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Biographie Correspondance journaux - Page 19

  • Dans le jardin de la bête - Erick Larson

    Berlin 1933

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    Depuis très longtemps je lis autour de la Seconde Guerre mondiale, que ce soit des biographies, des romans ou des essais historiques. 

    Dans ses « voyages dans le Reich » Oliver Lubrich avait évoqué le témoignage d’une fille d’ambassadeur qui avait attisé ma curiosité.

    Le livre d’Erik Larson a été la façon parfait d’en savoir un peu plus sur les débuts du nazisme et surtout sur le regard porté sur le phénomène par les américains.

     

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    1933 William Dodd est nommé ambassadeur à Berlin, il y restera jusqu’en 1937. Il n’est pas du tout issu de la classe politique dirigeante, c’est un universitaire tranquille, historien de formation, sa parfaite connaissance de la langue allemande à joué en sa faveur mais disons le il devient diplomate par hasard et au pire moment. 

    Il part à Berlin avec sa femme, son fils et sa fille Martha, une belle jeune femme de 28 ans.

    Le livre d’Erik Larson va nous restituer l’ambiance qui règne alors dans l’entourage de Roosevelt où l’antisémitisme n’est pas absent. Il va nous brosser un tableau qui s’assombrit au fil du temps des relations entre le personnel de l’ambassade américaine et les dignitaires nazis

    L’évolution va être lente pour William Dodd, tout d’abord sceptique quant aux exactions allemandes il reste d’une neutralité et même d’une grande bienveillance envers les nazis.

    Il a beaucoup de mal à croire aux rapports qui s’accumulent sur sa table de travail. 

    Martha, elle, est totalement séduite par ce nouveau régime, elle s’affiche en compagnie de Rudolph Diels alors chef de la Gestapo.

     

     

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    Autodafé  Mai 1933

    Ce gros livre se lit comme un roman policier, on a peine à croire à l’aveuglement dont on sait pourtant aujourd’hui toute la réalité.

    Au crédit de William Dodd mettons que ses yeux se désillent après la Nuit des longs couteaux, ses messages à la Maison Blanche sont de plus en plus pressants et de moins en moins complaisants. Il alerte sur les intentions d’Hitler de sans doute se débarrasser de tous les juifs. 

    Roosvelt et le gouvernement américain font la sourde oreille et acceptent sous la pression des allemands de rappeler l'ambassadeur.

     

    Erik Larson a réussi un excellent livre basé sur un important travail de recherche. Les notes envoyées par l’ambassadeur, le journal tenu par Martha ont été largement utilisés. Il parvient à nous faire pénétrer au plus près de ceux qui auraient pu encore à ce moment là éviter le pire à l'Europe. 

    Le contraste est saisissant entre William Dodd, homme de principes, droit, qui peu à peu perd ses illusions, et sa fille qui papillonne d’amants en amants jusqu’à tomber dans les bras d’un espion soviétique.

    L’atmosphère du Berlin de cette époque est parfaitement restitué,  de l’insécurité régnant dans les rues, de la peur qui monte même parmi l’élite, à la vie trépidante et joyeuse des  des nazis en place.

     

    C’est un livre passionnant et utile que je vais ranger aux côtés de celui d’Oliver Lubrich et d’Erika Mann.

    Pour finir de vous convaincre lisez les billet de Keisha ou Clara 

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque 

     

     

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    Le livre : Dans le jardin de la bête - Erik Larson - Traduit par Edith Ochs - Editions du Cherche midi

  • Lettres d'amour - Lues par Jacques Weber

    Ecrire la passion

     

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                                               Hugo à Juliette Drouet

     

    Alors que je cherchais comment composer ce thème de la passion, ce livre audio m’a tendu les bras à la bibliothèque

    Le nom de Jacques Weber était gage d’une belle lecture 

     

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                              JH Fragonard la lettre d'amour Métropolitan museum 

     

    Jugez du programme : Flaubert, Hugo, Napoléon, Baudelaire, Diderot et Voltaire : qui dit mieux ?

    Ecoutez la voix de la passion, du désir, des adieux, des plaisirs charnels……

     

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    C’est un voyage parfois d’une grande douceur, parfois tonitruant. 

