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A sauts et à gambades - Page 68

  • Bribes romantiques

    J’ai presque de l’humeur contre la nature qui semble prendre plaisir à nous faire perdre patience.

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    Les mélèzes, les bouleaux, deux pieds de lilas que nous avons au jardin, les rosiers et les haies d’aubépines portent à peine quelque verdure, tout le reste est sombre et dort presque comme en hiver, sauf quelques hêtres qui, plus printaniers que leurs frères commencent à se nuancer sur la masse noire de la plantation qui borde l’étang.

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    Il est doux de poursuivre une lecture passionnée jusques sous la chute du jour. Dans les lueurs du déclin, sous cette lumière où pénètrent déjà les ombres subtiles et le silence de la nuit, les lignes rêveuses parlent avec plus d’intimité; elles paraissent plus solitaires, plus recueillies, leurs pensées s’insinuent avec plus de charme et font mieux dans l’âme l’entrée furtive et muette des rêves.

     

    Le livre : Oeuvres  Maurice de Guérin  Editions Classiques Garnier 

  • Les Chasseurs dans la neige - Jean Yves Laurichesse

    Je connaissais Jean Yves Laurichesse mais pour des écrits différents, un essai sur Giono et sa participation au Dictionnaire Giono, un monument d’érudition
    Ici c’est un auteur bien différent, attentif, curieux, un auteur qui veut partager son admiration pour un peintre et surtout un tableau.

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    Les chasseurs dans la neige - Pieter Bruegel 

    Bruegel le peintre de la Flandre, l’héritier des livres d’heures qui a peint au temps d’Ulenspiegel et de la guerre des gueux. 

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    Quelle est la genèse d’un tableau ? La vue d’un paysage, une rencontre, une lecture, des couleurs ? 
    Jean Yves Laurichesse garde un souvenir très fort des Chasseurs dans la neige au point de vouloir à travers un roman nous faire partager son enthousiasme et son admiration.

    Je vous propose d’entrer dans le tableau et de rejoindre Bruegel qui cherche l’inspiration pour une commande que lui a fait un riche bourgeois d’Anvers sur le thème des saisons. 

     

    bruegel

    Le peintre

    Un village flamand en hiver c’est parfait.
    La terre qu’il peint ressemble à sa terre natale lui le peintre des villages et des paysans.Il croque des scènes villageoises et croise le chemin de Maeke, une jeune brodeuse. Le temps d’une danse à la fête du village, mais Maeke croise à nouveau le chemin du peintre et elle découvre ses dessins.

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     Les chasseurs descendent vers la vallée 

    Pour la jeune fille c’est une découverte, son village lui parait soudain riche de mille détails
    Son quotidien se transforme, son regard s’élargit, elle voit le paysage d’un oeil neuf. Un lien se crée. 
    « Jamais il n'avait eu cette impression de vivre dans un paysage comme dans une peinture et il savait en être redevable à Maecke. »

    Maecke assiste à la création de l’oeuvre, elle voit petit à petit apparaitre les détails, la vieille femme ployant sous ses fagots, l’enseigne de l’auberge qui ne tient pas bien, le feu allumer pour griller le cochon et les chasseurs qui rentrent à moitié bredouilles 
    Elle entrevoit le mystère de la création d’un tableau.

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    Détails

    Avec Maecke nous entrons nous aussi dans le village, est-ce que l’on entend le carillon de l’église étouffé par la neige, les aboiements des chiens, on a envie de glisser sur l’étang gelé puis de rejoindre l’abri d’une maison car l’hiver est rude.

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                         " Les arbres au tronc nu et l’étendue gelée des lacs où s’agite une foule menue "

     

    Le peintre se sent proche de ces villageois. 
    « C’est eux qu’il aime peindre, dans leurs travaux et leurs fêtes, pour donner gloire à leurs vies promises à l’oubli, comme recouvertes déjà du drap blanc de la neige » Plus tard il reviendra pour affiner ses croquis pour poursuivre son travail dans son atelier et faire une proposition à Maecke.

