espace où la faune et la flore seront foisonnantes. Avec chaque sou économisé, j’achèterai toutes les forêts privées et les champs avoisinants en monoculture, et je les laisserai en friche, fleurir sans coupes, pousser en paix. Ma vie reprend du sens dans ma forêt. »

    Le livre : Encabanée - Gabrielle Filteau Chiba - Editions Le Mot et le Reste

  • Bribes d'un passionné

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    « Pour la première fois, il me semblait qu’en des mots se trouvaient enclos les merveilles et les effrois du monde, que des mots avaient le pouvoir d’en convoquer les puissances, peut-être même de les créer. »

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    « Par eux s’opérait une mystérieuse alchimie. Comme si venaient à moi le monde, une infinité de mondes, une cohue de personnages, hommes, femmes, enfants qui se bousculaient, me captivaient – m’envahissaient ? Non : m’agrandissaient. Que je ferme les yeux, encore aujourd’hui, et ils reviennent, qui me font signe (…)  Chasseurs d’or de James Oliver Curwood,  Chingachgook pleurant son fils mort, dernier des Mohicans, Ivanhoé s’inclinant devant sa belle au tournoi d’Ashby »

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    « J’étais Buck redevenu loup, qui menait la chasse en tête de sa meute, sous les lunes pâles, Allan Quatermain en quête des mines du roi Salomon, Mary Yellan, aussi, découvrant les mystères de l’Auberge de la Jamaïque, tout comme Prue, l’héroïne de Sarn au bec-de-lièvre, face aux moqueries et aux insultes, ou Scarlett prête à tout pour Tara. »

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    « Ils se pressent, comme aux premiers jours, me rappellent que tous m’ont fait ce que je suis, sont à jamais partie de moi »

    Le livre : Pour l’amour des livres - Michel Le Bris - Editions Grasset

  • 555 - Hélène Gestern

    C’est agréable de reprendre contact avec un auteur que l’on a déjà lu avec plaisir.
    J’ai lu deux romans d’Hélène Gestern, le dernier L’odeur de la forêt avait été un vrai plaisir de lecture. 
    J’ai donc repiqué avec son dernier roman et je vous invite à faire de même.

    Un roman qui a la musique comme toile de fond mais aussi l’art si intrigant de la lutherie, l’ébénisterie d’art, la connaissance pointue des partitions , le monde des musicologues et enfin la musique qui envoûte.

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    Domenico Scarlatti 

    Petite colle : Savez vous combien Scarlatti a composé de sonates ?  555 mesdames messieurs, du moins 555 qui nous soient parvenues.

    Aussi lorsque Grégoire Coblence ébéniste se voit confier un étui de violoncelle et qu’il y découvre une partition très ancienne sa curiosité est piquée. Il n’est pas musicien mais fou amoureux de musique, serait il possible que ce soit une oeuvre du compositeur italien, la 556 ème sonate ?

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    Un ébéniste d'art 

    La recherche qu’il va entamer va lui permettre d’oublier un peu sa femme qui l’a planté là deux ans auparavant sans aucune explication.

    Il partage son atelier avec un luthier, Giancarlo Albizon homme à femme et en proie au tourment du jeu et des dettes qui vont avec. Celui ci voit immédiatement dans la partition l’occasion de payer ses dettes  oubliant un peu vite que la partition appartient avant tout au propriétaire du violoncelle. 

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    Un luthier 

    Lorsque la partition est volée les deux hommes vont devoir faire appel à des connaisseurs pour tenter de retrouver la partition et l’authentifier. 

    Hélène Gestern nous fait faire connaissance avec un musicologue odieux, un mécène riche comme Crésus, et Manig Terzian célèbre claveciniste qui a enregistré l'intégrale des 555 sonates.

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    « Quand je l'ai déplié, des grains de poussière ont dansé dans le soleil. J'ai reconnu immédiatement les lignes qui réglaient les pages et les notes qui s'y accrochaient en zigzag. C'était une partition »  Ici la partition de la sonate K 466

    Nous voila dans une partition à cinq voix, elles vont s’entremêler pour promener le lecteur dans le monde de la musique celle - ci étant LE personnage majeur du roman.  

    J’ai aimé cette découverte, elle m’a instruite et amusée à la fois.
    Tous ces personnages partagent d’une certaine façon l’amour de la musique, pour certain c’est l’occasion de jouer Scarlatti peut être pour la dernière fois, pour un autre c’est l’occasion d’écraser ses confrères, pour le troisième c’est le moment d’assouvir le besoin compulsif de posséder. 

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    Scott Ross

    Hélène Gestern se nourrit de musique, elle dit dans une interview qu’elle a découvert Scarlatti grâce à l’intégrale de Scott Ross.

    Avec son roman elle a fait une adepte supplémentaire de Scarlatti que je connaissais très peu et dont je vous invite à écouter la K. 466  je suis tombé sous le charme immédiatement.

