Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

A sauts et à gambades - Page 230

  • Le Crépuscule d'une idole - Michel Onfray

    crépuscule.gifLe crépuscule d’une idole - Michel Onfray - Fayard
    Je fais partie des gens que le freudisme agace, cela depuis de lointaines études et l’interdiction qu’il y avait alors à mettre en doute les affirmations de l’enseignant. Elles devaient être admises sans discussions possibles. J’ai toujours considéré la psychanalyse comme une thérapie peu fiable aux résultats très incertains et d’une durée risible. Ceci posé je n’ai jamais, au grand jamais mis totalement en doute les thèses de Sigmund Freud ou comme les appelle Michel Onfray ses " cartes postales"

    «Freud a découvert l’inconscient tout seul à l’aide d’une auto-analyse extrêmement audacieuse et courageuse»
    «Freud a découvert une technique qui, via la cure et le divan, permet de soigner et de guérir les psychopathologies»
    «la psychanalyse procède d’observations cliniques, elle relève de la science»
    «le complexe d’Œdipe est universel»,
    «la conscientisation d’un refoulement obtenue lors de l’analyse entraîne la disparition du symptôme»


    et bien sûr :  l’interprétation des rêves, les actes manqués, le déni, toutes ces notions développées dans une oeuvre qui occupe plusieurs rayons de bibliothèque, oeuvre qui semblait intouchable.
    C’était sans compter sur Michel Onfray, éternel empêcheur de penser en rond qui s’attaque à la statue du commandeur.
    C’est toute l’oeuvre de Freud qu’Onfray a lu pour écrire son livre, mais aussi sa correspondance, même si une partie de celle-ci est encore interdite d'accès.
    Que nous dit Michel Onfray en multipliant les citations de Freud lui-même ?

    Que les thèses développées par l’inventeur de la psychanalyse répondaient surtout aux obsessions de leur inventeur
    Que Freud était fasciné par des techniques qui frôlaient le charlatanisme
    Que lors des entretiens thérapeutiques avec ses patients il lui arrivait de s’endormir sans gêne aucune
    Qu’il a inventé des patients et masqué ses échecs thérapeutiques en falsifiant les rapports de ses expériences
    Qu’assoiffé de gloire et de richesse il n’hésitait pas à dénigrer, calomnier ses amis si cela pouvait servir ses intérêts
    Que son épouse, sa fille, sa belle-soeur ont toutes fait les frais de ses tourments personnels sans compter plusieurs patients qui ne se sont jamais remis des traitements infligés.

     

    divan.jpg

    Le divan du psychanalyste à Vienne

    Mais Onfray ne s’arrête pas là, après avoir affirmé que Freud n’a jamais guéri personne, il insiste aussi sur les positions très conservatrices de Freud et lui reproche son silence sur la montée du Nazisme, car Freud n’a jamais écrit  " contre Hitler, contre le national- socialisme, contre la barbarie antisémite, alors qu'il n'hésite pas, régulièrement, à publier de longues analyses contre le communisme, le marxisme, le bolchevisme"
    La charge est violente et le réquisitoire très sévère, on sort de cette lecture un peu ahuri, se demandant pourquoi ces faits n’ont jamais été étudiés, comparés, pourquoi alors que la science réclame en permanence des preuves, on a accepté comme vérité la parole seule de Freud sans aucune preuve à l’appui. " Freud ne s'est pas contenté de créer un monde magique, il y a conduit nombre de personnes et a souhaité y faire entrer l'humanité tout entière"

     

    annafreud.jpg
    Sigmund et Anna Freud on holiday, Italy, 1913.
     

    En voilà assez pour abattre n’importe quel statue, et l’homme Freud apparaît bien petit, on comprend mieux désormais sa haine des biographes et la destruction par lui ou ses proches d’une partie de sa correspondance.
    Alors tout est à jeter ? Non, même si le bilan est assez terrible, Michel Onfray reconnaît Freud comme philosophie et reconnaît l’apport important qui a " fait entrer le sexe dans la pensée occidentale "
    Il ne dénigre pas la psychanalyse mais refuse de la considérer comme une science comme Wittgenstein, Popper ou Deleuze avant lui.

