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  • Sanctuaire - William Faulkner

    Le roman d’une descente aux enfers.

    faulkner

    Le jugement dernier Hans Memling 

    Un roman puissant, sulfureux, qui demande une lecture très très attentive ou, peut-être comme je l’ai fait, deux lectures à quelques semaines d’intervalle.

    Je vous propose d'élucider ce qui dans ce roman, l’emporte : la pitié et la compassion pour Temple Drake l'héroïne, la colère et l’effroi envers Popeye ?  

    Ou par dessus tout comme pour moi : l’admiration pour la construction tordue et maléfique du récit.

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    Popeye est un gangster froid, cruel, un gringalet dangereux sa silhouette a « la méchante minceur de l’étain embouti », rien de normal en lui, c’est la malveillance faite homme.
    Popeye va commettre l’irréparable, Temple Drake va en faire les frais.

    Temple elle c’est une jeune fille de bonne famille « Mon père est juge » répète t-elle à satiété, mais c'est une jeune fille qui aime s’encanailler. 

    Horace Benbow l’avocat va lui aussi croiser la route de Temple,  lui c’est la lâcheté personnifiée et son portrait dit à peu près tout ce que Faulkner pense de la justice.

     

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    Temple Drake va passer très vite de « il va m’arriver quelque chose ? » à « il m’arrive quelque chose » Ruby Lamar, l’ancienne prostituée tente de protéger Temple, de l’avertir mais elle est sans illusion sur ce qui va arriver. Temple Drake a mis le doigt dans la spirale du mal.

    Faulkner nous fait la liste de toutes les turpitudes : le viol, le meurtre et l’arrestation d’un innocent.

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    W Faulkner © Frassonetto  Le temps 

    Faulkner ne décrit jamais les scènes les plus violentes mais il les suggère et c'est bien pire. Il laisse le lecteur les imaginer, on touche le mal du doigt, c’est un puit sans fond. 

    Tout homme a ses propres ténèbres, l’auteur les décline une à une.

    On est hanté par la chaleur du Mississippi, par la puissance maléfique de Popeye, le récit est pétri d’allusions bibliques et chacun sait que les récits bibliques ne sont pas des parcours de douceur et de bonté.

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    L’auteur fait suivre de fausses pistes à son lecteur, il faut attendre la fin du roman pour connaitre l’histoire dans son entier. Il arrache les masques, il nous fait toucher du doigt la violence du désir, les abîmes du mal.

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    Un roman où la place du traducteur est très importante (clic)

     

    Camus disait que ce roman était un chef-d’oeuvre. 

    Malraux  que « Sanctuaire, c'est l'intrusion de la tragédie grecque dans le roman policier.» 

    André Gide lui a « pensé devenir fou d'horreur et de détresse en lisant Sanctuaire.»

    Parfois, parfois, l’on voudrait n’avoir jamais commencé ce roman. Pourtant je vous invite à lui faire une place dans votre bibliothèque car comme le dit un de ses commentateurs « l’œuvre vaut mieux que sa sulfureuse et tapageuse réputation »

    Lisez l'avis de Nathalie dont le billet recoupe bien celui ci

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    Le livre : Sanctuaire - Oeuvres I - William Faulkner - traduit par Maurice-Edgar Coindreau - Editions Gallimard Pléiade ou Folio

  • L'intrus - William Faulkner

    Qu’arrivait-il dans les années vingt dans le Mississipi à un noir arrêté arme en main avec à ses pieds le corps d’un blanc abattu d’une balle dans le dos ?

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    Le lynchage de Thomas Shipp et Abram Smith, 7 août 1930 à Marion, Indiana

    Surtout quand la victime est de la tribue des Gowrie. Toute la ville s’attend à un lynchage, une pendaison ou même l’utilisation d’un simple bidon d’essence. Heureusement pour Lucas Beauchamp demain c’est le sabbat et il gagne quelques heures de vie.

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    Le film tiré du roman

    Quand Charlie avait 12 ans Lucas lui a sauvé la mise, il était passé à travers la glace d’une rivière gelée. Charlie sentant une dette peser sur sa conscience a eu un peu plus tard un geste qu’aujourd’hui encore il regrette, faisant ce qu’on attend d’un blanc vis à vis d’un noir.
    Aussi aujourd’hui quand Lucas Beauchamp dit ne pas être l’auteur du meurtre et que pour le prouver il lui demande d’aller tout simplement déterrer la victime, Charlie se sent obligé d’obéir.

    Il va trouver de l’aide auprès de la vieille Miss Habersham qui fournit véhicule, pelle et pioche ! 

    Lucas Beauchamp n’est pas un noir ordinaire et avec ce personnage c’est tout le talent de Faulkner qui s’impose.

    Lucas est le prototype du nègre qui ne s’incline pas devant les blancs, qui n’enlève pas son chapeau, ne remercie pas, ne plie pas le genou, cela même de l’avis des autres noirs qui eux font ce que l’on attend d’eux c'est à dire endurer et survivre.

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    Lucas Beauchamp

     L’intrigue est on ne peut plus simple mais elle est magnifiée par le talent de Faulkner et comme moi je pense vous serez admiratif du retournement qui se produit entre la première scène, celle du sauvetage de Charlie Mollison et la scène finale.

    Dès le début on se perd dans ses digressions, ses parenthèses, ses incises. On suit le monologue intérieur de Charlie, fil rouge du roman, son sentiment de culpabilité, son besoin de payer sa dette, il est intelligent et fier mais sait déjà que les blancs, les petits fermiers autour de lui, se font une autre idée de la justice et du droit et Gavin Stevens son oncle juge et attorney n’est pas exempt des mêmes préjugés.

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    Oxford Mississipi la ville de Faulkner

     

    Si vous aimez Virginia Woolf vous êtes déjà initié au flux de conscience, Faulkner est dans le même registre avec une dureté beaucoup plus prégnante et une permanence parfois déroutante. Les retours en arrière ne sont pas signalés alors on se perd parfois en route mais un coup de rétroviseur et l’on retrouve le bon chemin.

    Ce roman initiatique splendide que Faulkner écrit à la veille d’être couronné par le Nobel est une bonne façon d’entrer dans son univers pas toujours simple d’accès, beaucoup plus facilement que ses grands romans qui peuvent décourager plus d’un lecteur. 

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    Le livre : L’intrus - William Faulkner - Traduit par RN Rimbauld et Michel Gresset - Editions Gallimard Folio