    Lettres destinées à la tendre amie, à l’unique. Lettres provocant le chaos ou l’ivresse, les pleurs ou la félicité………..

     

     

    Laissez vous prendre au jeu.

     

    Le Livre audio : Lettres d’amour - Lues par Jacques Weber - Editions Thierry Magnier

  • Et qu'un seul soit l'ami La Boétie - Jean-Michel Delacomptée

    L'un et l'autre : Montaigne et La Boétie

     

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                                           Sarlat maison de La Boétie

     

    Dans une courte présentation de ce livre Olivier Barrault parle de fraternité d’élection pour cette collection on peut étendre l’expression à l’amitié dont il est question ici.

    L’amitié de Montaigne et La Boétie tient de la légende pourtant La Boétie reste un peu mystérieux, seul persiste son Discours sur la servitude volontaire. 

     

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                                     "Parce que c'était lui "   © Pascal Moulin

     

    Jean-Michel Delacomptée se dit insatisfait des protestations d’amour de Montaigne pour La Boétie, il revient ici  sur la personnalité et la vie de La Boétie et sa rencontre avec Montaigne.

    La Boétie était laid mais pourtant « jouissait d’une autorité naturelle qui, malgré sa modestie, le portait sur le devant » 

    C’est un beau personnage ! une « extrême droiture » et un « extrême souci du bien public ». 

    On ne sait pas précisément ce qui le poussa à écrire et plusieurs hypothèses sont envisagées mais les convulsions de l’époque sont nombreuses et trois évènements peuvent être à l’origine du Discours : un soulèvement des gabelous en Guyenne écrasé dans le sang,  la condamnation au bûcher d’Anne du Bourg conseiller au Parlement, les abus d’autorité du roi. 

    Son Discours sera repris ensuite par les protestants comme un étendard pour leur cause et la défense de leurs droits.

     

    La Boétie et Montaigne ont à peu de chose près le même âge, entre un gentilhomme campagnard qui est encore loin de l’homme de lettres et ce « Rimbaud de la pensée » qui écrivit à 20 ans un texte subversif qui aujourd’hui encore réveille les passion, l’amitié naît dès la première rencontre « toujours la seule qui compte. Si elle imprime en nous, si elle nous dicte sa loi, c’est que l’amitié, comme l’amour, consiste en une fidélité à une émotion initiale, à une grâce, manière de figer le temps en se restant identique à soi-même ».

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                                         "Parce que c'était moi"

     

    Une amitié qui « tend à la fusion des biens et des mots ». Une amitié floue car « jamais Montaigne ne décrit concrètement un moment qu’ils auraient partagé, un épisode, un acte, un décor, des propos quotidiens » 

    L’auteur nous dit que chez Montaigne, La Boétie n’est qu’un esprit « c’est le pur esprit d’une amitié pure »

    Il occupera finalement une place assez réduite dans les essais, le superbe chapitre sur l’amitié et le récit de son agonie. 

    Une amitié de peu d’années qui laissera à Montaigne l’écriture en héritage, un héritier qui sera alors capable dit Jean-Michel Delacomptée « de passer du lui au moi »

     

    Un très bel essai qui éclaire la personnalité de celui qui fut « l’ami parfait ».

     

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    Le livre : Et qu'un seul soit l'ami  La Boétie - Jean-Michel Delacomptée - Editions Gallimard l'un et l'autre
  • La Grandeur Saint-Simon - Jean-Michel Delacomptée

    L'un et l'autre 

     

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    En Pléiade c’est 8 ou 9 volumes, pas certaine que vous êtes prêts à vous embarquer dans une aventure aussi longue, aussi je vous propose une version raccourcie, très très raccourcie.

    Jean Michel Delacomptée est le spécialiste chez Gallimard des microbiographies, j’ai lu avec grand intérêt son livre sur Ambroise Paré et j’ai dans ma bibliothèque plusieurs essais de lui. 

    C’est une vraie gageure de parler de Saint Simon de façon aussi simple et percutante et en un nombre de pages très réduit. C’est un art et l’auteur y excelle.

