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« Ils habitaient le pays de Noé, où pour la première fois était apparu un arc-en-ciel. Comme dans la Bible, ils croyaient qu’une arche avait existé, longue de trois cents aunes, large de cinquante et haute de trente, un bateau de sauvetage enduit de goudron dans lequel hommes et bêtes avaient survécu à l’inondation du globe terrestre tout entier »
L'arche de Noé Chronique de Nuremberg 1493
« Je ne m’étais encore jamais fait la réflexion qu’il existait des lieux bibliques que l’on pouvait tout bonnement aller visiter »
Le livre : Ararat - Frank Westerman - Editions Chrisitian Bourgois
J'ai une tablette depuis des années et je l'apprécie beaucoup, mais quand on se retrouve verrouiller au lit ou peu s'en faut, la votre liseuse devient votre meilleure amie.
Pas certaine de me lancer dans de la philo ce matin, mais peut être un petit polar en attendant cet après midi ma première séance de bibliothèque en chambre
Connaissez-vous la collection Biophilia chez José Corti ? On peut y trouver des merveilles et je viens d’y faire une bonne pioche. Entrons immédiatement dans le vif du sujet
« Au moment précis où je commence ce livre, le 30 juin, 9h38, un Troglodyte mignon est à peu près le seul de sa classe à percer le silence. Son chant, qui alterne les modes majeur et mineur, est rythmé par les gouttes d’une pluie continue dont le timbre varie selon leur densité et le support qui les accueille, feuilles de frêne ou de tilleul, gravier, friche, vitre »
Voilà vous êtes immédiatement dans le monde de Fabienne Raphoz. Originaire de Haute Savoie elle a installé ses pénates dans le Quercyoù silencieuse comme toute bonne observatrice elle épie la gente ailée. Amoureuse des oiseaux et des mots, son livre nous emporte dans le sillages des oies sauvages et des poètes.
Elle fait chaque jour une cueillettede plumes, de couleurs, de chants et de cris, la cueillette faite il s’agit de savoir ce qu’on a vu et entendu, de nommer ce monde en se plongeant dans les guides et autres encyclopédies. Pour Fabienne Raphoz c'est une jubilation totale.
Je l’ai suivi jumelles en main ou presque à la recherche du Rougequeue à front blanc
ouh ça lui donne un air sévère
Ne pensez pas que notre ornithophile reste accrochée à son Quercy, non au fil du temps on pérégrine à la recherche de l’ibis le roi des tombeaux égyptiens derrière Jean-François Champolion, ou le Jabiru du Sénégal une sorte de cigogne.
déjà en ce temps là
Chez elle, sur son domaine, c’est le pouillot vélocequi l’intéresse, celui là je l’avais déjà croisé chez Jacques Brosse. Mais elle examine et écoute aussi de près la fauvette, la grive musicienne ou la sittelle torchepot.
Guetter l’Hypolaïs polyglotte lui procure un plaisir indicible, moi c’est ce nom qui m’enchante, j’imagine un oiseau maitrisant plusieurs langues, et l’auteur est absolument ravie nous dit-elle « d’ajouter un son inconnu à ma petite encyclopédie sonore personnelle. »
Et en VO s'il vous plait
Il faut une oreille exercée pour reconnaitre les chants, les cris, les trilles qui annoncent les amours ou le sauve qui peut.
Si on demande à Fabienne Raphoz de se définir ? Elle propose les mots d’un poète
« ouvrir la fenêtre et dire, voyez, un monde existe »
Je ne peux que vous encourager à lire ces « carnets d’été d’une ornithophile » et partez à la rencontre d’une exploratrice d’un genre ailé, et peut être observerez vous une espèce inconnue, le Saint Graalpour tout ornitophile qui se respecte.
Ce livre va prendre place juste à coté des insectes d’Ernest Jungër, des scarabées de Jean Henri Fabre, des libellulesd’Alain Cugno et des oiseaux deJacques Delamain
Le livre : Parce que l’oiseau - Fabienne Raphoz - Editions José Corti
D’aucuns diront que la fallacieuse beauté créée par la pénombre n’est pas la beauté authentique. Toutefois, ainsi que je le disais plus haut, nous autres Orientaux nous créons de la beauté en faisant naître des ombres dans des endroits par eux-mêmes insignifiants.
