Le Jardin d’Epicure - Irvin Yalom - Traduit de l’anglais par Anne Damour - Editions Galaade
Un livre sur le défi le plus exigeant, le plus prégnant que nous rencontrons : surmonter notre peur de la mort, une préoccupation majeure, omniprésente et universelle. C’est un peu comme « regarder le soleil en face » titre anglais de ce livre.
J’avais par le passé fait un bout de chemin avec Irvin Yalom à travers deux romans que j’avais beaucoup aimé, il revient ici avec un livre de professionnel en psychiatrie et en psychothérapie.
Ce livre veut être une aide " affronter la mort ne conduit pas nécessairement à un désespoir qui nous dépouille de toute raison d’être" la peur de la mort pour chacun du nous est pourtant au coeur d’une grande partie de notre anxiété, comment lutter contre cette peur et est-ce possible ?
Le plus souvent une expérience personnelle nous éveille à la reconnaissance de notre peur : un rêve, une perte douloureuse comme le décès d’un être proche, mais aussi la perte d’un emploi, la vente d’une maison, la survenue de la maladie, un accident ou simplement le vieillissement ou un anniversaire comme les 50 ans ou 60 ans (ah bon ..)
Toutes choses qui nous confrontent à notre statut de mortel.
A l’aide des récits sur ses patients Yalom nous apprend à reconnaître derrière des comportements variés la peur de la mort, nous propose des méthodes pour faire face à cette peur pour transformer celle ci en force vitale nous permettant de nous accomplir " affronter la mort nous permet non d’ouvrir une boîte de Pandore, mais d’aborder la vie d’une manière plus riche et plus humaine "
Il s’agit là d’une opportunité pour nous permettre de réfléchir à nos priorités, pour améliorer nos relations avec autrui, pour mieux communiquer avec ceux que nous aimons.
Il nous invite ainsi à mieux goûter la vie, à en reconnaître la beauté, il nous invite à nous engager pour les autres.
La peur de la mort s’appuie souvent sur notre besoin de laisser une trace immortelle de notre passage, Yalom utilise une belle métaphore : celle des ondulations sur l’eau, des rides sur un étang, c’est l’effet de rayonnement , chacun de nous crée des cercles concentriques d’influence qui toucheront les amis, les proches, et ces "rides" resteront le signe de notre passage. Qui laissera un trait de caractère, qui une expérience, un avis, une preuve de vertu, une parole de réconfort.
Le livre des morts égyptien
L’auteur nous encourage à " consumer " nos vies, à aimer notre destin, et éviter le regrets d’une vie non vécue.
On retrouve ici Nietzsche que Yalom cite abondemment, mais aussi Epicure et Montaigne, les penseurs et les philosophes qui peuvent nous aider à apaiser nos peurs, des écrivains aussi et l’on retrouve Tostoï et "La mort d’Ivan Illitch "
La philosophie pour Yalom, comme pour ses maîtres en pensée, doit nous aider à vivre et soulager notre anxiété, les comparaisons auxquelles il nous invite à réfléchir entre la mort et ce temps de non-être d’avant notre naissance sont éclairants.
Yalom n’est pas croyant, il reconnaît l’aide qu’apporte parfois la religion pour combattre notre peur et respecte la foi des croyants, mais il affirme la possibilité de s’en passer " Je ne doute pas que la foi religieuse tempère les craintes de la mort chez beaucoup. Mais chez moi elle soulève cette question - elle semble être une feinte pour contourner la mort, la mort n’y est pas définitive, la mort y est niée, la mort y est dé-mortalisée "
L’oeuvre d’Irvin Yalom est importante, elle mêle son expérience de thérapeute à sa vision personnelle de l’existence, d’une clarté constante son livre exprime la chaleur et la compassion qu’il réserve à ses patients.
Classiquement un thérapeute reste discret sur son vécu personnel, pour nous convaincre Yalom fait appel à sa mémoire et raconte ses expériences intimes au moment de la mort de son père, il ajoute là une touche personnelle bienvenue. Un dernier chapitre s’adresse aux professionnels de la psychanalyse ou de la psychothérapie mais reste lisible pour le lecteur non professionnel.
