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Voyager - Page 21

  • En si bon chemin vers Compostelle - Léo Gantelet

    En si bon chemin vers Compostelle - Léo Gantelet - Editions l’Astronome
    compostelle.gifIl y a des rêves que l’on traîne avec soi longtemps, personne ne sait si on pourra un jour les réaliser mais qu’importe car en leur compagnie la vie est plus douce
    Aller à Saint Jacques de Compostelle, faire ce chemin mythique est un rêve que j’ai en moi depuis très longtemps, depuis une fameuse émission de Bernard Pivot où il avait invité Pierre Barret et Jean Noël Gurgand qui avaient « fait le chemin » et publié un livre toujours disponible et passionnant : Priez pour nous à Compostelle.
    Depuis j’ai engrangé au fil des années une jolie bibliothèque sur le sujet, je ne suis jamais partie mais je n’ai jamais cessé de rêver.
    Le livre de Léo Gantelet était devenu indisponible et je courais après depuis longtemps, il vient d’être réédité pour mon plaisir.
    Léo Gantelet est Haut Savoyard, il a un parcours original, il est passé de l’informatique à l’ouverture d’une galerie d’art, aussi lorsque sur un coup de tête il décide de partir à Compostelle son entourage le prends très au sérieux.
    Assez classiquement on assiste à ses préparatifs, son souci des détails pratiques en particulier le poids du sac à transporter sur 1900 km, ou le choix des chaussures mais aussi une préparation physique peu convaincante à vrai dire.

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    Photo du site Santiago chemin de lumière

    Le récit de Léo Gantelet est très agréable à suivre, il écrit simplement et sait donner de la saveur à ses anecdotes, il fait vivre avec sympathie les personnages qui croisent sa route ou qui font un bout de chemin avec lui.
    La traversée de l’Aubrac, le passage des Pyrénées, les longues heures en Castille, j’ai pérégriné avec lui avec bonheur et envie.
    S’il entre dans vos projets de vous lancer à votre tour prenez le temps de lire ce livre et rangez le dans votre bibliothèque en attendant le grand jour.

     

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    Photo du site Santiago chemin de lumière

    Merci à Léo Gantelet qui a eu la gentillesse de mettre un aimable commentaire à ce billet  vous pouvez le retrouver sur son blog

     


    Deux autres excellents bouquins sur le sujet :  Retour à Conques et Le grand chemin de Compostelle de Jean Claude Bourlès chez Payot

  • L'Ile de Sakhaline - Anton Tchekhov

    L’Ile de Sakhaline - Anton Tchekhov - Traduction du russe par Lily Denis - Editions Gallimard Folio
    sakhaline.gifDans un précédent billet nous avons suivi le voyage de Tchekhov vers Sakhaline et les lettres qu’il a adressé à sa famille et à ses amis.
    En se rendant à Sakhaline Tchekhov voulait, nous dit Roger Grenier dans la préface, "payer sa dette à la médecine"
    De son séjour il tirera un livre qu’il écrira avec difficulté et qui sera édité pour la première fois en 1895, il écrit alors " Je suis heureux que dans ma garde-robe littéraire se trouve une rude blouse de forçat "

     

     

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    Sakhaline

    Contre toute attente alors qu’il n’a aucun document d’introduction ou autorisation, Tchekhov réussi à se faire admettre par le gouverneur le Général Korff, celui-ci l’autorise à circuler librement et à interroger qui bon lui semble sauf les détenus politiques.
    Tchekhov va user et même abuser de cette autorisation, il rédige un questionnaire et en trois mois ce n’est pas moins de 10.000 fiches qu’il va renseigner, véritable recensement de la population de Sakhaline, il entre dans tous les villages, toutes les prisons, les maisons de fer.
    Il note tout ce qu’il voit, tout ce qu’on lui dit " Je vais seul d’isba en isba ; parfois un forçat m’accompagne, parfois aussi un garde-chiourme armé d’un révolver me suit comme mon ombre "

     

