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Littérature américaine - Page 9

  • Les Européens - Henry James

    Quatre mariages et un enterrement

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    Plus encore que Roderick Hudson voilà une façon simple et légère d’entrer dans le monde de Henry James..
    James a trente-cinq ans lorsqu’il écrit Les Européens. De ce roman va naitre sa renommée, même si la réception fut plus positive en Angleterre qu’aux Etats-Unis.

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    Une atmosphère bucolique

    Félix et Eugenia viennent d’arriver à Boston. Ils sont frère et soeur, américains mais ont toujours vécu en Europe. 

    On pressent que la visite qu’ils font à leurs cousins d’Amérique est un rien entachée d’intentions intéressées dues à une situation très précaire.

    Félix est un beau jeune homme à l’heureux caractère et sans occupation aucune, Eugénia quant à elle a contracté un mariage avec un prince allemand, mariage proche de sa dissolution. 

    Leurs cousins américains les Wentworth sont une famille austère mais pleine de générosité qui les accueille avec quelques réserves surtout Mr Wenworth, homme froid avec une maison à son image

    «  pas de splendeurs, pas de dorures, pas de régiment de domestiques. »

    Ses deux filles elles sont un peu éblouies par ces cousins si exotiques, Gertrude, sur laquelle Félix jette très vite son dévolu, est promise au pasteur Brand. Elle est celle qui est le plus attirée par ces nouveaux venus

    « Elle n’avait rien connu d’aussi délicieux depuis la lecture de Nicholas Nickleby »

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    L'archétype de la jeune américaine

    Robert Acton cousin et ami de la famille se laisse lui aussi prendre dans les filets de ces européens, seule résiste sa soeur Lizzie archétype de la jeune fille américaine, hardie et innocente à la fois, si on veut lui trouver une parenté il faut la chercher chez Edith Wharton et le personnage de May Welland dans le Temps de l’innocence.

    Mona Ozouf dit que ce roman est une « palette de couleurs tendres » c’est vrai mais le ton est constamment ironique. Satire légère et pleine d’humour qui entérine l’opposition entre Nouveau et Ancien monde, entre un monde puritain et bien pensant et celui du plaisir des sens et de l’esprit.

    L’ atmosphère du roman est crée par petites touches « le décor bucolique, la campagne environnante » les sentences religieuses accrochées ici et là, les fiacres collectifs qui surprennent nos européens.
    Les Wentworth représentent une société prude et moralisatrice, chez eux

    « pas de splendeurs, pas de dorures, pas de régiment de domestiques »

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    L'adaptation de James Ivory

    Le décor d’une maison, les parures féminines relèvent pour eux du mensonge, des apparences et donc du péché. 
    Plusieurs scènes mettent en opposition la froideur et la rigueur morale à l’insouciance et la frivolité européennes, le roman est une passerelle jetée entre ces deux mondes que tout oppose.
    Félix est jovial, léger, un rien inconséquent
         « Je n’ai jamais étudié; je n’ai pas de formation. Je fais un peu de   tout, mais rien de bien . je ne suis qu’un amateur » 

    Les scènes sont parfois cocasses, les comparaisons très ironiques, Eugenia a une conversation que le pasteur n’hésite pas à rapprocher de Mme de Staël et de Mme de Récamier et dans sa bouche c’est loin d'être d’un compliment. 

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    Lee Remick en Eugenia


    C’est un roman délicieux mais ne nous y trompons pas le James plus noir, plus caustique n’est jamais loin. Ne dit-il pas d’Eugenia. 
          « Rien de ce que disait la baronne n’était tout à fait faux. Mais peut-   être convient-il d’ajouter en toute justice que rien de ce qu’elle disait n’était tout à fait vrai »
    Quant à Gertrude voilà comment elle voit sa famille et son entourage.

    «  Il doit y avoir mille façons d’être lugubre et parfois je me dis que nous les utilisons toutes »

    Donc palette tendre mais ce sera la dernière fois dans l'oeuvre de James qu'un roman se termine par des mariages.

     

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    Le livre : Les Européens dans Portrait de femme et autres récits - Henry James - Traduit par - Gallimard Pléiade

  • Si je reste - Gayle Forman

    J’ai lu Si je reste de Gayle Forman 

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     Voilà l’histoire :

    Mia est une jeune fille de 17 ans, elle joue du violoncelle, elle a un petit ami rock star, des parents excentriques et un  super petit frère. Elle à la vie devant elle. 

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    Quand tout s'arrête à cause d’un simple accident de voiture qui bouleverse sa vie. Après l’accident elle vit comme détachée d'elle même, elle flotte, elle contemple son corps, entend tout  ce qui se passe.

