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A sauts et à gambades - Page 228

  • Le journal d'un homme de trop - Ivan Tourguéniev

    le-journal-dun-homme-de-trop.jpgLe Journal d’un homme de trop - Ivan Tourguéniev - Traduit du Russe par Françoise Flamant - Editions Mercure de France
    Une nouvelle des débuts de Tourguéniev en littérature. Une nouvelle qui lui va comme un gant lui qui toute sa vie a été « obsédé par le contraste entre un jeune homme nerveux, faible, et une jeune fille passionnée, volontaire ; entre un homme qui s’analyse trop et une femme qui, au contraire, s’abandonne courageusement à la vie. » Ce sont les mots d’André Maurois et ils illustrent parfaitement la nouvelle de Tourguéniev.
    Un homme jeune va mourir, le médecin vient de lui annoncer,  Tchoulkatourine se retourne sur sa courte vie et comme il s’ennuie et est incapable de profiter de ses derniers jours, il décide d’écrire son journal et de faire le récit de sa vie.
    C’est un homme qui a eu une enfance bien terne « pénible et morne », une famille sans ambition et une vie provinciale bien falote.  Alors rien n’est survenu dans sa vie ? rien qui soit digne d’être distingué ?
    Si, son amour pour Elisabeth Kirillovna, mais son tempérament indécis l’a empêché d’exprimer son amour, il a craint les rebuffades « telle demoiselle russe aux sentiments élevés peut avoir une façon si dominatrice de se taire que même chez un homme averti ce spectacle provoque parfois des grelottements  » il n’a pas su accordé ses actes à ses sentiments et la demoiselle s’est tournée vers un autre. Une seconde chance lui sera offerte mais il ne saura pas la saisir.
    C’est dans la tenue du journal que pour la première fois le jeune homme prend sa vie en main, il s’est aveuglé toute son existence et l’approche de la mort lui donne quelque lucidité. Il a accepté de petites humiliations, il fait preuve envers lui même d’une cruelle ironie, d’amertume et de désenchantement  « Ma petite comédie est terminée. Le rideau tombe. En rentrant dans le néant, je cesse d’être de trop… »

    tourgueniev.jpgCe n’est pas un véritable héros que Tchoulkatourine, on éprouve de la pitié pour lui, son incapacité à vivre réellement, à faire preuve de passion le tient en marge de la vie, son impuissance devant le destin qu’il subit nous empêchent d’éprouver de la sympathie.
    Tourgueniev a un grand sens du récit et il sait à merveille raconter : un duel, une simple promenade sous le tilleuls, un bal.
    Ce qui rend cette nouvelle marquante c’est que Tourgueniev fait en partie son portrait dans celui de cet « homme de trop » , ses amours avec Tatiana Bakounine ou Pauline Viardot ont la couleur de l’échec et ce portrait d’un homme peu doué pour le bonheur c’est un peu le sien, il dit lui même « Je n’ai jamais pu rien créer qui vînt seulement de mon imagination. Il me faut pour faire un personnage un homme vivant. »

    En lisant « Un homme de trop » vous aurez peut être envie de connaitre un peu mieux Tourguéniev.

  • L'Acropole

    L’impression que me fit Athènes est de beaucoup la plus forte que j’aie jamais ressentie. Il y a un lieu où la perfection existe (..)
    Je savais bien avant mon voyage que la Grèce avait créé la science, l’art, la philosophie, la civilisation ; mais l’échelle me manquait. Quand je vis l’Acropole, j’eus la révélation du divin. (Ernest Renan)

     

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    L'Acropole


    Elle était à ma droite, assise sur des collines légèrement élevées, et les ombres des montagnes, qui se prolongeaient jusqu’à elle, la détachaient vivement de tout le reste. C’était le Parthénon ; la ville entière restait cachée dans les replis du terrain et derrière les rochers de la citadelle. Il est difficile de peindre ce que je ressentais alors. Les regards attachés pendant de longues soirées sur ces pierres, dont je ne pouvais distinguer la forme, je ne sais quel charme prodigieux, et qui ne ressemblait à nul autre, m’attirait de ce côté. (Edgar Quinet)

     

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    Le Parthénon

    C’était donc à cette tribune que Périclès, Alcibiade et Démosthène firent entendre leur voix.

