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  • La marche du philosophe

     

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    La Côte Ligure

    Et puis un beau matin, il ne reconnu plus le paysage. La lumière a réveillé les couleurs. La mer n’a plus la teinte argentée ds oliviers, elle est bleue comme dans les rêves, d’un bleu de plus en plus profond à mesure que les yeux se portent ver le large. Le chemin est sec et rend la marche plus légère. Les mimosas que l’on croyait morts à tout jamais s’ouvrent en gerbes d’or. Sanctus Januarius.

     

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    Lac de Silvaplana

    Les nuages s’accrochent au sommet des montagnes et ne semblent pas vouloir libérer le ciel. Le lac de Silvaplana se teinte d’ardoise : il a perdu sa lumière. Pourtant Nietzsche continue sa marche. Tout son corps est parcouru de « frissons ténus » qu’il sait maintenant reconnaître. Il reconnaît l’inspiration ce « quelque chose qui vous ébranle au plus intime de vous-même » et vous bouleverse comme une révélation.


    Le livre : La danse de Nietzsche - Béatrice Commengé - Editions Gallimard

     

  • Emily la dame blanche

     

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    Emily Dickinson

    " Emily a deux tables sur lesquelles elle aime écrire, l’une dans sa chambre, l’autre dans le salon.
    Un chèvrefeuille appuie ses arabesques contre la vitre du salon et, par la fenêtre entrouverte de sa chambre, l’été, du côté du pré, les chants qui s’élèvent du sorbier aux oiseaux bénissent son écriture.
    Les poèmes serrés sur le papier diffusent la même lumière d’or que le blé rassemblé en meules dans le pré. Ce ne peut être le paradis puisque l’on doit mourir. C’est quelque chose qui y ressemble, qui rassure et qui trompe.
    "

     
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    "Par une trappe dans le ciel du langage — qu’elle seule sait crocheter — Emily fait tomber sur l’homme repu de littérature des lumières qui l’aveuglent. Elle lui montre les forges de sa pensée : ses poèmes naissent en réplique à une « lumière soudaine dans les vergers » ou à un « mode nouveau du vent ». Ecrire est une manière d’apaiser la fièvre du premier matin du monde qui revient chaque jour."

     

    Le livre : La Dame blanche - Chrisitan Bobin - Gallimard
    Image  Fleur de narcisse des poètes

  • ”Le livre ouvre un lointain à la vie”

     

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    livres.jpgIls sont fortunés les livres dont on sent que, derrière l'agitaiton, même frénétique, qui peut à l'occasion les habiter, ils ont été écrits de bout en bout comme dans la poussière d'or et dans la paix souriante et regrettante d'une fin de journée d'été.

     

    Une histoire de la littérature, contrairement à l'histoire tout court, ne devrait comporter que des noms de victoires, puisque les défaites n'y sotn une victoire pour personne.

    Un livre qui m'a séduit est comme une femme qui me fait tomber sous le charme : au diable ses ancêtres, son lieu de naissance, son milieu, ses relations, son éducation, ses amies d'enfance !

    livres.jpgQuelle bouffonerie, au fond, et quelle imposture, que le métier de critique : un expert en objets aimés ! Car après tout, si la littérature n'est pas pour le lecteur un répertoire de femmes fatales, et de créatures de perdition, elle ne vaut pas qu'on s'en occupe.

     

    Le livre : En lisant en écrivant - Julien Gracq - José Corti

  • Bribes d'Aran

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    «  Marcher, c’est tout un art. En arrivant sur ces îles, il faut le réapprendre.

    Il faut d’abord oublier le pas précipité de la vie citadine et laborieuse : impossible, au reste, de courir ; il s’élève toujours un obstacle, mur ou rocher, pour rappeler qu’ici on prend son temps, on prend le temps de marcher » 

    « Il faut aller l’amble. S’arrêter souvent, divaguer, se perdre. 
    C’est l’endroit où aller vérifier si un sac d’or est bien enfoui au pied de l’arc-en-ciel. » 

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    Arc en ciel sur l'île d'arak © Bertrand Rieger 

    « Mettez vos pas dans les hiéroglyphes délicats que les oiseaux de mer impriment sur les sables humides.
    Marchez dans l’eau et laissez sécher le sel sur vos pieds nus. »

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    Hieroglyphes délicats 

    « Imprimez l’île sous vos pieds et vos pieds sur l’île. »

     

    Le livre : Grain d’Aran - Dominique Beugras - Editions La Bibliothèque

  • Un médecin de campagne - Honoré de Balzac

    L’acquisition pour quelques euros des oeuvres complètes de Balzac en numérique et la lecture d'Alain (je vous en parle dans mon prochain billet) m’ont donné envie de fouiller parmi les oeuvres multiples jamais lues, peu connues ou oubliées.

    Tous les romans de Balzac ne sont pas des grands romans mais tous sont intéressants, Balzac écrit un Médecin de campagne alors qu’il a 33 ans et qu’il n’a pas encore vraiment connu le succès.

    L’action se situe dans une vallée reculée des Alpes, ces pays perdus où l’on rencontrait encore des êtres frustres que l’on qualifiait alors de crétins des Alpes. Paysans pauvres atteint par le manque d’iode qui provoquait chez eux une atteinte caractérisée par une apathie, une somnolence et un retard intellectuel et un énorme goître.

