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Littérature américaine - Page 13

  • Journal de l'année du désastre - Kressmann Taylor

    Mon dernier rattrapage au un parfum d'Italie

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    Un dernier rattrapage, celui-là appartient au genre  jamais traduit.
    Dieu sait que l’auteur est aujourd’hui célèbre après la publication de Inconnu à cette adresse, mais saviez-vous que Kressman Taylor a vécu à Florence et qu’elle y était présente la première semaine de novembre 1966, l’année du désastre ?

    Selon votre âge c’est un événement dont vous avez vaguement entendu parlé ou alors comme moi, vous gardez un souvenir précis des images de Florence sous les eaux dans la presse et à la télévision.
    En novembre 1966 l’Arno sortit de son lit et plus encore ! Florence fut submergée en quelques heures, des habitants perdirent la vie, bon nombre de florentins perdirent tout leurs biens, musées, églises, palais, bibliothèques, tout se retrouva sous les eaux.
    C’est cet épisode que retrace le livre de K Taylor. Elle le fait avec un luxe de précisions que lui permet sa situation privilégiée, hôte de la pensione Consigli et elle a une chambre avec vue sur l’Arno.

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    Le 3 novembre au soir rien ne laisse présager du désastre imminent
    « Six heures du soir à Florence. Une foule d’imperméables regagne ses pénates par les ruelles étroites du centre ville. »
    Mais le lendemain matin la chanson a changé de registre :
    « Ma première vision est un ciel noir de suie et toujours ces trombes d’eau. L’instant d’après je contemple la rivière bouche bée »
    Et oui l’Arno est devenu un fleuve furieux, un torrent qui crache des flots de boue, de déchets, de mazout, d’objets
    « Un fauteuil voguant paisiblement, calme et droit  » et le flot s’accentue toujours plus au cours des heures «  Dans un enchevêtrement de branches vertes passe une vache rouge et blanc »
    C’est l’horreur pour cette ville qui est un joyau, la ville « la plus rare, la plus intime »  l’eau déferle à 60 km/heure , les habitants sauvent ce qu’ils peuvent, à la pensione Consigli tout le monde monte d’un étage et K Taylor s’endort écoutant « dans un demi-sommeil le grondement de l’Arno »

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    Le lendemain c’est un sentiment de désolation qui l’emporte, les ponts endommagés ou emportés, les boutiques dévastées « Le coeur de la belle Florence n’est plus qu’une morne décharge. »
    K Taylor, amoureuse de l’Italie, de Florence va faire le récit des jours suivants, ceux du bilan terrible pour la ville et toute la région, des jours où la ville est coupée du monde, ceux ou les florentins vont devoir avec dignité et courage, faire face au désastre :  6 000 familles sans abri, 6 000 boutiques balayées, 1 300 oeuvres abîmées ou perdues.
    Elle va assister à des scènes de désespoir mais aussi de solidarité, voir la vie reprendre le dessus envers et contre tout.

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    Paru quelques mois après l’inondation en anglais, c’est une excellent chose que les éditions autrement choisissent de traduire et éditer ce livre car le récit est très vivant, toujours plein d’empathie pour la population et son courage extraordinaire. Les anecdotes sont parfois drôles, parfois émouvantes et l’on est aux premières loges. Amoureux de l’Italie ajoutez ce livre à votre bibliothèque.

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    Le livre : Journal de l’année du désastre -Kathrine Kressmann Taylor - Traduit par Olivier Philipponnat- Editions Autrement 2012

  • La Grande course de Flanagan - Tom McNab

    Session de rattrapage : A vos marques .....

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    Dans les années vingt la crise économique jeta sur les routes des milliers de personnes, route de l’émigration pour certains, route de la misère pour d’autres. 

    Certains pour survivre choisir de courir, courir pendant 3000 miles !!! de Los Angeles à New-York. Ils furent 2000 à se précipiter sur la ligne départ. Cette course appelée le Bunion Derby eu lieu en 1928. 

    Tom McNab la rebaptisa la Trans-América et en fit un roman passionnant, publié en France en 1982, introuvable depuis longtemps,  mais miracle des rééditions il est de nouveau disponible, alors je vous offre une session de rattrapage.

