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littérature anglaise - Page 6

  • Les Européens - Henry James

    Quatre mariages et un enterrement

    james

    Plus encore que Roderick Hudson voilà une façon simple et légère d’entrer dans le monde de Henry James..
    James a trente-cinq ans lorsqu’il écrit Les Européens. De ce roman va naitre sa renommée, même si la réception fut plus positive en Angleterre qu’aux Etats-Unis.

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    Une atmosphère bucolique

    Félix et Eugenia viennent d’arriver à Boston. Ils sont frère et soeur, américains mais ont toujours vécu en Europe. 

    On pressent que la visite qu’ils font à leurs cousins d’Amérique est un rien entachée d’intentions intéressées dues à une situation très précaire.

    Félix est un beau jeune homme à l’heureux caractère et sans occupation aucune, Eugénia quant à elle a contracté un mariage avec un prince allemand, mariage proche de sa dissolution. 

    Leurs cousins américains les Wentworth sont une famille austère mais pleine de générosité qui les accueille avec quelques réserves surtout Mr Wenworth, homme froid avec une maison à son image

    «  pas de splendeurs, pas de dorures, pas de régiment de domestiques. »

    Ses deux filles elles sont un peu éblouies par ces cousins si exotiques, Gertrude, sur laquelle Félix jette très vite son dévolu, est promise au pasteur Brand. Elle est celle qui est le plus attirée par ces nouveaux venus

    « Elle n’avait rien connu d’aussi délicieux depuis la lecture de Nicholas Nickleby »

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    L'archétype de la jeune américaine

    Robert Acton cousin et ami de la famille se laisse lui aussi prendre dans les filets de ces européens, seule résiste sa soeur Lizzie archétype de la jeune fille américaine, hardie et innocente à la fois, si on veut lui trouver une parenté il faut la chercher chez Edith Wharton et le personnage de May Welland dans le Temps de l’innocence.

    Mona Ozouf dit que ce roman est une « palette de couleurs tendres » c’est vrai mais le ton est constamment ironique. Satire légère et pleine d’humour qui entérine l’opposition entre Nouveau et Ancien monde, entre un monde puritain et bien pensant et celui du plaisir des sens et de l’esprit.

    L’ atmosphère du roman est crée par petites touches « le décor bucolique, la campagne environnante » les sentences religieuses accrochées ici et là, les fiacres collectifs qui surprennent nos européens.
    Les Wentworth représentent une société prude et moralisatrice, chez eux

    « pas de splendeurs, pas de dorures, pas de régiment de domestiques »

    james

    L'adaptation de James Ivory

    Le décor d’une maison, les parures féminines relèvent pour eux du mensonge, des apparences et donc du péché. 
    Plusieurs scènes mettent en opposition la froideur et la rigueur morale à l’insouciance et la frivolité européennes, le roman est une passerelle jetée entre ces deux mondes que tout oppose.
    Félix est jovial, léger, un rien inconséquent
         « Je n’ai jamais étudié; je n’ai pas de formation. Je fais un peu de   tout, mais rien de bien . je ne suis qu’un amateur » 

    Les scènes sont parfois cocasses, les comparaisons très ironiques, Eugenia a une conversation que le pasteur n’hésite pas à rapprocher de Mme de Staël et de Mme de Récamier et dans sa bouche c’est loin d'être d’un compliment. 

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    Lee Remick en Eugenia


    C’est un roman délicieux mais ne nous y trompons pas le James plus noir, plus caustique n’est jamais loin. Ne dit-il pas d’Eugenia. 
          « Rien de ce que disait la baronne n’était tout à fait faux. Mais peut-   être convient-il d’ajouter en toute justice que rien de ce qu’elle disait n’était tout à fait vrai »
    Quant à Gertrude voilà comment elle voit sa famille et son entourage.

    «  Il doit y avoir mille façons d’être lugubre et parfois je me dis que nous les utilisons toutes »

    Donc palette tendre mais ce sera la dernière fois dans l'oeuvre de James qu'un roman se termine par des mariages.

     

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    Le livre : Les Européens dans Portrait de femme et autres récits - Henry James - Traduit par - Gallimard Pléiade

  • Howards End - E.M Forster

    Rares sont les livres dont l’adaptation au cinéma éclipse presque le roman. C’est le cas de ce livre, je suis certaine que vous êtes nombreux à avoir vu le film avec Emma Thompson, Helena Bonham Carter, Anthony Hopkins et Vanessa Redgrave.
    Et pourtant si vous n’avez pas lu le roman vous vous privez d’un grand plaisir.

