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Jours de travail Les Journaux des Raisins de la colère - John Steinbeck

Ce livre s’adresse aux lecteurs de Steinbeck, aux admirateurs de son roman le plus célèbre : Grape of wrath, les Raisins de la colère.

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C’est un roman que j’ai découvert très tôt, trop sans doute mais si je n’ai pas lors de ma première lecture apprécié l’ensemble à sa juste valeur, j’ai néanmoins ressenti fortement cette volonté forte, déterminée, de prendre fait et cause pour les démunis, les traine-savates, les exclus. 

Quand Steinbeck commence l’écriture des Raisins de la colère il vient de connaitre le succès, succès de ses deux derniers livres : En un combat douteux et surtout Des souris et des hommes. 

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Adaptation théâtrale, Hollywood lui fait les yeux doux, il est harcelé par les médias pour des émissions, interviews, réceptions et il se sent piégé et incapable de mener à bien en même temps l’écriture d’un roman ambitieux.

Le journal qu’il tient pendant ces quelques mois d’écriture traduit fidèlement ses difficultés, ses emballements, ses doutes. Steinbeck est pressé par le temps, il s’impose des délais intenables, écrire 2000 mots chaque jour, il se fixe des objectifs pour les oublier le lendemain.
« Un livre a-t-il jamais été écrit dans des conditions plus difficiles ? »

Il tente de lutter contre le délitement de son temps d’écriture et de sa concentration, les bruits intolérables, les coups de téléphone, les amis qui s’invitent et surtout le projet d’achat d’une propriété qui lui tient à coeur mais qui traine en longueur et vient perturber son écriture.

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Chaplin est parmi les visiteurs

L’écrivain travaille à son domicile et pour son entourage il n’est pas vraiment au travail, il est là, disponible. « ils m’observent et ne sont plus naturels. »
Il se fait aussi des reproches, il a une tendance à la paresse, au découragement 
Plus grave encore on le sent préoccupé par l’évolution vers la guerre, les accords de Munich, sa vision de plus en plus forte d’une guerre imminente. 

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                                                                    Munich 1938 

« Ce livre est ma seule responsabilité et je dois m’y coller, et rien d’autre. Ce livre est ma vie à présent ou doit l’être. Quand il sera terminé, viendra le temps d’une autre vie. Mais pas avant qu’il ne soit achevé. Et les autres vies ont commencé à faire irruption. Cela ne fait aucun doute. C’est pourquoi je prends autant de temps à écrire ce journal ce matin. Pour me calmer

 Sa principale préoccupation est de bien traduire dans son écriture le combat des pauvres cueilleurs, fermiers qui ont tout perdu, métayers d’Oklahoma fuyant la misère et la poussière; la vie effroyable dans les camps de migrants.

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Camp  Photo de Dorothea Lange 

On sent dans le journal cette volonté d’être à la hauteur, c’est un corps à corps avec les difficultés, les personnages, on les voit naitre sous sa plume 
Son épouse tape frénétiquement au fur et à mesure de l’écriture. 

On voit le roman avancé et je me suis reportée au fur et à mesure aux chapitres du roman correspondants, on voit le déroulé, le plan des différentes étapes du roman. On voit les personnages prendre de l’épaisseur. En même temps Steinbeck est bouleversé par la famine et la détresse des cinq mille familles de saisonniers venus en surnombre pour la cueillette des petits pois, son nom va servir de caution, ajoutant ainsi à la pression qu’il ressent.

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                                              © Dorothea Lange 

On apprend par son journal que c’est sa femme qui a trouvé le titre splendide issu d’un chant patriotique américain. « un titre merveilleux, le livre existe enfin »

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Il se sent totalement responsable  « C’est la partie importante du livre. Je dois la réussir. Cette petite grève. Je dois la gagner. Il faut que ce soit plein de mouvement et qu’il y ait la combativité de la grève. Et il faut la gagner »

Le livre est un énorme succès dès sa sortie mais Steinbeck est poursuivi par la vindicte des grands propriétaires ou des banquiers montrés du doigt dans le roman. Son livre est interdit de vente dans certaines villes de Californie.

