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Rechercher : dictionnaire amoureux

  • Le Pont des anges - Philippe Le Guillou

    Les émotions  les sentiments 

     

    La peur, la solitude, le doute 

     

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    Comme je ne recule devant rien, je vais vous transporter d’un coup d’aile de chez les Mormons vers le plus petit état du monde ! Mon empreinte carbone va en prendre un coup mais tant pis.

     

    Le Pape vient de mourir, Miltiade II, c’était le premier Pape noir de la chrétienté ! La ville éternelle est à feu et à sang, attentats, incendies des églises, actes terroristes. Le désordre est partout, on parle même de scission entre les Eglises d’Amérique du Sud et le Vatican. Certains évêques se rebellent contre l’autorité non sans ménager leurs intérêts. 

    Bref la tradition est mise à mal et l’Eglise de Pierre est la proie de tous les extrêmistes. 

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    C’est dans cette ambiance explosive que le conclave se réunit. 

    Tractations, manoeuvres, négociations souterraines

    L’élu est Thomas Sullivan l’irlandais, moine bénédictin devenu cardinal et qui prend le nom de Clément XV. 

    Cet homme amoureux du beau, d’une foi profonde, va devoir déjouer les pièges des différents clans de la curie romaine figée dans un immobilisme rétrograde. L’homme est en proie au doute, à la peur et à la solitude.

    Deux hommes vont par leur amitié l’aider à conduire la « barque de Pierre », Julius le penseur cloué sur un lit de souffrance et Simon le peintre torturé. 

    Clément XV va se révéler à la fois attaché aux rituels de l’Eglise et à sa liturgie mais en même temps très novateur. 

    Ses voyages en Afrique et au Brésil vont être l’occasion d’affirmer son souci des pauvres et de la nécessité de réformes. 

    Le Vatican tremble sur ses bases à entendre un discours où il est question de décentraliser le pouvoir de l’Eglise et d’ordonner des hommes mariés.

     

    J’ai énormément aimé ce roman, Philippe Le Guillou a une connaissance du sujet qui rend le récit d’une totale crédibilité. Le conclave est un grand moment ! J’ai sorti mon dictionnaire à plusieurs reprises à la recherche de mosette, de pallium et de cathèdre

     

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     La mosette est une courte pélerine descendant jusqu'à la ceinture et boutonnée par devant

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    Cathèdre :  symbole de l'autorité, de l'enseignement et de la juridiction épiscopale, dans la liturgie catholique concrétisé par le siège de célébration de l'évêque .

     

     

    L’homme qu’il nous présente est attachant, on aime son combat avec le bouillant cardinal de Sao Paulo , on aime ses promenades nocturnes au bord du Tibre vers le Pont des Anges .

     

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                                  Le Pont Saint Ange et Saint Pierre de Rome

     

    Les liens de ce Pape avec le monde de l’art sont l’occasion de pages magnifiques sans oublier son Irlande natale et pays d’élection de l’auteur avec ses « Etendues désolées de Donegal, les loughs avec leurs vols de sarcelles et de bécasses, les rives fangeuses, la terre de bruyère, la tourbe noire »  Un excellent roman.

     

    Dernière minute : alors que ce billet était déjà écrit et engrangé pour la publication, l'actualité vient donner une teinte particulière au livre, un majordome renvoyé, un banquier remercié, la curie en plein scandale, Philippe Le Guillou observateur attentif de ce monde bien clos ne s'est pas trompé !!! 

     

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                              © afp Filippo Monteforte 

     

    Le livre : Le Pont des Anges - Philippe Le Guillou - Gallimard - 2012

  • John Florio alias Shakespeare - Lamberto Tassinari

    Si vous me suivez ici régulièrement vous savez que j’ai lu deux biographies de Shakespeare, trois en fait mais l’un d’elle n’a pas fait l’objet d’un billet.