    L’île est divisée en territoires et secteurs, les hommes qui séjournent ici appartiennent à des catégories distinctes, mais tous sont reclus à vie sur cette île, même leur peine purgée les condamnés ne retrouveront pas leur ville ou village d’origine.
    Tout un personnel administratif vit sur l’île, le gouverneur nommé par le Tsar, un médecin, des commis aux écritures car il faut bien faire des rapports pour le pouvoir central, des artisans : boulanger, menuiser, cuisinier, mais aussi tout le corps de surveillants et autres gardes-chiourmes.
    Les condamnés qui sont ici ont fait le même voyage que Tchekhov, fers aux pieds, la Sibérie est une longue route vers le bagne, la route de Vladimirka " Nous les avons fait marcher dans le froid avec des fers aux pieds durant des dizaines de milliers de verstes "
    Son ami Isaac Levitan a peint un tableau pour illustrer la douleur de cette route connue de tous les russes.

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    Isaac Ilitch Lévitan La route de Vladimirka Moscou, Galerie Trétiakov.

    Dans les villages travaillent des prisonniers mais aussi des paysans dit  libres qui sont en fait des colons contraints de rester sur l’île, leur travail leur permet tout juste de survivre : l’abattage de bois, travail très dangereux, l’agriculture sur une terre peu fertile au climat peu favorable, le travail de la mine le plus dur et le plus dangereux.
    Les mineurs descendent dans la mine par une galerie très longue, ici pas d’ascenseur, l’homme tire un traîneau déjà lourd à vide ; quand il remonte la pente il le fait à quatre pattes tirant son traîneau chargé et les 300 mètres de galerie deviennent un parcours inhumain, le mineur le refait 13 fois par jour !
    Les femmes qui ont suivi leur mari, celles condamnées et libérées, n’ont souvent d’autre choix pour survivre que de se livrer à la prostitution, seule façon de nourrir leurs enfants car ceux-ci sont nombreux à Sakhaline malgré  une mortalité infantile importante. Tchekhov y voit une consolation pour ces hommes et femmes mais les enfants, hélas, aggravent les conditions de vie, plus de bouches à nourrir alors que les possibilités de travail et de ressources sont extrêmement limitées.
    La nourriture est simple, voire frustre, la viande ne fait que très rarement partie des menus, quelques années avant la visite de Tchekhov le scorbut a dévasté la population carcérale.
    Ses observations sur l’état de santé de cette population font mention de la tuberculose bien évidemment, de diphtérie, de la variole, et du typhus dont la mortalité est énorme, enfin bien sûr en raison de la prostitution la syphilis fait des ravages.

    Les conditions de détentions sont inhumaines, barbares, le mot justice n’a plus aucun sens en ces lieux.
    Les punitions et sanctions  sont fréquentes et appliquées sans discernement avec parfois beaucoup de cruauté et de sadisme.
    Les verges et le fouet sont courants, les sentences prononcées le sont selon les « droits » de celui qui sanctionne, le Gouverneur à « droit » à faire appliquer 100 coups de fouet, le surveillant lui n’a « droit qu’à 50 coups ....
    A sa demande Tchekhov assiste à une punition   " J’ai vu applique la peine du fouet, ce qui m’a fait rêver pendant trois ou quatre nuits du bourreau et de l’atroce chevalet "
    Les récidivistes, ceux qui ont tenté de s’évader sont enfermés dans la maisons de fer : enchaînés des pieds et des mains à une  brouette suffisamment lourde pour empêcher les mouvements et suffisamment petite pour être la nuit glissée sous la paillasse. Un modèle de torture ! Les mouvements sont de  trop faible amplitude et la dégénérescence musculaire est définitive, ainsi la punition se poursuit bien après sa fin officielle.
    La répression féroce et  l’absence d’espoir de quitter l’île poussent les hommes à tenter de s’évader et malgré le peu de réussite et les coups de fouet qui suivront, les tentatives sont nombreuses.
    Il faut laisser la parole à Tchekhov " Sakhaline est le lieu des souffrances les plus insupportables que puisse endurer un homme, aussi bien libre que condamné, nous avons laissé croupir dans des prisons des millions d'hommes, et cela pour rien, de manière irraisonnée, barbare "

    Tchekov.gifA son retour Tchekhov fait envoyer des milliers de livres à Sakhaline, ce voyage et ce séjour l’ont marqué " Je ne saurais dire si ce voyage m’a aguerri ou s’il m’a rendu fou. Du diable si je le sais " Ce livre-enquête s’apparente au reportage d’Albert Londres sur le bagne de Cayenne, deux hommes qui ont par leurs écrits rendue vaine la question de l’implication de l’intellectuel dans la vie politique.

