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A sauts et à gambades - Page 150

  • Le Chant d'Achille - Madeline Miller

    La Guerre de Troie a bien eu lieu

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    Il y a quelques semaines j’avais fait un billet sur une traduction de l’Iliade, l’occasion pour moi de relire ce long récit hors de tout sentier scolaire.

    J’aime l’antiquité, son histoire, ses écrivains, ses philosophes et ses grands textes

    Voilà pourquoi j’ai lorgné sur un roman très curieux qui met en scène Patrocle, le héros un peu oublié de l’Iliade. Si on a tous à peu près en tête la colère d’Achille, Ménélas en mari délaissé, Iphigénie en martyr,  Patrocle lui est un peu falot.

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                         Le sacrifice d'Iphigénie

     

    Admettez l’improbable et imaginez Patrocle nous racontant son enfance, sa rencontre avec Achille « Le meilleur de tous les grecs » et sa Guerre de Troie.

     

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      Thétis et Pelée 

     

    Tout ça démarre assez mal pour Patrocle, prince déchu, qui trouve refuge très jeune au royaume de Phtie  « Pélée, son roi, était l’un de ces hommes aimé des dieux : sans être divin, il était intelligent, courageux, beau, et aucun des ses pairs ne pouvaient égaler sa piété. ».

    Il se lie d’amitié avec Achille, amitié qui au fil du temps se transforme en passion amoureuse. Mais la mère d’Achille veille au grain « Thétis était rusée et capable de donner à sa peau mille aspects changeants de fourrure, de plumes et de chair » et la contrarier n’est pas de bon augure.

    Quand Achille est appelé pour aller guerroyer pour récupérer la belle Hélène, Patrocle va s’engager dans l’armée Grecque à ses côtés.

     

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    Résumé rapide pour une histoire connue, alors quel est l’intérêt de ce roman ?

    L’auteur spécialiste de grec et de latin et universitaire confirmée réussit un tour de force. Elle nous transporte dans cette Grèce antique auprès de deux jeunes gens plus épris de soleil, d’art du combat, de médecine, de chaudes nuits amoureuses que de rejoindre l’armé d’Agammemnon.

    Elle invente les détails des relations entre les personnages qu’ Homère n’a jamais donné. Nous participons à tout, à la constitution de l’armée grecque, aux échanges avec le rusé Ulysse, très agaçant Ulysse je dois le dire, et à l’envie de faire mordre la poussière à un Agammemnon plein de morgue.

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    Menelas soutenant le corps de Patrocle © Lu Dahlem  

     

    Loggia de la Signoria

     

    Elle fait tout cela d’une plume très prenante s’appuyant sur toutes les légendes qui nous restent en tête et qui voient les dieux venir se mêler de la vie des humains, Thétis en mère jalouse est très convaincante, et leur promettre un destin glorieux. 

    C’est la jolie métamorphose d’une légende en  un récit très contemporain grâce à la belle imagination de Madeline Miller.

     

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    Le livre : Le chant d’Achille - Madeline Miller - Traduit par Christine Auché - Editions Rue Fromentin - 2014

  • Les anciens une valeur sûre

    Les anciens une valeur sûre

     

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    Petit à petit j’essaie de remplacer mes vieux livres de poche par des livres brochés plus agréables à lire et plus durables.

    Donc je surveille les parutions et c’est comme ça que j’ai trouvé les oeuvres de Tacite dans la collection bouquin.

    Oui oui je sais que parmi vous certains et certaines se sont cassés les dents sur les versions de Tacite mais que voulez vous moi que n’ai jamais souffert sur les versions latines et  j’ai un faible pour ces textes !

    Il faut dire que sans être chauvine il est un peu de chez nous Tacite il est né en Gaule Narbonnaise et certainement à Vaison la Romaine

    C’est un historien sérieux, « Maître de la langue latine » rien à voir avec Suétone qui fait plutôt une histoire à la Closer si vous me passez l’expression. 

    Cette nouvelle parution regroupe les Histoires et les Annales plus quelques textes moins connus, une partie a été retraduit.