     

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    Le film de James Ivory

    Une famille d’origine allemande composée de deux soeur Helen et Margareth et d’un frère fantasque, s’est liée d’amitié avec la famille Wilcox lors d’un voyage.

    Helen invitée chez les Wilcox se croit amoureuse d’un des fils, Paul, l’idylle tourne court mais provoque un bel émoi dans les deux familles.

    Les soeurs Schlegel sont proches l’une de l’autre, disposant d’une fortune personnelle, elles sont intelligentes et sensibles, elles peuvent se consacrer à l’art, à la littérature, à la vie de la pensée.

    Helen est l’utopiste tandis que Margareth garde les pieds sur terre.

    Elles ont fait connaissance, à un concert, de Leonard Bast, jeune homme intelligent mais dont la situation sociale est bien éloignée de celle des Schlegel et dont la femme Jackie est de moeurs légères. Le destin de cet homme fait penser au personnage de Thomas Hardy Jude l’obscur.

     

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    Leonard Bast au funeste destin

    Les Wilcox eux sont un peu l’opposé, ils représentent le monde de la finance, enrichi grâce au caoutchouc des colonies, ils sont avides de privilèges dus à leur rang, conformistes et étroits d’esprit.

    Le chef de famille est fier de sa lignée, peu enclin aux dépenses, rigoriste quant à la morale.

    Après l’idylle avortée c’est Margareth qui va nouer des liens avec Ruth Wilcox, elles partagent leurs emplettes de Noël, celle ci vante à Margareth la charmante demeure d’Howards End, une maison apportée en dote par Ruth Howard avant qu’elle soit devenue Wilcox, la maison de son enfance, où elle a grandi, et avec laquelle elle garde des liens très forts.

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    Howards End 

    A la mort de Mme Wilcox peu de temps après, son mari découvre qu’elle a écrit un mot pour léguer la maison à ....Margareth Schlegel au grand dam de la famille. 

    Le testament est détruit sans coup férir. Mais le hasard veille et quelques mois plus tard Henry Wilcox tombe amoureux de Margareth Schlegel.
    Je m’arrête là, si vous n’avez pas vu le film inutile de vous priver des découvertes des péripéties qui suivent. 

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    La Ferme des Forster qui a inspiré Howards End

    Il faut le talent de Forster pour nous transporter dans cette société étroite, hypocrite, à la limite de la caricature. Foin des préjugés on finit par s’attacher à ses personnages malgré tous leurs défauts.

    Forster frôle parfois le vaudeville mais bien vite sa patte critique et ironique revient. La façon dont la famille Wilcox se débarrasse du testament litigieux est très réjouissante.

    Il peut aussi parfois teinter son récit de poésie.

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    Le livre :Howards End - E.M Forster - Traduit par Charles Mauron - Editions Le Bruit du temps

  • Robinson Crusoé - Daniel Defoe

    Je vais peut-être vous étonner mais je crois n’avoir jamais lu une version complète de Robinson Crusoé.
    Ce livre a enchanté mes jeunes années, je me souviens encore de balades dans les bois où bien sûr j’étais Robinsonne. Le mythe du solitaire sur son île m’a toujours séduit et aujourd’hui encore je peux me précipiter sur des récits qui ont un tant soit peu de ressemblance avec ça. 

     

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    Lorsqu’est parue la traduction de Françoise du Sorbier c’était une belle occasion de lire enfin ce récit dans sa version complète avec une traduction que j’ai trouvé vraiment excellente. Ajoutons que les éditeurs n’avaient jamais vraiment fait d’effort la dernière traduction datait de ...1833

    Je ne vais peut être pas vous raconter l’histoire....Non je vais me contenter de vos dire quelles furent mes surprises à la lecture. 

    D’abord ce chapitre d’entrée où le personnage se présente, évidement il était supprimé dans les versions enfantines donc j’ai enfin fait connaissance avec l’homme et son passé.

    La longueur et la précision du récit du naufrage qui est terrible et qui donne le ton du récit: c’est parfaitement rythmé et l’on est accroché sans effort.

    defoe

    Comme tout enfant qui lit cette histoire avec quelques illustrations je m’étais fait une idée de Robinson, des vêtements cousus à la va comme je te pousse, une pétoire, une barbe énormissime.
    Je me souvenais bien de la palissade érigée mais pas du tout du chien et des chats, bien de la recherche de nourriture mais très peu des efforts pour se transformer en agriculteur. On a la mémoire très sélective.

