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  • Un tableau un livre Georges de la Tour

     « La Tour peint une orante. Madeleine ne craint pas la nuit, elle s’en drape. Elle n’est pas débraillée, à demi nue, elle s’est dépouillée de sa coquetterie ».

     

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    Georges de la Tour, Metropolitan of Art, New-York, 1645


    « Peignant Madeleine, l’artiste, proclamait sans doute la foi de La Tour ».

    « La flamme d’une chandelle, qui éclaire sa rêverie et joue sur le crâne qu’elle contemple, c’est, métaphoriquement, « le Feu de Dieu ».

    Le livre : Madeleine ou l’incandescence - Barbara Lecompte - Editions Arléa
    Le Tableau : Madeleine au miroir

  • Léonard et Machiavel - Patrick Boucheron

    L’un c’est Léonard de Vinci bien sûr mais vous aviez deviné, l’autre c’est Machiavel celui qui a permis de créer un nouveau mot dans notre petit Larousse.
    Nous voilà transporté à la Renaissance, époque de foisonnement intellectuel et artistique mais aussi de danger, de sang et de poisons.

    Un constat : pendant environ 15 ans Machiavel et Léonard de Vinci se sont côtoyés, rencontrés, ont été liés aux mêmes personnes, aux mêmes protecteurs, ont travaillé sur les mêmes projets et ...rien pas d’écrits, aucun document, rien de rien.

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    Machiavel secrétaire de chancellerie, un peu ambassadeur un peu espion, occupe une fonction risquée à l’époque où les princes se succèdent le plus souvent dans le sang et la fureur.
    Léonard lui a déjà 50 ans, il peint, dessine depuis plus de 30 ans, il a depuis toujours une passion pour les techniques, les phénomènes naturels et l'eau en particulier, sans doute l’esprit le plus curieux de son temps. Patrick Boucheron est persuadé que les deux hommes se sont rencontrés mais voilà... nulles traces de ces rencontres.

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    Plus agaçant encore : ils ont travaillé sur le projet fou du détournement du cours de l’Arno, pas un noble projet humaniste pour protéger les paysans des inondations, non un projet guerrier pour détruire Pise l’éternelle rivale de Florence. D’autres rencontres ont eu lieu lorsque Léonard de Vinci reçoit en commande la réalisation d’une fresque pour la salle du  Palazzo Vecchio à Florence, la fresque de la bataille d’Anghiari ne sera jamais terminée par Léonard et le destin va séparer les deux hommes.

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    Ces deux figures de la Renaissance rapprochées par la soumission obligatoire aux condottieri de l’époque, il fallait bien vivre ! Ces deux hommes ont dialogué, conversé, peut être échangé des lettres mais il n'en reste rien, ni dans les fameux carnets de Léonard, ni dans la correspondance de Machiavel. Très contrariant pour un historien de n’avoir aucun écrit à se mettre sous la dent, plus que contrariant, carrément frustrant, alors me direz-vous , il invente ? il fait dans le romanesque ...et bien pas du tout, il digresse, tourne autour de son sujet, « il interroge le silence » dit-il lui même et tout cela pour notre plus grand plaisir. Ni traité de peinture ni traité politique, ni biographie, ni fiction, ce texte à la fois érudit sans être pédant, limpide mais exigeant et qui se lit avec délices.

    « Léonard et Machiavel n'étaient pas de ces éclaireurs à l'avant-garde, mais au coeur de la bataille, dans la mêlée confuse, où rien ne se discerne nettement sinon la vérité du combat. Ils n'ont pas fait leur temps; parce qu'ils furent si intensément du leur, ils sont toujours du nôtre. Il y eut entre eux un temps commun, qui les fit contemporains ».

    Patrick Boucheron depuis ce livre a fait son chemin et aujourd’hui vous pouvez le retrouver dans des cours au Collège de France

     

    Le livre : Léonard et Machiavel - Patrick Boucheron - Editions Verdier

     

  • Bribes de Proust avant Proust

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    « L’université, à l’époque, n’était pas du tout persuadée de l’importance de Marcel Proust. Presque aucun travail ne lui avait été consacré, on ne disposait pratiquement d’aucune étude, les chercheurs ne s’étaient pas occupés de lui et, pour tenter de retracer la création de la Recherche du temps perdu, on en était réduit à quelques indications données par les amis de Proust, souvent erronées d’ailleurs, ou à quelques confidences que l’on trouvait dans sa correspondance »

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    « En fait l’intérêt des Plaisirs et les jours vient au contraire curieusement de ce que ce petit livre fini, soigné, parfait, ne peut plus être lu aujourd’hui que comme un brouillon, une ébauche. Le lecteur qui le découvre a d’abord le plus grand mal à admettre que le puissant romancier de la Recherche ait été l’auteur de ces pages délicates, brèves et précieuses. »