Faites une place dans votre bibliothèque à ce livre riche et profondément humain
L’auteur
Professeur émérite de psychiatrie à Stanford, Irvin Yalom est psychiatre à Palo Alto (Californie). Entre fiction, philosophie et psychothérapie il est l’auteur de nombreux essais, romans ou récits, dont Apprendre à mourir. La méthode Schopenhauer, Mensonges sur le divan, Et Nietzsche a pleuré ( source l’éditeur)
Commentaires
Abordé de cette façon, à travers quelques grands philosophes et par un psychiatre écrivain, le sujet ne me fait pas fuir, bien au contraire! Il faut savoir affronter ses propres peurs!
Excellent billet pour apprendre à glisser sa barque au gré du courant
J'ai lu trois livres de lui, toujours avec énormément de plaisir et d'intérêt. J'attends la sortie en poche de celui-ci.
Je suis complètement d'accord avec toi à la fois sur Irvin Yalom (dont j'ai lu plusieurs ouvrages) et sur ce livre que j'ai commencé mais que je lis par petits morceaux...C'est un livre dont le sujet est dur mais justement il réussit à en sortir un incroyable bonheur de vivre !
@ Cathe : tous ses bouquins sont vraiment excellents, que ce soit les romans ou les essais, vraiment un auteur à découvrir, ce livre ci m'a touché plus profondément un livre sur la mort qui donne du courage et envie de vivre c'est une gageure !
C'est ce qui fait la réussite totale de ce livre , apporter l'apaisement à ceux qui en ont besoin, faire réfléchir sans apeurer ni attrister
@ BOL : Si vous ne connaissez pas Yalom c'est un auteur à découvrir , ses romans "apprendre à mourir" et "Nietzsche a pleuré" sont très réussis
je vais acheter ce livre , vous donnez très envie de le lire
@ Luocine, je pense que vous ne le regretterez pâs c'est excellent
Mmmh! Un bon auteur, on dirait, et des thèmes qu'il ne faut pas éviter (nous mourrons tous). merci de ce billet qui peut m'aider à aborder le livre.
Et j'aime bien ton "ah bon". Pour certains c'est 40 ans qui est le palier difficile!
@ Keisha : je peux me permettre le "ah bon" car j'ai largement passé les 40 et quelques autres ...
Un beau billet qui donne envie de laisser, sans tarder, beaucoup de délicates "rides".
Je ne connais pas l'auteur mais je dois avouer être souvent déroutée par les écrits de Nietzsche. J'ai noté un titre sur le même sujet chez Florinette, je vais commencer par celui-ci, je note le tien car ce que tu en dis me donne l'impression que je passe à côté de qqch. Je vais y aller par étape, tu as raison, c'est un sujet qui nous fait peur mais qui fait du bien une fois qui l'est abordé.
Bonsoir Dominique,
Je viens de lire très attentivement ton billet très élogieux sur cet essai, je serai curieuse de le lire grâce à toi. Il est tout à fait vrai que des soucis de santé nous forcent à regarder différemment la Grande Faucheuse! Et cet ouvrage pourrait certainement apporter y une aide...
Amicalement
@ Colo : j'aime beaucoup la métaphore de Yalom des rides que nous laissons, c'est un livre sur la mort profondément optimiste et serein
@ Kenza : le livre est plein d'exemples pris auprès des patients de Yalom et dans sa propre vie ce qui le rend très "humain"
@ Theoma : Nietzsche n'est pas un philosophe facile, ici Yalom fait le travail pour nous, il retient des écrits de divers philosophes ce qui peut nous aider, ce n'est pas un livre de philosophie universitaire, c'est lisible par tous
Réfléchir à nos priorités, améliorer nos relations avec autrui, mieux communiquer avec ceux que nous aimons... Oui, la mort nous rappelle à la vie, c'est vrai.
Beau billet, Dominique, sur un livre qui semble porteur de sérénité.
@ Tania : le mot sérénité reflète bien ce livre ce qu'il nous en reste une fois refermé
Quel jolie image pour l'ouvertude dema semaine en chansons... Je la 'pique' je ne la 'pique' pas... je la 'pique' je ne la 'pique' pas... je la 'pique' je ne la 'pique' pas... j'hésite.