     

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    Courir pour survivre © Walt Disney pictures 

     

    Le 21 mars 1931 Douglas Fairbanks posa donc son arc et ses flèches de Robin des bois et donna le départ de la course. Les coureurs allaient devoir courir 80 km par jour et ça pendant 3 mois. 

    Charles C Flanagan a tout prévu, les étapes sponsorisées, un règlement draconien : Chaque étape doit se faire dans un temps maximum, interdit d’aider un concurrent en le portant par exemple, mais chaque étape donne lieu à des primes (on se coirait sur le Tour de France). Des tentes sont montées pour abriter les coureurs à l’étape, et Flanagan fournit même des chaperons pour les dames engagées dans la course.

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                                 Le Bunion Derby en 1928

     

    Il est temps de faire connaissance avec quelques coureurs :

    Doc Cole, marathonien averti, le seul professionnel de la course à pieds, le chéri du public qui le connaît bien, un écossais Hugh McPhail, un coureur aussi mais de sprint et cette Tans-América ne ressemble pas aux courses dont il a l’habitude, Mike Morgan plus habitué à faire le coup de poing comme gréviste et à combattre à mains nues pour gagner sa vie.

    Il nous fallait un anglais c’est Peter Turleigh un tout petit peu snob il est suivi par son valet, Juan Martinez lui court pour faire vivre son village là-bas au Mexique et enfin la reine de la course Kate Shéridan qui s’est alignée car elle était persuadée que ça ne pouvait pas être plus dur que de danser 3 fois par jour dans un club de danse. Il y a même une équipe allemande composée de petits jeunes qui se font appeler Jeunesses Hitlériennes.

     

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    Courir dans le désert

     

    Voilà le départ a été donné et McNab nous convie à être des supporters attentifs, des soigneurs zélés car il va falloir traverser le désert Mojave, franchir les Rocheuses , passer des fleuves en crue. Mais ce n’est pas tout car des péripéties multiples attendent les coureurs au long du parcours : mineurs en grève qui refusent le passage, sabotage de la

    mafia. 

     

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    Faire face à une grève

    Alors des liens se créent entre les coureurs, des équipes se constituent. 

    Pour gagné ce pari fou il ne suffit pas de faire preuve de courage, d’endurance, de se dépasser, il faut aussi accepter de l’aide, faire preuve de solidarité et surtout écouter les conseils bienveillants de Doc Cole le vétéran, avoir la hargne de gagner de Mike Morgan le syndicaliste et la capacité à prendre des coups d’Hugh l’écossais.

     

    Je vous avertis McNab est redoutable dans l’art du récit, ses personnages sont superbes, bien campés, il en fait des héros inoubliables. Il parsème le récit de temps forts et parfois très drôles : les jeux highlandais ou le relais hommes contre cheval sont des très bons moments du roman.

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                                         Franchir les Rocheuses

     

    Tout était bon pour survivre, aux Etats-Unis c’était le temps des marathons de la danse, Horace McCoy en a fait un livre fort et Sidney Pollack le transforma en un magnifique film. C’était le temps des luttes pour la dignité incarnées dans Les Raisins de la colère. 

    La Grande course de Flanagan c’est la version optimiste des Raisins de la colère, le versant heureux d’ On achève bien les chevaux , n’hésitez pas faites lui une place dans votre sac des vacances.

     

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    Un billet sur le chef d'oeuvre d'Horace McCoy chez In Cold Blog

     

    Le livre : La grande course de Flanagan - Tom McNab - Editions Autrement 2012

  • Le Problème Spinoza - Irvin Yalom

    Penser  Philosopher Croire 

              Les deux faces de la médaille

     

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    Irvin Yalom vous le connaissez si vous lisez ce blog depuis plusieurs mois, je l’avais déjà suivi dans  les jardins d’Epicure et j’avais beaucoup aimé la balade.