    Dans les trois, les auteurs se posent beaucoup de question sur l’identité même de l’auteur anglais, des zones d’ombres importantes persistent, en particulier sur ses études, sur une dizaine d’années où l’on ignore ce qu’il a pu faire. Toujours les biographes se sont interrogés sur le surgissement brutal de cet auteur si doué, si magnifique sur la scène londonienne, disons le, du jour au lendemain

     

    D’ailleurs Stephen Greenblatt note les trous dans la biographie et les incertitudes

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    « Un jeune homme originaire d’un petit bourg de province, sans fortune, ni relations familiales, ni éducation universitaire »  mais aussi « une réussite qui défie toute explication rationnelle » 

    Parlant de l’oeuvre

    « Son oeuvre est si surprenante et si lumineuse qu’elle semble avoir été créée par un dieu et non par un mortel, encore moins par un provincial d’origine modeste. » Il précise « nous n’avons aucune preuve que Shakespeare fit ses études à la grammar school de Stratford. »

     

    C’est au point que beaucoup d’écrivains et non des moindre,Borges, Henry James, Dickens, Twain, Walt Whitman sans oublier Freud, mettaient en doute que l’auteur de théâtre ait pu ainsi surgir d’un chapeau.

    Beaucoup de noms ont été avancés, Francis Bacon, Edouard de Vere ou Marlowe, sans que jamais on ne soit parvenu à rien prouver faute de documents.

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    Voici l’essai de Lamberto Tassinari qui n’hésite pas à franchir le Rubicon et à considérer que William Shakespeare en tant qu’auteur n’a jamais existé, que sous ce nom se cache John Florio italien de naissance, anglais d’adoption, l’auteur du premier dictionnaire anglais/italien Le Monde des mots et le traducteur de Montaigne et Boccace en anglais.

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    John Florio

    Pour l’occasion et afin que vous ne me preniez pas pour une hurluberlue j’ai relu la biographie romancée de John Florio par Anne Cuneo

    La biographe place Shakespeare au plus près de Florio même si dans la post-face l’auteur prend bien garde de préciser que jamais au grand jamais elle n’a pu penser à une possible paternité de John Florio, faute de temps dit-elle.

     

    Ce qui m’a intéressée dans le travail de Tassinari c’est qu’alors que Shakespeare est un des auteurs ayant entrainé la production de travaux universitaires en nombres ahurissants, personne n’ait cherché à travailler sur Florio éminent intellectuel de son temps, linguiste émérite, traducteur reconnu. Comme si cet homme singulier n’avait jamais existé et surtout n’avait aucun lien avec William Shakespeare.

    Pourtant le premier livre de Florio  First Fruites  est un ouvrage d’un linguiste qui aurait dû susciter l’intérêt de tous les chercheur soucieux de reconstituer la langue anglaise de Shakespeare 

    On constate quand on lit Shakespeare qu’il a un penchant pour les proverbes en tous genres hors « John( Florio) a lancé la mode de l’utilisation de dictons populaires et de proverbes en Angleterre, une mode dont Shakespeare, selon la critique orthodoxe, allait être un des adeptes les plus enthousiastes. »

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    le dictionnaire de john Florio

    Le second livre de l’italien Second frutes est un « texte extrêmement pénétrant, résultant d’un travail de journalisme littéraire intelligent et cultivé sur la vie londonienne de l’époque. Bref, c’est un manuel plein de vivacité, d’érudition, d’idées et de tournures stylistiques qui, souvent, se retrouvent inchangées dans les oeuvres de Shakespeare »

     

    Plusieurs universitaires ont commencé d’étudier Shakespeare à la lumière de Florio, mais au dernier moment, alors qu'il avancent des arguments en faveur d'un lien fort, ils renoncent à faire un pas de plus et à dire Florio = Shakespeare

    Ce qui est certain et n’est nié par aucun biographe de Shakespeare c’est que « indépendamment de la question identitaire, le processus de l’écriture, de la représentation et de l’impression des oeuvres de Shakespeare demeure un mystère presque total » et j’avoue qu’en relisant la biographie de Greenblatt le lien qu’il fait entre, un penchant possible pour l'alcool du père de Shakespeare et la création de l’ivrogne Falstaff, est un rien tiré par les cheveux par exemple. 

     

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    Alors d’où viennent les connaissances de Shakespeare en musique, son vocabulaire musical est étendu, en botanique, en médecine ...
    Tous les biographes mettent l’accent sur l’influence de Montaigne sur Shakespeare (le Roi Lear, la Tempête) Montaigne dont les Essais furent traduits par.... John Florio

    Florio a forgé  1149 mots en anglais pour traduire Montaigne, rappelez vous que l’on dit que Shakespeare lui en aurait inventé 2000, il semble improbable que deux hommes vivant à la même époque, créent en même temps un nouveau vocabulaire sans se connaitre !

     

    Plus pertinent encore la connaissance par Shakespeare des écrits de Giordano Bruno pas encore connu, que Florio a côtoyé plusieurs années auprès de l’ambassadeur de France.
    Le Marchand de Venise et Othello ont pour source d’inspiration des romans italiens non traduits en anglais au moment où Shakespeare écrit.

