Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Nature et bestioles - Page 13

  • Ecouter lire

    1311689708.jpg

    Il y a quelques mois j'ai lu et chroniqué ici le livre d'Alain Cugno, livre qui m'a donné beaucoup de plaisir et en novembre Frédéric Lenoir et Nelly Anvar l'ont invité aux Racines du ciel 

    Ecoutez Alain Cugno et je crois que vous aurez envie de lire le livre ou de l'offrir à votre oncle qui adore les bestioles

  • La Troisième île - Fredrik Sjöberg

    Les éditions José Corti recèlent des livres rares un peu confidentiels. Ce livre en fait partie.

    Fredrik Sjöberg est à la fois un scientifique et un écrivain, il choisit donc dans ce livre de nous tracer la biographie d’un naturaliste Gustav Eisen. 

     

    Eisen.jpg

     

    Pas question pour lui de faire une bio classique, il choisit donc de faire une sorte de voyage avec Eisen le spécialiste des vers de terre ! (et ce n’est pas un canular)

    Eisen fut un ami dévoué et le bienfaiteur de Strindberg qui comme chacun sait avait un caractère de cochon, cela démontre la mansuétude d’Eisen. Dans les années 1869 il écrit carrément une thèse sur un lieu défini et minuscule proche de chez lui, thèse qui fut en son temps admirée par Darwin

    Il travaille plusieurs années aux Etats Unis et en particulier à l'Académie des sciences de Californie.

     

    Academy-of-Sciences-rain-forest-canopy.jpg 

                            California Academy of Sciences

     

    Après l’incendie de San Francisco qui a ravagé toutes ses archives et recherches botaniques accumulées pendant des années, Eisen à court de subsides  va chercher par tous les moyens à gagner de l’argent et va se tourner vers ...la viticulture !

    Un précurseur et doublement parce que lors de ce séjour en Californie il défendit aussi avec beaucoup de talent et de force la création de « sanctuaire » de la nature à l’origine du parc national des séquoias. Un homme de la trempe d'un John Muir.

     

     

    Sequoia_Log.jpg

                         Sequoia National Park en 1890

     

    Passant à un moment par New York il se promène chaque matin à Central Park et finit par y faire connaissance avec une centaine d’écureuils. 

    Ajoutez à cela qu’il fut un peintre accompli. Bref un touche à tout de génie que Sjöberg nous rend très vivant.

    syrphes.jpg

    © Flickr Cesar Ojeda

    L’auteur, spécialiste pour sa part des syrphes,  nous distille cette bio à coup d’anecdotes très vivantes, parfois empreintes d’une douce folie. Il mêle à cela ses propres expériences de biologiste, les polémiques scientifiques qui font s’écharper les savants, bref par de courts chapitres il vous met en appétit et titille la curiosité du lecteur.

    Il faut dire que les souvenirs de l’auteur sont parfois excellents. Vou apprendre comment l’entomologie lui permettait de courir les filles ou de déclencher à l’aide d’une simple cellule photoélectrique l’hystérie collective des ampoules de l’éclairage d’une petite ville.

     

    Il a été très attiré par la personnalité de Eisen, sorte de dilettante  de génie, de professeur Tournesol qui à 90 ans apprenait l’écriture cunéiforme pour passer le temps.

     

    C’est un livre à offrir aux curieux, aux entomologistes amateurs, aux lecteurs de Jünger et des ses chasses subtiles ou aux passionnés de Fabre 

     

    9782714311276FS.gif

     

    Le livre : La Troisième île - Fredrik Sjöberg - traduit par Elena Balzamo - Editions José Corti

     

    L'auteur

     SJOBERG_FREDRIK.jpgNé en 1958, Fredrik Sjöberg - biologiste, écrivain et critique littéraire – vit à Runmarö dans l’archipel de Stockholm. Il a été nominé pour le prestigieux Augustpriset (le Goncourt suédois) et a obtenu le Vinterpris de Samfundet De Nio (l’Académie pour la littérature, à Stockholm). Ses livres ont été traduits en allemand, en russe, en norvégien, en anglais. (source l'éditeur)

  • L'âne et l'abeille - Gilles Lapouge

    anebis.jpg

    « Jésus décida de récompenser l'âne de Bethléem. il donna à tous les descendants de cet âne le pouvoir de rire.»

     

    Voilà un homme qui aime les chauve-souris et les colibris mais qui fait carrément une fixation sur les ânes et les abeilles. 

    Son choix est poétique, c’est la faute non pas à Voltaire mais à Francis Jammes et au divin Platon.

    Tombé dans le poème de Francis Jammes quand il était jeune, mais si vous savez...