    Son nouveau roman est dédié à Spinoza, un génie s’il en fut et ça tombe vraiment bien car il est sans doute le philosophe à qui je porte la plus grande admiration. Mais Irvin Yalom ne se contente pas d’un roman biographique car son texte a deux versants et le second est dédié à la vie d’un des hommes les plus terribles du siècle : Alfred Rosenberg  qui fut à l’origine de l’idéologie nazie prônant la supériorité de la race aryenne et l’antisémitisme et qui un jour eut à faire avec Spinoza et plus spécialement sa bibliothèque.

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             Le sceau et la devise de Spinoza

     

    Une face lumineuse et une face obscure.

    La face lumineuse d’abord : Irvin Yalom  nous propulse dans l’Amsterdam du XVII ème siècle dans les boutiques qui jouxtent la Synagogue. Il nous fait faire la connaissance de Bento Spinoza (ou Baruch ou Benedictus) et nous le montre étudiant déjà érudit, promis aux plus hautes fonctions, mais ... il y a un mais de taille, Spinoza est à quelques jours de son excommunicationou Herem, par les rabbins de la Synagogue d’Amsterdam. 

     

    Le Herem prononcé le 27 juillet 1956 est infamant et définitif : 

    « Nous excluons, chassons, maudissons et exécrons Baruch de Spinoza »

    Il est non seulement exclu mais les rabbins attirent sur lui les foudres divines 

    « Qu'il soit maudit pendant son sommeil et pendant qu'il veille. Qu'il soit maudit à son entrée et qu'il soit maudit à sa sortie. Veuille l'Éternel ne jamais lui pardonner. Veuille l'Éternel  allumer contre cet homme toute Sa colère et déverser sur lui tous les maux mentionnés dans le livre de la Loi : que son nom soit effacé dans ce monde  »

    Et pour la mise au ban soit totale : 

    « Qu'il ne lui soit rendu aucun service et que personne ne l'approche à moins de quatre coudées. Que personne ne demeure sous le même toit que lui et que personne ne lise aucun de ses écrits. »

     

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    Baruch Spinoza a bien des tords, il a ouvertement mis en cause le contenu de la Torah, son origine divine, il s’interroge : avec qui les enfants d’Adam et Eve se sont-ils mariés ? Comment Moïse pouvait-il écrire sur sa propre mort ? La Torah ne serait-elle pas un conte à dormir debout et la vérité de Dieu ne serait-elle pas ailleurs ?

    La face obscure est celle d’Alfred Rosenberg, étudiant qui vers 1910 se passionne pour les thèses de Houston Chamberlain  sur la prétendue supériorité de la race aryenne, ayant tenu un discours antisémite virulent il est sommé de s’expliquer devant la direction et se voit contraint de faire un travail sur les écrits de Goethe et sur l’admiration que le « Génie allemand » porte à Spinoza. 
    Ce pensum Alfred Rosenberg s’en acquitera mais cela n’aura pas l’effet escompté par ses professeurs. La trajectoire d’Alfred Rosenberg va définitivement s’infléchir vers le mal.

    Irvin Yalom tresse un récit passionnant de bout en bout, le portrait de Spinoza et son parcours qui aboutit à une Ethique de la joie se dévore littéralement. La vie et la pensée de Spinoza nourrissent le livre et même s’il s’agit ici d’une simplification de la pensée du philosophe, celle-ci est habile et juste. 

    Les ruptures occasionnées par le texte sur Rosenberg sont l’occasion de s’interroger sur la nature du mal, sur son inéluctabilité. Quelque chose ou quelqu’un aurait-il pu empêcher cet homme de devenir un des plus grands criminel ?  

    Cette construction en deux volets est très réussie et les liens entre les deux récits très efficaces. 

    On retrouve ici le meilleur de Yalom, sens du récit, écriture prenante, originalité du propos, bref un très très bon livre.

     

    L’avis de Christw 

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    Le livre : Le Problème Spinoza - Irvin Yalom - Traduit par Sylvette Gleize - Galaade Editions- 2012

            

  • En lieu sûr - Wallace Stegner

    Pas de frontière à l'amour et l'amitié : direction les US

     

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        Plus précisément  le Wisconsin

     

    Comment sait on dès les premières lignes que l’on vient d’ouvrir un très bon roman

    L’histoire avance lentement mais vous ne remarquez pas cette lenteur, vous êtes suspendu aux mots, ils vous tiennent en haleine. En quelques paragraphes les héros semblent faire partie de votre univers depuis toujours. 