    La Renaissance se prêtait bien aux emprunts littéraires, le droit d’auteur n’était pas fixé et  « la masse des emprunts de Shakespeare à Florio est avérée »

    On a souvent fait noté les emprunts de Shakespeare à la Bible et son savoir en la matière, ce à quoi L Tassinari répond qu’en effet John Florio a fait des études au séminaire de Tübingen ce qui lui permettait de vivre « bible en poche »

     

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    Enfin la connaissance fine de l’Italie est sûrement un argument de poids, connaissance des textes, de la commedia del arte, et sentiment de l’exil très souvent utilisé par Shakespeare.
    Florio est un italien amoureux de la langue anglaise ce qui pourrait expliquer l’étrangeté souvent remarquée de la langue de Will le barde.

     

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    Robert Dudley Comte de Leicester mécène de john Florio ET Shakespeare

    L’essai de Lamberto Tassinari n’est pas parfait mais il a le mérite d’ouvrir un débat.
    « Pourquoi ce linguiste polyglotte, lexicographe, traducteur, courtisan, ami des plus puissants parmi les nobles de son époque, durant seize ans secrétaire personnel de la reine Anne de Danemark et grand diffuseur des cultures européennes en Angleterre a-t-il été boudé par les universitaires ? »

     Il n’y a pas de preuves de ce que Lamberto Tassinari avance MAIS il y a un tel faisceau d’éléments concordants qu’à tout le moins on peut être certain d’une coopération entre ces deux personnages si tant est qu’ils ne fassent pas qu’un.

    Que les anglais résistent à l’idée d’étudier la question on peut le comprendre, imaginons qu’un trublion vienne nous dire que Molière c’est du vent ....

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    Le livre : John Florio alias Shakespeare - Lamberto Tassinari - Traduit par Michel Vaïs - Editions Le Bord de l’eau

     

  • Bribes de l'art d'écrire

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    En somme la lecture, je l’ai toujours associée à l’écriture. La pratique de la lecture m’est toujours apparue comme un accompagnement indispensable de l’écriture. C’est parce que j’ai commencé à écrire que je me suis mis à lire. 

    C’est parce que j’ai compris très vite  ( et qu’on me l’a dit et répété à juste titre ) que pour écrire il fallait avoir lu, que j’ai commencé à lire.

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    D’ailleurs toutes les premières grandes lectures fondatrices de ma vie - Kafka, Beckett, Proust - je ne les ai pas faite dans l’adolescence, je les ai faites alors que j’écrivais déjà.

    J’ai toujours lu avec une perspective d’écrivain.

    Il est bien sûr très rare qu’on ouvre un dictionnaire et qu’on se mette à le lire, pages après pages, dans la continuité. Non on ne lit pas le dictionnaire, on le feuillette, on le parcourt, on le fatigue, selon la très jolie expression de Borgès.

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    Une chose me frappe, mais ce n’est peut être qu’une illusion d’optique, c’est qu’il y a plus de mots dans l’oeuvre de Proust que dans tous les dictionnaires du monde.

     

    Le livre : C’est vous l’écrivain - Jean-Philippe Toussaint - Editions Le Robert 

     

  • Un amateur d'opéra

    Un auteur dont je vous ai déjà entretenu, une biographie et un livre de voyages, j’ai trouvé il y a quelques temps un livre sur cet auteur qui m’a charmé et un dicitionnaire amoureux parfait pour les amateurs.

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    Je vous donne un indice, il était amateur d’opéra.

  • bribes de vie d'un livre

    Mort et résurrection d’un livre

    « Chez nous, en Hollande, nous appelons ce dictionnaire le “Gros Van Dale”, il conserve le trésor de notre langue. Mon exemplaire était doté d’une reliure entoilée verte, l’air humide l’a attaqué, le sel apporté par le vent de mer a fait son œuvre destructrice, le livre a commencé à se déliter, la couverture à lâcher prise, chaque fois que je soulevais le livre il réagissait avec aigreur, il laissait tomber des feuillets que je devais glisser à la fin sans pouvoir les recoller »

    nooteboom

    « Alors a commencé la lente révolte, une sorte de guerre de vingt ans que j’ai menée pour ma part armé de ruban adhésif et de colle, de glu, d’aiguille et de fil, jusqu’au moment où le Van Dale a baissé les bras et menacé de se suicider. »

    nooteboom

    suicide de dictionnaire

    « C’est à ce moment précis que quelqu’un m’a parlé d’une relieuse qui, selon lui, habitait l’île. Je lui ai apporté en petits morceaux le Van Dale moribond. Elle m’a demandé deux mois, en m’assurant que je le retrouverais vivant. En prenant congé, j’avais l’impression qu’on portait en terre le cercueil de ma langue. »

    nooteboom

    Redonner vie à un livre

    « Mon Van Dale est de retour, il est posé ici à côté de moi. La relieuse lui a confectionné une jolie boîte, de couleur verte comme la toile usée de sa couverture. »