    Transportée à l'hôpital elle voit ses proches la supplier de rester, Adam va tout tenter pour qu’elle ne parte pas, elle revoit sa vie d'avant, elle imagine son avenir si elle sort du coma, si elle reste chez les vivants.

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    L'actrice du film : Chloé Grace Moretz

    Mon avis : Un des rare livres qui m'a fait autant pleuré. Le choix que doit faire Mia rester ou partir pour toujours.

    Un livre magnifique très bien adapté au cinéma et je conseille fortement les 2, un livre selon moi à la portée des ados comme des adultes et en plus c’est en livre de poche !!

     

     

     

     

  • Dans la forêt - Jean Hegland

    Elles sont deux, elles sont soeurs, Nell et Eva dix-sept et dix-huit ans. Elles ne sont pas tout à fait comme les autres, elles ne sont jamais allées à l’école, éduquées par un père un brin iconoclaste et une mère artiste. Elles vivent loin de tout, au bout du bout de la route dans les forêts au nord de la Californie.

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    Pas d’école mais des livres pour l’une et la danse pour l’autre. Aujourd’hui elles sont prêtes à entrer à Harvard et à intégrer le corps de ballet de San Francisco.

    Oui mais voilà rêves et ambition vont en prendre un sacré coup. Autour d’elles le monde se délite : terrorisme, crise économique sans précédent, effondrement des infrastructures, des guerres lointaines mais qui ont un retentissement sur la société entière. d’abord l’électricité est coupée certains jours, puis totalement,  plus de téléphone, plus d’approvisionnement, tout s’arrête....

    Ces changements les deux soeurs et leur père ne les voient pas arriver car la mère malade vient de mourir. Le chagrin prend le pas sur la désolation du pays. Quand le père est victime d’un accident mortel Nell et Eva vont devoir faire face seules. C’est à travers le journal de Nell que nous les découvrons.

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    Pas d’inquiétude, je n’ai trahi aucun secret tout cela on l’apprend dans les trois premières pages. 

    Je le dis tout net je n’aime pas les romans apocalyptiques, j’ai détesté La Route, oui oui je sais vous avez tous et toutes adoré ce roman mais moi je n’ai pas marché. J’ai lu sans déplaisir Vongozero mais sans vraie passion. Alors pourquoi ici me suis-je laissée prendre ? 

    Et bien pour l’écriture (la traduction est parfaite) et la construction du roman. Par touches fines et retours en arrière particulièrement bien menés, on découvre la vie de cette famille, les liens qui les unissaient, la passion de Nell pour le savoir, l’éblouissement d’Eva pour la danse.

    Tout l’art de Jean Hegland est d’instiller doucement le doute, les petites ratées, les changements imperceptibles, bref tout ce que la famille ne voit pas et qui va modifier leur vie de façon brutale et sans retour possible.

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    L'auteur

    C’est magnifiquement évoqué. Une vie pleine et belle, un avenir radieux qui s'annoncent et brusquement l'obligation de vivre autrement, de compter l'une sur l'autre et sur la nature pour survivre.

    C’est un roman très poétique, lyrique, poignant par moment. J’ai aimé ces deux personnages, leurs rêves, leur volonté à survivre. La forêt qui les entoure est un personnage du roman et Jean Hegland en parle magnifiquement. Une belle rentrée pour moi.

     

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    Le livre : Dans la forêt - Jean Hegland - Traduit par Josette Chicheportiche - Editions Gallmeister 2017

  • Flannery O'Connor Dieu et les gallinacés

    Voyage dans le vieux sud

     

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    © Ivre de livres

     

    Après la lecture de Ce sont les violents qui l’emportent j’avais envie de lire une biographie de l'auteur. 

    Cécilia Dutter retrace la vie de cette dame du sud dont les romans ne furent pas accueillis avec enthousiasme mais qui aujourd’hui est reconnue comme une grande romancière américaine.

    o'connor

    C’est une biographie très admirative que livre Cécilia Dutter, elle n’hésite pas au long du livre à faire le parallèle avec sa vie, ses propres émotions. Ce n’est pas gênant cela donne une teinte intimiste qui m’a plu. C’est son père qui lui offrit les nouvelles de Flannery O’Connor Les braves gens ne courent pas les rues, qu’elle considère comme un cadeau littéraire.

    o'connor

    Ce qui fait le centre de la vie de Flannery c’est l’écriture mais aussi hélas la maladie

    C’est une femme à nulle autre pareille, catholique en pays protestant, écrivain femme dans une région où les hommes font la loi, profondément croyante mais n’hésitant pas à rendre grotesques les dévots, défenseur des noirs au pays de la ségrégation. 

