Lorsqu’un auteur me plait je vais souvent au bout de ma lecture, parfois il me faut beaucoup de temps mais cahin-caha j’avance.
Mon auteure actuelle est George Eliot, après l’essai de Mona Ozouf il est temps de revenir aux romans.
Impossible de commencer cette chronique sans répéter les mots de Proust
« deux pages du « Moulin sur la Floss » me font pleurer. »
Moulin de Parham - John Constable
Faisons connaissance avec Maggie et Tom Tulliver, elle est vive, intrépide, enthousiaste, curieuse de tout, rêveuse et vite enfiévrée par les livres, Maggie voudrait tant étudier. Mais elle souffre d’un handicap certain : c’est une fille.
Tom lui est le point de mire de la famille, il porte l’ambition du père, s’élever dans la société et pour cela faire des études ce qui exige des sacrifices et l’endettement pour M Tulliver propriétaire d’un moulin.
Tom aime beaucoup sa soeur mais ne peut pas s’empêcher de lui adresser piques et rebuffades, de l’humilier et de faire preuve de pas mal de mesquinerie, trouve normal de recevoir un souverain lorsque Maggie doit se contenter de shillings, en cela il ne fait que suivre l’avis d’une société qui maintien la femme en état de dépendance et de soumission.
Lorsqu’après des déboires, dus à l’ entêtement du père, la famille se retrouve démunie, ruinée, Tous les espoirs reposent sur Tom qui doit permettre aux Tulliver de retrouver leur place dans la société et ainsi venger l’honneur de son père.
Pour parvenir à ce résultat la famille va devoir consentir des sacrifices. Sacrifier son bien être et se séparer de ses possessions, je vous recommande une scène autour d’un problème de théière qui est un morceau d’anthologie, le tempérament sarcastique de George Eliot éclate dans ce genre de scène.
Mais le sacrifice va aller bien au-delà pour Maggie. Elle a un tempérament ardent Elle va devoir sacrifier beaucoup, une amitié amoureuse avec Philipp Wakem le fils de l’ennemi juré des Tulliver, puis un amour éclos bien malgré elle pour Stephen le fiancé de sa cousine.
Je sais qu’il est habituel de parler de ce roman comme celui de l’amour entre un frère et une soeur mais pour moi indéniablement c’est le roman de Maggie, c’est elle le centre du récit.
Elle est une héroïne superbe, en soeur aimante alors que son frère est très souvent dur et injuste avec elle « Tu as toujours pris plaisir à me punir... tu as toujours été dur et cruel avec moi. » crie-t-elle dans un moment de révolte.
Jeune fille vite enflammée elle a au fond d’elle la volonté farouche de ne nuire à personne et accepte pour cela de sacrifier ses propres désirs, ses propres passions.
J’ai aimé les scènes bucoliques autour du moulin, la peinture très poétique d’une vie naturelle et simple.
La rivière est centrale dans le roman, voici ce que dit Mona Ozouf dans son essai sur George Eliot
« La Floss cependant est bien la personne centrale du récit. Séduisante, incertaine, ombrageuse, un brin sorcière, elle est la maîtresse du moulin qu’elle cerne, fait vivre menace »
Si je n’ai pas comme Proust, pleuré à la lecture du Moulin sur la Floss, j’ai cependant été touchée par Maggie qui va rester pour moi, un de ces beaux personnages à l’égal de Jane Eyre, de Dorothea de Middlemarch ou d’Elizabeth Benett.
Le livre : Le Moulin sur la Floss - George Eliot - Gallimard Folio