    Et puis si l’on m’avait demandé la durée de sa présence sur l’île cela aurait oscillé entre 3 et 5 ans et j’ai été stupéfaite de découvrir 28 années sur son calendrier.

     

    J’ai aimé le récit des efforts de Robinson pour se créer un univers vivable : provisions, poterie, tonneaux fabriqués pour faire de la bière. 

    Enfin je n’avais aucun souvenir de la lecture très forte de la Bible et d’un Robinson interrogeant Dieu et se confiant à lui pour être épargné, pour se rassurer. 

    Frappée aussi par les plans qu’il fait pour combattre et tuer des intrus, la peur d’avoir à faire à des anthropophages, bref la peur de l’inconnu et du différent, un sentiment qui n’a jamais cessé de nous habiter.

    Je passe sur Vendredi car cela c’est inoubliable. 

    defoe

    Et je vais vous confier une petite anecdote familiale, ma fille ainée en dernière année de maternelle est revenue un jour enthousiaste, sa maitresse avait parlé de Robinson, mais au moment de nous parler de son compagnon, là horreur, le trou de mémoire, elle ne se rappelait pas du nom de ce bon sauvage, petit coup de pouce de ma part « il ne s’appelait pas Vendredi ? » mais alors ce qui se peignit sur le visage de ma fille, ce ne fut pas la joie d’avoir retrouvé ce nom mais plutôt une stupéfaction totale « Alors toi aussi tu es allée dans la classe de Mme Rouveyrolle ? ». Ce jour là elle prit sa première leçon de mythe littéraire.

    Le mythe n’a pas nourri que ma fille mais aussi beaucoup d’écrivains, de Rousseau à Michel Tournier. 

    Replongez vous dans votre enfance, j’espère que vous y prendrez le même plaisir que moi.

    Si vous voulez en savoir plus sur la traduction lisez l’interview de Françoise du Sorbier 

     

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    Le livre : Robinson Crusoé - Daniel Defoe - Traduit par Françoise du Sorbier - Editions Albin Michel

  • Le Jardin de Virginia Woolf

    Vous êtes un amoureux des jardins ? Vous êtes une inconditionnelle de Virginia Woolf ? Dans un cas comme d'en l'autre ce livre est fait pour vous.

    Caroline Zoob fut en charge avec son mari de Monk’s House au nom du National Trust qui possède et gère le domaine. Elle nous offre là un livre qui met en joie.

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    En quelques pages de présentation on comprend que le jardin actuel de Monk’s House n’est pas tout à fait celui de Virginia et Leonard mais peu sans faut et l’esprit de ce jardin est bien le même.

    A travers les lettres et le journal de Virginia on sait beaucoup de choses de ce jardin, vous entendrez d’ailleurs sa voix au travers des commentaires de telle ou telle transformation, de telle ou telle plantation, de tel ou tel agrandissement.

     

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    © John Pilmmer


    Mais ce jardin est aussi et surtout celui de Leonard qui en fut le maitre d’oeuvre. 
    On peut voir en Caroline Zoob  une amie du couple Woolf tellement sa compréhension est fine et délicate.

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    «  Dans le jardin où les arbres serrés dominaient les massifs floraux, les pièces d’eau et les serres, les oiseaux chantaient sous le soleil éclatant, comme s’ils étaient seuls au monde. »

    Elle nous fait revivre l’achat de la maison, les premiers temps difficiles sans eau courante, sans électricité, sans sanitaires. Virginia et Leonard ont acheté la maison sur un coup de tête, surtout pour le jardin et son verger extraordinaire.

    Au gré des saisons le jardin se transforme, des allées sont tracées, des coins créés. Leonard surveille le potager, les Woolf vendent et offrent les fruits du verger, se font apiculteurs.

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    La cabane de travail de VW

    Les amis viennent en séjour et petit à petit la maison prend forme, les pièces changent de destination, Virginia repeint le salon en rouge et les toilettes rudimentaires en jaune !

