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Rechercher : Marie Edith Laval

  • Brigitta - Adalbert Stifter

    J’aime Adalbert Stifter même si ce n’est pas l’écrivain autrichien le plus connu, j’aime sa prose, ses personnages.

    Brigitta est plus une nouvelle qu’un roman et ce court texte est une jolie réussite. 

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    Les bergers de la Puszta

    C' est une belle histoire d’amour qui est contée. Le genre d’histoire où la passion, la faute, le pardon tiennent toute la place.

    Le narrateur a un ami le Major, ils ont fait connaissance en Italie Le Major possède un domaine en Autriche-Hongrie, Uwar, qu’il tente de gérer avec des méthodes modernes, c’est bien loin des villes,  dans les steppes de la Puszta. Il a été invité « à passer chez lui un été, une année, ou cinq, ou dix ans »

    Le narrateur va lui rendre visite et ainsi faire connaissance avec les fermiers, les hommes et femmes qui travaillent sur le domaine, il rencontre aussi un personnage étonnant, la voisine du major, Brigitta Maroshely que tout le monde craint et respecte, excellente cavalière qui vit avec Gustav son fils adolescent son mari l’ayant abandonné.

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    Un pays de chevaux

    Le major est un hôte parfait, il a voyagé, il a lu, le temps passe vite auprès de lui. Le séjour s'allonge.

    C’est une histoire simple, ce qui la rend si présente c’est l’art de Stifter, il est habile à dresser un portrait tout en ambiguïté de ses personnages, une femme émancipée et pourtant fragile qui est liée au major par une amitié rare alors que c’est une femme laide « Un visage ingrat nous réserve souvent une beauté intérieure dont cependant nous ne savons dans l’instant déceler la valeur » le major lui conte son histoire.

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    La steppe est belle sous la plume de Stifter, la nature est très présente, à la fois magnifique et hostile.
    C’est d’ailleurs la nature qui fait basculer le récit lorsque Gustav est attaqué en plein hiver par une meute de loups affamés.

    C’est un récit très réussi, poétique, à la prose plutôt classique mais belle et l’histoire bien que brève recèle quelques surprises. 

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    Le livre : Brigitta - Adalbert Stifter - Traduit par Marie Hélène Clément - Editions Cambourakis

  • La nuit des orateurs — Hédi Kaddour

    Nous sommes à Rome et je vous propose de rencontrer Publius Cornelius Tacitus, bref Tacite vous l’aurez compris. 

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    Tacite 

    Tacite n’a encore rien écrit, les Annales viendront plus tard. Il est le mari de Lucretia Agricola, femme de haute noblesse, elle est l’amie de Domitien l’empereur actuel, cette proximité va t elle suffire à protéger Tacite de la colère de l’empereur ? 

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    Domitien 

    Quel est le tord de Pline, de Senecio et de Tacite ? Celui d’avoir défendu une province mise en coupe réglée par un préfet aux ordres de Domitien. 

    C’est suffisant pour compromettre les trois hommes et risquer la colère de l’empereur qui « tue comme il éternue » 

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    Pline le Jeune

    Tout peut passer pour un crime de lèse-majesté : un mot de trop, une référence littéraire, un geste, alors avoir pris fait et cause pour un opposant !!!
    C’est peut être la nuit qui précède leur arrestation, la mort dans l’infamie 

    L’entourage de Domitien est là pour le servir et même pour anticiper sur ses désirs, Norbanus le préfet de sa garde prétorienne est près à toutes les bassesses.

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    La garde Prétorienne

    Lucretia va combattre contre Domitien à fleuret moucheté, contre Flavie la maitresse en titre de son mari, c’est une longue nuit qui s’avance.

    Une superbe réflexion sur le pouvoir et ses dérives.
    Rumeurs, complots, dénonciations, tout sent la pourriture, le danger, la mort.
    C’est violent, noir, une réflexion sur le pouvoir sans concessions aucunes.
    Le roman prend des allures de manuel de survie par temps de tyrannie.

