Souvent certains d’entre vous m’interroge : comment fais-tu pour choisir un livre ? Un brin de réponse ici.
Un livre que je n’ai pas choisi
c'est un cadeau d’anniversaire
Offert par quelqu’un qui connaît bien mes goûts
Un livre placé sous la tutelle bienveillante de Clément Rosset un philosophe que j’aime particulièrement.
Un livre de Claire Marin avec qui j’ai fait connaissance sur le thème de la douleur.
Et bien bonne nouvelle c’est tout à fait réussi, j’ai aimé, vraiment beaucoup aimé, même si la lecture m’a demandé un effort certain.
Vous l’avez compris c’est un essai philosophique qui pourrait s’intituler : Y a-t-il un début à tout ?
On y parle de débuts de romans, comme celui si célèbre d’Italo Calvino « Si par une nuit d’hiver un voyageur » car en matière de roman « On espère du début d'un roman et peut-être de n'importe quelle histoire, fictive ou non, une véritable surprise, un étonnement franc. »
Mais très vite l’auteure nous embarque car les débuts ne sont pas seulement ceux de la lecture ou de l’enfance.
Les débuts cela peut être la naissance mais aussi l’adolescence, le début d’un roman, le début d’un emploi.
Elle affirme une certitude celle qui dit : « Il faut vivre chaque jour comme un début » ou pour le dire comme Emerson que cite Claire Marin « toujours vivre dans un jour neuf »
Elle nous dit que les débuts c’est un peu comme les premiers pas de l’enfant, incertains, hésitants mais conquérants.
Ces liens ainsi créés nous emportent car la finesse et l’intelligence de sa réflexion nous font sortir de la routine, nous donne l’impression d’être beaucoup plus fûté qu’en réalité.
Ce qui rend la lecture passionnant mais exigeante c’est que Claire Marin fait la cour aux philosophes et romanciers, sans ordre préétabli cela va de Montaigne à Jankélévitch, de Pessoa à Romain Gary et Annie Ernaux, mais aussi vers Sofia Coppola.
Elle dévide sa pelote patiemment.
Elle donne la parole à Bergson et Bachelard, « ces moments où la force d'un sentiment, d'une sensation physique, l'effet d'une parole ou d'une image font vriller mon esprit, renversent ma représentation du monde ». Et toc j’ai aussitôt commandé Intuition de l’instant que je n’ai jamais lu.
Si l’on verse vers la littérature elle nous dit que c’est le « le réservoir de l'inouï » celui dont surgissent les émotions.
La notion de début n’est pas une question d’âge, c’est plutôt « Découvrir ce dont on est capable seul, à 18, 40 ou 75 ans. » Je vous avoue que ces petites phrases font un bien fou.
Ou celle-ci que j’aime beaucoup aussi « chaque amour à n'importe quel âge de la vie peut prétendre à être le premier »
Une étincelle une possibilité et une nouveauté qui nous bouleverse qui parfois fait chavirer notre vie.
C’est une sorte de cadeau pour casser le ronronnement, pour faire rupture dans le quotidien.
« Le début, c’est quand le réel nous égratigne, nous provoque, nous bouscule. »
Parfois un début est une « radicale nouveauté » mais parfois il est difficile de repérer ce moment parfois éphémère, il n’y a pas toujours un avant et un après.
Un début peut être aussi un recommencement car celui-ci peut être réjouissant, vivifiant, c’est une quête du renouveau
« Ainsi, des histoires commencent comme si c’était la première fois. Avec une intensité telle que les fois précédentes pâlissent s’effacent devant tant de splendeur. La première fois balaye le passé et toutes les autres premières fois. Alors quel que soit mon âge, je peux aimer comme si je n’avais jamais aimé auparavant, porté par une ardeur adolescente. »
De quoi nous souvenons nous en pensant à nos débuts ? d’un coup de foudre, de la naissance d’une étincelle ? ou d’une annonce difficile : une rupture, un départ, un diagnostic.
Les débuts détiennent une force explosive qui “brise ou détourne le cours des choses”.
Dans un interview Claire Marin dit « Il ne faut pas réduire les débuts et les commencements à une chronologie linéaire de l’existence. Il y a de grands commencements qui peuvent survenir plus tard dans la vie, de vrais débuts tardifs et des recommencements totalement inattendus. »
Je ne vous cache pas que par moment il faut s’accrocher un peu, Claire Marin n’offre pas une démonstration, il y a les débuts évidents mais aussi ceux que l’on n’attend pas et qui sont un rien mystérieux.
L’écriture est simple, fluide mais dense. Les chapitres sont courts
Claire Marin nous invite à une réflexion légère et savante, riche et pleine de joie, je suis certaine que même s’il n’est pas cité Spinoza n’est pas loin.
Le livre : Les Débuts, par où recommencer ? – Claire Marin – Éditions Autrement