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    « Nous avons eu également un hiver sérieux, ici, bien froid et neigeux... »

    Au fur et à mesure des rentrées d’argent liées à ses droits d’auteur, Virginia investit dans la maison et Leonard dans le jardin.
    Un nouveau bassin, un petit étang où l’on pourra patiner l’hiver, une gloriette, une pergola, une folie, une serre ....
    Les différentes parties du jardin reçoivent des apellations : la terrasse aux meules, le jardin aux poissons rouges, le jardin italien, l’allée des fleurs.

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    «  Une jolie petite pièce...juste ce dont j’ai toujours rêvé »

     Les cendres de Virginia furent répandues dans le jardin et Leonard ajouta une plaque gravée des derniers mots du roman Les Vagues.

    Caroline Zoob fut un temps agacée par l’idolâtrie dont jouissait Virginia, puis au fil du temps elle appris à aimer ces hommes et ces femmes qui font un long chemin juste pour venir s’asseoir sur un banc de ce jardin, pour entrer en communion avec leur écrivain préféré et qu’elle trouvait encore assis à la fermeture le soir attendant la maîtresse de maison.

     

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    C’est un livre que je vais ajouter à mon espace Virginia Woolf, il est magnifiquement illustré, intelligemment commenté et il accompagne parfaitement les pages du journal de Virginia Woolf. Un cadeau à faire ou à se faire. 

     

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    Le livre : Le jardin de Virginia Woolf Histoire du jardin de Monk’s House - Caroline Zoob  - Photographies Caroline Arber - Editions Massin

  • Ma vie avec Virginia - Leonard Woolf

    J’ai pris un grand plaisir, qui s’est étalé sur un temps considérable, à la lecture du journal de Virginia Woolf.

    J’ai lu avec intérêt la biographie d’Hermione Lee et avec un agacement certain celle de Vivian Forrester qui a tendance à ramener tout Virginia Woolf à sa vie sexuelle. 

    C’est une jolie expérience que la lecture de ce petit livre, une façon d’entrer dans l’intimité de l’écrivaine sans aucun voyeurisme, comme une amie qui viendrait prendre des nouvelles.

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    Leonard peint par Roger Fry en 1940

    Dès la préface on entend la voix de Cecil Woolf, neveu de Leonard qui dit « Sans lui, Virgnia n’aurait pas vécu assez longtemps pour écrire ses chef-d’oeuvre » et je dois dire qu’en confrontant ce livre avec le journal, je suis du même avis.

    On voit à travers ses pages, naitre, s’épanouir et souffrir un écrivain. Mais avant d’aller plus avant une ou deux choses : saviez-vous que le texte qui a présidé à la création de la Société des Nations après la Première Guerre est tout droit sorti de la plume et de la réflexion de Leonard Woolf ? Pour autant cet homme ne fit pas vraiment une carrière, il s’effaça derrière son épouse, la privilégiant, l’aidant à surmonter ses accès de folie.

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    Vu par Holywood

    Quelques pages nous parlent de la vie de Leonard avant Virgnia, le temps des colonies en somme, à Ceylan, expérience qui lui donna le goût ensuite de la politique pour défendre les peuples, se battre contre le colonialisme et le racisme.

    Il côtoie  la famille Stephen, Vanessa est la plus belle mais son attention est attiré par Virginia « Son expression, la forme même de son visage, changeaient avec une rapidité inouïe dès que se faisait sentir une tension, un souci, une inquiétude. »

    Manifestement amoureux il dit de Virginia « Elle est la seule personne que j’ai connu intimement et dont je peux dire qu’elle méritait l’appellation de génie. »

    Leonard Woolf détecta très tôt les problèmes psychiques de sa femme, on le sent d’une cruelle lucidité lorsqu’il évoque les épisodes de violence, l’anorexie, le basculement dans la folie, les crises de logorrhée, les tentatives de suicide. 

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    The writing lodge. ©NTPL/Eric Crichton

    On sent aussi à travers son texte toute l’attention qu’il fallait donner pour Virginia mène une vie sans heurts, de surveiller les moments annonciateurs ceux par exemple où « elle décolle au cours d’une conversation », la vie mondaine du couple qui parfois conduit Virginia au bord du gouffre.

    J’ai retrouvé intact dans ces pages, qu’on trouve aussi dans le Journal,  les moments de création littéraire, l’angoisse au moment de la relecture et de la publication d’un manuscrit, la folie qui rôde dans l’attente des critiques.

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    On sent l’aide et le soutien qu’a pu apporter Leonard au détriment de sa propre carrière : Les voyages faits ensemble, l’aventure de la Hogarth Press, les amis communs, l’achat et l’embellissement de Monk’s House. 