    L’écriture m’a plu, la fin n’est pas tout à fait réussie, c’est un péché véniel par rapport à l’art d’hédi Kaddour pour nous transporter en un siècle plein de fureur et de bruit 

    Si vous voulez avoir un aperçu du règne de Domitien je vous renvoie à Lucien Jerphagnon et à son histoire de Rome 

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    tacite

    Les livres 

    La nuit des orateurs  Hédi Kaddour  Editions Gallimard
    Histoire de la Rome antique  Lucien Jerphagon  Editions Hachette pluriel 
    Les Divins Césars  Lucien Jerphagnon Editionts  Tallandier 

  • Trajectoire d'une comète : Marina Tsvetaeva

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    Il ne m’a pas fallu moins de trois livres pour rendre compte de cette femme hors du commun.
    Elle est comme bien des poètes de son temps, fille de la Révolution et fille de la répression qui s’abattit sur nombre d’entre eux.
    Insurgée dit Troyat, c’est certain, une femme, un poète qui toute sa vie refusa de se plier aux règles communes, règles politiques, règles familiales. Elle refusa le rôle de la bonne épouse, de la bonne mère.

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    Marina en 1916



    Née avant la Révolution dans un famille aisée, son parcours l’emporte vite par provocation, par choix vers l’opposition.
    Elle vit l’intolérable pauvreté au moment de la guerre de 14, une des ses filles paiera cela de sa vie. Une fois les bolcheviques au pouvoir elle refuse les diktats et ses poèmes sont refusés, censurés,  elle ne trouve aucun travail digne, obligée de mendier la nourriture, de mendier un abri à ses amis. Elle devient nomade entre Moscou et la Crimée.

     

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                                 Marina avec son mari sa fille Ariadna et son fils Mour

    Les fléaux qui s’abattent sur elle comme sur son mari, ne l’anéantissent pas, elle résiste, elle écrit, elle a la plume en main tout au long des jours. Son soutien principal pendant des années seront la poésie et les poètes, Mandelstam dont elle tombe amoureuse, Pasternak avec qui elle entretien une correspondance littéraire et amoureuse, Rilke qui forme avec Pasternak et Marina un triangle amoureux, ces lettres sont souvent évoquées dans sa poésie « lambeau de chiffon » mais surtout bonheur fou.

    Contrainte de quitter la Russie, elle prend le chemin de l’exil, l’Allemagne, Prague puis Paris. En France elle ne trouve pas auprès des immigrés le soutien qu’elle pourrait attendre, trop révolutionnaire pour eux, trop contestataire pour le régime soviétique ! Elle dit avec un humour noir « En Russie, je suis un poète sans livres, ici un poète sans lecteurs. »

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                                Boris Pasternak et Marina Tsvetaeva  © Lena Levin


    La mort de Rilke, le quasi reniement de Pasternak lui seront une douleur vive dont elle ne se remettra pas. Elle est à bout et sous la pression elle fera le choix du retour en URSS, son mari a été fusillé, elle s’enfonce en Russie fuyant l’avancée des allemands pour faire finalement le choix du suicide. On trouvera près d'elle des carnets de poèmes et « pardon de n'avoir pas supporté ».

    Toute sa vie elle a été « contre », toute sa vie elle a scandalisé par ses amours tumultueuses, ses coups de foudre,  ses amours scandaleuses avec une femme, elle qui choisit d’épouser un juif !! Une vie toute de passion, toute de tension, bercée par les soubresauts de l’Histoire.

    Pour faire votre choix entre ces trois livres : le petit livre de Linda Lê est celui qui rend le mieux compte de la poésie de Marina Tsvetaeva, Celui d’Henri Troyat est une belle biographie qui rend bien le parcours familial, personnel mais où je n’ai pas perçu la passion pour la femme.
    Mon préféré et de loin est celui de Rauda Jamis conseillé par Nadejda,  que j’ai trouvé d’occasion sans difficulté. L’auteur parvient totalement à faire aimer la femme, à nous donner l’envie de lire sa poésie. Elle fait revivre à merveille cette femme exceptionnelle.

    Mandelstam disait que les oeuvres se partagent en deux groupes « celles qui sont permises et celles qui sont écrites sans permission comme on dérobe un peu d’air » c’est le cas de toutes l’oeuvre de Marina Tsvetaeva.


    Quelques vers de Marina

    Si vous saviez, passants, attirés par d’autres regards charmants que le mien
    que de feu j’ai brûlé, que de vie j’ai vécu pour rien.

             *************

    Et je dirai - console-moi,
    Mon coeur blessé se tord,
    Et je dirai - le vent est frais,
    Le ciel brûle d’étoiles.
     

            *************


    L’un est fait de pierre, l’autre d’argile,
    Et moi je m’argente, je brasille,
    Varier est mon affaire, Marina mon nom,
    Moi périssable écume de mer.

