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Poésie - Page 11

  • Arpenter le paysage - Martin de la Soudière

    Je voudrais que vous fassiez connaissance avec Martin de la Soudière, j’avais déjà croisé l’auteur grâce à un livre sur les saisons et celui qu’il vient de publier m’a aussitôt attiré. 

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    Arpenter le paysage nous propose-t-il, j’aime la marche ou plutôt je l'ai aimé, la nature, la poésie des lieux, la peinture de paysages, les descriptions magnifiques de certains auteurs donc je me suis embarquée.

    La première partie du livre est faite des souvenirs d’enfance de l’auteur, on entre ainsi en paysage avec lui à travers ses souvenirs de vacances dans les Pyrénées, randonnées, promenades, balades en vélo, en famille. 

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    La vallée de Vicdessos

    On ne s’ennuie pas un instant, il faut dire que parfois le récit tient un peu des Pieds Nickelés.
    On égrène avec lui les observations faites au fil du temps, les grands bonheurs lors de l’arrivée au sommet, et aussi les petits malheurs lorsque rien ne se déroule comme prévu. C'est un vrai apprentissage initiatique.

    Le récit est fait de mille anecdotes familiales ponctuées de citations, de fragments de poésie, de noms d’auteurs pas toujours des plus connus. L’auteur a déclenché mes souvenirs  de randonnées pyrénéennes dans les gorges de la Carança, un lieu qui me fascinait enfant.

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    Les gorges de la Carança

    Ensuite Martin de la Soudière élargit son propos. Il nous propose de suivre des arpenteurs, des flâneurs, des promeneurs. Moi quand on m'invite chez les écrivains du voyage je ne peux pas résister.

    Jean Loup Trassard en Mayenne, Julien Gracq en bord de Loire, Fernando Pessoa, André Dhôtel dans ses Ardennes ou Philippe Jaccottet dans sa garrigue drômoise.

    Julien Gracq en bord de Loire

    L’universitaire bien sûr glisse quelques remarques sérieuses ici ou là, j’ai retrouvé avec plaisir Elisée Reclus par exemple, mais il laisse place bien vite à l’amoureux des paysages, au passionné de littérature.  

    Avec lui on se fait botaniste, géologue, on avance au rythme lent des arpenteurs, on apprend avec le géographe, on crapahute avec le montagnard, on rêve avec le poète.

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    Le pays où l'on n'arrive jamais

    Vous êtes en bonne compagnie : bergers, taupiers, militaires, cartographes  ou ethnologues. 
    C’est passionnant et cela éveille de nombreux souvenirs, les livres de Marie Hélène Laffon, les écrits de Giono, les films de Raymond Depardon. 

    Le livre a déclenché chez moi tout une série d’images et de lieux oubliés parfois, de sensations et d’émotions. 
    Un château médiéval en ruine dans un coin de Vaucluse, le parfum d’une forêt de pins, le froid glacial d’un ruisseau pyrénéen, la sauvagerie des Causses.

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    Le château de Boulbon dans le Vaucluse

    souvenirs de lectures d'enfant dans l'odeur des pins

    Vous avez envie de vous plonger dans les auteurs cités, d’en découvrir d’autres, de mêler avec bonheur le savoir et l’imagination. 

    La plume est belle, sérieuse et légère à la fois, elle éclaire petit à petit la notion de paysages. Le genre de livre que vous fermez en vous sentant un brin plus intelligent, plus sensible à ce qui vous environne. Il vous rend le paysage intime. 

    Un beau livre dont la couverture est munie d’un large rabat qui sert de marque-pages

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    Le livre : Arpenter le paysage - Martin de la Soudière - Editions Anamosa

  • Tour d'horizon - Kathleen Jamie

    Depuis la lecture de ses premiers écrits j'ai mis une veille sur l’auteur et toc voilà un recueil de textes brefs dans la même veine que son premier livre.

    Kathleen Jamie nous entraine à sa suite d’île en île, dans des lieux où je n’avais même jamais rêvé d’aller mais j’ai suivi cette écossaise bon teint, cette poétesse des choses de la nature avec un grand plaisir.