    Pas étonnant dans ces conditions que ses romans peinèrent à rencontrer leur public. 

    Comme beaucoup d’écrivains américains elle passa par les ateliers d’écriture mais très vite sut s’en démarquer pour dessiner le monde rural qui l’entourait, les personnages parfois burlesques parfois pathétiques qu’elle côtoyait. Quand elle découvre Faulkner elle se reconnait en lui et va lui emboiter le pas.

    o'connor

    Flannery O’Connor est une battante, il lui fallut lutter non seulement contre les préjugés mais aussi et surtout contre la maladie. A l’époque le lupus érythémateux était synonyme de mort, elle en reconnut les premiers signes à 26 ans et en mourut jeune à 39 ans.

    Elle aimait rire et se moquer, elle aimait la parodie. Il lui fallait supporter de vivre auprès de sa mère dont elle était physiquement dépendante dans la vie quotidienne.

     

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    Andalusia Farm à Milledgeville

    Elle sut transformer cet sorte d’enfermement à Milledgville, petite ville de Georgie, « infime point sur la carte »  en un lieu privilégié d’observation, grâce à un oeil perçant et un humour caustique.

    Ecrivain sans complaisance, ce que montrent ses nouvelles et ses romans, elle aimait la vie et le faisait savoir.

    Sa passion pour les paons est célèbre et exaspérait sa mère. Ils pullulent et saccagent le jardin mais elle admirait « l’inutile et indifférente beauté » des volatiles.

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    l’inutile et indifférente beauté

    Le combat pour l’écriture est parfaitement rendu par Cécilia Dutter ainsi que la foi profonde de Flannery

    « Son œuvre est un pied-de-nez au prêt-à-penser consensuel. Elle nous bouscule, nous secoue, torpille nos préjugés et nos pauvres évidences pour nous révéler l’envers du décor »

    J’ai aimé découvrir le personnage et je poursuis la lecture de son oeuvre, un univers singulier et attachant.

     

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    Le livre : Flannery O’Connor Dieu et les gallinacés  Cécilia Dutter - Editions du Cerf

  • Thomas H Cook n'est pas un auteur de polars

    J’ai très peu lu de polars cet été exceptés ces deux romans qui ne sont pas pour moi à ranger dans cette catégorie malgré l’obstination de l’éditeur à les classer ainsi.

    Ma première découverte de Thomas H Cook remonte aux débuts de ce blog avec un roman qui se déroule au temps de la lutte pour les droits civils aux USA.Un excellent récit qui pointe bien le rôle très trouble que la police jouait alors.

    Depuis j’avais abandonné cet auteur mais grâce à Christian je m’y suis intéressée de nouveau.

    Attention un petit bémol, ne lisez pas ces deux romans à la suite car les modalités du récit qui font la particularité de l’auteur se retrouve d’un livre à l’autre, cela ne m’a pas gênée, j’ai même été heureuse de retrouver son style, sa manière de raconter mais mieux vaut étaler un peu la lecture.

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    La Nouvelle Angleterre telle que je l'imagine

     

    Pour les deux romans Thomas H Cook fait parler un protagoniste, on connait dès le début la victime et même peut être le coupable

    Alors me direz-vous comment l’auteur parvient-il à tenir son lecteur en haleine ? Par un art très subtil de la narration, ses retours en arrière ne sont pas de simples flash back mais s’inscrivent totalement dans le récit au point de nous faire oublier si nous sommes aujourd’hui ou hier.

    Il distille savament les informations sur les différents protagonistes, ceux qui touchent de près la victime ou le narrateur, ceux dont on a envie immédiatement de se méfier, ceux qui éveillent la sympathie ou la colère.

     

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    l'Alabama des années soixante

    Thomas H Cook sait aussi avec art faire le tableau d’une société, une petite ville d’Alabama ou de Nouvelle Angleterre.

    Tous les personnages sont passés au crible, les boutiques et les lieux chauds, le lycée qui est sur le devant de la scène dans les deux cas.

    Le lecteur se laisse prendre par la main pour creuser le secret qu’il devine, attendant à tout moment à voir s’écrouler ses certitudes. 

    Il est toujours question avec Thomas H Cook de personnages en marge, de ceux qui viennent rompre le prêt à penser que ce soit sur l’amour, sur les droits des noirs, sur les rapports parents enfants.

    Son habileté est époustouflante et une fois entamé il n’est pas question de poser le livre. 
    Je vous invite à découvrir la vie provinciale qui peut avoir des accents bien noirs.  