     

    Le livre : 533 Le livre des jours - Cees Nooteboom - Traduit par Philippe Noble - Editions Actes Sud

  • Vous reprendrez bien un peu de latin ?

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    dictionnaire.jpgDictionnaire des sentences latines et grecques - Renzo Tosi - Editions Jérôme Millon
    A l’heure de la fronde des professeurs de lettres classiques cette parution fait un joli pied de nez à ceux qui pensent que le latin/Grec c’est dépassé ! Rogné, malmené, moqué, l’enseignement du latin et du grec est réduit à la portion congrue mais vous pouvez  retrouver le plaisir du voyage dans le passé dans ce dictionnaire qui n’est pas du tout destiné aux spécialistes ou enseignants, non il est fait pour vous et moi si l’on est curieux de nature.
    Plus de 2000 sentences, maximes, expressions, locutions, celles qui font les beaux jours des pages roses du Larousse mais pas seulement. Ajoutez y des proverbes, des dictions, des aphorismes et enfin pour faire savant : des apophtegme (ça c'est grec !)

    Classez tout cela par thème par nom d’auteur pour donner un semblant d’ordre et vous voilà avec de quoi butiner, pilloter, picorer, et lire à sauts et à gambades pour plusieurs semaines voire plusieurs mois.
    Ce que j’aime le plus ce sont les croisements avec les auteurs qui ont utilisé telle ou telle expression, question record La Fontaine est très bien placé suivi de près par Racine et Corneille mais on trouve ici toute l’Europe et au delà : Dante, Cervantès, Shakespeare, Tolstoï.
    Vous retrouverez vos auteurs antiques favoris :  Horace a beaucoup fait pour ce dictionnaire mais aussi Pétrone, Juvénal, sans oublier Cicéron et Sénèque.
    CerclePoetesr-300x253.jpgRenzo Tosi va plus loin en liant chaque sentence avec des oeuvres, des films, ah le Cercle des Poètes disparus Monsieur Keating et son Carpe Diem,  des chansons récentes. Ces mariages sont toujours passionnants à découvrir.
    Réalisé par un italien, il est traduit en français pour la première fois alors qu’en Italie il en est à sa 16 ème édition et à 100 000 exemplaires vendus ! Je vous laisse découvrir la préface sous forme de conte humoristique, elle est signée Umberto Eco
    L’éditeur vous invite à le suivre en quelques exemples.
    je lui donne la parole : 
    "Nos mentalités se sont forgées depuis des millénaires, sur un même patrimoine d'images, qui trouvent leurs origines dans les civilisations grecques et latines. Elles continuent à les faire vivre, à les remodeler et prouvent l'enracinement des images du passé et leur obstination à perdurer
    « Les murs ont des oreilles », « Tel père tel fils », « Les rats quittent le navire », « La nuit porte conseil », « Tous les animaux sont tristes après l'amour », « La peur donne des ailes » 


    Quelques exemples

    Consummatum est - Tout est accompli : tiré des évangiles l'expression a été utilisé par Puccini le jour de la première de Madame Butterfly qui fut un désastre........Pauvre Puccini

    Omnia vincit amor - l'amour vainc tout : un des articles les plus longs et on retrouve ici l'Ecclésiaste, Pétrarque, Emily Dickinson en passant par Carmina Burana

    Unus pro multis - Un seul pour un grand nombre : tiré de l'Enéide on ne peut s'empêcher de penser que Churchill s'en soit inspiré dans son célèbre discours " Jamais dans l’histoire des conflits humains une dette aussi grande n’a été contractée par tant d’hommes envers si peu "

    Nulla dies sine linea - Pas un jour sans une ligne : Sans doute utiliser par Pline l'ancien mais reprise par Erasme, Giordano Bruno, Kierkegaard, et bien sûr Emile Zola

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque et passez de longues heures à butiner