    Je laisse à Tchekhov les derniers mots, Sakhaline "Tout autour la mer, au milieu l'enfer." et je vous propose d'ajouter ce livre à votre bibliothèque

  • Lettres de voyage - Anton Tchekhov

    Lettres de voyage - Anton Tchekhov - traduit du russe par Françoise Darnal-Lesné - Editions l’Harmattan
    lettres de voyage.gifLectrice de plusieurs biographies d’Anton Tchekhov, un épisode de sa vie intrigue et provoque l’admiration : c’est son voyage et son séjour sur l’île de Sakhaline
    Il partit de Moscou en avril 1890 il atteint Sakhaline en juillet. Il y séjourne trois mois avant d’entamer une voyage de retour qui le ramène à Moscou en décembre de la même année.
    Sakhaline est un bagne particulièrement inhumain et Tchekhov part pour enquêter " Après l'Australie, dans le passé, et Cayenne, Sakhaline est le seul endroit où l'on puisse étudier une colonie faite de criminels. Toute l'Europe s'y intéresse, et nous devrions l'ignorer ? " et aussi dit-il pour payer sa dette à la médecine.
    En partant il cours des risques, le régime tsariste n’a jamais vu d’un très bon oeil les récits sur les défauts et les manques de la Russie,    
    il part sans recommandation, sans lettres d’introduction et très incertain de l’accueil qu’il recevra des autorités sur place.
    Son ami et mentor Alexeï Souvorine s’est engagé à publier dans les colonnes de son journal, le récit de ce voyage, mais les lettres qu’Anton Tchekhov  adresse à ses amis et relations ne sont pas destinées à être publiées, elles respirent le naturel et la sincérité, l’inquiétude pour les siens, parfois l’indignation, mais aussi son amour inconditionnel pour sa patrie.

    Il va faire 12000 Km dans une contrée parcourue par les vagabonds, les mendiants et les déportés " la Sibérie est un pays froid, tout en longueur. J'avance, j'avance et n'en vois pas la fin " Il voyage dans des conditions dures et très éprouvantes lui qui est déjà atteint de tuberculose.
    Son itinéraire l’emporte en train, à cheval, il remonte la Volga sur un vapeur, il traverse le Baïkal sur un caboteur et remonte le fleuve Amour dont   " Les rivages sont si sauvages, vierges et somptueux qu’on voudrait y rester et y vivre jusqu’à la fin des temps."
    Les dangers sont multiples : " Il fait un froid de loup" l’itinéraire est semé d’embûches "J’ai guerroyé avec les crues, le froid, le bourbier, la fringale et l'envie de dormir" ou encore " Peu avant le soir, on me dit au relais qu'il n'est pas possible d'aller plus loin car tout est inondé, les ponts ont été emportés"
    Ses lettres à sa famille se font parfois légères et savoureuses comme la relation de ses expériences gastronomiques "miel et sauterelles" constituant parfois son menu.

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    La région de Tomsk à l'époque de Tchekhov


    Le tableau qu’il dresse de la Sibérie est sans concessions, le médecin et l’écrivain se confondent et il déplore l’état sanitaire des populations décimées par la diphtérie ou la variole. L’alcoolisme qui fait des ravages  " On trouve autant de vodka qu'on en veut dans les villages les plus reculés (...)  il est beaucoup plus facile de boire de la vodka que de faire un effort pour pêcher du poisson dans le Baïkal ou élever du bétail "
    A Irkoutsk plane encore le souvenir de Raditchev exilé par l’impératrice Catherine pour ses écrits jugés subversifs et ceux des décabristes coupables d’avoir rêvé à la démocratie et envoyés au bagne par Nicolas 1er.
    Mais l’éloignement du pouvoir administratif permet une certaine liberté " Ici on n'a pas peur de parler haut et fort. Il n'y a personne pour vous arrêter, ni d'endroit pour vous exiler, on peut faire du libéralisme à satiété."