     

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    Deuxième tentation à laquelle je n’ai pas su résister, depuis longtemps je voulais une version intégrale des Vies de hommes illustres de Plutarque, que voulez vous à force de lire Montaigne j’étais plus que tentée de m’y mettre.

    En faisant un tour sur les sites d’occasion je suis tombée sur une édition superbe, reliure cuir en coffret et une impression ancienne magnifique avec lettrines et gravures, le tout en excellent état et au même prix que la version Quarto tout molle.

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    Et me voilà avec de la lecture pour longtemps

  • Retour aux grands textes

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    Je pourrais dénommer ainsi mes deux prochains billets mais ça ne serait pas tout à fait exact.

    Un billet pour vous parler de mes acquisitions récentes d’auteurs de l’antiquité

    Et une jolie surprise avec un roman d’aujourd’hui sur le monde d’hier 

     

    C’est ici dès demain

  • Que ma joie demeure - Jean Giono

    Enchanter le monde

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                      Plateau du Contadour

     

    Après les épisodes biographiques il est temps de revenir à l’important.

    Revenir à un livre que l’on avait pas eu l'envie de lire jusqu'à aujourd'hui, mais là c'est le bon moment.

    Je me suis vraiment sentie en phase avec Bobi l’homme qui va tout changer sur le plateau de Grémone.

     

    Giono s’énervait énormément quand ses lecteurs bêtifiaient sur la Provence du soleil, lui voyait plutôt une terre dure, ingrate souvent où l’homme s’accroche désespérément dans une solitude parfois profonde. 

    Imaginez un plateau soumis aux éléments où Jourdan et Marthe s’échinent jour après jour sans espoir d’un avenir meilleur, ils s’usent dans une solitude totale, mais un jour Jourdan est pris d’une certitude : quelqu’un va venir.

     

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                     Nuit étoilée  Vincent Van Gogh

     

    « C’était une nuit extraordinaire. Il y avait eu du vent, il avait cessé, et les étoiles avaient éclaté comme de l’herbe. Elles étaient en touffes avec des racines d’or, épanouies, enfoncées dans les ténèbres et qui soulevaient des mottes luisantes de nuit. »

     

    La nuit était trop belle « On y voyait comme en plein jour. Alors lui prit l'envie d'aller labourer une pièce de terre derrière la ferme, nullement de nécessité, d'envie seulement. » mais « il s'était dit que s'il doit venir ce sera par une nuit pareille. »

     

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    Et Bobi l’homme libre, le vagabond qui a soigné les lépreux arrive. 

    Il charme hommes et bêtes. Il vient pour apporter la joie, le partage, la solidarité. Un vent de folie se met à souffler sur le plateau. On peut repousser l’adversité, partager le bon et le moins bon, mettre en commun les ressources et les efforts.

    On peut même apporter un peu de beauté en semant des fleurs sur le plateau, en plantant des haies pour faire revenir les oiseaux et du coup on entendait « autour du plateau l’élargissement de la vie du monde »

    On pourrait même organiser un grand banquet pour fêter la nouvelle communion avec la nature.

     

     

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                           © edith Berger peintre du Trièves

     

    Et la vie change, se fait plus douce, plus joyeuse alors Jourdan dit à Bobi « Reste avec nous » et les femmes sensibles à ses paroles se font plus tendres, Zulma, Joséphine et Honorine, Hélène et Aurore et même Fabre celui qui lit des livres s’est laissé convaincre.

    Mais la joie n’est pas toujours paisible, elle peut aussi être « batailleuse et passionnée. »

     

    Je ne peux que vous invitez à lire ces pages superbes et à vous laissez prendre par la parole de Bobi jusqu’à ce que tout change quand « Le vent bleu monta de la mer. »

    Giono a des accents Virgiliens dans ce roman, Giono aimait l’oeuvre de Virgile et elle déteint sur ce roman.

    Il parvient à donner à son récit une belle ampleur, son conte prend des allures de tragédie antique. La dernière page du livre est tout à fait magique et l’on garde les mots en soi, sachant qu’on ne les oubliera pas.

