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Bribes et brindilles - Page 39

  • Les arbres et la forêt

    Dire que l’arbre est, de tous les objets que produit la terre, le plus grand et le plus beau n’est pas lui faire un éloge exagéré.


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    L’une des beautés du peuplier d’Italie, et qu’il est presque le seul à prodiguer, tient à la ligne ondoyonte que le vent lui fait décrire. La plupart des arbres, dans la même situation, ne sont que partiellement agités, un côté demeurant au repos, tandis que l’autre est pris de mouvement. Mais le peuplier italien ondule d’un seul tenant de la cime au pied, comme une plume d’autruche sur le chapeau d’une dame.

     

     

     

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    La ramure de chaque espèce recèle beaucoup de variété, comme aussi celle de chaque individu. Elle présente tant de lignes élégantes, tant d’oppositions et de riches entrecroisements de toutes parts, qu’il existe peu d’objets naturels d’une beauté comparable à la ramure d’un arbre.
    En été son effet est incontestablement supérieur, mais pour ce qui est de la beauté, et de l’agrément, je crois que je le préfère en hiver.


    Le livre

    Le paysage de la forêt - William Gilpin - Editions Premières Pierres

  • Un bol de nature

    Quelques extraits de livres, de ceux que je ne prête pas, de ceux qui me sont précieux et que je peux ouvrir à n’importe quelle page et y trouver un grand plaisir de lecture. Des livres riches et magnifiques, poétiques et sensibles. Certains sont épuisés chez l'éditeur mais la persévérance fait des miracles.

    Tout cela a commencé, voici quinze ans déjà, par un pique-nique à la pointe orientale de l’île d’Orléans, là où l’accès au fleuve est rendu hasardeux, en juillet par une immense batture chargée de joncs, de foin de mer et de riz sauvage. Le lieu où nous nous trouvions était paisible, préservé.(...) Dans l’après-midi, au cours d’une promenade au bord du fleuve, j’aperçus cachée dans les arbres et à demi enfouie sous les hautes herbes, une petite cabane rouge qui servait de camp de chasse. Je ne savais pas encore que cette maisonnette de bois rond allait devenir un des lieux importants de ma vie.
    Pierre Morency - L’oeil américain - Boréal

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    Une batture

    Chaque année, après les tempêtes de neige du coeur de l’hiver, survient une nuit de dégel où le tintement de l’eau qui goutte traverse le pays, réveillant sur son passage les créatures assoupies pour la nuit et d’autres qui dormaient depuis le début de l’hiver. La mouffette roulée en boule au fond de sa tanière déplie ses membres et risque une sortie dans cet univers humide, en traînant son ventre dans la neige. La trace de la mouffette marque l’un des premiers événements repérables de ce cycle de fins et de commencements qu’on appelle une année
    Aldo Leopold - Almanach d’un comté des sables

     

     

    Dans l’herbe autour du chalet, les abeilles sont très occupées à butiner les pissenlits dorés, et ne prêtent aucune attentions aux houstonies et aux violettes. Les violettes pourpres, bleues et blanches, poussent à telle profusion que l’air est embaumé de leur parfum. La brise apporte l’odeur sucrée des fleurs de pruniers sauvages qui poussent dans les bois sur la colline. Les abeilles aiment les fleurs des pruniers sauvages et moi aussi.
    Sue Hubbell - Une année à la campagne

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    Tinker Creek

    Il y a dans ce monde sept ou huit catégories de phénomènes qui valent la peine qu’on en parle, et l’une d’entre elles, c’est le temps qu’il fait. Si, d’aventure, l’envie vous prenait de sauter dans votre voiture, de traverser tout le pays, et de franchir les montagnes pour arriver dans notre vallée, et là, de traverser Tinker Creek, de monter la route qui mène à la maison, et si par hasard, vos pas vous faisaient traverser la cour, frapper à la porte et demander à entrer, et que, vous vous mettiez à parler du temps qu’il fait, alors, vous seriez le bienvenu.
    Annie Dillard - Pèlerinage à Tinker Creek

     

     

  • Les Quatre saisons

    Au printemps, c’est l’aurore que je préfère. La cîme des monts devient peu à peu distincte et s’éclaire faiblement. Des nuages violacés s’allongent en minces traînées.
    En été, c’est la nuit. J’admire, naturellement, le clair de lune ; mais j’aime aussi l’obscurité où volent en se croisant les lucioles. Même s’il pleut, la nuit d’été me charme.

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    En automne, c’est le soir. Le soleil couchant darde ses brillants rayons et s’approche de la crête des montagnes. Alors les corbeaux s’en vont dormir, et en les voyant passer, par trois, par quatre, par deux, on se sent délicieusement triste. Et quand les longues files d’oies sauvages paraissent toutes petites ! C’est encore plus joli. Puis après que le soleil a disparu, le bruit du vent et la musique des insectes ont une mélancolie qui me ravit.
    En hiver, j’aime le matin, de très bonne heure. Il n’est pas besoin de dire le charme de la neige. Mais je goûte également l’extrême pureté de la gelée blanche ou, tout simplement, un très grand froid ; bien vite on allume le feu, on apporte le charbon de bois incandescent : voilà qui convient à la saison...