     

    Je vous sens frustrer alors j’ajoute quelques détails :

    Dans l’un l’arrivée d’un nouveau professeur Mrs Channing va faire basculer la communauté de la petite ville de Chatham en Nouvelle Angleterre, dans l’autre c’est Kelli jeune fille brillante et prometteuse qui va agiter la ville de Choctaw en Alabama, deux femmes qui se refusent à suivre les chemins tracés. Les deux romans se déroulent dans les années soixante.

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    Les Livres : 

    Sur les hauteurs du mont Crève-coeur  Thomas H Cook - Traduit par P Loubat-Delranc - Editions du seuil

    Au lieu-dit Noir étang - Thomas H Cook - Editions Point seuil

  • Roderick Hudson - Henry James

     Les débuts d'un maître

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    Roderick Hudson est le premier roman très abouti d’Henry James. Il reçut un accueil très positif aussi bien au Etats Unis qu’en Angleterre.

    Roderick est sculpteur, c'est un jeune artiste au talent prometteur. Il est remarqué par Rowland Malet qui va jouer auprès de lui le rôle de mécène et de mentor, il lui propose de l’accompagner en Europe, de découvrir avec lui les grands musées, les artistes les plus brillants et de donner ainsi une chance à son talent de s’épanouir.

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    Henry James et Hendrick Andersen sculpteur 

    Très vite les deux hommes deviennent amis, Rowland lui ouvre toutes les portes possibles, ils sont introduits dans une société brillante mais où l’argent ou plutôt le manque d’argent tient une grande place. 

    La belle aventure va tourner court lorsque Roderick Hudson rencontre Christina Light. La beauté incarnée mais hélas aussi le caractère le plus imprévisible qui soit. Sous la pression de sa mère elle est en Italie à la recherche d’un riche parti. 

    Roderick tombe sous son charme très sulfureux, terminé la sculpture, le jeune homme se laisse porter par un caractère volage et fantasque que Rowland n’avait pas décelé. Il fait fi des préjugés et se rend à Baden Baden où le jeu va compliquer la situation. 

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    L’idylle prend un tour dangereux, Roderick  échappe à son Prométhé et pousse Rowland à appeler à la rescousse Mrs Hudson mère qui redoutait les tentations du voyage et Mary Garland qu’il a rencontré aux Etats-Unis et qui apprend-t-il est fiancée à Roderick. 

    Rowland espère que la venue des deux femmes va remettre Roderick au travail, mais les liens entre Roderick et Christina sont semble-t-il trop violents.

    Comme toujours avec Henry James on entre dans le secret des ressorts humains sans pour autant leur trouver une explication ou une justification.

    J’ai aimé le personnage de Rowland, il est un rien ambigu évidement mais son côté mécène est tout à fait sincère, cela  procure un but à sa vie oisive. 

    Là où James est le meilleur c’est dans la description des rapports tortueux qui unissent Roderick et Christina, mais aussi dans l’évolution de ceux entre Roderick et Mary Garland. L’amour non partagé, le dévouement absolu, l’égoïsme poussé à son comble.

    Roderick et Rowland sont d’abord deux amis, puis deux frères complices pour finir par se trouver en opposition, beaucoup de critiques y ont vu une teinte d’homosexualité. J'y ai plus vu le reflet de la compétition permanente avec son frère Williams mais ce n'est que mon impression. 

    Le second thème du roman est bien sûr la création artistique, ses méandres, ses aléas, l’intrusion du mécène et le rôle parfois ambigu qu’il tient. La différence de traitement que James accorde à l’artiste plein de talent mais qui refuse toute discipline, tout effort, et celui qu’il accorde à un peintre d’aquarelles qui, lui, progresse par un travail acharné, un jugement tout à fait dans la morale du temps.

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    Rome apparait comme une ville magnifique mais ô combien dangereuse. Contrairement à d’autres romans où la nature est assez absente, il y a dans ce roman quelques belles descriptions de paysages et c’est d’ailleurs à travers elles que Henry James fait monter la tension dramatique de l’histoire.

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    Il semble que le roman doive beaucoup à la lecture de Balzac qu' Henry James admirait énormément,  vrai que l’on trouve la trace des Illusions perdues et de l’expérience de Lucien de Rubempré.

     

    David Lodge fervent admirateur de James dit que « La lecture de Henry James requiert patience et maturité. Suivre le flux de conscience des personnages les plus instables grâce à toutes les nuances de la plus somptueuse des proses, nécessite de tourner lentement les pages de son livre. »

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    Le livre : Roderick Hudson dans Un portrait de femme et autres romans - Henry James - Traductions de Anne Battesti - Gallimard Pléiade 2016.