     

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    Le livre : Que ma joie demeure - Jean Giono - Editions Grasset Les cahiers rouges

  • Blanche Meyer et Jean Giono - Annick Stevenson

     D’ombre et de lumière

     

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    Deux livres pour entrer dans l’intimité d’un auteur qui comme tout un chacun eu sa part de lumière mais aussi une part d’ombre ignorée longtemps sur laquelle pèse le silence de ses proches, de ses amis et de ses principaux biographes.

     

    Commençons par le connu, le simple, le lumineux destin d’un homme à travers sa maison, son lieu de vie. Dans une collection tournée vers les maisons d’écrivains sa fille Sylvie Giono évoque de jolie façon la maison familiale : le Paraïs « ni forteresse, ni tour d’ivoire ».

     

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    Elle s’efface avec beaucoup de simplicité devant son père car « C’est lui, l’enchanteur, qui est l’âme de cet endroit »

    Elle nous ouvre grand les portes de cette maison où Giono écrivit tous ses romans, où son ombre rôde encore aujourd’hui.

    Elle a de belles expressions pour nous dire à quel point ce lieu a compté pour l’écrivain « C’est sa fenêtre sur l’imaginaire par laquelle il s’échappe du réel.».

    Son père est bien vivant à travers des objets commes ce tableau de peinture chinoise 

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    « qui représente des chevaux mongols, aux allures fines et déliées en même temps »

    ou ses pipes Dunhill ou un fin porte plume en bambou.

    La vie de la maison tournait autour de Giono, le rythme des activités, l’organisation des pièces, les aménagements tout était fait en vue de lui plaire et de lui donner le confort nécessaire à la création.

     

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    « C’est une maison vivante, une maison qui a une âme. Elle réunit le réel et le merveilleux. »

    C’est une image lumineuse qui est tracée par Sylvie Giono. Un peu trop lumineuse ?

     

    Un livre vient s’inscrire en ombre portée de cette vie idyllique toute tournée vers l’écriture et la famille.  

    Après la guerre l’écriture de Giono changea, le style, le type de récits, les personnages ...bref tout le monde s’accorda à parler de tournant dans l’oeuvre de l’écrivain, ce furent le cycle d’Angelo puis les Chroniques romanesques.

    Il y a quelques années Hubert Nyssen leva le premier le voile sur ce changement qui  fut en lien étroit avec la rencontre d’une femme, elle s’appelait Blanche Meyer. Une passion était née qui changea la vie de l’écrivain et métamorphosa son inspiration

    Annick Stevenson dans un petit livre vient éclairer l’événement et nous expliquer pourquoi la femme, son autobiographie et ses lettres sont restées dans l’ombre.

    Ils seront amants pendant dix ans au moins mais amis pendant toute la vie de l’écrivain. Pourquoi son nom n’apparait-il jamais dans les livres consacrés à Giono ? La biographie de Pierre Citron pourtant très bien documentée fait silence sur le sujet à la demande express de la famille. 

    Mais nous sommes plus de 40 ans après la disparition de l’écrivain alors quelle validité à l’interdiction faite à la fille de Blanche Meyer de mettre à disposition du public la correspondance de sa mère avec Giono ? 

    Nous sommes loin du temps où l’on cachait l’homosexualité du petit Marcel, ne serait-il pas temps de livrer le portrait complet de cette femme qui su inspirer les personnages d’Adeline, de Pauline de Theus et de l’Absente. 

    Pour cela 1300 lettres dorment sagement à l’université de Yale soumise au bon vouloir d’une famille qui s’honorerait d’ajouter au portrait de Jean Giono sa moitié encore dans l’ombre.

     

    Les livres

    Blanche Meyer et Jean Giono - Annick Stevenson - Editions Actes Sud

    Jean Giono à Manosque - Sylvie Giono - Editions Belin

  • Pour saluer Giono : biographies et entretiens

    Deux écrivains rendent hommage à l’auteur qu’ils admirent. 