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    Les livres
    Comment ça va la vie - Linda Lê - editions Jean Michel Place 2002
    L’espérance est violente - Rauda Jamis - Nil Editions
    Marine Tsvetaeva l’éternelle insurgée - Henri Troyat - Editions Grasset

  • Marcel - Erwin Mortier

    Taire ou dénoncer 

     

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    On sait tous que la réaction devant des événements exceptionnels peut être très différente d’un homme à l’autre, d’un pays à l’autre. Il y a toujours ceux qui se taisent, collaborent et ceux qui dénoncent, se battent.

    Je vous propose un roman qui pourrait porter en sous-titre : Quand on choisit le silence...........

     

    La Flandre, un pays qui dans les années 70 vit encore sous le poids d’une histoire que beaucoup voudraient oublier.

    Une ville flamande comme les autres, une maison qui « ressemblait à toutes les autres de la rue : plus très d’aplomb après deux siècles d’occupations, de tempêtes et de guerres ».
    Une famille flamande presque comme les autres.

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    Le narrateur vit chez sa grand-mère, une maîtresse femme qui « a rarement tord », elle connaît tout le monde dans la ville, Andréa, elle occupe toute la place dans ce roman.

    La vie s’écoule doucement « personne ne se déplaçait librement dans la maison. Chacun suivait le chemin de son habitude »
     

    Dans une petite ville les langues vont bon train, quand Mademoiselle Veegaete, l’institutrice, vient pour renouveler sa garde robe, c’est l’effervescence car c’est une cliente privilégiée, on sort le service à liséré d’or, les magazines de mode. Ces jours là le narrateur voudrait « être une petite souris qui voit tout et n’oublie rien ».

     

    Parfois on fait des visites « la grand-mère nous avait empaquetés, le grand-père et moi comme une cargaison vivante », l’occasion de découvrir de nouvelles photos : « Une multitude de visages d’hommes (...) Au dessus des têtes, une houle de bras levés »

    Ce jour là le narrateur découvre qu’il ressemble à Marcel

     

    Le même Marcel qui trône dans la vitrine où la grand-mère aligne les photos de tous les morts de la famille. « Dans leurs cadres chic, pareils à de précieux carrosses ils paraissaient faire la queue à la douane ».

    Une kyrielle de tantes, d’oncles, tous disparus. Chaque photo raconte une histoire. Andréa époussette les cadres avec soin, elle va entretenir leurs tombes au cimetière. Elle raconte sans se lasser l’histoire de chacun. Sauf pour Marcel, parce que,Marcel, si il y a bien sa photo dans la vitrine, il n’y a aucune tombe à fleurir au cimetière et personne ne connaît la date de sa mort.

    L’enfant aime le grenier et tout ce qu’il y trouve, c’est sa curiosité qui va déclencher la tempête, quand pour un travail scolaire il se sert d’une lettre ornée d’un aigle magnifique...

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    Les héritiers !

    Un roman court, sobre et habile pour restituer cette part de l’histoire longtemps cachée.  Le monde de l’enfance est décrit avec virtuosité et est empreint de trendresse mais le passé que l’auteur explore à travers ce récit est marqué de sentiment de culpabilité.  

    Voici ce que dit l’auteur dans une interview :

    «  Marcel  était pour moi l'occasion de m'exprimer en tant qu'arrière-petit-neveu d'un collaborateur mort en Russie, sur le front de l'Est. Âgés de vingt ans, mes grands-parents ont sympathisé avec les Allemands. Ce passé a marqué mon enfance, même si je suis né vingt ans après la fin de la guerre.» © La Libre Belgique 2003

     

    La langue est superbe et la traduction a value à Marie Hooghe un prix bien mérité.

     

    Si le sujet vous intéresse retrouvez chez JEA plusieurs articles ici et là 

     

    Le livre : Marcel - Erwin Mortier - Traduit du néerlandais (Flandres) par Marie Hooghe - Editions Fayard 

     

    L'auteur

    erwin.jpgNé en 1965, en Belgique (Flandre), Erwin Mortier est écrivain, journaliste et historien d'art. Il est l'auteur deMarcel (Fayard, 2003, prix de traduction Amédée Pichot 2003), Ma deuxième peau (Fayard, 2004), Temps de pose(Fayard, 2005) et Les Dix Doigts des jours (Fayard, 2007), tous traduits du néerlandais par Marie Hooghe.