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    "Tout ce qui vit – arbres, animaux et hommes –

    est de couleur sombre et les ombres font défaut sous un soleil caché."

    Jean Yves Laurichesse a donné vie à Bruegel dans un texte plein de sobriété, de grâce, de beauté, de poésie sans une once d’esbrouffe, un texte à l’image du tableau.
    L’auteur a payé sa dette et peux enfin découvrir l’oeuvre de Bruegel au Kunsthistorisches Museum de Vienne pour un moment de contemplation.

     

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    Le Livre : Les chasseurs dans la neige - Jean Yves Laurichesse - Editions Ateliers Henry Dougier

     

  • bribes et flocons

    Quelques bribes floconneuses pour vous mettre dans l’ambiance de la prochaine chronique.

     

    « Voici venir l’hiver tueur des pauvres gens »  ça c’est Jean Richepin,  petit souvenir d’école.

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    « La neige choit, la neige tombe,
    Monotone, sur les maisons
    Et les granges et leurs cloisons ;
    La neige tombe et tombe »  

                     La Flandre d’Emile Verhaeren

     

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    La charette route d'gonfleur   Claude Monet

     

    « Regardez la neige qui danse
    Derrière le carreau fermé.
    Qui là-haut peut bien s'amuser
    A déchirer le ciel immense
    En petits morceaux de papier ? »

                                         Pernette Chaponnière poétesse genevoise

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  • Le Facteur Cheval ... jusqu'au bout du rêve - Nils Tavernier

    Quand on est lyonnaise comme moi, la visite du Palais idéal du Facteur Cheval est un incontournable.

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    Le tombeau

    Je me souviens encore de ma première fois, je devais avoir dix ans, le fameux palais était dans un état lamentable avec des zones interdites à la visite par peur d’accidents, malgré tout  on devinait un monde  extraordinaire et dans ma mémoire d’enfant c’est resté pour toujours.

    Dans le jargon local c’était la maison du fada jusqu’au jour où on l’a réalisé que cet homme avait fait une véritable oeuvre, d’une originalité exceptionnelle mais cela a pris du temps ….

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    Le palais autrefois

    Depuis une restauration a été entreprise et aujourd’hui on vient du monde entier visiter ce Palais que le fameux facteur à érigé pour le bonheur de sa fille Alice.

    Il n’était pas architecte, il n’avait aucune connaissance mais il avait un rêve et une capacité d’imagination et une obstination qui dépassent l’entendement.
    Cet homme a vécu une aventure artistique hors du commun lui qui toute sa vie parcouru les chemins et les routes de son village, plus de trente kilomètres chaque jour par tous les temps pour distribuer le courrier.
    « il parcourt ainsi les ravins, les coteaux, les endroits les plus arides, faisant ici et là des petits tas de pierres que, le soir, il retourne chercher. »

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    Il a l’imagination fertile cet homme, il aurait tant voulu aller à l’école. Il se console en admirant les cartes postales qu’il distribue, les magasines que reçoivent certains des administrés, les revues de voyages.

     Et il va poser la première pierre de son palais,  une cascade comme on en voit alors dans les jardins italiens.
    Pendant plus de trente ans il va bâtir son palais idéal pierre à pierre. Il ajoute des fontaines, des belvédères, des cadrans solaires,  il fait jaillir l’eau, puis naissent des animaux fantastiques.  Tout son temps et son argent y passent. Il réussira à la fin de sa vie à construire son tombeau !! 

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    Il faudra des décennies pour que soit reconnue cette oeuvre extraordinaire et féérique,  longtemps laissée à l’abandon, une restauration a été entreprise et aujourd’hui on vient du monde entier visiter ce Palais. En 2017 plus de 175 000 visiteurs sont venus découvrir le palais du « fada »

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    Nils Tavernier a été fortement touché par la vie de cet homme et si je ne doute pas que son film sera magnifique.
    Si vous allez voir le film ne vous privez pas malgré tout de cette biographie.

