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Rechercher : la mort en Arabie

  • Exit le fantôme - Philip Roth

    Exit le fantôme - Philip Roth - Traduit de l’anglais par Marie-Claire Pasquier - Editions Gallimard
    exitlefantome.gifUne boucle se ferme dans ce roman, pour les lecteurs de P Roth voici le temps d’une dernière danse avec Nathan Zuckerman l’alter ego fictionnel de Philip Roth.
    Nathan Zuckerman, écrivain célèbre, vit à la campagne depuis des années, depuis en fait qu’il a reçu des menaces de mort, rien de tel pour vous faire aimer la solitude.
    L’homme a vieilli, plutôt difficilement, il est atteint d’un cancer de la prostate et pour faire bonne mesure d’impuissance et d’incontinence, même sa mémoire fou le camp. C’est pour se soigner qu’il revient à New York alors que la campagne présidentielle bat son plein.
    Décidé à échanger sa maison contre un appartement à NY, il fait la connaissance de Jamie jeune romancière dont il tombe amoureux fou comme seul peut l’être un homme au crépuscule de sa vie.
    Pour faire plaisir à la jeune femme il rencontre un journaliste qui s’apprête à publier une biographie qui révèle des détails scabreux de la vie d’un écrivain que Nathan a bien connu : Lonoff
    ll a été dans le passé un témoin privilégié de la vie  d’ Amy Bellette la maitresse de Lonoff. Aujourd’hui Lonoff est mort et Amy est atteinte d’une tumeur au cerveau. Zuckerman est révulsé par ce déballage, par les secrets sordides qui n’ajoutent ni ne retranchent rien au talent d’un homme et il va tenter de faire échouer le projet.
    C’est une lutte contre la mort que mène Nathan Zuckerman en réalité, Lonoff lui a déjà perdu, Amy Bellette va lâcher la rampe, notre héros ne se résout pas à abdiquer. Il veut encore plaire, séduire une dernière fois même si ce n’est qu’en rêve.

    Voilà posé l’histoire que nous raconte Philip Roth dans ce livre.
    philiproth.jpgIl y règle par avance quelques comptes avec les soit disant biographes qui seraient tentés d’écrire sur lui. Son livre plein de colère contre la déchéance physique, plein de rage contre la perte du désir, nous montre un homme qui doit faire le deuil de sa puissance aussi bien physique que créatrice. Le combat de Zuckerman est le sien. 
    Parcouru par une ironie noire, ce livre testament est le salut d’un artiste à son public avant que le rideau ne tombe,  une dernière parade brillante et désespérée pour le plus grand plaisir de ses lecteurs.

    Un billet très positif sur Les routes de l'imaginaire

    L'avis de nos cousins du Québec dans Voir
    " La conclusion exceptionnelle de l'un des cycles romanesques marquants de l'histoire littéraire américaine"

    Une interview de l'écrivain sur Télérama

  • L'Idée ridicule de ne plus jamais te voir - Rosa Montero

    Un petit clin d’oeil à Geneviève qui m’en a parlé avec une telle fougue et une telle sensibilité qu’il était impossible de ne pas lire ce livre.

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    J’ai aimé La folle du logis et Rosa Montero nous emportant dans son antre d’écrivain.

    Ici il s'agit de la mort de son compagnon sa douleur est là tapie et elle ne sait plus très bien comment attraper les choses, elle se bat avec un roman qui n’avance pas. 

    Bienheureuse éditrice qui lui demande une préface à un tout petit livre « déchirant comme un hurlement de douleur et de désespoir » c’est le journal tenu par Marie Curie à la mort de Pierre Curie survenue accidentellement. Journal très intime qui va trouver chez Rosa Montero un écho immédiat, comme l’écrit d’une soeur en désespoir.

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    Pierre et Marie Curie

    Le livre oscille donc entre écrits personnels de l’auteur et accompagnement des mots de Marie Curie  « Mais ce livre n’est pas un livre sur la mort ».

    D’empathie immédiate à admiration, Rosa Montero va petit à petit remonter dans la vie de Marie Curie, la surprendre jeune et étudiante tombant quasiment d’inanition faute d’argent, institutrice en Pologne alors qu’elle ne rêve que de Paris et d’études.