     

  • Réchauffement climatique

    Pour changer un peu des polars du nord qui envahissent nos étagères ( pour notre plaisir quand même!) je vous propose une balade italienne.
    Rien de bien original mais des valeurs sûres, sympathiques et gastronomiques, ce n’est pas un programme à dédaigner

     

    Une recette en prime , d'accord c'est en italien mais ça n'en a que plus de parfum


    Montalbano d’abord, le commissaire né de la plume d’Andrea Camilleri, je lis ses aventures depuis sa création, avec des hauts et des bas et quelques franches réussites. Ce que j’aime chez lui c’est qu’entre une autopsie et un interrogatoire il vous fourgue une recette pour cuire les rougets ou mitonner une caponata, remarquez il a pas grand mérite car il a une cuisinière à sa dévotion.
    Bon alors aujourd’hui il joue les Nabokov en enquêtant sur de jeunes demoiselles qui portent le tatouage d’un sphinx sur le corps et que les demoiselles en question ont la fâcheuse idée de mourir ou de disparaître.
    Comme on est en Italie et je dirais même plus : on est en Sicile, ces demoiselles ont  un lien avec une association caritative bien pensante et bien bien catholique.En parallèle Montabalno  recherche un mari disparu qui semble avoir joué les filles de l’air avec une jeunesse mais impossible de lui remettre la main dessus, ce qui ne plait pas à l’épouse éplorée qui se refuse à croire à la vilenie du mari.
    C’est parti pour Montalbano et ses habituels acolytes, enfin doucement car il est maintenant dans les plus de 50 ... donc prudence, surtout que ses amours ne vont pas fort, Livia toujours au nord de l’Italie et lui toujours au sud et depuis quelques temps elle ne donne plus de nouvelles.
    Que vous dire de l’enquête ? C’est bien ficelé, parfois très drôle, parfois très grinçant et comme toujours la langue de Camilleri est un bonheur.
    C’est du polar classique pur et sûr.
    Les Ailes du sphinx - Andrea Camilleri - Traduit de l’Italien par Serge Quadruppani - Editions Fleuve noir

     

     

    Remontons un peu plus au nord pour trouver le commissaire Brunetti, la figure créée par Donna Leon , dans sa dernière aventure je l’avais trouvé un peu poussif et bien là il s’est réveillé.
    Le décor ; Venise, je n’en dis pas plus, une nuit des carabiniers armés et cagoulés font irruption chez un pédiatre et son épouse, tabasse le mari, terrorise la dame et pour faire bonne mesure enlèvent leur enfant de quelques mois.
    Alertée par les voisins la police cherche à comprendre, Brunetti n’obtient aucun renseignement des carabiniers, vive la coopération policière, et rien non plus auprès du pédiatre agressé qui refuse de donner la moindre explication.
    Pour son enquête il va avoir besoin une nouvelle fois de son beau-père l’aristocrate et de se trouver une épouse de substitution, eh oui quand on veut se faire passer pour un candidat à l’adoption.... Vianello, son adjoint, enquête de son côté sur une escroquerie à la sécurité sociale impliquant des médecins et des pharmaciens.
    Le talent de Donna Leon c’est de nous mener tranquillement, Brunetti est un homme lettré, fin, intelligent et l’accompagner dans son enquête est fort agréable. Un petit coup de morale , un petit coup d’érudition et hop c’est enlevé.
    Ah j’oubliais, ici aussi vous pouvez prendre quelques leçons de cuisine, je ne sais pas comment se débrouille Mme Brunetti mais elle assure question recettes,  donc prévoyez à côté de vous un petit verre de quelque chose et deux ou trois antipasti, c’est de rigueur.
    Le cantique des innocents - Donna Leon - Editions  Calmann-Lévy

  • Dostoïevski, mémoires d'une vie - Anna Grigorievna Dostoïevskaïa

    Dans l'intimité de l'écrivain

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    Il n’est pas si fréquent d’avoir, pour éclairer la vie d’un écrivain, le témoignage de son épouse, certains de leurs écrits sont parfois des actes vengeurs et enlèvent ainsi une part de crédibilité.
    Les mémoires d’Anna G Dostoïevskaïa ne sont pas du tout dans ce registre. D’un bout à l’autre on y sent la vérité, la sincérité et le souci d’une honnêteté totale.