    Le site officiel 

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    Le livre : Le Facteur Cheval …Jusqu’au bout du rêve - Nils Tavernier - Editions Flammarion

     

  • Bribes de promenades

    Un visage rond d’enfant, comme divisé en son milieu par l’éclair, les joues teintées d’une légère rougeur, les yeux bleus, la moustache courte, d’un blond doré. Les tempes déjà grisonnantes. Le col cassé et la cravate de guingois.

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    Lorsqu’il aperçoit une auberge d’aspect engageant, une ferme cossue ou une église au clocher baroque en forme d’oignon, il tombe en arrêt et murmure : « Que c’est beau – que c’est charmant ! » Il est comme grisé par le paysage vallonné, par la paix solennelle du dimanche.

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    Le promeneur solitaire inspire à pleins poumons l’air limpide de l’hiver. 
    Et voilà que soudain, son cœur marque un temps d’arrêt.
    Le mort couché dans la neige, au pied de la pente, est un poète qu’enchantèrent l’hiver et la danse légère et joyeuse des flocons – un authentique poète qui nourrit en son cœur d’enfant la nostalgie d’un monde de silence, de pureté et d’amour : Robert Walser.

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    Le livre : Promenades avec Robert Walser - Karl Seelig - Editions Rivages

  • Morts imaginaires - Michel Schneider

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    Finita la comédia 

    Ecrire, raconter, imaginer parfois les morts d’écrivains célèbres, de poètes maudits ou non. Que se passe-t-il lorsque le rideau tombe ?

    Ce sont les morts dont Michel Schneider nous fait le récit sous un angle particulier, un point de vue bien à lui.
    C’est la réalité et en grande partie la vérité mais l’auteur nous les développe de façon très  personnelle.

    C’est un livre surprenant, que je lis pour la seconde fois pour vous en parler et je l’ai fait sans une once d’ennui, avec le même grand plaisir qu'à la première lecture de retrouver ces moments de vie ou plutôt de mort où  poésie et  réflexion s’invitent.

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    Le cimetière du Père Lachaise

    « Je tiens ici le registre des morts imaginaires d'écrivains réels. J'ouvre le rideau au moment où La commedia è finita »

    Certains ont eu une mort douce, d’autres tragique, certaines sont un rien ridicules.

    Michel Schneider nous offre ainsi les heures dernières de trente-six écrivains, mais la cérémonie n’est pas macabre du tout.
    Il utilise les biographies, les correspondances, les bons mots de la fin restés célèbres de ces hommes et femmes à qui il offre ainsi un beau monument funéraire.

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    le combat du jour et de la nuit

    Certains derniers moments sont très révélateurs, d’autres totalement incompréhensibles, certains sont choquants d’autres risibles. Parfois l’on prend une leçon de courage et de dignité.

    Je vous propose d’aller vous recueillir sur quelques tombes célèbres et de répondre à l’invitation de Michel Schneider, après avoir déposé vos fleurs il sera tant d’ouvrir les oeuvres.

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    Nabokov en chasseur

    Prenez Nabokov pense-t-il à  sa Russie natale ? Pas le moins du monde, Nabokov dit « un certain papillon est déjà en vol » joli dernier rêve non ?

    Montaigne qui souhaite mourir à cheval mais qui s’éteint parmi les siens lui qui disait avoir « continuellement la mort en bouche »

    Tchékhov qui « était un médecin. Il savait un peu ce qu’était la mort » et réclame un peu de champagne. 

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    Lev Nicolaïevitch Tolstoï en gare d’Astaopovo, fuyant sa femme, sa maison « fuir…fuir »

    Robert Walser à la mort « malicieusement tragique » qui trouve la mort en promenade « D’un pas frêle mais assuré, il est parti sur la page du jour. »

    Vous trouverez aussi Pascal, la belle marquise de Sévigné, Goethe ou Pouchkine, Kant et Flaubert, Rilke ou Zweig.

    Un livre à ranger à côté de celui de Cees Nooteboom 

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    Le livre : Les morts imaginaires - Michel Schneider - Editions Grasset et Folio