Quand on est un peu accro à un auteur on saute sur tout ce qui parait, sans se poser trop de questions, par fidélité en somme.
C'est ce qui m'a fait acheter ce livre et non seulement je n'ai aucun regret mais j'ai des petites étincelles dans les yeux.
Attention c'est un livre qui date un peu, enfin tout est relatif, mais quand même, les articles ont été écrit par P Rumiz pour les journaux dans les années 2003 à 2006. Mais qu'importe car ils mettent déjà l'accent sur les changements que connaissent les territoires de montagne, en Italie, en Suisse, en Autriche et en France. Et aujourd'hui les choses n'ont fait qu'empirer.
Paolo Rumiz a entrepris un voyage de 7000 Km le long des Alpes et des Apennins, son voyage l'emporte du golfe de Kvarner jusqu'au bout de la botte italienne.
Golf et îles de Croatie
Les Alpes pas de problème, je voyais bien les paysages, les lieux, les vallées, les sommets. Par contre les Apennins c'était plus nébuleux pour moi malgré plusieurs séjours en Italie ça ne me parlait pas vraiment.
Mon regret ? Ne plus avoir sous la main l'équivalent du fabuleux atlas que j'avais enfant, celui du Reader Digest qui à l'époque m'a fait voyager partout, l'Europe était mon terrain de jeux et j'ai passé bien des heures penchée sur les doubles pages à la taille démesurée ( il faut dire que j'étais petite et gringalette ) je me suis vengée sur ma tablette.
Vous êtes prêt pour le voyage ?
Un mot d'abord des moyens de circulation, à pied évidement, en vélo, et plus insolite en Topolino de 1954 « Sur le marché, c'est celle qui se rapproche le plus de la mule. » dit Paolo Rumiz
Tout commence dans les Alpes en Slovénie, surprenant voyage dans un pays qui n'attire pas l'attention et que les pages de Rumiz m'ont donné envie de découvrir même si le penchant des slovènes va plus vers les ours que vers les étrangers.
On navigue, car c'est bien de navigation qu'il s'agit, entre le pays des loups, des ours et du miel, le Tessin italien, les sommets avec Walter Bonatti un guide idéal dans les Alpes ou Mario Rigoni Stern qui devait disparaitre peu après.
Walter Bonatti
Ce début de voyage m'a enchanté et a ravivé des journées en montagne, des cueillettes de fleurs, des photos de sommets, des vallées presque inconnues, des glaciers et de somptueux coups de soleil.
Une belle randonnée dans les Alpes que j'ai parcouru au fil des années et le récit de Rumiz a réveillé bien des souvenirs pour moi.
On croise des musiciens, des experts, des gardiens d'auberges de montagne, il est à Chamonix juste avant que ne soit décidé la réouverture aux poids lourds après la catastrophe du tunnel du Mont Blanc, entrainant la catastrophe écologique qui sévit aujourd'hui si vous avez écouté les dernières constations sanitaires sur la vallée de l'Arve.
Il évoque la catastrophe du Vajont en 1963 qui tua 2000 personnes et anéantit une partie de la Vénétie.
Ces Alpes où la neige est de plus en plus rare, où les stations plongent dans un marasme économique et écologique.
On croise Õtzi l'homme des glaciers découvert par Helmut Simon, avec autour de cette découverte un peu de ce qu'à connu chez nous la Grotte Chauvet et les enjeux médiatiques qui s'y rattachent.
Les Apennins c'est différent, je ne me sentais pas en pays connu. Ces montagnes nécessitent la lenteur, la recherche d'une certaine harmonie. Les lieux ont été parfois saccagés, parfois épargnés, les témoignages sont là pour appuyer les propos.
Et puis les Apennins vivent encore dans l'ombre d'Hannibal.
Traverser ces montagnes « sans croiser un gendarme ou une autoroute » cela tient d'une gageure. On peut lire les marques sur le paysage de la désertification, du manque d'eau, l'installation de la « grande peur climatique »
Paolo Rumiz déniche une Topolino, datant de 1954. Un véhicule pour se faire instantanément des amis. La sienne prend l'eau, a des ratés mais avance vaille que vaille.
On s'enfonce dans « un labyrinthe aussi fascinant qu’infini » qui va des côtes ligures jusqu'au bout du bout de la Calabre.
On navigue dans des villages déserts, uniquement habité de vieillards et de leurs auxiliaires de vie, Paolo Rumiz rivalise d'anecdotes pour faire oublier la tristesse des lieux.
Vous pensez que cela va vous plomber le moral ? Et bien pas du tout, l'humour de l'auteur est là, et puis il y a ces personnages hors du temps qui enchantent le récit.
Certains noms de lieu ne parlent pas à nos oreilles françaises et la magie d'internet est là pour combler le vide
« Vous verrez des merveilles. Des fleuves de lumière, des villages abandonnés, des maquis impénétrables, des cascades.»
Un journal de voyage plein de surprises, sans GPS mais avec carte. Des sites hors des itinéraires touristiques, où la cuisine est savoureuse et les villages dépeuplés.
Un livre par un écrivain de la lenteur, pour les fous de voyage, de montagne, de protection des territoires, d'écologie.
Pour clore ce billet je laisse la parole à Paolo Rumiz
« Parti pour m'échapper du monde, j'ai fini, au contraire, par en trouver un autre : à ma grande surprise, mon voyage s'est transformé en révélation d'un univers vivant et secret. Je l'ai décrit avec rage et émerveillement. Émerveillé par la beauté fabuleuse du paysage humain et naturel, mis en rage par le pouvoir qui n'en tient aucun compte. »
Le Livre : La légende des montagnes qui naviguent - Paolo Rumiz - Traduit par Béatrice Vierne - Editions Arthaud