    J’ai vu du haut de l’Acropolis le soleil se lever entre les deux cimes du mont Hymette : les corneilles qui nichent autour de la citadelle, mais qui ne franchissent jamais son sommet, planaient au-dessus de nous : leurs ailes noires et lustrées étaient glacées de rose par les premiers reflets du jour; des colonnes de fumée bleue et légère montaient dans l’ombre, le long des flancs de l’Hymette.
    Athènes, l’Acropolis et les débris du Parthénon se coloraient des plus belles teintes de la fleur du pêcher (...) au loin, la mer et le Pirée étaient tout blancs de lumière ; et la citadelle de Corinthe, renvoyant l’éclat du jour nouveau, brillait sur l’horizon du couchant, comme un rocher de pourpre et de feu. (Chateaubriand)


    Le livre
    Vu sur l’Acropole - M Chateaubriand, Edgar Quinet, Ernest Renan - Editions La Bibliothèque

  • L'île - Giani Stuparich

    lile.gifL’île - Giani Stuparich - traduit de l’italien par Gilbert Bosetti - Editions Verdier poche
    Ce roman de Stuparich m’a été soufflé par Claude et je lui dis un grand merci car j’ai pris un très grand plaisir à cette lecture.
    L'Ile est un court récit qui évoque la relation entre un père malade et son fils. Ils sont venus sur l'île de Lussinpiccolo, juste en face de Trieste, pour passer pour la dernière fois quelques jours ensemble.
    Ce voyage c’est le père qui le souhaite, il veut retourner sur son île natale « s’installer les jambes pendantes sur la jetée et oublier le monde » et surtout partager encore quelques moments avec son fils. Le fils a quitté la côte Triestine depuis longtemps, il préfère la montagne, il vit loin.
    Le fils a longtemps regardé son père comme un héros distant et intouchable « Le visage lumineux, la voix retentissante, avec des manières de conquérant. » Mais le père a vieilli, il est malade et maintenant « ses épaules semblaient veiller à maintenir son corps qui se serait affaissé sans la ferme volonté qui le dominait encore. »
    Le père lui regarde son fils avec affection « il le voyait suivre sa route d’un pas assuré, et il en était fier. »
    Chacun d’eux fait un voyage vers l’autre, les souvenirs partagés, les silences, les gestes simples, les objets, le père qui clot ainsi son existence et le fils qui lui ne fait qu’entamer le voyage.
    L’auteur écrit que l’homme né sur une île est fait pour « courir le monde et ne revenir qu’à la dernière extrémité. »

     

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    L'île de Lussinpiccolo en Istrie vers 1900

    Giani Stuparich sait à merveille évoqué cette inversion constante et parfois insupportable : enfant et parent échangeant leurs rôles, l’enfant devenant celui qui protège, le père celui qui a besoin d’aide.
    Il écrit un récit lent, poignant, épuré, limpide et sobre. Un chef d’oeuvre de la littérature italienne à découvrir.
    Il y a beaucoup de similitudes entre ce roman et celui d’Arzo  Maison des autres que j’ai lu très récemment mais aussi avec le beau roman de Anna Luisa Pignatelli  Noir toscan qui a concouru pour le Fémina étranger.

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    L’auteur
    stuparich.jpgGiani Stuparich est né à Trieste en 1891 et mort à Rome en 1961. Sa mère était juive et son père Istrien d’origine slave et autrichienne.
    À la naissance de Stuparich, Trieste est une ville de l’Empire austro-hongrois : il fera ses études ausi bien à Florence qu’à Prague, où il devient l’ami de Masaryk, futur président de la République tchécoslovaque.
    Lors de la Seconde Guerre mondiale, marié à Elody Oblath, qui appartient à la communauté juive de Trieste, et lui-même identifié comme résistant, il sera interné par les SS, en compagnie de sa mère et de sa femme, dans le camp de San Sabba en 1944. (source l’éditeur)

  • La Gloire de mon père

    gloire de mon père.jpgLa Gloire de mon père - Lu par Marcel Pagnol - Editions La Librairie sonore Frémeaux et associés
    « Je suis né dans la ville d'Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers » Lorsque la voix de Marcel Pagnol entame le récit de son enfance, c’est toute la Provence qui s’invite. Les plus beaux passages du livre sont dans toutes les mémoires : Joseph le petit instituteur si fier de son fils, l’amour filiale de Marcel pour Augustine la jolie couturière, l’oncle Jules fameux propriétaire du parc Borély, le déboutonnage de Tante Rose et surtout  surtout l’arrivée à la Bastide Neuve dressée au milieu d’un « désert de garrigues »

    Ecouter Pagnol lire « La Gloire de mon père » c’est pendant un moment être transporté au pays de l’enfance heureuse, retrouvé le petit Paul qui « abordait le soir dans son lit, la philosophie des Pieds Nickelés. » , c’est partir en escapade avec Lili des Bellons.
    Tous les personnages sont extraordinairement vivants auréolés des souvenirs de nos lectures, on ressent au fond de soi la fierté du fils pour son père bouliste amateur et on est impatient de refaire avec Joseph le magnifique doublé de bartavelles.