    Onfray aime la polémique et ses passages sur les plateaux télé sont devenus  trop fréquents, son livre d’une écriture directe et simple est plein d'approximations disent ses détracteurs, mais beaucoup d'arguments avancés reposent sur les écrits de Freud lui-même ce qui affaiblit considérablement la critique. A cette lecture on s’offusque, on rit, on s’étonne, on est d’accord ou non, mais on ne s’ennuie pas un seul instant. Lisez ce livre dérangeant et tonique.

    Une interview de Michel Onfray


  • Florence

    Florence

    Dessous tes ponts multicolores
    L’Arno prophète paisiblement s’ensable
    Et dans les reflets tranquilles brise à peine
    Les arches sévères parmi les fleurs qui se fanent

     

    florence.jpg

    "Florence, lys de puissance, rejeton printanier"

     

    Le livre : Chants Orphiques - Dino Campana - Editions Allia

    Vous pouvez retrouver un billet sur ce livre chez Claude

  • Ciel et terre et ciel et terre et ciel - jacques Roubaud

    Ciel et terre et ciel et terre et ciel - Jacques Roubaud - Editions Argol
    C’est un enfant qui court dans la garrigue, « son territoire personnel, la tranquillité sans menaces, la solitude, son bien.»
    Un enfant rêveur qui se cache parce qu’on est en 1943 et qu’on devine que l’enfant n’est pas d’ici. Il aime regarder le ciel, les nuages qui le font voyager « Il pouvait reconnaître en eux à volonté, des navires, des barques, des goélettes, des steamers, des yachts, des pirogues, des radeaux, des îles. » il voudrait les conserver intacts dans sa mémoire.
    Dans la chambre où il est réfugié avec sa mère, il y a au mur quatre tableaux qui lui permettent de quitter la chambre par l’imagination, de faire accélérer le temps, il leur donne des noms à lui et quand il ferme les yeux il peut les reconstituer « la rivière, la prairie, le moulin, la barque ». C’étaient des images d’Angleterre, un pays qui rimait avec liberté si sa mère et lui y parvenaient.

    constable-etude-nuage2.1266483819.jpg

    Clouds study with birds John Constable - Yale Center of British Art

    Quarante ans ont passé et M Goodman regarde un ciel d’Ecosse, il étudie le ciel, c’est un scientifique, il veut comprendre les nuages et un jour il voit un tableau « Clouds study with birds » un tableau de John Constable mais les tableaux du peintre n’évoque rien pour lui, ne lui rappellent rien, jusqu’au jour où « un coin de voile d’oubli opaque qui plus de quarante ans auparavant était tombé devant ses yeux se leva. Il se souvint. »

    800px-John_Constable_The_Hay_Wain.jpg
    La Charette de foin - John Constable - Londres National Gallery

    Lors d’un voyage sur les traces de Constable « Peu à peu, par pans entiers, les images de son passé qui s’étaient refusées à lui obstinément, par vagues successives l’envahirent. Il revit la garrigue et ses nuages,  il revit l’écluse du canal, il revit la maison où il était resté des semaines attendant le départ pour l’Espagne »

    constable-stratford-mill-NG6510-fm.jpg
    Le moulin de Statford - John Constable - Londres National Gallery
     

    Une réconciliation avec le passé par le filtre de la peinture, la force de l’oubli des événements tragiques, c’est ce qu’offre Jacques Roubaud dans un magnifique récit construit comme une énigme.
    Il évoque comment les images de l’enfance sont transformées, recomposées par la mémoire, la fascination qu’exercent les nuages, il nous permet de cerner le génie de Constable qui « avait fait d’une quête du temps la forme centrale de sa peinture, et découvert, là était son génie, une solution picturale à son mystère dans le contraste entre ciel et terre, entre une terre peuplée des images fixes du passé, des lieux de l’enfance, et un ciel peuplé des images mobiles du présent perpétué en futur, les nuages »

    Ce livre avait déjà été publié aux éditions Flohic en 1997.

