La lecture de Quattrocento m’a emporté du côté de Montaigne et de Lucrèce alors j’ai poursuivi sur cette route là.
Ma lecture de Lucrèce remontant à pas mal d’années j’ai pris un compagnon de route qui était dans ma bibliothèque et je l’ai rouvert pour vous.
Fresques de Pompéi
La première fois j’ai luDe rerum naturad’une traite et certainement trop vite dans une période où j’engloutissais la philosophie sans reprendre mon souffle.
Ce petit traité d’André Comte-Sponville est de ceux qu’on lit avec intérêt, auquel on revient forcément. Un livre de fidélité, celle d’A Comte-Sponville pour Epicure et le divin Lucrèce, son intérêt pour la sagesse tragique et son amour de la poésie.
« C’était l’heure des jeux, des causeries et des rires »
De rerum natura est un texte qui ne se livre pas forcément à la première lecture mais qui est de ceux auquel on revient ensuite avec délectation.
C’est bon d’avoir un compagnon qui vous aide à avancer dans le texte, qui le dépoussière et le débroussaille en restituant toute l’ampleur du propos, gommant les difficultés, les passages obscurs.
Lucrèce livre sa pensée en six chants qu’il place sous la tutelle bienveillante d’Epicure son maître.
Epicure par Raphaël
« Il est beau que la lumineuse sagesse d’Epicure ait trouvé, pour parvenir jusqu’à nous, ce chant profond et grave. »
Le De rerum natura c’est le matérialisme mis en vers, les atomes devenus source de poésie, l’âme et le corps ne faisant qu’un. C’est un traité poétique qui envisage aussi bien la physique que la médecine, les planètes et la terre, la naissance, le plaisir et la mort. Véritable thérapie de l’âme qui balaie les superstitions, la magie et le surnaturel.
Ecoutez le poète : « Et le ciel apaisé resplendit de lumière » c’est cet apaisement que voulut transmettre Lucrèce.
Certes la potion est parfois un peu difficile à boire mais le poème « a de la vigueur, du souffle, de la puissance » et c’est dit André Comte-Sponvile un mélange entre « le doux miel poétique et l’amère absinthe du vrai »
Je dois à André Comte-Sponville et à ses livres mon intérêt pour la philosophie, ne l’ayant jamais étudiée, j’ai entrepris de lire les philosophes très tardivement, peut être est-ce ainsi que chacun devrait les lire. On ne lit plus alors pour se cultiver, ni pour obtenir un diplôme, on ne lit plus que pour vivre comme le dirait Flaubert.
Dans cet essai aucun effets de manche, aucun vocabulaire abscons, pas besoin de dico à côté de soi, c’est un chant d’amour et d’admiration pour Lucrèce un homme qui fut un angoissé, un déprimé et dont pourtant la vision du monde lui permis d’écrire une oeuvre qui a résisté au temps.
André Comte-Sponville sait s’effacer derrière son sujet tout en nous en livrant sa « substantifique moelle ».
Un livre qui pousse à la lecture lente, attentive, crayon en main, une belle promenade antique.
Le livre : Le miel et l’absinthe - André Comte-Sponville - Editions Hermann
Commentaires
Voilà exactement ce que je me suis dit en lisant ton article sur "Quattrocento" : "il faudrait que je lise Lucrèce" : je vais donc suivre ton guide, dont j'aurai bien besoin, peu adepte que je suis des textes philosophiques !
@ Annie : j'ai fait le parcours inverse mais qu'importe, le poème de Lucrèce est de ceux que l'on oublie pas, ses images sont fortes, la langue est magnifique
.......quand je serai à la retraite........
@ miriam : comme ta liste dès maintenant :-)
Tout à fait d'accord avec cette façon que vous décrivez d'envisager la philosophie: éviter les spécialistes au vocabulaire compliqué et incompréhensible. Comme dans tous les domaines pointus (et la philosophie en est un), il est préférable d'adopter un langage compréhensible par le plus grand nombre si on veut justement toucher celui-ci.
Comte-Sponville trouve le juste milieu: je possède plusieurs de ses ouvrages et ne connaissais pas celui-ci.
@ Christw : je n'ai pas lu tous les livres de ACS mais les principaux et j'aime assez son point de vue qui rejoint aussi celui de Nietzsche ou de Onfray, la philosophie ne doit pas rester affaire de prof de philo mais bien interroger la vie et nous aider à la vivre
D'accord avec christw!
Là tu donnes envie de lire de la philo
@ keisha : ce sont des lectures qu'il faut garder pour des jours tranquilles quand on a du temps, s'y plonger avec délices, parfois avec un peu d'effort mais en ressortir conquis
J'ai un peu de mal avec Comte-Sponville, mais sur ce thème-là, il peut m'intéresser.
@ Aifelle : j'ai aimé surtout ses premiers livres qui balayent la philo, moins les derniers
celui là est certainement un de mes préférés
Le titre de cet ouvrage est somptueux, tes illustrations merveilleuses... J'apprécie moi-aussi A.Comte-Sponville, j'ai énormément de gratitude envers ceux qui nous aident ainsi à accéder à certains chemins de connaissance. Merci Dominique, belle journée. brigitte
@ Plumes d'Anges : comme toi j'aime à dire mon admiration ou mes remerciements pour tel ou tel auteur. C'est Lucrèce qui utilise le miel et l'absinthe dans son poème et j'aime énormément cette métaphore
"On ne lit plus alors pour se cultiver, ni pour obtenir un diplôme, on ne lit plus que pour vivre comme le dirait Flaubert." Comme c'est bien dit !
@ Tania : merci merci mais j'ai piqué un peu de la phrase à Flaubert :-)
Ce philosophe est un grand pédagogue, et il sait introduire la pensée de ces grands philosophes qui sont ses maîtres.
@ Anis : un philosophe que j'apprécie aussi et comme tu le dis il donne envie de lire Montaigne, Spinoza, Pascal ou Lucrèce
"Un" Nouveau chemin de la connaissance lui avait été consacré
L'émission est encore disponible manifestement
Bonne journée
http://www.franceculture.fr/emission-les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance-figures-d-epicure-24-les-chants-de-lucrece-2011-11-
@ AloIs : je dois l'avoir podacastée cette émission là mais je vais vérifier
merci à toi pour le lien
Sagesse tragique et poésie...pour moi la philosophie n'est pas à lire mais, comme tu le dis, à prendre par petits passages, à méditer et/ou déguster si elle est poétique.
Le but de la philosophie étant de se poser des questions et également aider à vivre...on peut en abuser donc!!
Tes illustrations sont dorées comme le miel, si belles!
merci Dominique!
@ colo : ici on est au pays de la dégustation