J’ai décidé de fêter à ma manière le festival Quai du Polar.
Je dis à ma manière parce que très peu pour moi des queues interminables pour apercevoir un auteur et plus encore l’écouter parler. Foin de la foule qui se presse en masse pour acheter le dernier Connelly ou Bussy.
Non je me suis plongée dans des eaux noires bien à l’abri, dans mon fauteuil mais je dois dire que j’ai malgré tout frissonné un rien.
Je vous propose de faire connaissance avec deux flics, deux trilogies, deux pays et deux époques.
Je me garde toujours un polar ou deux sous le coude pour les jours de disette : disette d’envie de lire, disette de livres à lire (euh ça c’est plus rare) voilà comment j’ai fait connaissance de l’Inspecteur Wisting et de Franck Stage.
Le passé en premier, Cay Rademacher nous transporte dans l’immédiat après-guerre à Hambourg. La ville a subi des bombardements pendant des mois, le décor est sinistre, tout est dévasté et le premier opus de la trilogie se passe en plein hiver par moins vingt degrés.
Voilà le cadre est posé, le flic de service Franck Stage, après avoir montré patte blanche auprès des autorités anglaises, prouvé qu’il n’avait jamais été nazi, est en charge de la brigade criminelle. Sa femme est morte dans les bombardements et son fils engagé dans les SS, lui, a disparu.
Il est secondé, parce que les alliés sont moyennement confiants à cette époque, par un lieutenant de l’armée britannique Mac Donald et il peut aussi trouvé de l’aide auprès du procureur Erlich, un chasseur de nazis.
Trois enquêtes donc très réussies. Le marché noir, la prostitution des enfants, la faim, la peur car ce fut l’Apocalypse à Hambourg :
« Dans la tempête de feu de 1943, le goudron bouillait. Des femmes et des enfants qui fuyaient leur domicile en flammes y sont restés englués. Ils se sont débarrassés de leurs chaussures collées au bitume, se sont remis à courir, pour quelques enjambées seulement : leurs pieds nus se sont enfoncés jusqu’aux chevilles dans cette masse bouillonnante. Puis les flammes des incendies les ont rattrapés. »
Le binôme anglo-germanique fonctionne bien, le tableau de cette Allemagne à terre est juste, le temps est en quelque sorte suspendu mais les meurtres eux ne s’arrêtent pas et les conditions d’enquête sont très difficiles. Comme il se doit l’histoire personnelle du héros évolue aussi et l’on prend plaisir à suivre le parcours de cet homme qui tente de se relever, d’oublier, de vivre à nouveau.
Le tableau n’est pas manichéen et l’auteur nous fait pénétrer dans les tréfonds d’une ville en décrépitude avec les bassesses, les faiblesses et parfois ici ou là un rien d’espoir. C’est très réussi.
D’un coup d’aile je vous transporte de nos jours en Norvège, ben oui Quai du polar cette année met les nordiques à l’honneur.
Question nordique on ne fait pas mieux avec l’inspecteur Wisting un veuf tranquille dont la fille Line partage la vie d’un mauvais garçon.
Nous sommes dans la Norvège qui est au top 5 des rêves pour réfugiés. Un pays magnifique …euh à part le climat, moi il me convient mais je vous prévient vous allez grelotter évidement.
beau mais frais
Les enquêtes sont classiques mais pas fades du tout, on se prend au jeu facilement. J’ai lu les trois romans pffff dans la foulée.
Le premier opus se passe sur une commune où notre inspecteur à un chalet, lieu magnifique mais qui va vite se transformer en scène de crime.
La construction des trois enquêtes est habile, les personnages sont prenants et l’on finit vite par être captivé par l’énigme posée.
Dans le second roman Wisting est mis en cause sur une ancienne enquête qu’il aurait bidouillé, my god ! Il va lui falloir se défendre en plongeant dans les archives aidé par sa fille Line qui j’avais oublié de vous le dire est journaliste d’investigation.
Scène de crime à la norvégienne
Dans le troisième c’est une série de disparitions à quelques vingt années d’intervalle qui va faire peser sur la police une pression distillée par les médias.
Jorn Lier Horst connait parfaitement le système, la police, les médias et la société norvégienne, il a été flic lui-même. Mine de rien il dénonce les dérives qu’elles soient policières ou médiatiques.
L'auteur
Ne cherchez pas d’analyse trop psychologisante, c’es l’efficacité nordique qui est à l’oeuvre.
J’ai marché pour les trois romans et il parait qu’en fait c’était le 8 ème roman de l’auteur, alors Gallimard a encore quelques titres à nous offrir.
Les Livres de Cay Rademacher traduits par Georges Sturm - Editions du Masque
1 L’orphelin des docks
2 L’assassin des ruines
3 Le faussaire de Hambourg
Les livres de Jorn Lier Horst Traduits par Hélène Hervieu et Céline Romand Monnier- Editions Gallimard et folio
1 Fermé pour l’hiver
2 Les chiens de chasse
3 L’usurpateur