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque

    L’ auteur
    Né en 1932 à Caluire, Jacques Roubaud est mathématicien de profession et membre de l'Oulipo depuis 1966. il a consacré des études qui ont fait date à l’histoire du vers français ou à la poésie des troubadours. Il est également traducteur, de l’anglais et du provençal.

     

  • Maison des autres - Silvio d'Arzo

    maisonautres.gifMaison des autres - Silvio d’Arzo - Traduit de l’italien par Bernard Simeone - Editions Verdier (1980)
    Montelice, un village perdu des apennins, tout juste un village d’ailleurs «sept maisons adossées et rien d'autre» le curé est là depuis trente ans, c’est lui qui raconte.
    Il raconte la vie du village, des gens qui sont là depuis toujours, qui vivent au rythme des saisons, accomplissant des tâches dures avec des gestes vieux de mille ans. Les hommes rentrent des pâturages à la lumière des lanternes le soir, le climat est rude et le curé a déjà vu trente noëls ici, sous la neige. La misère est le lot commun, le prêtre s’inquiète  « j'ai vraiment peur de ne plus pouvoir être utile à grand-chose dans un cas de ce genre. Tout cela est pour moi une autre langue...Fêtes, saintes huiles, un mariage sans façon, voilà désormais mon lot.»
    Le curé s’interroge car une femme, nouvelle dans ce village, l’intrigue, elle semble toujours sur le point de lui parler mais au dernier moment renonce. C’est Zelinda, pauvre entre les pauvres, elle lave le linge des villageois, se nourrit d’un croûton de pain et du lait de ses chèvres. Elle vit hors du village « plus loin que le sentier des ormes, juste à la limite de la paroisse, et après ce ne sont que ravins, toubières ou pire encore».

     

    apennins.jpg

    village des Apennins

    Jour après jour il la voit laver le linge,  un jour elle vient au presbytère l’interroger, mais c’est une ruse, sa question est sans objet, du moins elle n’a pas posé la question qui la tourmente, elle a feinté. Quand va-t-elle se décider ? Enfin un jour elle dépose une lettre à son intention.
    J’arrête là car il y a un suspense dans ce récit, comme le vieux curé, on attend, on essaye de comprendre cette femme. Silvio d’Arzo dont c’est la nouvelle la plus connue, nous arrache à notre petite vie pour nous faire vivre au rythme de sa prose, sèche, dure, les couleurs sont sombres dans ce pays de désolation « Les ravines et les bois, les sentiers et les pâturages deviennent d'une couleur vieille rouille, puis violette, puis bleue »

    Le vieux cure Grd.JPG

    J"e sentais dans mes os l'hiver proche"

    Dans une seconde nouvelle "Un moment comme ça" autour de la disparition d'un soldat son récit est sobre et tragique.
    J’ai beaucoup aimé ces deux récits, graves, cruels, qui laissent le lecteur  avec des questions qui n’ont peut être pas de réponse. On peut rapprocher ce livre des récits de Ferdinando Camon (jamais vu soleil ni lune)  mais plus encore des hommes et femmes décrits par Carlo Levi dans « Le Christ s’est arrêté à Eboli ».


    Une oeuvre à découvrir Le billet de Theoma pour qui ce fut "un coup de poing"

    L’auteur
    arzo2.jpg

    Silvio d'Arzo de son vrai nom Ezio Comparoni est né en 1920 et mort à 32 ans. Il est des figures les plus mystérieuses de la littérature italienne (Source l’éditeur)

  • Pétra la bariolée

    Pétra la bariolée

    "Les veines bleues, roses, les stries qui ondulent et serpentent à travers le grès, la moirure des couches ferrugineuses font frissonner la pierre.
    Avec ses demeures froissées par le vent, fripées par le sable, cette ville morte est recouverte d’un voile qui en brouille la perfection géométrique.
    Ce voile soyeux a même donné son nom à l’une des tombes, la « tombe de soie » sans que l’on puisse oublier que Pétra s’appelait en araméen Arquem, en nabatéen requem : « la bariolée ».