    Son voyage de retour dure deux mois. Il embarque sur un bateau qui doit le ramener à Odessa, les escales sont parfois supprimées en raison d’une épidémie de choléra, il peut néanmoins s’arrêter à Hong Kong où il fait un tour en pousse-pousse " Cela revient à dire que je me suis fait traîner par des hommes" et à Ceylan " Un endroit où sûrement se situait le paradis"
    Il a été heureux en voyage et il écrit à Souvorine  "J’ai vu tant de richesse et j’ai eu tant de plaisir que je n’aurais pas peur de mourir maintenant"

     

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    La ville de Tomsk a perpétué le souvenir du passage de Tchekhov


    Mais durant ces sept mois d’absence il a découvert l’enfer de Sakhaline et il ne sera plus jamais le même après cela.
    Je vous propose de le retrouver à Sakhaline dans un prochain billet.

    Vous pouvez aussi aller lire le billet de Tania sur la Correspondance de Tchékhov

  • Pyramiden portrait d'une utopie abandonnée - Kjartan Fløgstad

    Pyramiden Portrait d’une utopie abandonnée - Kjartan Fløgstad - Traduit du néo-norvégien par Céline Roman-Monier - Editions Actes Sud
    pyramiden.gifEn 2000 j’ai fait une croisière non vers le soleil mais vers le nord, au-delà du cercle polaire, au Spitzberg mais dont le nom correct et norvégien est Svalbard. On embarque à Bergen et on remonte jusqu’à Ny-Ålesund la ville la plus au nord du monde qui se trouve à 800 petits kilomètres du Pôle Nord.
    Croisière où les gants et les parkas sont nécessaires en plein mois d’août, où les descentes à terre se font encadrées par des gardes armés en cas de rencontre avec un ours polaire et où vous pouvez apercevoir des morses sur la banquise.
    Une des escales m’avait impressionné à l’époque puisqu’elle avait lieu dans une ville russe abandonnée : Pyramiden, enclave Russe en Norvège, ancienne ville minière où la vie semblait s’être arrêtée et dégageait un sentiment d’abandon et de solitude presque effrayant.

    La lecture du livre de Kjartan Fløgstad était une façon de repartir en voyage au Svalbard et de comprendre mieux le destin de cette ville achetée par les russes au début du XXe siècle , peuplée par des hommes souvent originaires d’Ukraine, mineurs volontaires venus exploiter des mines de charbon au bout du monde.
    Fløgstad s’interroge sur le destin de cette ville qui a suivi celui du régime soviétique, projet russe ambitieux " Pyramiden est l'Utopie, poussée à l'extrême, dans l'extrême Nord, vidée de son contenu, figée dans le temps, par le froid arctique, par les conjectures économiques, par la guerre froide, par le capitalisme triomphant."
    En 1990 Pyramiden avait encore 2500 habitants et faisait la fierté du régime soviétique, en 1998 la ville se vide, les bâtiments sont abandonnés, les mines fermées et Pyramiden passe de ville minière à ville fantôme.

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    Kjartan Fløgstad nous fait faire la visite (photos à l’appui) et insiste sur la qualité des bâtiments et des installations, ce qu’il en reste aujourd’hui, le gymnase déserté, la bibliothèque, qui contenait plusieurs milliers de volumes, vidée et dévastée.
    Je garde pour ma part un souvenir très précis de la sensation d’irréalité sur la place de la ville où sont  encore érigés les symboles du communisme  "Partout à l’intérieur, Pyramiden à l’air d’avoir été frappée par une catastrophe naturelle, ou une catastrophe culturelle"
    Pour l’auteur le destin de cette ville miniature repose sur la mine, et plusieurs chapitres passionnants sont consacrés à la symbolique qui s’y rattache, avec des incursions dans d’autres villes minières en Bolivie, en Pologne ou en Chine.
    L’auteur étend son analyse au folklore, à la littérature  "minière" de Zola à Orwell, et bien sûr Jules Verne et son  "voyage au centre de la terre" Moins littéraire et plus noir, Fløgstad fait référence aux  écrits de Kapuscinski sur Vorkouta dont le bassin de houille le plus riche du monde, fut l’un des camps le plus dur du Goulag.



    Sa réflexion épouse aussi le champs du social et du politique et il tente de comprendre comment est morte cette société créée de toutes pièces, qui vivait sous la menace permanente des accidents, il s’interroge sur la valeur du travail dont le mineur est le représentant quasi héroïque. Aujourd’hui se pose la question du devenir de cette cité fantôme, mais personne n’a l’air très pressé de trouver une réponse pas plus les Russes que la Norvège.