    Comment s’y prend t-il pour nous faire entrer dans le coeur de l’oeuvre ? 

    Il nous le situe dans son siècle, sa vie même et il s’interroge sur le projet que Saint Simon mêne à bien à un âge déjà avancé, il nous dit « A partir de quel moment un écrivain, chargé d'un projet longuement fermenté mais qui lui résiste, finit par se lancer et, d'une traite, le réalise ? »

     

    Songez que Saint-Simon commence à écrire vraiment alors qu’ il a plus de soixante ans  « A soixante quatre ans (...) Louis de Saint-Simon rompant les amarres, s'élança dans l'océan »

    Son oeuvre s’achèvera pratiquement avec sa vie.

     

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                           Le château en 1668 Pierre Patel

     

    Il nous présente des Mémoires de Saint-Simon les portraits les plus incisifs, ces portraits tantôt méchants, tantôt méprisants de la cour et des courtisans avec lesquels il partageait le vivre et le couvert. Si vous avez vu le film tiré du roman de Chantal Thomas, Les adieux à la Reine, vous avez eu une idée de ce qu’était la vie quotidienne à Versailles. 

    Saint-Simon  a l’oeil qui traîne partout et la dent dure, la santé à l’époque était précaire mais il a pour le moins conservé une bonne mâchoire, ses coups de dents sont saignants. Son mariage lui permet de résider au château de Versailles, d’être un courtisan, de ceux qui peuvent approcher le Soleil.

     

    Le tout est mis en mots avec une langue extraordinaire « Une langue écrite par le vieil homme, mais qui était si neuve, si vibrante de passion, si chargée de la grandeur même du règne dont il blâmait les tares. »

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    Les courtisans 

     Cet homme d’une fidélité exemplaire, il admire Louis XIII qui pour lui fut « chaste, désintéressé, modeste, sobre, charitable »  Il est aussi capable d’inimitiés terribles et de rancunes tenaces et il dit de Louis XIV que c'était un roi à l'esprit  « au dessous du médiocre »

    A la mort du Grand Dauphin il sait que la place sera libre pour Philippe d’Orléans qui est son ami et il le dit « Il me semblait, avec une évidence encore plus parfaite que la vérité, que l'État gagnait tout en une telle perte. Parmi ces pensées, je sentais malgré moi un reste de crainte que le malade en réchappât, et j'en avais une extrême honte. »

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                              Louis de Rouvroy Duc de Saint-Simon

     

    Jean-Michel Delacomptée avec un titre parfaitement choisi, nous dresse un portrait tout en nuances « Grandeur modeste par son altruisme, ambitieuse par son objectif, audacieuse par l'exposition de soi , avec pour clé de voûte la franchise, la véracité des faits rapportés et l'honnêté morale » 

    Son portrait m’a rappelé celui de La Fontaine par Marc Fumaroli, une même célébration de la langue, une même admiration de l’homme, une même nostalgie d’un passé révolu et magnifiquement ressuscité.

     

    Le livre : La Grandeur Saint-Simon - Jean-Michel Delacomptée - Editions Gallimard collection l’un et l’autre 

  • Une matinée chez le libraire - Carl Jacob Burckardt

    Liber, libraire, librairie........

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    Sur le thème de la librairie voici un petit livre que j’ai toujours gardé car il me réjouit.

     

    Imaginez deux amis flânant dans les rayons d’un bouquiniste, une vieille vieille librairie « Une boutique étroite et obscure où les livres s’entassaient des deux côtés, jusqu’au plafond. Ils occupaient aussi les longues tables branlantes et recouvraient le sol dans les coins. » 

     

    Le libraire « un petit homme âgé » s’approche à regrets car il a été contraint d’abandonné sa lecture.

    Là commence une conversation qui passe de Ronsard à Nietzsche, on vilipende Malherbe, le temps de s’extasier sur Racine et le libraire finit par poser la question : Qui êtes-vous ? 

    Et la réponse simple du client :  un poète allemand.

     

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                      Rainer Maria Rilke  © dessin de Christian Serrano

     

    Et voilà qu’arrive un autre client. Quelle guigne, mais non simplement la conversation s’élargie.