    « C’est un témoignage d’une qualité rare » nous dit M Venaille le traducteur et c’est vrai que ce texte est d’une haute tenue.

    Leonard est celui à qui Virginia Woolf a pu écrire « Ce que je veux dire, c'est que je te dois tout le bonheur de ma vie »

     Ajoutez ce livre à votre bibliothèque.

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    Le livre : Ma vie avec Virginia - Leonard Woolf - Traduit par Micha Venaille - Editions Les Belles lettres

  • Middlemarch - George Eliot

    Il y a un côté jouissif à s’attaquer à un pavé. D’abord arrivera-t-on au bout ? Le temps passé vaudra-t-il la peine ? Je réponds oui aux deux questions. 
    Bien sûr il m’a fallu quelques jours de lecture pour parvenir au bout de ce roman, mais qu’importe quand on est tout à fait subjugué par la lecture le temps ne parait pas long du tout.

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    Je n’avais jamais rien lu de George Eliot, je me le promettais depuis longtemps mais l’occasion ne s’était pas trouvée.
    Trois temps : j’ai commandé, j’ai reçu et j’ai lu, tout cela dans la foulée sans effort aucun mais avec un vrai grand plaisir.

    Un petit préalable pour dire que je connaissais déjà le traducteur Sylvère Monod comme tous les lecteurs de Dickens, j’étais déjà certaine de la qualité de la traduction et c’est vraiment très important pour un livre aussi long dont il est important de saisir non seulement le contenu mais aussi toutes les nuances.

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    Illustration de la British library

    George Eliot se rapproche de Jane Austen en cela qu’elle aime brosser la vie d’un village, de ses habitants, des liens qui les unissent, des histoires drôles ou sordides qui les lient.

    Sa fresque, parce qu’il faut bien parler ici de fresque plutôt que de tableau qui aurait un air un peu trop restrictif, sa fresque est de l’avis de Virginia Woolf « Un des rares romans anglais écrits pour grandes personnes »

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    Dorothea vue par la BBC

    Les personnages qui vont apparaitre sur la fresque de la petite ville de Middlemarch : Dorothea Brooke qui très vite épouse pour son malheur un ecclésiastique froid, raide, à la réputation largement usurpée. Lydgate le médecin ambitieux qui va se fourvoyer dans un mariage raté, Peter Vincy qui court après un amour impossible et est un rien incapable de s’engager véritablement dans une carrière professionnelle lui assurant un avenir, le pasteur Casaubon qui court lui après la gloire universitaire mais ne va rencontrer qu’échec et humiliation après une expérience ratée de mariage avec Dorothea, enfin le jeune Will Ladislaw qui représente l’avenir. 

    Autour d’eux tout un monde qui vient croiser le destin de chacun pour le bien ou pour le mal. Les imbroglios des relations familiales reposant sur des mensonges, les caractères des personnages allant de l’inconséquence absolue à l’abnégation totale comme Mary Garth
    George Eliot à l’art du masque et un même personnage est tour à tour nimbé d’admiration pour passer aussitôt à l’opprobre sociale.

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    George Eliot

    Vous allez me dire que je ne vous parle pas de l’intrigue du roman, tout simplement parce qu’il n’y en a pas vraiment.
    Certes il y a des péripéties, des imbroglios, mais l’important c’est la peinture de cette société où l’auteur passe du destin individuel au tableau plus large de la vie d’un pays : épidémies, réformes politiques, changements techniques comme l’arrivée du chemin de fer.

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    Les débuts du chemin de fer

    Cette alternance George Eliot en a la maitrise parfaite et les épisodes avec une large vision et ceux centrés sur un personnage, se mêlent avec une grande habileté. Il y a à la fois de la sévérité dans les portraits qu’elle trace mais en même temps beaucoup de lucidité.

    On a tout : le rôle de l’argent, du pouvoir, les faiblesses des êtres humains au prise avec l’ambition, la soif de l’argent, le désir, la haine ou l’amour.
    Il y a un souffle puissant dans ce roman, la société anglaise de l’époque est analysée avec finesse, acuité, ironie et brio.

    Un roman habile et riche qui mérite totalement l’effort de la lecture.

     

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    Le livre : Middlemarch - George Eliot - traduit par Sylvère Monod - Editions Gallimard Folio