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En 1940 Steinbeck reçoit le prix Pulitzer Pour Les Raisins de la colère

Je suis une inconditionnelle de Steinbeck alors évidement je suis partiale, mais si comme moi vous aimez ses romans alors lisez ce livre qui fait pénétrer dans l’intimité de la création, ses joies et ses affres.

Chaque entrée du journal est repris en notes par Pierre Gugliemina ce qui éclaire le lecteur et apporte une saveur supplémentaire au journal. Il dit que Steinbeck a pleinement conscience d'écrire un roman révolutionnaire.
Il est évident que l’on a une seule envie, celle de relire le roman dont les premiers mots sont restés dans la mémoire de beaucoup de lecteurs :

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« Sur les terres rouges et sur une partie des terres grises de l’Oklahoma, les dernières pluies tombèrent doucement et n’entamèrent point la terre crevassée. » 

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Le livre : Jours de travail -Les journaux des Raisins de la colère -John Steinbeck - Traduit par Pierre Guglielmina - Editions Seghers

Commentaires

  • Un journal qui semble indispensable pour bien comprendre Steinbeck. Ton billet est très agréable à lire.

  • merci, indispensable peut être pas mais très intéressant pour les amateurs comme je le suis

  • Cette incursion dans sa vie et sa création semble du plus grand intérêt. C'est un auteur que j'ai toujours énormément apprécié en me disant dernièrement qu'il en faudrait plusieurs comme lui pour dénoncer, aider les démunis, tous et tant!
    Merci pour ce superbe billet, bonne journée printanière Dominique.

  • un auteur dont on ne parle plus assez à mon goût

  • J'ai compris! (je suis fan de l'auteur aussi), mais je dois d'abord relire Les raisins de la colère

  • j'ai fait une relecture partielle en lien avec le journal

  • Bonjour Dominique, ton billet donne envie de relire Les raisins de la colère lus il y a longtemps. Merci. Bonne journée.

  • un livre que j'ai relu plusieurs fois, ici je me suis contentée de relire certains passages ceux dont je me souvenais de façon forte ou ceux que Steinbeck évoque dans son journal

  • Titre inspiré de la Bible : " Les parents ont mangé des raisins verts et les enfants en ont eu les dents agacées " . Fin du rêve américain . C'est en lisant Steinbeck ( et Faulkner ) que j'ai compris ce qu'on appelait alors " les pauvres blancs " .

  • les pauvres blancs une expression qui reviendra dans la littérature ensuite
    le titre vient d'un chant américain qui est peut être lui même inspiré de la Bible car chez eux TOUT est inspiré par la Bible

  • Pour bien en tirer parti, il vaut mieux avoir lu les raisins, ce qui n'est pas (encore) mon cas. C'est amusant, sa femme a trouvé le titre.
    Merci pour ce copieux billet sur un auteur que manifestement, vous appréciez.

  • Si vous n'avez jamais lu le roman en effet le livre n'est pas pour vous mais par contre lisez le roman c'est un chef d'oeuvre

  • Belle trouvaille de l'épouse dévouée ! Relire Steinbeck, que je n'ai plus ouvert depuis longtemps, c'est noté. Bonne semaine, Dominique.

  • il sait gré à son épouse manifestement car le titre est important et ajoute au contenu, ici il est manifestement en adéquation

  • J'aime beaucoup ces journaux dans lesquels on découvre les affres de l'écriture (je pense ici au Journal de Virginia Woolf). Je note donc celui-ci, mais auparavant il me faudra relire "Les raisins de la colère", lus dans ma lointaine adolescence ! Bonne semaine, Dominique.

  • c'est une relecture que l'on fait avec jubilation et émotion

  • Il me faut avouer que je n'ai jamais lu Steinbeck... Ce serait bien de commencer par Des souris et des hommes ?