    Alors c’est l’effervescence et l’on saute allègrement de Villon à La Fontaine, Valéry et Hölderlin. On évalue les qualités des traductions.

    Parfois il y a dissension entre le poète, le libraire et le nouvel arrivant et cela donne lieu à des échanges enflammés. On finit pas se retrouver autour d’une poularde et d’une bouteille de champagne

    Un poète qui n'est autre que Rainer Maria Rilke, un historien, Monsieur Augustin le libraire et Lucien Herr bibliothécaire de l’Ecole Normale supérieure ……C’était dans le Paris de 1924. 

     

    Le livre de Carl Jacob Burckhardt a un charme certain et un peu suranné. Ce texte est complété par des « Souvenirs de Rainer Maria Rilke » 

     

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    Le livre : Une matinée chez le libraire - Carl Jacob Burckhardt - Editions l’Anabase 1994

  • Journal 1918-1920 - Nelly Ptachkina

     Fuir la Russie 

     

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    Etre adolescente en 1918 en Russie, être emportée par la tourmente révolutionnaire, c’est ce qui a poussé Nelly Ptachkina à tenir un journal. Il y a une certaine banalité à tenir un journal à cet âge mais le tenir pendant une guerre civile c’est tout autre chose.

     

    Bien entendu on pense à Anne Franck, on pense à Marie Bashkirtseff. Ce journal ne diffuse pas la même émotion que celui d’Anne Franck, il est nettement moins intellectuel que celui de Marie Bashkirtseff mais il y a ici une fraîcheur, une vivacité qui le rendent très agréable.

     

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                     La ville de Kiev en 1918

     

    Le journal suit les pérégrinations de la famille ballotté de ville en ville, Moscou, Kiev, Rostov puis en route vers l’émigration.

    Voilà une jeune fille issue d’un milieu privilégié qui voit se dérouler sous ses fenêtres une guerre civile. Son journal est ainsi un mélange entre la violence de l’époque et la vie quotidienne d’une jeune fille passionnée. 

    Elle est tout feu tout flamme Nelly, elle aime les livres, la littérature, l’histoire, elle s’enthousiasme pour tout : la planète terre ET le théâtre, le féminisme ET les garçons, la politique ET les bals.

    Elle lit énormément et développe une vraie réflexion qui lui permet d’observer ce qui se passe avec une oeil vif.

    Elle souffre aussi et sait le dire avec sincérité « Je souffre pour la Russie » et se projette vers un avenir où elle veut prendre sa place « Je désire être utile au peuple russe, je ne resterai pas indifférente à la vie politique de mon pays. »

    Elle aime les études et le dit bien fort « Etudier, étudier, étudier, quel bonheur ! » et s’affirme comme femme « Donnez-nous la possibilité de faire des études et nous vous prouverons que nous ne sommes en rien inférieures aux hommes. »

     

     

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                                   La cascade du Dard à Chamonix 

     

    On a beaucoup de plaisir à lire ces pages d’une intelligence aïgue, on est touché par la sincérité de cette jeune fille qui aime la lecture et nous confie son bonheur de lectrice « On sent, on vit, on apprend tant de choses en lisant ! Quel plaisir extraordinaire » 

    Elle imagine l’avenir et sait nous communiquer sa passion «.. devenir écrivain. Quel bonheur ce serait ! » 

    Elle est témoin aussi d’événements que l’on connaît moins bien : les terribles combats pour une République Ukrainienne, les pogroms des armées nationalistes, la guerre avec la Pologne. Elle lit énormément y compris la presse et développe une vraie réflexion qui lui permet d’observer ce qui se passe avec une oeil vif, sans a priori et avec une maturité tout à fait étonnante. 

     

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    Le journal s’arrête abruptement car Nelly Ptachkina qui a échappé à une guerre civile connaît un destin dramatique, elle fait une chute mortelle à Chamonix quelques mois après son arrivée en France.

     

    Une préface éclairante de Luba Jurgenson qui assure aussi la traduction.

     

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    Le Livre : Journal (1918-1920) - Nelly Ptachkina - Editions des Syrtes