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Naguère en Palestine - Raja Shehadeh

naguèreenpalestine.gifNaguère en Palestine - Raja Shehadeh - Traduit de l’anglais par Emilie Lacape - Editions Galaade
Je ne pense pas être une exception si je vous dis que le conflit Israélo-palestinien tient pour moi à la fois de l’incompréhensible et de l’inacceptable.
Je me rends compte que je me fais une opinion à travers la presse écrite ou radio mais que j’ai très peu lu de livres sur le sujet,  en réfléchissant je n’ai pas lu du tout sur le sujet. Voila pourquoi j’ai acheté ce livre.

L’auteur nous invite à faire avec lui sept promenades, sept balades dans les collines autour de Ramallah, Naplouse, Jéricho. « Quand je commençai à parcourir les collines, il y a un quart de siècle, je n’étais pas conscient de me promener dans un paysage en voie de disparition » C’est une terre millénaire que Raja Shehadeh parcourt au gré des saisons « La Palestine a toujours été l’un des pays les plus visités par les pélerins et les voyageurs » Ces paroles font aussitôt écho chez moi qui viens de lire Lamartine et ses très belles pages sur cette terre biblique.
Suivons le dans ce qu’il appelle sept « Sarha » le mot qu’il utilise pour dire ses vagabondages « Un homme qui part en sarha se promène sans but, sans restriction de temps ni de lieu ; il va où son esprit le guide pour nourrir son âme et se ressourcer »

 

Ramallah.jpg

Ramallah - Image du blog de JL Kuffer

De collines en vallées il nous découvre une terre rocailleuse, sèche, traversée de murets de pierres pour retenir la terre et permettre les cultures. Terre parsemée de vieilles habitations où il aime se reposer qui porte des noms comme « Ain Al-Lawza source de l’amande » et qui prend une toute autre allure après la pluie « Les fleurs sauvages poussaient en abondance le long du chemin. La plupart étaient minuscules : des iris bleus de quelques centimètres de haut, des fleurs de lin rose tout aussi proches du sol, quelques orchidées pyramidales (...) la terre était comme tapissée de fines broderies colorées »
Il évoque sa famille et en particulier son grand-père qui a cultivé ici ses vignes, son verger et s'est même fabriqué un fauteuil quasiment royal.
Nous ne pourrons partager la beauté de ses promenades qu’à la condition de partager aussi son extrême tristesse devant la perte progressive de sa terre.

A coup d’expropriations, de tracés de routes, d’occupation militaire de certaines zones, de création de colonies de plus en plus nombreuses et de plus en plus étendues, le gouvernement israélien au mépris de ses propres lois a réduit l’espace de vie des palestiniens. L’utilisation abusive de la notion d’occupation des terres par les tribunaux entraînent la spoliation massive de propriétaires palestiniens.
Son témoignage de juriste est sans appel et lui qui a courageusement créé une association de défense des droits de l’homme et a oeuvré pendant des années pour défendre ses concitoyens contre l’arbitraire, est aujourd’hui très pessimiste. Sa dernière promenade où il est « agressé » par de jeunes palestiniens armés et menaçants met un terme à l’espoir de voir enfin la paix régné sur ses collines « Debout sur les ruines de l’un de mes endroits préférés, près de là où je suis né et où j’ai toujours vécu, je sentis que les collines ne m’appartenaient plus. Je ne suis plus libre de venir m’y promener. Elles sont devenues dangereuses et je ne m’y sens plus en sécurité »

ramallah2.jpg

J’ai pris conscience grâce à ce livre du rétrécissement systématique des terres palestiniennes, de l’interdiction des déplacements choisis remplacés par des déplacements contraints, de l’arrachement à la terre par des expropriations iniques  et parfois violentes.
Ce livre exprime tout cela avec une telle douleur dans les mots, une telle sensibilité qu’il fait plus pour notre compréhension que tous les reportages et que toutes les chroniques politiques.


Raja_Shehadeh.pngL’auteur
Raja Shehadeh est avocat et écrivain, il vit à Ramallah et à reçu pour ce livre le Prix Orwell 2008
Le prix Orwell est un prix littéraire anglophone récompensant les œuvres rapprochant la politique du grand public, en littérature et en journalisme. Son nom est un hommage à l'écrivain et journaliste George Orwell (source Wikipédia)

Petit additif

Alors que je terminais ce livre et ce billet la chronique de Pierre Assouline est consacrée à la mort de Tony Judt qui s'est engagé en faveur d'un état binational avec des droits identiques pour les Israéliens et les Palestiniens. Je retiens cette phrase de lui que je fais mienne  " Les Juifs sont rendus muets par l’exigence qui leur est faite de soutenir Israël, les non-Juifs le sont tout autant par la crainte de passer pour antisémites, c’est pourquoi il n’y aucun dialogue sur le sujet " et je vous invite à aller lire l'article que Tony Judt a signé dans le Monde diplomatique (Juin 2008)

 

 

Commentaires

  • Incompréhensible et inacceptable, oui! Depuis longtemps je ne suis plus tout cela que de loin, trop décevant, à peine y a-t-il une lueur d'espoir de paix (car des deux côtés il y a des hommes et des femmes de paix) que patatras ça craque!
    Je comprends particulièrement l'attachement à une terre cultivée par ses parents et grands parents... quel que soit le lieu.