    En 1866 Anna Grigorievna se voit proposer un moyen de gagner sa vie, M Olkhine son professeur de sténographie la propose pour aider un écrivain en difficulté qui doit rendre un livre dans un délai extrêmement court sous peine de voir tous ses droits sur ses livres précédents lui échapper. Elle accepte immédiatement car " Depuis mon enfance, le nom de Dostoïevski, romancier préféré de mon père, m’était familier " et elle a lu récemment Crime et châtiment
    Pour Fédor Dostoïevski c’est un ange tombé du ciel ! Il va pouvoir écrire le roman attendu dans les délais ce sera Roulettenbourg qui plus tard prendra le titre du Joueur et en même temps avancé la dictée de l’Idiot.

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    La première rencontre montre un Dostoïevski qui " était de taille moyenne. et se tenait très droit. Ses cheveux châtain clair et même légèrement roux étaient fortement pommadés et soigneusement lissés."
    Pendant ce travail en commun Dostoïevski va petit à petit se confier à Anna, parler de sa passion pour le jeu, des dettes énormes qu’il a contracté, et surtout de son épilepsie. Il faudra vingt six jours pour terminer le roman, et un mois pour que l’écrivain demande Anna Grigorievna en mariage.  

    Elle va pour 14 ans attachée sa vie à celle de l’écrivain. Elle sera pour lui une compagne dévouée, prête à passer plusieurs années à l’étranger pour permettre à son mari d’échapper aux usuriers. Elle est  un soutien constant pendant les années d’écriture des chefs-d’oeuvre : les Démons, les Frères Karamazov, elle partage avec lui les jours sombres où il s’est remis à jouer, les jours fastes où il est invité à la cour par le Grand-duc Constantin et la grande-duchesse Alexandra. Elle le suit lorsque Dostoïevski fait des lectures publiques de ses oeuvres malgré sa fatigue et malgré les crises d’épilepsie. Elle s’efface lorsqu’il est pressenti pour faire le discours en l’honneur de l’inauguration d’un monument à Pouchkine.
    Elle conduira son époux à sa dernière demeure au cimetière de Tikhvinsk dans la Laure Saint-Alexandre Nevski grâce à l’intercession du Grand-duc Constantin, entourée d’une foule nombreuse qui rendait hommage à l’écrivain du petit peuple.

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    Si vous aimez Dostoïevski ce livre vous plaira, il n’est en rien une analyse de l’oeuvre, mais il est le témoignage de la vie quotidienne d’un écrivain. Anna Grigorievna n’est pas écrivain, son livre ne vaut pas par le style. Il est attachant par la vivacité, la sincérité que l’on entend derrière les mots. On y découvre un homme pressuré par son entourage familial et qui ne sait rien leur refuser, un père de famille qui vénère ses enfants et qui s’occupe d’eux " c’est aussi un tendre père de famille pour lequel tout ce qui se passe dans la maison a une grande signification "
    On y voit vivre une famille russe au quotidien, les réceptions, les relations amicales, les difficultés, la résidence d’été, les voyages.
    Elle ne cache rien Anna Grigorievna la jalousie maladive de son mari,  les contraintes du travail du grand écrivain qui comme Balzarc, comme Dumas, court après l'argent

    " Il fallait de l’argent pour vivre, pour payer les dettes ; pour cette raison, malgré la maladie, et quelquefois le lendemain d’une crise, il était nécessaire de travailler, de se hâter, sans même revoir le texte écrit, pourvu que celui-ci pût être remis le jour fixé et rapporter le plus vite possible l’argent qu’on en attendait. "

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    Bureau de Dostoïevski

    C’est le manque d’ambition d’Anna qui rend le livre  si simple et si touchant. Jusqu’à la fin de sa vie après la mort de Dostoïevski, elle travaillera sans relâche pour défendre et éditer l’oeuvre de son mari. Elle ne parle de lui qu’avec admiration et amour " Il était bon, généreux, charitable, juste, désintéressé, délicat, compatissant "
    Elle sait nous le rendre vivant, proche et si l’on été admirateur de l’oeuvre on éprouve de la sympathie pour l’homme après avoir lu son récit.

    Si vous voulez une biographie de Dostoïevski centrée sur son oeuvre c’est le livre de Joseph Franck qu’il faut livre aux éditions Actes Sud.


    Le livre : Dostoïevski, mémoires d’une vie - Anna Grigorievna Dostoïevskaïa - Traduction André Beucler - Mercure de France