    Le livre
    Sei Shônagon  Notes de chevet - Gallimard
    la photo vient d'ici

  • Promenades littéraires en Provence

    En Avignon et à Fontaine de Vaucluse
    fontaine-histoire-petrarque.jpgQu’il est tentant de suivre le jeune Pétrarque dans ces ruelles qui n’ont pas changé depuis le 6 avril 1327, jour où, sur le parvis de l’église Sainte Claire, il entrevit Laure, Provençale blonde. « Des cheveux d’or flottaient sur ses épaules, son teint était d’une blancheur éclatante, sa bouche n’offrait que de perles et des roses, sa taille était fine et souple. » Elle portait une robe de soie verte semée de violettes et l’atour, sorte de béguin, encadrait son visage.

    Vauvenargues
    Le doux et sensible Vauvenargues, disent les manuels de littérature.
    Doux et sensible, certes, mais aussi amoureux et résolu, machiavélique et ambitieux. Ce moraliste qu’on veut nous faire passer pour tiède est d’abord un conquérant. C’est le capitaine Fracasse de notre littérature.
    Tandis que le mistral chantait dans les pins et que les ruisseaux murmuraient à mes pieds, j’ai ouvert au hasard le petit recueil scolaire où j’ai fini par marquer d’une croix presque toutes les maximes. (...) Il est des écrivains qui me forcent à penser, d’autres qui m’émeuvent. Sa pensée si droite, sa poésie si profonde atteignent l’âme et l’esprit.

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    Vauvenargues - Le Château

    Le livre : Ma route de Provence - Raymond Dumay - Editions La Table Ronde

  • Promenades littéraires

    Grosse colère
    Souvent j’ai entendu cette phrase : « Moi, non, je ne lis rien de ce qui paraît actuellement. Tout cela est si médiocre, et on a tant de mal à s’y reconnaitre. Je retourne à Pascal, à Molière, Villon... » (..) Se flatter de sa vieillesse et de son incuriosité !
    Ils se prétendent cultivés, bouffonnerie ! Cultivés parce qu’ils ont acheté un jour, en bloc, les Cents chefs-d’oeuvre français et qu’ils s’en gargarisent ! Cultivés ces hommes pour lesquels Villon n’eût été qu’un bandit qu’il fallait pendre, Rimbaud un collaborateur, Mallarmé un mauvai professeur et Verlaine un ivrogne !

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    Ne savez-vous pas qu’être cultivé, c’est d’abord être vivant, c’est chercher, choisir, se tromper, se ridiculiser même (...) La Culture n’est pas un petit bac de père peinard, mais un train dans lequel il faut sauter en pleine marche.

    Et admiration
    Romain Rolland avait l’art involontaire de provoquer des dévouements familiaux. Sa mère morte, sa soeur refusa de se marier pour veiller sur lui, car sa santé exigeait de constants ménagements.
    Il arriva qu’un jour au fond de la Russie, une jeune fille lu Jean-Christophe. Après le dernier volume, elle se leva, boucla une valise, franchit la frontière, traversa l’Europe arriva jusqu’au lac suisse où vivait son homme de génie et l’épousa.

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    Le livre
    Ma Route de Bourgogne - Raymond Dumay

     

  • Promenades littéraires l'Aquitaine

    Balzac et Angoulême

    Balzac est le grand homme de la ville depuis qu’il la décrivit dans les Illusions perdues, ce roman trop peu connu, qu’on devrait offri à tous les jeunes gens provinciaux qui rêvent de tenter à Paris la fortune littéraire.
    La ville est étouffée par son créateur. Elle est née et morte avec Lucien de Rubempré. Elle ne s’enorgueillit point du passage de Calvin qui prêcha jadis dans la chaire de plein air (...) Négligé aussi La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes , ci livre au pessimisme réconfortant. Pour Ravaillac, autre enfant du pays, le silence est plus justifié.
    Angoulême est la ville des illusions perdues.

    Joubert  enfant de Montignac
    Le recueil complet de ses pensées (...) a donné de l’homme une image non pas fausse, mais partielle, celle d’un épicurien idéaliste, nonchalant et frileux.
    Joubert le frileux a été révolutionnaire, Joubert le timide a été l’ami de tous les hommes les plus chargés de vitalité de son époque : Diderot, Rétif de la Bretonne, Grimod de la Reynière, Mercier, Chateaubriand.
    Joubert l’idéaliste fit un mariage d’argent, accéda aux plus grandes fonctions universitaires et traversa tous les régimes de Louis XV à la Restauration sans jamais être inquiété, ce qui n’est pas sans exemple, mais sans jamais renier ses amis, ce qui est plus rare.

    Le livre
    Ma Route d'Aquitaine - Raymond Dumay - La Table ronde (2010)