Cette vie - Karel Schoeman - Traduit par Pierre Marie Finkelstein - Editions Phébus
C’est le troisième roman que je lis de Karel Schoeman, j’ai beaucoup aimé En étrange pays et plus encore celui-ci.
En Afrique du Sud à la fin du XIXème siècle, au fond du Roggeveld, seule dans sa chambre d’enfant, une femme va mourir et tente en un long monologue de comprendre toutes ces images qui affleurent à sa mémoire.
« J'ai trop de souvenirs, dit-elle. Toute ma vie, j'ai eu trop d'occasions de regarder, d'écouter, de voir, d'entendre et de me souvenir. Je n'ai pas fait exprès d'emmagasiner toutes ces connaissance et je n'ai pas demandé à les retenir mais aujourd'hui que me voici arrivée au soir de ma vie, je considère toute cette sagesse et je me rends soudain compte qu'elle est loin d'être vaine».
Bribes après bribes ses souvenirs remontent, elle tente de retrouver les visages de tous, les frères aimés, la mère crainte, le père effacé, les domestiques et Sofie la bien aimée.
Sa vie fut longue, enfant personne ne l’a vraiment aimé, elle était une ombre silencieuse, un oeil innocent, une oreille attentive.
Sa mémoire n’est pas sûre, en longs allers et retours la narratrice fait remonter des lambeaux de souvenirs qui morceau après morceau vont recomposer sa vie : les leçons des précepteurs, l’arrivée de Sofie femme de son frère aîné, belle et rieuse, la naissance de Maans son neveu, le seul qui lui ait un peu appartenu.
L’histoire de la famille s’écrit dans la nuit : les départs et les morts, les mariages et les naissances qui viennent s’inscrire dans la bible familiale, les non dits, les paroles de colère, les secrets, les actions honteuses.
On est envoûté littéralement par le récit, peu à peu absorbé par le paysage. La vie se déroule au rythme des saisons : la transhumance annuelle lorsque vient l’hiver, la lumière changeante sur le veld, l’explosion de couleurs au printemps.
L’écriture d’une grande beauté de Karel Schoeman nous emporte dans un pays dur et ingrat, où le paysan survit plus qu’il ne vit, où les hommes et femmes sont corsetés dans des traditions et une religion austère.
Magnifique roman d’un temps révolu, ode lyrique, subtil et poétique à son pays. L’éditeur parle de chef-d’oeuvre de la littérature Sud-Africaine, c’est le mot juste.
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L’auteur
Karel Schoeman est né en 1939 dans l’Etat libre d’Orange.
Solidaire du combat des Noirs de son pays, il a été décoré par N Mandela. Son oeuvre compte 17 romans dont 4 ont été traduits et publiés chez Phébus.
Pour Cette vie il a reçu le Prix Hertzog la plus prestigieuse récompense littéraire d’Afrique du Sud