    Jumelles en main Kathleen tient là son rôle d’observatrice : depuis les aurores boréales, les ruines de villages à l’abandon, d’éclipse de lune jusqu’à une colonie de Fous de Bassan.

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    « D’un vert lumineux de la couleur du plumage d’une sarcelle, l’aurore boréale scintille presque immédiatement au dessus de nos têtes. Elle se développe dans la nuit étoilée comme l’haleine projetée contre un miroir (…)D’abord c’est un voile émeraude puis cela prend la forme d’un cocktail à la menthe. »

    Elle sait regarder y compris ce qui ne devrait pas être dans le paysage, comme cet aileron qu’elle ne cherchait pas mais qui est bien là.
    Sa pensée vagabonde au gré de la lumière du jour, de l’infiniment petit à l’infiniment dangereux.

    jamie

    Cette  auteure est une éveilleuse qui sait nous faire admirer le monde dans toute sa diversité, ses mystères. Elle sait le faire avec légèreté, allègrement, sans fioritures aucunes.
    « Continuez à regarder, même quand il n’y a pas grand-chose à voir. Ainsi votre œil apprend ce qui est normal, et quand quelque chose d’anormal apparaîtra, votre œil le repérera. » 

    J’aime les îles et en particulier celles du nord de l’Europe, alors là c’est un festival  Saint Kilda, Rona, North Mains, je vous laisse chercher où tout ça prend forme au milieu des eaux agitées de l’Atlantique ou dans les eaux fraîche de l’Arctique

    jamie

    « Les falaises biscornues de Saint Kilda sont à nouveau apparues à l’horizon »

    J’ai aimé ces textes simples, dépouillés même et à hauteur de …femme. Elle ne se paie pas de mots mais elle parvient à faire vibrer ses textes.

    jamie


    « Il se dégage des montagnes, de la glace et du ciel, un silence minéral qui exerce une puissante pression sur nos corps. C’est un silence ­venu de très loin, effrayant, qui fait ressembler le bruit sous mon crâne au cri d’une oie criarde. J’aimerais réduire mon esprit au silence, mais je pense que cela prendrait des années »

    jamie

    Musée de Bergen

    Il y a un rien de magie dans ses écrits, elle est habitée par les légendes celtiques, alors suivez là faites vous ornithologue, ou archéologue et parcourez avec elle le Groenland, les Féroé, les Hébrides ou un musée un rien poussiéreux, tout est bon pour célébrer la terre, le « paysage de mer grise et de ciel blanc rincé de pluie et hanté d’oiseaux » ou bien les pluviers, les fulmars et autres oiseaux des mers. 

    jamie

    Le livre : Tour d’horizon - Kathleen Jamie - Traduit par Ghislain Bareau - Editions La Baconnière

     

  • Ecoutez Ovide et Lucrèce

    ovide,lucrèce

    La littérature antique n’attire pas les foules.
    Je sais qu’en matière de livre audio la majorité des adeptes va préférer un roman mais ……

    Tentez l’expérience et peut être l'écoute vous donnera envie de lire Les Métamorphoses ou De natura rerum. 

    ovide,lucrèce

    Mon chemin vers les livres

    Qu’est-ce qui m’a mené vers ces deux livres audio ? 

    Un intérêt toujours vif pour Ovide, j’ai suivi un cours d’histoire de l’art il y a quelques années et j’avais été stupéfaite du nombre d’oeuvres qui arrivent en droite ligne de chez Ovide. 
    Peintures et sculptures pleuvent pour illustrer les Métamorphoses et c’est sans rien dire des poètes qui les ont exploitées tant et plus.

    ovide,lucrèce

    C’est l’histoire du monde que vous allez écouter.
    Savez-vous qu’exilé au bord de la mer noire, Ovide brûla son livre de désespoir, heureusement des copies avaient été faites par ses amis ! 

    Pour lire une oeuvre comme celle-ci il fallait un grand lecteur, Michel Vuillermoz est parfait dans l’exercice, sa voix, sa diction, son rythme tout est réussi.
    C’est une jolie collaboration entre Frémeaux éditeur de livres audio et Les Belles Lettres éditeurs des grands classiques de l’antiquité.

    ovide,lucrèce

    Et bien sûr vous pouvez choisir de le lire 

    Le second livre est plus encore un bel exercice, car non content d'avoir la lecture audio de l’oeuvre de Lucrèce, on a en prime une traduction renouvelée et magnifique de Bernard Combeaud.