    Un roman sans armes à feu, sans passions exacerbées, sans divorce, sans drogue, rien de spectaculaire ici.

    Des vies pleines, riches, parfois difficiles, une amitié qui repose sur de fortes différences et qui pourtant ne vacille pas même dans la tempête. 

     

    Il est temps de faire connaissance avec les deux couples d’universitaires car vous allez passer la moitié d'un siècle avec eux.

    Dans les années trente, Larry Morgan, le narrateur, vient d’épouser Sally qui attend un bébé. 

    Il a obtenu un poste à Madison, Wisconsin, ils sont désespérément fauchés et Larry s’acharne à l’écriture de nouvelles qu’il espère vendre à des magazines.

    La rencontre avec Sid et Charity Lang va changer le cours de leur vie. Le couple Lang représente la notoriété, la richesse, les relations mondaines. C’est une véritable adoption plénière qui va avoir lieu, ils vont tout partager : Les soirées à parler littérature, les espoirs des uns et des autres, les pique-niques qui deviennent un rituel mémorable, les naissances, les vacances dans le Vermont, la guerre, les échecs. 

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     Les vacances  dans le Vermont

     

    Des liens fort se créent qui gomment les différences et font accepter les contraintes de la vie quotidienne. 

    Tout n’est pas parfait, Sid rêve d’écrire de la poésie mais pragmatique et ambitieuse Charity le pousse à écrire des articles et livres pour servir sa carrière, elle organise tout, est indispensable à tous, mène d’une poigne de fer toute sa tribu et les Morgan très vite en font partie. Larry regimbe parfois devant tant d’autorité mais toujours les quatre amis sont soudés face aux réussites joyeuses comme aux accidents de l’existence. L’amitié encaisse tout les chocs car dit Larry :

    « Mon sentiment pour eux est une part de moi-même avec laquelle je ne me suis jamais querellé, même si mes rapports avec eux ont pu être plus d’une fois quelque peu raboteux. »

     

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    En plusieurs retours vers le passé Wallace Stegner décrit à merveille la vie qui s’écoule, le partage permanent, la mémoire des instants heureux.  Voilà ce qu’il dit de ses intentions à la parution de ce qui fut son dernier roman :

    « Je voulais faire toucher du doigt une vérité moins fardée encore que d’habitude, une vérité vraiment nue. Faire entendre une musique qui ne remuerait que de tout petits bruits, mais dont les échos iraient un peu plus loin. » , il tient parole je vous l'assure.

     

    Un roman pour lequel un critique américain parle de « rasade de sagesse » j’aime bien l’expression. Un livre qui est  une belle méditation sur l’amitié, la création littéraire, la compassion et l’amour entre les êtres, servi par une écriture sans effet, dépouillée 

    mais jamais mièvre.

    Vous pouvez le trouver sur les sites de livres d’occasion, je viens de le relire avec un plaisir intact, je vous propose de lui faire une place dans votre bibliothèque.

     

    D’autres romans de Wallace Stegner sur la toile : La Bonne grosse montagne en sucre ou Angle d’équilibre tous chez Phébus

     

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    Le livre : En lieu sûr - Wallace Stegner - Traduit de l’américain par Eric Chédaille - Editions Phébus - 2003

     

    L'auteur :Il est né en 1904 dans l'Iowa. Il grandit à Great Falls dans le Montana ainsi qu'à Salt Lake City dans l'Utah. De 1946 à 1971 il dirige l'atelier d'écriture à l'Université de Stanford, il enseigne également à l'université de Harvard. Stegner compte parmi ses étudiants Thomas McGuane, Raymond Carver, Larry McMurtry, Edward Abbey.

    Wallace Stegner a écrit une soixantaine d'ouvrages, pour la majeure partie des biographies et des livres d'histoire.