  • Personnellement, c'est le livre de Steinbeck que je préfère . Bonnes découvertes !

  • Personnellement, c'est le livre de Steinbeck que je préfère . Bonnes découvertes !

  • oui un bon début ensuite au choix Les Raisons ou à L'est d'Eden selon ton envie

  • Étant comme toi un inconditionnel de Steinbeck je te remercie pour ce billet, qui va me permettre de me jeter sur ce livre que j'ignorais.

  • un livre qui vaut pour comprendre les ressorts et les affres d'une écriture, ce qui m'a le plus touché c'est ce combat contre le temps contre les distractions qui viennent perturber son travail et sa volonté de ne pas trahir les plus pauvres dans son roman

  • C'était une sorte de mission qu'il s'était fixé et tout s'est mis en route autour de lui pour qu'il réussisse, c'est courageux et formidable, c'est précieux ! Merci Dominique, on a jamais assez de lumière en soi ! brigitte

  • il y a effectivement un côté mission à accomplir

  • Je me promets de lire Steinbeck depuis des lustres... j'espère que je me souviendrai de ce journal quand je le ferai car cela a l'air d'être un complément fascinant à un roman qui l'est visiblement également. Merci donc de cette découverte

  • un auteur qui vaut vraiment la peine d'être sorti de la poussière qui s'accumule sur les livres que l'on a parfois lu il y a longtemps ou à coté desquels on est passé

  • Je l'ai lu trop jeune moi aussi, mais je me souviens que ça avait été un choc. Tu me donnes très envie de lire le journal et bien sûr de relire maintenant "les raisins de la colère". Je le comprendrai sûrement beaucoup mieux maintenant.

  • je l'avais relu lorsque je l'avais proposé à mes filles et cela est resté pour moi un auteur majeur, mes vieux poches ont rendu l'âme mais je les ai remplacé par des livres d'occasion en bon état que je garde précieusement

  • Ton article est passionnant. Je n'ose avouer que je n'ai toujours pas lu Les raisins de colère ( pourtant, Les souris et des hommes, La perle, surent des grandes lectures ). J'ai eu la chance de voir l'exposition consacrée à Dorothea Lange l'année dernière, et c'est là que je me suis promise de lire Les raisins de la colère.

  • jette toi dessus tu verras c'est un grand moment de lecture

  • oui même si le livre s'adresse plutôt aux inconditionnels

  • Un livre indispensable pour comprendre ce grand écrivain, mais aussi pour comprendre, je crois, ce qu'est la création, ce que représente pour un écrivain l'urgence de la transmission.
    Vous en parlez bien, vraiment. Merci.
    Bonne journée.

  • oui on ressent l'urgence dans le journal et en même temps la solitude et parfois même la douleur qui va avec

  • Comme toi, j'aime énormément Steinbeck. Comme toi aussi j'ai lu Les raisins de la colère assez jeune mais c'est quand je l'ai relu plus tard que je l'ai vraiment apprécié. Vu aussi à Paris l'exposition Dorothea Lange que l'on ne peut plus dissocier ensuite des images que fait naître le roman.

  • une alliance photo texte qui est inoubliable et qui s'impose à la mémoire

  • C'est vraiment très intéressant de montrer le roman de cette façon-là. J'avais appris qu'il avait eu des problèmes à sa sortie, mais je ne connaissais pas tout le contexte qui avait accompagné l'écriture, comme les Accords de Munich. Une incitation à le relire, si cela n'a pas encore été fait !

  • comme toi j'ignorais le contexte exact et la violence des réactions à la publication

  • Merci pour l'information sur la publication de ce "journal" en français!
    Si je connais et apprécie de longue date l'oeuvre de Steinbeck (y compris ses livres plus "légers" que sont Tortilla flat, Rue de la sardine ou Tendre jeudi), je ne savais pas qu'il avait tenu son journal pendant qu'il rédigeait...

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