    Le titre d’ailleurs a changé, De natura rerum est devenu La naissance des choses, un beau titre.

    ovide,lucrèce

    La traduction papier de Bernard Combeaud peut encore se commander à la librairie Mollat mais je ne l’ai pas trouvé en vente ailleurs.

    Lucrèce c’est le mélange de la poésie et de la philosophie, magnifiquement retraduit et en vers ce qui touche à l’exploit, le livre est lu par Denis Podalydès, gage de lecture parfaite.

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    la naissance du monde vu par Dali

    J’ai découvert le livre de Lucrèce tardivement mais je suis immédiatement tombé sous sa coupe, le poète qui sait masquer le goût un rien amer de la philosophie sous un miel de poésie, ce n’est pas moi qui le dit, c’est lui.

    Pour en savoir plus je vous renvoie à ma chronique ici

    Parfois il faut saluer les éditeurs après qui je râle parfois, merci aux Editions Mollat et Frémeaux pour ces deux belles réussites

     

    Je vérifie encore une fois ici le plaisir qu’il y a à lire par ricochets 
    Bonne découverte et bonne écoute 

  • Gaspard de la nuit - Aloysius Bertrand

    Il vous est certainement arrivé de découvrir un livre qui vous fait dire : mais pourquoi est-ce que je n’ai jamais lu ce livre ? Cela vient de m’arriver avec celui d’un poète qui fut l’homme d’un seul livre, un poète qui préfère la prose à la versification, admiré par Hugo et Baudelaire et qui a inspiré les surréalistes. 

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    Si vous ouvrez son livre vous partez pour quelques heures de folie, de délire, de scènes pleines de mystères et de merveilleux. 
    6 livres composent Gaspard de la nuit, avec chacun plusieurs petits textes, qui parfois répondent à une logique, mais pas tous loin de là.

    On saute d’une scène à l’autre, d’un lieu à un autre sans explication, comme pour déstabiliser le lecteur et le faire participer sur un rythme de sarabande soigneusement orchestrée.

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    Les passionnés de peinture s’y sentiront à l’aise car Aloysius Bertrand vous offre des « Fantaisies à la manière de Rembrandt et Callot » et de Jérôme Bosch
    Rembrandt pour le vieux sage en méditation, Callot qui aime le grotesque, le baroque, la folie.

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    Jacques Callot les Misères de la guerre

     Aloysius Bertrand ne décrit pas un tableau, il tente d’en saisir l’esprit. 
    « Trente dindelles carillonnent dans un ciel bleu d’outre-mer comme en peignait le vieil Albert Dürer »

    Des scènes de guerre, des personnages grotesques, des paysages d’hiver, des scènes que l’on a admiré dans des tableaux flamands de tout temps, féérie des contes et légendes. 

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    Des textes qui font retentir une volée de cloches, qui vous envoient faire un tour à la synagogue.pour la Sabbat, vous font sauter des Flandres à l’Italie, ou regarder au fond de la cornue d’un alchimiste. 

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    Ou les couplets surprenants et l’astuce magnifique qui fait clore un poème avec le « regard inquisiteur du duc d’Albe dont le portrait, chef-d’œuvre d’Holbein, était appendu à la muraille. »

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    Le duc d'Albe

    Le poète propose des énigmes et aussi de courtes balades dans le Paris des gueux, aux alentour de la Tour de Nesle, vous vous mêlé aux fous du carnaval, aux nains, au peuple de la cour des miracles, étonnez vous ensuite qu’un chapitre soit dédicacé à V Hugo 

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    On habite le récit, on croise un marchand de tulipes qui a un trésor « la merveille des merveilles, un oignon comme il n’en fleurit jamais qu’un par siècle dans le sérail de l’empereur de Constantinople ! »

    On tend la main vers un marchand, on lui ferme sa bible « jonchée de gothiques enluminures » 
    C’est un livre peuplé de vieux grimoires, de chouettes, de « nuits d’été, balsamiques et diaphanes »

    Vous vous constituerez une collection de mots rares, précieux, vous savourerez des mots comme : 
    Dindelles, basterne, violier, falot, ringrave …..