Paravent à six feuilles en laque noir décoré au laque d'or. Canton, 18ème siècle
Je crois que le beau n’est pas une substance en soi, mais rien qu’un dessin d’ombres, qu’un jeu de clair-obscur produit par la juxtaposition de substances diverses. De même qu’une pierre phosphorescente qui, placée dans l’obscurité émet un rayonnement, perd, exposée au plein jour, toute sa fascination de joyau précieux, de même le beau perd son existence si l’on supprime les effets d’ombre.
En fait, la beauté d’une pièce d’habitation japonaise, produite uniquement par un jeu sur le degré d’opacité de l’ombre, se passe de tout accessoire.
''La cuisine japonaise, a-t-on pu dire, n'est pas chose qui se mange, mais chose qui se regarde ; dans un cas comme celui-là, je serais tenté de dire: qui se regarde, et mieux encore, qui se médite !''
Le livre : Eloge de l'ombre - Junichirô Tanizaki - Editions Verdier
Qu’arrivait-il dans les années vingt dans le Mississipi à un noir arrêté arme en main avec à ses pieds le corps d’un blanc abattu d’une balle dans le dos ?
Le lynchage de Thomas Shipp et Abram Smith, 7 août 1930 à Marion, Indiana
Surtout quand la victime est de la tribue des Gowrie. Toute la ville s’attend à un lynchage, une pendaison ou même l’utilisation d’un simple bidon d’essence. Heureusement pour Lucas Beauchamp demain c’est le sabbat et il gagne quelques heures de vie.
Le film tiré du roman
Quand Charlie avait 12 ans Lucas lui a sauvé la mise, il était passé à travers la glace d’une rivière gelée. Charlie sentant une dette peser sur sa conscience a eu un peu plus tard un geste qu’aujourd’hui encore il regrette, faisant ce qu’on attend d’un blanc vis à vis d’un noir. Aussi aujourd’hui quand Lucas Beauchamp dit ne pas être l’auteur du meurtre et que pour le prouver il lui demande d’aller tout simplement déterrer la victime, Charlie se sent obligé d’obéir.
Il va trouver de l’aide auprès de la vieille Miss Habersham qui fournit véhicule, pelle et pioche !
Lucas Beauchamp n’est pas un noir ordinaire et avec ce personnage c’est tout le talent de Faulkner qui s’impose.
Lucas est le prototype du nègre qui ne s’incline pas devant les blancs, qui n’enlève pas son chapeau, ne remercie pas, ne plie pas le genou, cela même de l’avis des autres noirs qui eux font ce que l’on attend d’eux c'est à dire endurer et survivre.
Lucas Beauchamp
L’intrigue est on ne peut plus simple mais elle est magnifiée par le talent de Faulkner et comme moi je pense vous serez admiratif du retournement qui se produit entre la première scène, celle du sauvetage de Charlie Mollison et la scène finale.
Dès le début on se perd dans ses digressions, ses parenthèses, ses incises. On suit le monologue intérieur de Charlie, fil rouge du roman, son sentiment de culpabilité, son besoin de payer sa dette, il est intelligent et fier mais sait déjà que les blancs, les petits fermiers autour de lui, se font une autre idée de la justice et du droit et Gavin Stevens son oncle juge et attorney n’est pas exempt des mêmes préjugés.
Oxford Mississipi la ville de Faulkner
Si vous aimez Virginia Woolf vous êtes déjà initié au fluxde conscience, Faulkner est dans le même registre avec une dureté beaucoup plus prégnante et une permanence parfois déroutante. Les retours en arrière ne sont pas signalés alors on se perd parfois en route mais un coup de rétroviseur et l’on retrouve le bon chemin.
Ce roman initiatique splendide que Faulkner écrit à la veille d’être couronné par le Nobel est une bonne façon d’entrer dans son univers pas toujours simple d’accès, beaucoup plus facilement que ses grands romans qui peuvent décourager plus d’un lecteur.
Le livre : L’intrus - William Faulkner - Traduit par RN Rimbauld et Michel Gresset - Editions Gallimard Folio