  • @ Keisha : c'est en effet de loin terriblement difficile de comprendre la poursuite de ce conflit et les positions très dures alors que comme tu le dis on sait pour les avoir entendus ou lus que bon nombre d'hommes sont pour la paix des deux côtés
    Ce livre m'a beaucoup touché car aucune trace de haine, de la colère oui, de l'incompréhension mais pas de haine.

  • Très beau billet sur un sujet tellement douloureux! Je vais suivre les liens que tu as donnés!

  • @ Mango l'article du Monde que Pierre Assouline a mis en lien, est vraiment excellent et mérite d'être lu

  • Bien difficile d'écrire sur ce sujet.... en pensant au sort tout à fait révoltant qui est celui des Palestiniens, en terre de Gaza par exemple. Mais je connais peu l'histoire de la région alors... livre à lire !

  • @ Margotte ; j'ai eu du mal à écrire ce billet partagée entre mon plaisir pour des pages superbes et poétiques et la tristesse ressentie à cette perte définitive d'une terre

  • J'ai lu le billet de Pierre Assouline hier et comme toi je l'ai trouvé très intéressant. Je note cette lecture, comme toi je ne suis plus les méandres de ce conflit trop compliqué, et puis il y a toujours le même hiatus entre classe politique et peuple. C'est sûr que cette spoliation se paie cher et va continuer à se payer très cher. C'est désespérant.

  • @ Aifelle : c'est bien ce désespoir que l'on sent dans ce livre, une énorme tristesse et un énorme gâchis

  • Le sujet n'est pas simple et le choix est courageux. Pour les raisons mêmes que tu évoques ici et là. Toute discussion sur ce qu'on appelle commument "la cause palestinienne" soulève les passions les plus acerbes et déraisonnables.
    On est tenu, à chaque fois, de comprendre et d'accepter sans discussion les raisons juifs sous peine d'antisémitisme et cela même au sein d'une institutions international ou la tolérance devrait règner plus qu'ailleurs. C'est dire.
    Bravo Dominique. Ton article est magnifique.

  • @ Armando : ton approbation me va droit au coeur venant de quelqu'un qui depuis plusieurs semaines met en avant une "Europe des mots" placée sous le signe de la tolérance

  • Je n'ai pas grand chose à ajouter à tout ce que toi et les autres ont dit, je partage l'incompréhension et la tristesse, je peste souvent aussi.
    Merci pour le lien. C'est un livre que je lirai sûrement, merci.

  • @ Colo merci pour ton commentaire, peste peste cela est nécessaire

  • Bonjour Dominique,
    Merci de votre incursion dans notre blog et commentaire que vous y laissez. Oui, ce conflit est source de tant de souffrances, il dure depuis si longtemps. Je ne peux rien y changer, mais je peux lire le livre que vous recommandez et je vais le faire. Je vous en donnerai écho. Amitiés et bon WE.
    Golovine

  • @ Golovine : merci de votre passage et commentaire, j'apprécie pour ma part de découvrir de nouveaux blogs et de nouvelles lectures

  • Le conflit Israëlo-palestinien demeure une épine dans le pied des pays occidentaux qui ont refusé pendant toute la 1ère partie du 20ème Siècle d'entendre parler d'un État qui appartiendrait à la fois aux Juifs et aux Arabes. De nos erreurs, omissions, errances et omissions sont nées ce problème qui paraît aujourd'hui quasiment insoluble. L'État d'Israël a été fondé sur les ruines des communautés juives européennes massacrées, en réparation de ce que les alliés savaient en le taisant au reste du monde, par intérêt et pour ne pas froisser certaines susceptibilités politiques ! Ces deux populations doivent comprendre qu'elles sont faites pour vivre ensemble, côte à côté, et construire un état bi-national et faire taire les velléités religieuses de part et d'autre. C'est la seule solution actuellement ! Pour l'avoir souhaité comme tel, Rabbin a été assassiné par un fanatique juif ...

  • @ Nanne : Oui et l'auteur dans son livre parle des espoirs nés des différents processus de paix mis en place et toujours interrompu, des négociations pendant lesquelles Israël accélérait la création de nouvelles colonies oui des fanatiques palestiniens venaient ruiner des semaines d'effort
    On a aujourd'hui peine à croire à une solution possible

  • cet ouvrage m'intéresse, en passant je te signale un ouvrage aux éditions Galaade à ce sujet : Hirbat Hiza de Yitzhar un chef d'œuvre de la littérature israélienne (un classique de 1949) qui raconte l'évacuation d'un village palestinien.

  • cet ouvrage m'intéresse, en passant je te signale un ouvrage aux éditions Galaade à ce sujet : Hirbat Hiza de Yitzhar un chef d'œuvre de la littérature israélienne (un classique de 1949) qui raconte l'évacuation d'un village palestinien.

  • @ Miriam : j'ai énormément aimé ce livre, nostalgique, sage et plein d'humanité , je note le livre dont tu parles car je souhaite lire un peu plus sur ce sujet

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