     

  • Le journal des cinq saisons - Rick Bass

    La vallée du bout du monde au confins du Montana

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    L’oeuvre de Rick Bass est déja riche de nombreux livres, des nouvelles, un long roman ( là où était la mer) et deux essais sur sa vallée, son territoire (le livre de Yaak et Winter) mais aujourd’hui il franchit une frontière avec ce livre.

    Journal météorologique et poétique, au fil des mois et des saisons Rick Bass nous livre ses observations sur sa vallée et son marais, la vie dans cette contrée grandiose, dangereuse, qui porte le sceau encore visible de l’ouest sauvage.
    Ses observations portent parfois la marque du scientifique, du géologue, mais le plus souvent celle du poète, du militant écologiste, du père qui s’interroge sur l’avenir qu’il peut promettre à ses filles.

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    Tout commence rituellement en janvier « le mois où le cerveau ralentit », un mois magnifique et difficile, l’isolement pendant parfois plusieurs jours, il faut pelleter la neige, sa cabane d’écriture est inutilisable. Des mois propices au travail lent et régulier « aux besognes rudimentaires » car l’hiver c’est l’ensevelissement sous un neige « si douce, si lourde, si apaisante »
    Février est le mois du froid « le marais est encore une vaste plaque marbrée de glace et de neige » et pourtant déjà quelques oiseaux sont de retour et le premier papillon « le théâtre de l’univers avec ses divers groupes et tous ses comédiens, est en train de ressusciter »

    Le printemps occupe un maximum de pages pour répondre à  la splendeur et la folle fécondité, la saison où le marais reprend vie, marais que Rick Bass appelle son « réservoir de couleurs et de parfums ». Avril est le mois où l’on entend à nouveau « le babil apaisé » des oies qui remontent du sud.
    C’est la saison où les ours noirs et les grizzlys sortent la tête de leurs tanières et « se mettent à arpenter les pentes inondées de soleil  » attirés par les lys avalanche vifs et jaunes, l’auteur les admire faire de folles glissades et se gaver de lys odorants et sucrés  « il arrive que des tâches jaunes s’accrochent à leur fourrure dorée et au museau de ces grands ours » améliorant ainsi naturellement la pollinisation.

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    la profusion de l’été, les randonnées en famille, les clairières baignées de soleil, les caches des fraises des bois, la cueillette de myrtilles. C’est aussi la période de retour à la civilisation, voyages, concert, rencontres. Mais comme rien n’est jamais parfait c’est aussi le temps des mauvaises herbes, sus à l’épervière d’une belle couleur mais par trop envahissante.
    La saison aussi des incendies, utiles parfois, dangereux toujours, qui mettent parfois en péril la maison et la vallée et oblige à dormir d’un seul oeil.

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    Vallée du Yaak

    Et c’est l’éclatement de l’automne, le retour de la pluie qui annonce déjà le long hiver, l’automne et ses impondérables comme cet accident de camion qui a tout d’un film d’horreur projeté au ralenti.
    Septembre c’est la lumière automnale « si intense maintenant qu’elle en est presque palpable, pareille au froissement d’un parchemin »
    Octobre sent le bois coupé. Les bois résonnent des tirs des chasseurs, tétras, faisans, antilope, cerfs et wapiti, pour profiter des cadeaux de la nature.

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     L'imposant wapiti

    Rick Bass a toujours plaidé pour la protection de l’environnement, il veut pour ses filles un monde où le mot sauvage aura encore un sens, où la main de l’homme n’aura pas tout détruit, où elle pourront continuer d’aller à l’école en pleine forêt, avec des pommiers dans la cours et « des cerfs broutant paisiblement la pelouse »
    Il aime cette vallée « majestueusement reculée, nichée  » à la frontière du Canada et du Montana et il défend sa cause.
    Je vous laisse découvrir ce qu’il appelle la cinquième saison, intermédiaire pour lui entre l’hiver et le printemps.

    C’est un guide envoûtant, avec ce livre Rick Bass prend place dans la longue lignée des écrivains de la nature car derrière le botaniste et le géologue se cache l’écrivain et le poète.
    J’ai aimé cette relation physique avec la nature, les combats perdus d’avance contre les mauvaises herbes, les solstices qui rythment la vie de la maisonnée.
    J’ai aimé ses propos car il n’est pas donneur de leçons,  son militantisme, bien réel, reste discret, il cherche à convaincre plus par la beauté que par l’injonction. Rick Bass n’est pas un ayatollah de la cause environnementale, il a trop la fibre libertaire et souvent la mélancolie l’emporte sur le combat.