    C’est un voyage curieux et personnel que fait faire l'auteur de ce livre, de nombreuses photographies l’illustrent, elles sont de Marc de Gouvenain qui a accompagné l’auteur lors d’un voyage à Pyramiden.


    L’auteur
    flogstad.jpgNé en 1944 à Sauda dans le Sud de la Norvège,puis suit des études de linguistique à l’Université de Bergen. C’est là que survient l’appel du réel, il abandonne ses études et s’engage comme ouvrier d’usine puis marin sur un cargo norvégien grâce auquel il part en voyage. Il devient le traducteur, vers le Norvégien de grands noms de la littérature Sud-Américaine au premier rang desquels Pablo Neruda et Julio Cortazar. En 2008, il a reçu le Brageprisen d’honneur pour l’ensemble de son œuvre.

  • Marcher une phisosophie - Frédéric Gros

    Marcher, une philosophie - Frédéric Gros - Editions Carnets Nord
    marcher.jpgDes « Balades » de Thoreau, à « L’éloge de la marche » de David Le Breton en passant par « Bâton de randonnée » d’Yves Leclair, ma bibliothèque de «marche » est déjà bien étoffée, mais je n’ai pas hésité longtemps avant d’ajouter le livre de Frédéric Gros sur mes étagères.
    Ici pas de récit personnel, pas de conseils aux marcheurs, pas d’itinéraires secrets, mais plutôt une réflexion, une méditation sur l’art de la marche. Frédéric Gros interroge les marcheurs invétérés, ceux dont l’oeuvre ou l’action porte le sceau du marcheur. De Rimbaud à Nietzsche en passant par Ghandi, sans oublier Kant ou Thoreau.

    Se balader, marcher, flâner, des activités qui prédisposent à penser et méditer au coeur de la nature, loin des soucis quotidiens.
    Nietzsche est le premier accompagnateur de cette marche, chez lui pas de mièvrerie, on va d’un bon pas de Sils-Maria à Rapallo, hiver ou été, mer ou montagne "Nietzsche marche, il marche comme on travaille, il travaille en marchant" les livres de Nietzsche portent la marque de ce grand dehors que l’auteur nous décrit avec infiniment de poésie  "le charme d'un lacet de chemin au milieu des collines, la beauté des champs de vigne en automne, comme des écharpes de pourpre et d'or, l'éclat argenté des feuilles d'olivier sur un ciel définitif l'été, l'immensité de glaciers parfaitement découpés".

     

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    Aux environ de Sils Maria

    Pas question ici de records, de vitesse car « les journées à marcher lentement sont très longues : elles font vivre plus longtemps, parce qu’on a laissé respirer, s’approfondir chaque heure, chaque minute, chaque seconde, au lieu de les remplir en forçant les jointures »

    Mais la marche peut être fuite comme celle de " L’homme aux semelles de vent" qui de Charleville à Aden arpente le monde, chez Rimbaud la marche est l’expression de la colère, l’envie d’ailleurs, qui fait dire à Frédéric Gros " Cette joie profonde, toujours, qu’on a en marchant, de laisser derrière soir. Pas question de revenir quand on marche.(...) On sait toujours pourquoi on marche. Pour avancer, partir, rejoindre, repartir"
    Et pour le dire comme Rimbaud  "Allons, la route !"

    Marchons aussi avec Rousseau qui, comme Nietzsche, dit ne pouvoir penser qu’en marchant et en éprouver une grande joie "Jamais je n’ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi, si j’ose dire ainsi, que dans les voyages que j’ai faits seul et à pied "
    Se promener est-ce marcher ? bien sûr nous dit l’auteur pour qui "Le secret de la promenade, c’est bien cette disponibilité d’esprit, si rare dans nos existences affairées" et nous engage à relire les pages où Proust évoque ses promenades " Du côté de Guermantes ou de Méséglise "
    Nous croisons au détour d’un chemins, Wordsworth, poète  de la nature, car "marcher fait venir naturellement aux lèvres une poésie répétitive, spontanée , des mots simples comme le bruit des pas sur le chemin"

     

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    Paysage cher à Wordsworth

    la liste des marcheurs mais vous laisse au plaisir de faire un bout de chemin avec eux, en attendant je fais mon sac, prends mon bâton

    Ce livre plein de poésie et de grand vent, donne envie de boucler son sac. Je ne peux en épuiser ici tout le charme ni la liste d'autres marcheurs mais je vous laisse le plaisir de faire un bout de chemin avec eux.