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    C’est Freud qui a parlé de l’inquiétante étrangeté, c’est un peu ce que l’on ressent en lisant A Bertrand.   

    Après lecture, revenez à la préface qui donne quelques clés, mais ne vous privez pas d’une découverte sans GPS, c’est la meilleure. 

    Et vous pouvez décider de finir en musique avec Ravel qui se laissa prendre à la magie de Gaspard de la nuit.

     

             

     

    Le livre : Gaspard de la nuit - Aloysius Bertrand  - Le livre de poche

     

  • Bribes de bleu

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    « A part le grand aconit, une scille, un lupin, une nivelle, la véronique petit-chêne, le lobélia, et le convolvulus qui triomphe de tous les bleus, le Créateur de toutes choses s’est montré un peu regardant quand il a distribué chez nous les fleurs bleues. »

    colette

    Pas que les fleurs

    « Il y a des connaisseurs de bleu comme il y a des amateurs de crus.
    Quinze étés consécutifs à Saint-Tropez ne me furent pas seulement une cure d’azur, mais une étude aussi qui ne se bornait pas à la contemplation du ciel provençal. »

     

    Le Livre : Pour un herbier - Colette- Editions Fayard 1991

  • Sagesse de l'herbe - Anne Lemaître

    Il y a quelques semaines je vous ai donné un avant goût de ce livre, il est temps de vous donner envie de le lire, de l’offrir.

    C’est à pied qu’Anne Le Maître découvre son environnement.

    Voyages lointains, rando ou simple promenade, tout est l’occasion pour elle de partir nez au vent, de marquer le pas pour observer, s’évader, trouver un refuge, répondre à son besoin de calme, de silence. 

    Lemaitre

    Elle part avec de la poésie et de la philosophie dans ses bagages et dans sa tête. La Fontaine et Pascal l’accompagnent mais aussi Rûmi le poète persan

    «  Je suis la lueur de l’aube. Je suis l’haleine du soir. 
    Je suis le murmure du bocage, la masse ondoyante de la mer…
    Je suis la chaîne des êtres, je suis l’anneau des mondes.
    Echelle de la création, l’ascension et la chute…
    Je suis l’âme de tout. »

    Lemaitre

    Elle aime contempler, méditer en compagnie des poètes mais aussi des savants quand, comme Ptolémée surtout, ils savent mettre le monde en mots
    « Moi qui passe et qui meurs, je vous contemple étoiles !…Debout tout près des cieux dans la nuit aux cent voiles, je m’associe infirme à cette immensité :  je goûte, en vous voyant, ma part d’éternité. »

    On la suit de la forêt amazonienne aux gravillons de sa cour.

    « Tous ces chemins, donc, tous ces jardins et ces vergers, ces marécages et ces bois, ces friches et ces alpages, ces landes et ces déserts…Dans l’infini vertigineux j’avance pas à pas, allant d’un battement de coeur à l’autre »

    Lemaitre

    Anne Lemaître marche nous dit-elle «  au péril de l’herbe et du vent. » Pour tenter de renouer avec la sagesse de l’herbe. Déchiffrer un paysage, se pencher sur une fleur. 

    Si vous la suivez vous apprendrez que «  Nos mots sont nos lunettes, le filtre que la pensée pose devant le réel. » C’est ainsi que j’ai appris que les néerlandais ont un mot pour dire « marcher par mauvais temps pour le plaisir : uitwaaien »

    Lemaitre

    Livre précieux et délicieux, tout bruissant d’anecdotes, de rencontres, de lectures aussi.
    Vous verrez défiler les saisons, éclore les premières primevères, vous dénicherez avec elle un crocus, vous prendrez le temps de flâner, de vagabonder.
    Une très belle photo en couverture qui s’accorde parfaitement avec le propos du livre

    A lire sur le bord d’un chemin, quand l’envie de ralentir vous prend, à glisser dans votre sac à dos ou simplement comme moi à lire pour explorer avec elle les chemins.  

    Lemaitre

    Le livre : Sagesse de l’herbe - Anne Le Maître - Editions Transboréal