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    La Recherche

    « Dès cette époque nous voyons se dérouler le phénomène de création, tel que Proust le répètera quinze à vingt ans plus tard. L’auteur ne tire pas son livre du néant. Le livre préexiste et l’auteur a alors pour tâche de le trouver, presque de le retrouver. Le livre surgit à l’occasion d’un prétexte, et dès lors il augmente à mesure, s’enrichit de tout le passé et s’élargit pour contenir tout l’avenir »

     

    Le livre : Proust avant Proust Essai sur Les plaisirs et les jours - Bernard de Fallois - Editions Les Belles Lettres

  • Lettres à une jeune poétesse - Rainer Maria Rilke

    Rainer Maria Rilke, le poète de la lumière dans l'obscurité - Nos Pensées

    Elle c’est Anita Forrer, une jeune fille originaire de Suisse, lui c’est Rainer Maria Rilke, le poète, il a déjà publié plusieurs recueils de poésie et les Cahiers de Malte Laurid Brigge.

    Leur correspondance commence en 1920, Anita a assisté à une séance de lecture des poèmes de Rilke et elle lui écrit une première lettre pleine d’admiration.



    En jeune fille bien élevée elle s'inquiète de déranger le grand écrivain avec des lettres centrées sur elle-même.
    « Pourquoi je vous écris tout cela : je ne sais pas, c'est peut-être que j'obéis à une nécessité intérieure. »

     

    Le maître la rassure, l’apaise mais sans complaisance aucune, sans paroles anodines, parfois même frappant fort quand il lui écrit
    « Je ne saurai vous mettre suffisamment en garde contre la tentation de la rime, qui viole et aliène imperceptiblement ce qu'on pensait lui confier, et qui, en vérité, se perd en cours de route quand on tente une transformation poétique sans la maîtriser pleinement. Il n'est pas sans danger pour notre propre véracité de se réfugier dans une forme qui nous dénature, nous gâte et nous rabaisse un peu, là où l'on voudrait reconnaître notre image la plus chère ».


    Donc mademoiselle restez en à la prose !!!

    Le rythme des lettres étant très inégal Anita s’inquiète d’avoir conservé l’intérêt du poète car parfois plusieurs mois espacent les missives.

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    Comme le fut en son temps Franz Kappus des Lettres à un jeune poète, Anita Forrer est avide de conseils de lectures
    Comme il l’avait fait pour Kappus il lui propose les romans de Jacobsen qu’il apprécie beaucoup, mais il lui fait aussi découvrir Baudelaire et les Fleurs du mal, ce qui est plus osé dirait-on
    « Un livre indispensable qui doit nous accompagner tout au long de notre vie. »

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    Rilke prodigue aussi des mises en garde à une jeune fille peut être un peu trop confiante : « Je vois bien qu'il faudrait que je vous détourne de moi pour vous mener vers d'autres livres »

    Petit à petit Anita ose lui confier ses interrogations, ses peurs, ses goûts mais aussi ses relations amoureuses et familiales. Là Rilke devient le guide, le conseiller et il fait preuve d’une grande franchise et aussi d’une tolérance rare à cette époque, les penchants d’Anita en effet sont hors normes.
    Le poète la rassure « Nous ne savons pas ce qu'est le centre d'une relation amoureuse. »
    « Des êtres travaillent depuis longtemps déjà à dissiper les soupçons si laids qui pèsent sur les relations amoureuses au sein du même sexe. »

     

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    Rilke parfois ne peut s’empêcher de séduire « Ai-je répondu à toutes vos questions Anita ? - Il en reste une : est-ce que parfois, sans qu'une de vos lettres m'y invite, je pense à vous ? »
    Le plus souvent il reste l’ami bienveillant qui apporte le réconfort.
    Elle est sous le charme « Comme il doit être beau de parcourir la vie en vous ayant pour maître. »

    Rilke parfois lui aussi se confie en particulier sur les années de guerre
    « Les cinq bouleversantes années écoulées ont ouvert en moi d'abyssales interruptions ; une réflexion et une concentration laborieuses seront nécessaires afin de les surmonter et de poursuivre ces travaux intérieurs que j'avais – ah, et avec quelles espérances ! – entamés en 14. Je ressens encore dans toute ma nature la désespérance de la guerre. » 



     Il y eu quelques rencontres mais elles furent un peu ratées et Anita est déçue « Vous étiez l’unique point lumineux et directeur dans ma vie. Vous étiez pour moi comme le Bon Dieu » Pour autant elle reste sous son charme.