    L'avis de Jostein 

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    Le livre : 555  - Hélène Gestern  - Editions Arléa

  • Bribes de notre planète

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    Québec Baie des chaleurs 

    « À l’une des extrémités du lac où se situe notre chalet au Québec, il y a une petite anse marécageuse. C’est un coin sombre bordé de cèdres, où la profondeur de l’eau ne dépasse pas une trentaine de centimètres. Des plantes aquatiques font surface, cachant partiellement de vieux troncs d’arbres noyés depuis des décennies, voire des siècles. Nous avons surnommé cette anse « la baie du fond des temps ». »

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    Le héron bleu

    « Tout à coup, il détend tout son corps et darde sa tête dans l’eau. Là! D’un coup de bec, il a capturé une grenouille, je vois des pattes vertes qui s’agitent. Puis il se redresse et, d’un mouvement fluide, il fait glisser la bestiole dans son gosier, elle est avalée en une seule bouchée. »

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    un sphinx colibri ou moro-sphinx prénommée Ernestine

    « Toujours est-il qu’ Ernestine butinait nos fleurs d’une manière assidue, sortant sa longue trompe (macroglossum en latin ou « grande langue ») au-dessus des fleurs et la descendant pour chercher le nectar. Nul doute qu’avec cette longue trompe elle pompe le nectar que d’autres insectes ne peuvent pas atteindre. Certains jours, je l’ai vue inspecter de manière rapide les fleurs en pot, toujours en vol stationnaire, sans jamais se poser, et repartir aussitôt. Apparemment, elle ne trouvait pas le butin qu’elle était venue chercher. Mais d’autres jours, elle s’attardait, aspirant la moindre goutte de nectar. Je me suis dit que, étant donné qu’elle ne plongeait pas son corps entier dans la fleur, seule sa trompe revenait avec un peu de pollen collé dessus et qu’elle participait donc peu à la fécondation des fleurs. »

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    Le livre : La planète du héron bleu - Jean-Pierre Rogel - Editions La Presse/Fides 

  • Bribes stendhaliennes

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    « Avec qui aurais-je envie de m’asseoir à la table d’un café (d’un glacier) et de bavarder tranquillement ? 

    Pas avec Balzac, de peur qu’il ne me lise le caractère des passants d’après les bosses de leur crâne ; ni avec Flaubert, par crainte d’être assommé par ses gueulades contre les bourgeois ; ni avec Tolstoï, qui me reprocherait de perdre mon temps au lieu de travailler à mon perfectionnement spirituel. 
    Devant Baudelaire je me sentirais un imbécile. Proust serait trop intimidant, Dostoïevski trop encombrant. 
    Reste Stendhal, parce que avec lui je ne saurais même pas que je suis assis auprès de quelqu’un qui fait les plus beaux livres du monde. On parlerait Italie, on parlerait musique, on comparerait le dôme du Panthéon et la coupole de Saint-Pierre ; et seulement, en me levant, je découvrirais qu’il a écrit Le Rouge et le Noir. »   Dominique Fernandez 

     

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    Musée Stendhal  -  Grenoble

    « Balzac est ce qu'il est ; mais la vingtaine de romans où il tente de ressusciter l'atmosphère sociale de la Restauration n'atteignent pas l'évidence de l'évocation obtenue dans les 500 pages de Le Rouge et le Noir » Giuseppe Tomasi di Lampedusa 

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    Stendhal - Henri Lehmann - Musée Stendhal 

    « À travers son Julien Sorel, Stendhal s'est exprimé lui-même, tel qu'il était réellement, avec ses ambitieux désirs. Avec Fabrice del Dongo, en revanche, il a donné une vie réelle à l'homme qu'il aurait voulu être, à l'homme noble, riche, aimé, qu'il ne fut pas. Il lui donna la vie, puis il l'enferma en prison » Giuseppe Tomasi di Lampedusa 

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    Giuseppe Tomasi di Lampedusa 

    « Il écrivit un livre entier intitulé De l’amour, où il disséquait ce sentiment sous toutes ses formes et donnait des conseils pour réussir, lui qui n’était fait que pour l’échec en amour. » Dominique Fernandez

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    Giuseppe Tomasi di Lampedusa 

    « Stendhal, donc, resavourait, ruminait longuement ses propres expériences, ses propres velléités de plaisir, les innombrables anecdotes qu'on lui racontait et dont il était très friand ; mais en les resavourant il les soumettait à une critique psychologique et esthétique qui s'exerçait toujours dans le sens de l'élimination ; à un moment donné il ne lui restait que l'essentiel dans la tête » Giuseppe Tomasi di Lampedusa 

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    Un Fabrice del Dongo inoubliable 

    « Le clocher, la tour, la prison : figures de la solitude placée par Stendhal au-dessus de tous les plaisirs, de la solitude où il a vécu malgré ses dehors mondains, de la solitude qu’il jugeait nécessaire à l’exercice de la liberté et inséparable de ce qu’on se doit à soi-même. » Dominique Fernandez 

     

    Les Livres 

    Stendhal - Giuseppe Tomasi di Lampedusa - Traduit par Monique Baccelli Editions Allia

    Stendhal - Dominique Fernandez - Editions Buchet Chastel