@ Armando : pique pique pique ce que tu veux
Hum, j'ai aussi dépassé les 40, disons que je peux espérer penser en être à la moitié de ma vie... J'aime ces livres qui font réfléchir, j'en avais lu un il y a un bout, intitulé Vieillir sans être vieux, de Marie de Hennezel, pas le même thème, mais tout autant occulté.
@ Keisha : 40 ? tu es toute jeune alors !
Je connais les écrits de M de Hennezel mais pas ce livre là, merci de la réérence
Merci pour ce billet. Le sujet est complètement mis de coté par notre société de l'instant..
@ Alain; un sujet mis de côté par la société mais que nous ne pouvons pauvres mortels éluder
J'ai déjà lu d'autres critiques élogieuses de cet auteur.
Je vais demander à ma médiathèque favorite mais je penses que c'est à livre à acheter et à garder, vu l'importance du sujet et si la sérénité est au bout de la réflexion, c'est une belle oeuvre !
Voilà un auteur qui me résiste, mais je dois dire que ton article me donne envie de tenter cette lecture
@ fifi : bonne lecture et bonne sérénité
@ Sylde : Ses romans m'ont passionné mais je comprends qu'ils puissent laisser indifférent mais cet essai c'est le coeur même de notre vie : savoir que nous sommes mortels
J'imagine très bien la qualité de ce genre d'ouvrage, surtout par un psychiatre psychanalyste et l'aide que cette lecture peut apporter à chacun de nous ... La mort a toujours fait peur, mais plus que la mort, c'est l'idée même d'absence qui angoisse. En perdant un être cher ou un emploi, ou déménager, c'est faire le deuil d'une habitude, d'une rencontre ou d'un souvenir. C'est là le plus difficile à accepter. Se dire qu'avec la mort (physique ou psychique), on ne pourra plus voir la personne ou faire comme "avant" ! C'est dur d'admettre que nous sommes peu de choses voire même rien du tout, parfois ...
@ Nanne : c'est vrai qu'intellectuellement il est simple de se dire que la mort n'est rien puisque nous n'en aurons plus connaissance lorsque nous mourrons, Epicure a dit ça bien mieux que moi, le problème c'est émotionnellement et le fait qu'il est dure d'accepter que la vie continue sans nous !!
Passionné,emballé par Et Nietzche a pleuré je trouve votre critique très motivante et compte le lire rapidement.Votre blog m'intéresse beaucoup et je me permets de le retenir dans mes étapes à fréquenter.Merci.
@ Eeguab : merci pour votre visite et vos commentaires et à bientôt chez vous
@ Eeguab : j'ai aimé "Et Nietzsche a pleuré" d'abord pour l'originalité du propos, un humour certain tout en percevant une émotion qui m'a touché , celui ci est plus un essai mais j'ai énormément aimé le côté très positif pour parler de la mort et très réconfortant un auteur précieux !
Un très beau billet là encore que je viens de découvrir...
J'aime beaucoup Irvin Yalom mais je n'ai pas encore lu celui-ci...
La mort, un sujet sur lequel j'ai lu pas mal de choses (enfin... façon de parler car avec toi.. hum hum... mon "pas mal" se réduit à.. peau de chagrin! :))
Donc.. je note, les yeux fermés
Mais... franchement, oui! tu pourrais écrire un ouvrage sur les livres que tu aimes... d'ailleurs.. qui a fait ça? je pense à Henry Miller et son ouvrage "Les livres de ma vie".. mais il y a bien dû en avoir d'autres...
(Bien sûr... pour toi, ce serait un travail en plusieurs tomes!... ;-))
@ Macile : Beaucoup d'auteurs ont su faire cela, parler de leurs lectures avec bonheur et tient ça me donne une idée de billet et même une catégorie en plus : Des livres dans les livres, car ces auteurs lecteurs m'ont ouvert parfois un chemin et j'ai une dette à payer Ton commentaire agit comme un stimulant merci à toi
Tu vois que tes conseils sont suivis je viens de terminer Mensonges sur le divan et j'ai beaucoup beaucoup aimé
connais tu la série "in Treatement?"
cela doit te plaire non?
amicalement
Luocine