    Elle s’insinue doucement dans cette vie, tentant de découvrir derrière les photos où une Marie Curie rigide et sérieuse apparaît, la femme aimante, la chercheuse volontaire et indomptable, se pliant à un travail harassant dans des conditions qui aujourd’hui seraient refusées par n’importe quel ouvrier et pourtant dont elle dit « Dans ce hangar misérable, nous passâmes les années les plus heureuses de notre vie, complètement consacrées au travail »

     

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    Rosa Montero revient sur ce parcours hors normes sans pathos mais sans angélisme non plus, s’étonnant du peu de précautions prises par le couple avec le Polonium et le Radium ce qui devait à l’un comme à l’autre coûter la vie. Elle nous permet de découvrir la femme derrière le savant, l’amoureuse sensuelle derrière le Nobel.

    J’ai vraiment énormément aimé ce livre, j’ai aimé les relations qui se sont nouées par delà le temps entre ces deux femmes, j’ai aimé ce récit plein d’admiration et de tendresse. J’ai eu envie de réconforter l’une et de lire une biographie complète de l’autre. 

     

    Un grand merci à Nadejda qui m’a envoyé la version espagnole dans laquelle on peut profiter d’un grand nombre de photos. Dommage que Métailié ait fait l’impasse dessus.

     

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    Le livre : L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir -Rosa Montero -traduit par Myriam Chirousse – Editions Métailié 

  • Bribes de Georges Perec

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    Je me souviens qu'au « Monopoly », l'avenue de Breteuil est verte, l'avenue Henri-Martin rouge, et l'avenue Mozart orange.

     

    Je me souviens que c'est grâce à Edith Piaf que les Compagnons de la Chanson, Eddie Constantine et Yves Montand débutèrent.

     

    Je me souviens de l'époque où Sacha Distel était guitariste de jazz.

     

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    Je me souviens que les coureurs cyclistes avaient une chambre à air de secours roulée en huit autour de leurs épaules.

     

    Je me souviens que le lendemain de la mort de Gide, Mauriac reçut ce télégramme : « Enfer n'existe pas. Peux te dissiper. Stop. Gide. »

     

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    Le livre : Je me souviens - Georges Perec - Editions Hachette

  • Sarinagara - Philippe Forest

    Soleil levant : le sens des mots 

     

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    Je savais ce monde

    Ephémère comme rosée

    Et pourtant pourtant

     

    Un livre superbe que Philippe Forest baptise roman mais qui apparaît comme un objet littéraire qui tient tout autant de l’essai, de la biographie ou du journal.

    Dans un roman précédent L’enfant éternel l’auteur a raconté comment Pauline leur fut enlevée à l’âge de 4 ans après des mois de souffrance.

    Après ce deuil « Le Japon nous est apparu naturellement comme le lieu vers où aller au lendemain de la mort de notre fille  ».

    Ce voyage et ce séjour au Japon va servir de fil rouge à ce livre, fil rouge qui va réunir un poète, un romancier et un photographe japonais.

     

    Trois hommes, trois vies qui sont elles aussi ébranlées par la perte de proches, d’enfant, ou par la position de témoin

    Le premier le poète Kobayashi Issa le maître du haïku qui vit dans un Japon « qui a fermé ses frontières » dont la « vie est une longue errance, les voyages à travers le pays, la poésie, des poèmes par centaines et à côté d’eux, tout juste le labeur banal du malheur, de la misère. »

    Philippe Forest nous présente le poète qui fait face au malheur, à l’écoulement du temps car « la poésie est le sentiment du temps » et qui cependant va être « le poète de la vie, des enchantements d’enfants et des éveils émerveillés dans la nature » 

     

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    Nous sommes au monde

    Et nous marchons sur l’enfer

    Les fleurs le répètent

     

    Toute sa vie de vagabond, de père attendri et meurtri, entre dans ses poèmes car dit Issa «  si la poésie ne parle pas de ce monde alors elle n’est rien. »

     

    Venons maintenant au romancier, Natsume Sôseki le père du roman japonais jamais remis de la mort de son premier enfant, évènement qui va inspirer son travail.

    Cet écrivain, contemporain de Proust et de Kafka, écrit des livres étranges en particulier pour nous européens, romans qui témoignent d’ « une sorte d’effarement devant le mouvement s’accélérant du temps » . 