     

    J’aime l’âne si doux
    marchant le long des houx.
     
    Il prend garde aux abeilles
    et bouge ses oreilles 

    seraphin_chemin.jpg

    Celui là se nomme Séraphin

    Voilà notre homme qui s’embarque dans un livre où il est question du mariage improbable de ces deux animaux.Gilles Lapouge est amoureux à la fois de l’âne « qui bouge ses oreilles » et de l’abeille industrieuse.

    L’âne têtu (et ce n’est pas un mythe) et humble comme celui de la crèche à qui il manque une vertèbre ce qui le rend corvéable à merci, ne dit-on pas âne bâté ?

    L’âne marche, musarde, flâne, « L’âne est tenté par l'anarchie. » alors que l’abeille chacun sait qu’elle est une travailleuse hors pair, acceptant de se dévouer corps et âme pour sa reine et qui nous donne son miel. Gilles Lapouge nous dit

    « Ses colonies et ses ruches préfigurent les sociétés glaciales, techniciennes, sans ferveur ni déchirements, barbares en somme, modernes en somme »

    L’abeille elle philosophiquement n’est pas pour l’anarchie  « L’abeille est utopiste, à la manière de Platon et de Thomas Moore. » et elles sont résolument pour une société loin de tout individualisme.

     

    ruche-en-couleurs-535x410.jpg

    « Les abeilles, en s'associant les unes avec les autres, sacrifient leur indépendance, leur insouciance, leur goût du plaisir et leur passion de l'inutile. »

     

    Ânes et abeilles, ils les passe tous en revue, de Modestine accompagnant Stevenson, aux pauvres ânes des tranchées de Verdun (ils y étaient !) en passant bien évidemment par La Fontaine incontournable quand il s’agit d’animaux. Mais il y a aussi : la Bible, la mythologie, Homère, Aristote ou l’inévitable Marcel P.

    Pour les abeilles c’est itou, des blasons à l’étude des ruches, aux savants qui se sont interroger sur la fabrication du miel et sur le sexe non pas des anges mais des bourdons, là Lapouge est ferme : l’abeille n’a pas de vie sexuelle qu’on se le dise ! si ce n’est avec des fleurs....alors que l’âne lui est un des seuls animaux à s’accoupler hors de son espèces ! oh voilà bien un « exhibitionniste » osé ! 

     

    C’est une lecture délicieuse, douce comme le miel mais qui requière la ténacité de l’âne car Gilles Lapouge n’est pas en reste d’érudition et remonte allègrement les siècles pour nous enchanter. Je vous avertis que quand Lapouge vous tient il ne vous lâche plus et que l’on file doux 

    Un livre qui en en même temps fable philosophique, essai scientifique mais surtout une fantasia poétique et amoureuse.

     

    Le livre : l’âne et l’abeille - Gilles Lapouge - Editions Albin Michel 

     

  • Les oies des neiges - William Fiennes

    Oie_neiges2.jpg

     « Notre instinct est de revenir au bercail. Les oiseaux migrateurs ne voyagent pas pour le plaisir. Ils se déplacent entre les lieux d’hivernage et d’estivage, parce que l’axe de notre planète n’est pas perpendiculaire au plan de son orbite autour du soleil. »

     

    Comment nait une passion chez un homme ? Parfois totalement accidentellement.

    William Fiennes (pour les curieux oui oui c’est le cousin des Fiennes acteurs) fait de nombreux séjours à l’hôpital il lit beaucoup. Il tombe sur un livre d’enfant, lu il y a bien des années : l’ Oie des neiges.

    Ce livre va activer en lui une envie forte, « J’ai imaginé une quête, un vol : un voyage avec les oies des neiges jusqu’à l’océan Arctique »

    Pour un convalescent voilà bien un programme un peu intrépide mais son envie est très forte.

    Au printemps et à l’automne des milliers d’oies entament leur long voyage entre Golf du Mexique et la Baie d’Hudson. Ce sera donc notre chemin.

     

    oies.jpg

     « J’ai vu apparaître les oies des neiges comme une promesse tenue »

     

     

    Nous allons tel Nils Holgerson suivre les oies des neiges et entrer dans un monde où les oiseaux sont les rois.

    William Fiennes va utiliser des moyens de transport variés du bus Greyhound en passant par le train et la voiture. Il tente de ne jamais lâcher les oies des yeux et pour cela passe parfois plusieurs jours en un lieu comme au bord du Sand Lake.