    Les échanges dureront 6 ans.Dans les années trente Anita Forrer sera la compagne d d’Annemarie Schwarzenbach et l’accompagnera dans ses voyages.

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    Annemarie Schwarzenbach

    La traduction, les notes, et la présentation rendent la lecture aisée,
    « En présentant cette correspondance, nous aimerions faire entendre la voix d'un Rilke arrivé dans sa pleine maturité d'homme et de poète – mais aussi donner la parole à une jeune femme qui, tiraillée entre la pesanteur de son carcan social et un élan irrépressible vers la création et vers la vie, pourra devenir, à sa manière, source d'inspiration pour les lectrices et lecteurs d'aujourd'hui. »

    Si comme moi vous avez une petite bibliothèque Rilkéenne, ce livre y prendra place.

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     Le livre : Lettres à une jeune poétesse - Rainer Maria Rilke - traduit par Jeanne Wagner et Alexandre Pateau - Éditions Bouquins

  • Bribes de chinois

    En souvenir de mes années d’apprentissage 

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    « Le chinois est trop éloigné de nos langues pour qu’un Européen puisse se l’approprier comme une langue européenne, par transbordement, pour ainsi dire, en passant avec armes et bagages d’un vaisseau à l’autre et en se livrant ensuite, pour s’y installer, aux adaptations nécessaires. »

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    « On m’a souvent demandé si le chinois est une langue difficile. J’ai toujours répondu qu’il est une langue d’une simplicité merveilleuse, mais qui présente trois difficultés : 1. cette simplicité même, quand elle est mal comprise ; 2. la prononciation, en particulier à cause des tons ; 3. l’écriture, qui exige un effort sans commune mesure avec nos écritures phonétiques. »

    Le livre : L’art d’enseigner le chinois - Jean François Billeter -  Editions Allia 

  • Une saison pour les ombres - R J Ellory

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    Je n’ai fait aucun billet de polar pendant longtemps et là coup sur coup toc deux qui m’ont plu alors que je deviens un peu difficile.

    Direction Jasperville dans le Nord-Est canadien « Le trou du cul du monde, mais gelé jusqu'à l'os » Voilà vous êtes dans l’ambiance.

    Un pays de glaces, de froid 8 mois sur 12, où les hommes picolent, les femmes triment mais où le sous-sol est riche en fer et fait la fortune de la compagnie minière Canada Iron.

     

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    En 1984, Jack Devereaux a fui cette région hostile et construit sa vie comme spécialiste des incendies à Montréal.
    Le destin le rattrape quelques vingt-six années plus tard.

    Averti par la police locale, il apprend que son frère Calvis, ce frère qu'il a lâchement abandonné à l'aube de ses douze ans en compagnie de Carine son premier et unique amour à qui il avait promis ….bref aujourd’hui Calvis  a été arrêté pour tentative de meurtre, donc direction Jasperville.

    C’est retour vers le passé, vers le pays aux hivers interminables, aux étés de baignades et de piqures de moustiques.

    Un lieu où le bonheur est un vain mot, un endroit où l’on souffre et meurt sans jamais laisser de traces, un cadre hostile limitant fortement l'espérance de vie.

    Une jeune fille avait été retrouvée morte déchiquetée. Puis une deuxième deux ans plus tard, puis une autre encore. Pas de police sur place donc pas d’enquête.
    Calvis est accusé de meurtre, il accuse sa victime d’être le serial killer qui sévit à Jasperville depuis plus de trente ans.

    C’est parti pour un polar où l’ambiance fait tout. Noire, glauque, violente, torturée, car dit l’auteur :
    « Les hommes se punissent tout seuls. Dieu n'est là que pour porter le chapeau. »

    Jack va mettre à profit son savoir-faire professionnel afin de découvrir qui a tué ces jeunes filles.

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    Superstitions

    Jack est un personnage double, fort et sûr de lui mais en même temps fragile et torturé, en quête de rédemption, JR Ellory le dit en quelques mots « On est tous brisés, quoique chacun à un endroit différent »

    Un excellent polar, tant pour les personnages tous pleins de fêlures, que pour le décor et pour l’enquête, lente certes mais très bien menée.

    On côtoie le mal vrai ou supposé (ours et loups ont bon dos) Jasperville devient un personnage du roman.

    J’avais beaucoup aimé Seul le silence mais aussi deux romans d’Ellory, ensuite je n’avaient pas été séduite, j’ai retrouvé ici l’auteur des débuts.

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    Le livre : Une saison pour les ombres - J.R. Ellory -  traduction Étienne Gomez - Éditions Sonatine