    Sôseki qui connaît l’exil en Europe, se marie de retour au Japon et « comme le malheur est patient  » il voit disparaitre la plus  jeune de ses filles, mort qu’il raconte dans un roman dont le sens du titre est « à l’équinoxe et au-delà (…) car il n’y a pas de raison pour un romancier que tout s’achève avec la vie. »

     

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    Le site exposition des photos de Y Yosuke

     

    Le troisième homme est photographe, Yamahata Yosuke  fut envoyé à Nagasaki immédiatement après l’explosion atomique et il rapporta des photos des ruines et des victimes.

    Le 6 août est son anniversaire, il a vingt huit ans, il est affecté à une base comme photographe, parviennent des rumeurs de choses terribles qui se seraient produites, il n’est qu’à 160 km de Nagasaki et ses supérieurs l’y expédient pour faire des photos qui témoignent de l’explosion.

    Il atteint « l’extrême limite au delà de laquelle plus rien n’existe » 

    Yamata «  dut éprouver à quel point paraissent irréelles les choses les plus vraies » 

    Il fait des clichés des vivants et des morts, il dit n’avoir éprouvé aucune émotion, aucune pitié « c’est seulement plus tard que sont venus la souffrance et la honte ».

    Ces photos furent longtemps tenues cachées, mais Yamata décida de les conserver, de les sauver.

    A travers ses trois vies bouleversées par la perte, l’écriture ou les photos servirent de planche de salut comme l’écriture servit de tuteur à Philippe Forest.

     

    Le titre de ce livre grave sarinagara signifie : pourtant, cependant, chute d’un des haïkus les plus célèbres d’Issa Kobayashi.

    Ce livre exigera de vous un effort de lecture, il délivre un message non d’oubli mais d’apaisement. Une écriture portée à la fois par une douleur indicible et par la volonté de choisir le chemin de la sérénité.

     

    Chez Tania un billet sur Natsume Sôseki

     

    Le livre : Sarinagara - Philippe Forest - Editions Gallimard ou Folio 2004

  • Ermitage

    L’homme que le malheur a plongé dans la peine, qu’il n’aille pas à la légère se raser la tête ou se livrer à d’autres caprices, mais que plutôt, il ferme discrètement l’huis sur soi et vive sans rien attendre de ses nuits et ses jours. (1)

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    A l’approche de la soixantaine , à l’âge où la vie devient aussi fragile que la rosée, j’ai cependant construit de nouveaux un abri pour mes vieux jours.
    Au printemps je vois les glycines en fleur; elles s’étalent à l’ouest comme un nuage violet. En été j’entends le chant des coucous; et chaque fois, j’ai l’impression de faire un pacte avec eux pour qu’ils me servent de guides au suprême passage de la montagne de la mort. En automne, mes oreilles sont pleines du chant des cigales, qui semblent déplorer le caractère éphémère et fuyant de ce monde. En hiver, je contemple la neige, qui s’accumule ou fond, comme nos pêchés qui apparaissent et disparaissent. (2)




    Le livre :

    Les heures oisives - Urabe Kenkô   (1)
    Notes de ma cabane de moine  Kamo no Chômei (2)
    Ces deux textes publiés en un volume aux éditions Gallimard

  • La marche du philosophe

     

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    La Côte Ligure

    Et puis un beau matin, il ne reconnu plus le paysage. La lumière a réveillé les couleurs. La mer n’a plus la teinte argentée ds oliviers, elle est bleue comme dans les rêves, d’un bleu de plus en plus profond à mesure que les yeux se portent ver le large. Le chemin est sec et rend la marche plus légère. Les mimosas que l’on croyait morts à tout jamais s’ouvrent en gerbes d’or. Sanctus Januarius.

     

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    Lac de Silvaplana

    Les nuages s’accrochent au sommet des montagnes et ne semblent pas vouloir libérer le ciel. Le lac de Silvaplana se teinte d’ardoise : il a perdu sa lumière. Pourtant Nietzsche continue sa marche. Tout son corps est parcouru de « frissons ténus » qu’il sait maintenant reconnaître. Il reconnaît l’inspiration ce « quelque chose qui vous ébranle au plus intime de vous-même » et vous bouleverse comme une révélation.


    Le livre : La danse de Nietzsche - Béatrice Commengé - Editions Gallimard