    Au fil des kilomètres il croise des passionnés d’ornithologie, des serveuses de bar, Eléonor et sa chambre d’hôte, Michael du Fish and Wildlife service qui « savait exactement dans quel ordre tout ce monde ailé reviendrait au printemps », et son carnet de voyage s’enrichit des ses rencontres, d’anecdotes, de réflexions, de données scientifiques.

     

    Quand le voyage s’étire un peu trop il est atteint de nostalgie et c’est l’occasion pour lui de faire des parallèles avec la migration des oiseaux et leur envie de voyage et de retour en alternance. Les migrations des oiseaux ont toujours fasciné les hommes. 

    Les paysages sont magnifiques, l’hiver s’efface petit à petit pour laisser place à un printemps tardif au fur et à mesure de la montée vers le nord.

     

    SnowGeese_FR-FR536547936.jpg

     « Des milliers d’oiseaux de phases bleue et blanche étaient massés sur la glace au milieu du lac, formant un gigantesque dessin en amande qui s’effilait à ses extrémités nord et sud. Leurs têtes étaient levées bien haut, leurs cous tendus, perpendiculaires à la glace. De près le bruit n’était plus qu’un vacarme sauvage et  universel, les appels se propageaient sur la glace comme des billes roulant sur une plaque métallique. »

     

    Livre de passion et de savoir. William Fiennes le solitaire nous restitue de façon vivante un monde magnifique et il nous fait participer à son errance, à celle de ces oiseaux majestueux qui sillonnent le ciel par milliers.

    Ce livre va aller rejoindre Rick Bass et Dan O’Brien dans ma bibliothèque

     

    Tous savoir ? c'est ici

     

    13915280175305d8f591da0.jpg

    Le livre : Les oies des neiges - William Fiennes - Editions Hoëbeke 2014

  • Les abeilles et la vie - D Van Cauwelaert et J C Tessier

     Ruchers-Luxembourg-Paris.jpg

    Le rucher du Luxembourg

    Il y a quelques temps j’ai eu l’occasion de rencontrer un couple qui faisait de l’apiculture à...Paris, propriétaire d’une ruche ils récoltaient leur miel.

    Cela m’avait amusé. Bien entendu comme vous j’ai suivi les péripéties de la lutte inégale entre apiculteurs et fabricant d’insecticides, vous savez ça commence par un M ...Ils ont obtenu gain de cause mais pour une période limitée.

    Grand-Palais-Ruches-8_432.jpg

    Sur le toit du Grand Palais

     

    Quand ce livre sur les abeilles est arrivé sur les tables de ma médiathèque j’ai foncé dessus. Il n’est pas récent mais cela n’enlève rien à son intérêt et en plus il est magnifique

     

    En premier les photos de Jean-Claude Tessier sont vraiment extraordinaires, je vous en mets deux seulement pour ne pas abuser. mais je vous mets un lien vers une vidéo qui vous mettra l’eau à la bouche.

    Didier Van Cauwelaert dit que c’est une rencontre avec Rémi Chauvin grand spécialiste des abeilles qui lui a donné envie de faire les textes de ce livre.

    On remonte avec lui le temps, des millénaires en arrière les hommes représentaient déjà la récolte du miel.

     

    photo 1-2.JPG

                                         © Jean-Claude Tessier 

     

    Savez-vous qu’elles sont apparues au Crétacé en même temps que les fleurs. Mais savez vous que plus de 80% des fruits et légumes disparaitraient si les abeilles disparaissaient ?

     

    Leur organisation est fascinante, on connait le rôle de la Reine mais j’ai appris dans ce livre qu’elle était capable par la production de phéromones de stériliser à distance les ouvrières pour qu’elles soient bien concentrées sur leur travail ! mais attention les abeilles de la ruche peuvent suite à une sorte de référendum obliger une vieille reine à partir, certaines ouvrières vont la suivre et d’autres restées avec la nouvelle candidate !! Hum ça vous rappelle peut être quelque chose ?

     

    photo 2-2.JPG

                                    © Jean-Claude Tessier 

     

    " On a dit, convaincu par toutes ces merveilles
    Qu'un peu d'âme divine habitait les abeilles"

    Virgile - Les Georgiques

     

    Les abeilles sont de vraies sentinelles de l’environnement nous dit Didier Van Cauwelaert.

    Une ouvrière occupe des emplois multiples : butineuse, mais aussi femme de ménage, garde du corps et nourrice. Elle est aussi architecte d’alvéole...Elles ont un grand rôle dans le maintien d’une température régulière dans la ruche, les ventileuses maintiennent à 37 degré les lieux été comme hiver, une clim réversible ET non polluante ! Pour tout cela les abeilles calculent en permanence, elles sont des GPS ultra sophistiqués, la puissance de calcul d’une ruche c’est 5 fois la capacité d’un cerveau humain.