    Faites un place à ce livre dans votre bibliothèque

    Le livre : Le Journal des cinq saisons - Rick Bass - Traduit de l'américain par Marc Amfreville - Editions Christian Bourgois 2011

    rickbass-500x500.jpgL’auteur
    Rick Bass est un écrivain et écologiste américain, est né le 17 mars 1958 à Fort Worth dans l'état du Texas. Il a étudié la géologie à l'Université d'Etat de l'Utah. Émule de Jim Harrison, il a commencé à écrire de courtes histoires alors qu'il travaillait comme géologue pétrolier à Jackson, au Mississippi... En 1987, il s'installe avec sa femme, l'artiste Elizabeth Hughes, à Yaak Valley, à l’extrême nord-ouest du Montana, près de Troy, où il œuvre à la protection de sa région d'adoption. Rick Bass siège au conseil d'administration du Conseil Yaak Valley Forest and Round River Conservation Studies. (Ulike)


  • Nous étions les Mulvaney - Joyce Carol Oates

    Quand le bonheur vire au cauchemar

     

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    Tournez les pages de l’ album de famille : Sur la photo la famille Mulvaney avec en arrière fond High Point Farm et dans le lointain la petite ville de Saint Ephraim. Si vous regardez attentivement vous voyez les tenues vestimentaires qui vous ramènent aux années soixante.
    Tout est propre, net, rangé, tout respire l’amour familial, la prospérité grâce au travail de Michael le père entrepreneur en bâtiment ET membre du Country club local; il lui a fallu plusieurs années pour en arriver là mais c’est chose faite, il est devenu un notable et il a laissé loin derrière lui son catholique de père, brutal et alcoolique.
    Juste derrière vous voyez Corinne, l’épouse, fantasque toujours vêtue à la diable, voyez elle sort de l’étable à moins que ce soit de son atelier de réparation d’antiquités en tout genre. Elle aime Michael plus que tout, plus même que ses enfants, et tout cela sous l’oeil bienveillant de Dieu !
    Au premier plan les enfants,  magnifiques, heureux, beaux « j'ai souvent rencontré des gens qui pensaient que nous, les Mulvaney, formions quasiment un clan, mais en réalité nous n'étions que six »  Michael Jr, Patrick, Marianne dite Bouton. C’est Judd qui parle, le plus jeune des Mulvaney,  celui qui va dévoiler toute l’histoire.

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     Ferme américaine  Kimble Warren

    Quelque chose va soudain briser ce tableau idyllique, faire voler en éclats l’amour familial, faire porter la culpabilité sur un seul membre de la famille au point de l’exclure , de l’effacer du tableau. Quand la tempête va s’abattre chaque membre de la famille va y faire face avec son histoire, ses émotions, le poids du regard des autres.
    Le clan se lézarde, se disloque sous les coups de la société puritaine de Saint Ephraim.

    Une leçon d’analyse psychologique, lucide, tranchante, montrant du doigt le puritanisme d’une société bien pensante, soupesant la force du besoin d’intégration d’un homme, du besoin d’amour d’une femme et du poids effrayant de la culpabilité.
    Un roman passionnant qui bien que datant des années 70 ne perd rien de sa force tant l’analyse est pertinente et habile. On pourrait le proposer à tous les apprentis psychologues !
    Un seul bémol : que JC Oates signe une fin un peu trop angélique à mon goût. Mais c’est broutille, j’ai aimé les personnages, l’écriture, le rythme du roman. A lire assurément, c’est d’ailleurs l’avis de Chaplum
    Sylire
    et Golovine

    Je connaissais JC Oates à travers son journal et j'ai très envie maintenant de poursuivre la lecture de ses romans

    Le livre : Nous étions les Mulvaney - Joyce Carol Oates - Traduit de l’américain par Claude Seban - Editions Stock