    L'auteur

    frederic-gros.jpgFrédéric Gros est professeur de philosophie à l’université Paris-XII. Il a travaillé sur l’histoire de la psychiatrie (Création et folie, P.U.F.), la philosophie de la peine (Et ce sera justice, Odile Jacob) et la pensée occidentale de la guerre (Etats de violence, Gallimard). Il a édité les derniers cours de Foucault au Collège de France.(Source l'éditeur)

     

  • Aventures en Loire - Bernard Ollivier

    Aventures en Loire - Bernard Ollivier - Editions Phébus
    aventures en loire.gifUn billet pour préparer les vacances et si vous mettez vos pas ou plutôt d’ailleurs vos pagaies dans celles de Bernard Ollivier, vous partirez pour des journées de découvertes au prix de quelques douleurs et quelques baignades involontaires.

    Bernard Ollivier vous connaissez ? Dix ans déjà qu’il a parcouru à pied, en solitaire, la mythique Route de la Soie, les trois livres de La Longue marche qu’il en a tiré sont devenus des classiques et l’auteur était cette année l’invité du festival Etonnants Voyageurs
    Mais voilà le temps passe et à 70 ans, il s’est fixé un nouveau défi avant comme il le dit avec humour, d’en être réduit à la marche avec déambulateur.
    L’aventure ? nul besoin de partir au bout du monde, elle est là, à notre porte et les rencontres peuvent être aussi belles qu’aux confins de l’Asie. Prenez une carte et voyez le cours de la Loire. Le fleuve encore sauvage, le fleuve des rois, des poètes et des peintres.

     

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    Les gorges de la Loire


    1000 km que Bernard Ollivier va descendre un peu à pied mais surtout à partir de Retournac en canoë, l’aventure commence vraiment, car si Bernard  Ollivier est fin connaisseur de la randonnée pédestre, il a tout à apprendre du canoë, du coup de poignet indispensable  en col de cygne ,de la lecture de la Loire , du passage des remous et de quelques rapides.
    L’été pourri n’arrange rien et les bains forcés mettent à rude épreuve sa carcasse et la prétendue étanchéité de son matériel. Mais ces mésaventures passent à la trappe en regard des rencontres que Bernard Ollivier fait tout au long de son périple, les amis ont fait appel aux amis et chaque soir ou presque il a le gîte et le couvert assurés, et quand je dis  couvert nous sommes en pays de Loire, donc pensez  dive bouteille ce n’est pas pour rien le pays de Rabelais

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    La Loire à Briare

    La générosité des hôtes, la curiosité de l’auteur pour les métiers rares, pour la restauration de maisons, tout cela forge un récit plein de chaleur humaine, d’une grande richesse.
    Ces six semaines d’efforts, de dangers parfois, de rencontres, passent très vite et voilà notre pagayeur à Nantes où on l’abandonne à regrets
    J’ai retrouvé dans ce récit la personnalité chaleureuse de Bernard Ollivier, son goût pour les rencontres, j’ai dévoré ce livre, il m’a juste manqué pour l’accompagner un petit verre de ......

    Faites une place à ce livre dans vos sacs à dos ou valises

     

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    L’auteur (source l’éditeur)
    Né en Normandie en 1937, Bernard Ollivier consacra sa vie au journalisme (notamment à l’étude des questions sociales). À l’heure de la retraite, il retourne dans sa Normandie natale, mais rejoint régulièrement la capitale, où il anime Seuil, une association d’aide aux jeunes délinquants... quand il ne court pas les mauvais chemins. C’est la marche à pied qui lui aura valu, à 60 ans passés, la célébrité : celle d’un écrivain-voyageur salué par toute la presse, après la publication de son journal de promeneur au long cours: Longue marche (Phébus, 2000), Vers Samarcande (Phébus, 2001) et Le Vent des steppes (Phébus, 2003).