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    Pierre Magnan n’a que quinze ans lorsqu’il rencontre Giono pour la première fois, il le voyait déambuler dans Manosque et un jour de grand courage il osa, lui le petit ouvrier typographe, lui demander un article pour la revue qu’il vient de créer.

    Il entre pour la première fois dans « l’antre obscur » de l’écrivain et très vite sur l’invitation de son héros il prend la patache de Vachères et se retrouve bientôt sur le plateau du Contadour où il reviendra pour « la palabre interrogative sous le vent, à quatre, à huit, à quarante. J’en ai déjà, deux heures après mon arrivée, s’ajoutant au Mistral, la tête sonnante. »

     

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     De 1935 à 1939 les rencontres du Contadour   

     

    Parfois le maître lit ses oeuvres, il lui en lira pendant douze ans « tout le génie du verbe qu’il y avait mis se trouvait quintessencié et vous éblouissait. »

    Pierre Magnan pille littéralement la bibliothèque de Jean Giono, tout y passe : Rilke, Malraux, Gide, Steinbeck, Hardy, Dickens et Shakespeare. Mais renâcle devant Dostoievski.

     

     

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      La Bibliothèque de Jean Giono

     

    Les rencontres vont avoir lieu des années trente à la guerre, en 1945 Magnan retrouve Giono « Sur la route où il est seul, je le rejoins, je m’installe à ses côtés et je marche à son pas. »

    Les échanges reprennent :

    « Il me lut de cinq à huit heures du soir, un bon tiers de La Chartreuse. Il était dans un état d’enthousiasme indescriptible. Il avait écarté, pour faire place au livre devant lui, le manuscrit de Mort d’un personnage comme quantité négligeable.(..) J’ai lu depuis cinq ou six fois La Chartreuse de Parme ; à côté de mon éblouissement premier lorsque Giono ce jour-là me le réinventa, il me parut, le lisant moi-même, que, sur ce livre, le soleil s’était couché. »

    Vous l’avez compris Pierre Magnan est un inconditionnel et ce petit livre de souvenirs est le récit éblouit d’une admiration et d’une affection indéfectible.

     

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                                     Le Maître et l'admirateur

     

    Jean Carrière c’est tout autre chose, il fut l’assistant personnel de Giono et il démarre très fort en affirmant « Giono est le plus grand menteur de la littérature française du XXème siècle. » mais ajoutant quelques lignes plus loin « On ne se lasse pas de relire du Giono »

    Sa biographie n’est pas du tout linéaire d’ailleurs il affirme qu’elle tient en une phrase « Jean Giono, écrivain français vivant, né à Manosque et ne sachant pas nager. »

    A travers son livre et ses entretiens il démystifie l’auteur trop souvent présenté comme un « écrivain régionaliste » Giono n’incarne pas le Panturle de Regain, mais fut un romancier du bonheur à travers la figure d’Angelo Pardi.

     

     

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    Lui aussi est pétri d’admiration « J’ouvre un livre de Giono. Et brusquement mon coeur s’irradie d’une joie violente, insensée. »

    Dans les entretiens qui suivent la partie biographique, Jean Carrière  interroge Giono sur sa langue , sur le soleil qu’il n’aime pas, rêvant de vivre en Ecosse, sur ses goûts musicaux et littéraires, sur son admiration pour Don Quichotte et sa lecture permanente tout au long de sa vie de La Bible lui le mécréant absolu « j’ai toujours lu la Bible comme un livre de littérature, un livre d’histoires ou un livre de poèmes » dit-il avec un grand sourire, il avoue aussi être fan de foot et de boxe à la télévision ! 

    Ces entretiens ont fait l’objet d’un CD audio sous le titre « Du côté de Manosque » 

     

    Voilà vous avez le choix entre deux auteurs qui nous livrent un peu de la vérité de Giono, du  « voyageur immobile » mais nous verrons bientôt que tout n’était pas dit. 

     

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    Les livres

    Jean Giono Biographie et entretiens - Jean Carrière - Editions de la manufacture 1991

    Pour saluer Giono - Pierre Magnan - Editions Gallimard Folio 2002