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    Un désert de garrigues

    Même si vous l’avez lu de nombreuses fois, laissez vous séduire par la voix de Pagnol qui dit Patrick Frémeaux  « nous révèle un imaginaire intemporel qui est l’un des plus beaux chants d’amour à la Provence de notre patrimoine littéraire; un véritable hymne à la vie devenu l’un des fleurons de la mémoire collective des Français de toutes générations."


    Retrouver le livre chez Bénédicte

  • Ermitage

    L’homme que le malheur a plongé dans la peine, qu’il n’aille pas à la légère se raser la tête ou se livrer à d’autres caprices, mais que plutôt, il ferme discrètement l’huis sur soi et vive sans rien attendre de ses nuits et ses jours. (1)

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    A l’approche de la soixantaine , à l’âge où la vie devient aussi fragile que la rosée, j’ai cependant construit de nouveaux un abri pour mes vieux jours.
    Au printemps je vois les glycines en fleur; elles s’étalent à l’ouest comme un nuage violet. En été j’entends le chant des coucous; et chaque fois, j’ai l’impression de faire un pacte avec eux pour qu’ils me servent de guides au suprême passage de la montagne de la mort. En automne, mes oreilles sont pleines du chant des cigales, qui semblent déplorer le caractère éphémère et fuyant de ce monde. En hiver, je contemple la neige, qui s’accumule ou fond, comme nos pêchés qui apparaissent et disparaissent. (2)




    Le livre :

    Les heures oisives - Urabe Kenkô   (1)
    Notes de ma cabane de moine  Kamo no Chômei (2)
    Ces deux textes publiés en un volume aux éditions Gallimard

  • Le mois des papillons - Ariëlla Kornmehl

    moisdespapillons.gifLe Mois des papillons - Ariëlla Kornmehl - Traduit du néerlandais par Emmanuelle Sandron - Editions Actes Sud
    L’Afrique du Sud est le cadre de ce roman qui compose deux portraits de femmes très attachants.
    Une femme médecin, Joni, a quitté son pays à la suite d’un événement personnel très violent qui lui a fait rompre tous ses liens familiaux.
    Elle vit seule à Johannesburg et travaille dans le service d’urgences d’un hôpital, pour s’y rendre chaque jour elle fait un long trajet en voiture traversant des zones peu sûres. C’est son choix, elle vit dans une grande maison qu’elle partage avec une femme.
    En échange du logement et de la nourriture pour elle et ses enfants, Zanele qui est Zoulou s’occupe de la maison, prépare les repas, fait les achats, bref gouverne la vie de Joni. Le soir elle se retire dans sa partie de maison et joue du tambour pour Shanla sa fille.
    Elle a littéralement pris possession de Joni et des lieux. Elle veut la voir manger car elle la trouve trop maigre « Zanele voulait que je prenne un petit déjeuner, elle tentait de m’y contraindre »
    Zanele ne comprend pas le travail de Joni « Là où elle a grandit aucune ambulance ne venait jamais même quand on était gravement malade » elle est tout interdite devant les photos de Joni prise en Hollande un jour de neige.

     

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    Le pire

    Quand Shanla a trop de noeuds dans les cheveux elle les lui rase. Elle sait qu’il y a les choses que l’on peut manger et celles qui sont tabou, celles que l’on peut faire et celle qui sont dangereuses, et puis il y a les certitudes « plus on vient du nord, plus on est noir » les interdits : le pain bis, le maïs jaune, et ..parler avec sa patronne blanche.
    Ce qui pourrait être simplement une histoire d’amitié entre deux femmes prend une toute autre dimension car peu à peu le récit s’ouvre et l’on aperçoit un monde dur. Les dialogues entre les deux femmes dévoilent peu à peu l’histoire de Joni et ses rapports avec sa mère, sa souffrance, la violence au quotidien et les rêves que Zanele fait pour sa fille, la pauvreté et l’insécurité des townships, et le racisme qui n’est pas toujours où on l’attend.

     

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    Et le meilleur


    Deux femmes que tout oppose, l’une, scientifique, intellectuelle, l’autre, analphabète, superstitieuse. Elles se chamaillent et se comprennent, se soutiennent et composent une étrange famille dans ce pays où l’apartheid est encore dans toutes les têtes.
    J’ai beaucoup aimé ce roman fait de délicatesse et de rudesse, de soleil et de neige à la fois. En le lisant j’ai repensé à un roman lu il y a quelques mois Le miel d’Harar que j’ai aimé mais aussi le roman d’André Brink  Les imaginations de sable un excellent souvenir de lecture

    Découvrez cette jeune auteure en espérant que ses autres romans seront traduits chez Actes Sud


    L’auteur

    Le Mois des papillons est le second roman d’Ariëlla Kornmehl. Née en 1975, elle vit et travaille à Amsterdam, où elle a fait des études de philosophie. Elle a passé deux ans à Johannesburg.