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    C’est là un choix curieux de Balzac pour situer son récit. 

    Le commandant Génestas qui fut de toutes les campagnes napoléoniennes recherche le docteur Benassis, il veut le consulter pour une vieille blessure et finit par le trouver dans un village pour le moins atypique.

    C’est un sacré personnage que ce docteur Benassis, véritable saint laïque il a totalement transformé un village en terrain d’expérience économique. Là où régnait la misère il a apporté la prospérité, il a incité les paysans à moderniser leurs techniques agricoles, il a financé des créations d’activité, aujourd’hui on parlerait de micro entreprises et de micro crédit ! Petit à petit la prospérité s’est installée, des écoles, des routes furent construites, les marais furent asséchés chassant loin du village les fièvres si redoutables. Le crétinisme fut éradiqué. Terminé l’autarcie délétère, vive les échanges commerciaux avec les vallées voisines et même avec Grenoble la grande ville la plus proche. Pour un peu on croirait lire le panégyrique de la mondialisation.

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    Balzac en quelques pages nous fait un véritable cours d’économie libérale, apporte sa vision du développement social et c’est totalement surprenant.

    Même si le prétexte du roman est mince il y a là en germe tous les points forts de Balzac, l’art de la description d’un lieu, des portraits savoureux comme celui de Jacquotte la servante du docteur devenue la maîtresse des lieux et à qui tout le monde obéit y compris le bon docteur.

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    L'épopée Napoléonienne vue par Balzac - Edouard Detaille au Musée d'Orsay

    C’est aussi pour Balzac l’occasion de revenir sur l’épopée napoléonienne, il a eu un moment l’idée de faire un livre sur Napoléon, idée qu’il a finalement abandonné mais il utilise ici ses réflexions à travers le personnage de Génestas et le récit transpire la nostalgie.

    Ce n’est pas encore le Balzac du Père Goriot mais c’est un récit à découvrir.

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    Le livre : Le médecin de campagne - Honoré de Balzac - Editions Arvensa numérique

  • Miniaturiste - Jessie Burton

    Un livre phénomène outre-manche cela éveille la curiosité, alors en route pour les canaux et les riches maisons d’Amsterdam au XVII ème siècle.

     

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    Pieter De Hooch

     

    1686 Petronella Oortman vient de se marier, elle a juste 18 ans et son mari est le beau et riche marchand Johannes Brandt, un homme important de la communauté marchande et qui a deux fois son âge.

    Elle arrive seule dans sa nouvelle demeure et l’accueil de Marin la soeur de son époux est pour le moins froide et compassée. Marin est une vieille fille prude, rigide et qui n’a aucunement  l’intention de laisser le gouvernement de la maison à Nella.

    Deux domestiques seulement dans la maison ce qui est pour le moins surprenant pour un homme de la qualité de Johanne. Cordelia la servante délurée et Otto un homme à la peau sombre comme jamais Nella n’en a vu.

    La jeune épouse s’ennuie vite, solitaire, inoccupée et ignorée par son mari sauf lorsque celui-ci lui offre un extraordinaire jouet : une maison miniature stricte reproduction de la demeure cossue des bords du Herengracht.

     

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    La maison de poupée qui a inspiré l'auteur

    D’abord vexée par la cadeau Nella commande à un miniaturiste quelques petits objets pour meubler la maison, ils sont de parfaites reproductions mais bientôt les objets arrivent sans qu’elle ne les ait commandés et leur précision semble montrer que celui qui les fabrique connait la maison et même les secrets de ses occupants. Le miniaturiste finit par obséder Nella.

    Les liens entre Marin, Nella et les deux serviteurs vont se resserrer, les femmes vont devoir faire face avec courage aux événements qui vont s’abattre sur la maisonnée. Et chacun va se montrer sous un jour plus digne, plus riche que prévu.

     

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    la courbure d’or de la herengracht

     

    C’est vraiment un grand plaisir de se plonger dans ce monde plein de paradoxes que ce siècle d’or à Amsterdam. La prospérité de la ville et de la Compagnie des Indes Orientales, l’enrichissement sans limites des marchands se paient d’un rigorisme religieux qui porte chacun à espionner son voisin, qui oblige chacun à masquer sentiments et à se garder de tout écart de conduite. La liberté n’est qu’apparente. Les entrepôts regorgent de biens odorants, parfumés et savoureux mais le puritanisme condamne les personnes à une vie grise et sans charme et à se nourrir de hareng plutôt que des délices en provenances d’orient.

     

    Les personnages de Jessie Burton sont très bien mis en scène, sa puissance d’évocation est grande et l’on a aucune peine à imaginer dans cette maison tout droite sortie d’un tableau de Vermeer.

    Nella et Marin sont deux très beaux personnages féminins, l’une par son ouverture d’esprit et son imagination, l’autre par son caractère passionné bien caché derrière un autoritarisme calculé. 

    Les rebondissements tiennent le lecteur en laisse et même s’il y a parfois une ou deux longueurs la lecture est très prenante.

    Il semble que l’auteur a été comparée à Tracy Chevalier, il y a certes quelques ressemblances mais Jessie Burton me semble un écrivain plus ambitieux.

     

     

     

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    Le livre : Jessie Burton - Miniaturiste - Traduit de l’anglais par Dominique Letellier - Editions Gallimard 2015