     

    Si les abeilles vous sont sympathiques ou si vous voulez faire un cadeau à un amateur de « chasses subtiles » c’est un très bon livre.

     

    Mais vous pouvez aussi vous lancer dans l'apiculture ici

    La vidéo

    9782749920382FS.gif

     

    Le livre : Les abeilles et la vie - Didier Van Cauwelaert et Jean-Claude Tessier - Editions Michel Lafon

     

  • Un an dans la vie d'une forêt - David G Haskell


    haskell.jpg

    © David Haskell

    Deux moines tibétains dessinent un mandala avec du sable coloré. Ils vont lentement observent avant d’agir, d’abord un dessin d’ensemble puis les détails.

    Maintenant imaginez que vous êtes biologiste, comme ces moines vous vous fixez un coin de nature, une zone bien délimitée mais qui est capable par sa richesse de représenter le monde vivant, plantes et bêtes. 

    « J’a choisi l’emplacement en marchant au hasard jusqu’à trouver un rocher où m’asseoir. L’espace devant moi est devenu mon mandala. »

     

    sewanee.jpg

    Sewanee Tennessee

     

    L’observation de cette parcelle forestière de 1 mètre carré est votre nouvel espace de travail, nous sommes dans les forêts des Appalaches

    Notre biologiste choisit une petite fenêtre pour contempler le monde. Il se fixe quelques règles :

    « y venir aussi souvent que possible, observer le déroulement d’un cycle annuel, garder le silence, déranger le moins possible, ne pas tuer d’animaux ni en évincer, ne pas y creuser ni y pénétrer, ne m’autoriser qu’un simple effleurement des doigts. »

     

    pcreek8.jpg

                                       Les lichens © David Haskell

     

    Nous lecteurs, allons le suivre dans ce voyage fantastique vers l’infiniment petit, l’infiniment simple et l’infiniment complexe de cette forêt primitive. Une grande richesse écologique et une grande diversité biologique nous attendent.

    Dans ce carré de forêt presque chaque jour notre biologiste va aller s’asseoir et tenir un journal, c’est là l’objet de ce livre.

     

    Prenons donc la route en direction de Sewanee dans le Tennessee.

    Au fil des pages David Haskell nous fait découvrir la vie qui grouille sous les feuilles, la physiologie des lichens comme la façon de se nourrir des cerfs, la coopération qui existe parfois entre les occupants du mandala. Nous subissons la neige, des trombes d’eau, « les assauts du vent », la chaleur estivale et même un tremblement de terre. 

    Quand il pleut le mandala se transforme en  « Serengeti à mollusques », les fleurs sortent à profusion aux premiers jours d’avril et elles se déploient « Ce matin la tige a la forme d’un élégant point d’interrogation, toujours recouvert de duvet, la fleur bien close suspendue à l’extrémité de sa

    courbe ».

    champignons.jpg

     

                                              © David Haskell

           « La science approfondit notre intimité avec le monde »

     

    La civilisation se rappelle parfois brutalement à lui, comme avec cette balle de golf venant perturber le fragile équilibre de son mandala biologique.

    Il lève parfois la tête pour apercevoir « le vol de l’épervier brun ». Il nous dévoile le combat pour la vie qui se déroule sous ses yeux scrutateurs, il nous révèle les miracles d’une nature foisonnante, papillons et champignons, arbres et fleurs, tout est bon pour nous transmettre un message « Toutes nos actions font des vagues et les effets de nos désirs se répercutent à travers le monde ».

    salamandre.jpg

    © David Haskell

          « La salamandre luit comme si un rayon de soleil l’illuminait »

     

    Ce journal est passionnant de bout en bout, savant, érudit, il sait nous apprendre la vie mais sait faire sa leçon avec l’âme d’un poète.

    Dans les interviews il dit que c’est sa femme qui lui a fait regarder la nature avec empathie, elle qui est artiste, biologiste, éleveuse de chèvres et fabricante de savon ! Qu’elle en soit remerciée.

    Je suis sûre que David Haskell est un lointain cousin d’ Henry D Thoreau, d’Annie Dillard ou encore d’Aldo Léopold dans son lointain Comté des sables.

    Si l’on veut faire un peu de chauvinisme on peut aussi le rapprocher de Jean-Henri Favre et ses Souvenirs entomologiques.

     

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque

     

     

    9782081334243FS.gif

     

    Le Livre : Un an dans la vie d’une forêt - David G. Haskell - Traduit par Thierry Piélat - Editions Flammarion 2014