     

    Jordanie Petra (7).JPG

    "On a beau l'avoir vu mille fois, c'est un choc. Le "Trésor" apparaît "

    "Quand ce n’était pas par Alexandrie ou Palmyre, le commerce de la soie transitait par Pétra, celui de l’encens aussi, la myrrhe, les épices, l’huile d’olive, l’asphalte, les dattes, le cuivre - jusqu’à ce que les Romains, pour limiter les intermédiaires, déroutent le trafic par la mer Rouge et par Alexandrie, et tarissent la fortune de la ville."


    Le livre : Rendez-vous dans une autre vie - Jérôme Prieur - Seuil
    la photo : sur ce site

  • Eté noir

    Je m’étais promis de les emporter en vacances mais je n’ai pas résisté 2 polars pour mettre dans vos valises, à lire en chaise longue, en pique-nique ou sous parasol, attention lecture prenante, risque majeur de coups de soleil !

    La Descente de Pégase - James Lee Burke - Editions Rivages
    Un tour dans les marais de Louisiane avant Katrina et la marée noire, si vous êtes allés dans les marais à la Brume électrique avec Tavernier vous allez retrouver Dave Robicheaux avec grand plaisir.

    marais.JPG

    Paysage en voie de disparition

    Le pseudo suicide d’une jeune étudiante, une belle arnaqueuse fille d’un convoyeur de fonds mort sous les yeux de Robicheaux quelques vingt ans plus tôt, enfin pour compléter cette liste le cadavre d’un SDF trouvé dans le fossé. Trois affaires où présent et passé se mêlent dans ce nouveau roman et les trois affaires vont se croiser mais comptez sur notre héros pour trouver les points communs et dérouler la pelote.
    A la croisée des chemins il y a Bello Lujan truand violent et un mafioso Whitey Bruxal bien connu de Dave Robicheaux, notre héros fidèle à lui-même va traquer le mal en essayant de ne pas se perdre en route.
    James Lee Burke et son sens du récit, ses portraits riches et ambigus et sa Louisiane moite et violente où Katrina pointe le bout de son nez.  Un très bon moment de lecture

    Une interview de James Lee Burke



    L’Epouvantail - Michael Connelly - Editions du Seuil
    Une nouveau Connelly pour l’été ça ne se refuse pas, si vous ne l’avez jamais lu précipitez vous sur les premiers titres tous en poche, avec Harry Bosch pour vous faire vibrer, ils sont tous excellents mais ici retour vers un héros qui a fait les beaux jours de Connelly. Nous voilà dans la salle de rédaction du Los Angeles Times, la presse écrite est en difficulté comme partout et les mesures drastiques. Jack McEvoy vient d’en faire les frais, remercié, proprement viré, la rage au ventre il va tenter de mettre son  nom au bas d’une dernière enquête. Il a des atouts le monsieur, c’est lui qui avait couru derrière Le Poète tueur en série malin et machiavélique.

     

    cybercriminialité.jpg

    La cyber criminalité

    Les aveux étrangement faciles d’un jeune meurtrier de 16 ans le mettent sur la piste d’un tueur d’un sadisme ahurissant. Wesley Carver le tueur (je ne trahis aucun secret) utilise toutes les technologies de la cyber criminalité pour tuer et tromper tout le monde, McEvoy aura besoin d’aide, heureusement il n’a pas rompu le contact avec Rachel Walling du FBI avec qui il avait traqué "Le Poète"
    Un polar ultra classique, quelques accélérations, quelques plages de repos, un souci du détail, la technique de Connelly même si elle s’essouffle un peu reste assez efficace pour vous faire passer un bon moment. Mais si par hasard vous n'avez pas lu "Le Poéte" alors n'hésitez pas il est meilleur et de loin que cet épouvantail là.