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  • Les Cygnes sauvages - Kenneth White

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    Paysage d'Hokkaïdo

    Après pas mal d’années passées à Annecy, les cygnes font partie de votre paysage. Le titre du livre de Kenneth White a donc attiré mon regard, puis ma main, puis ….

    Récit d’un voyage au Japon, vers le nord du Japon et ses chemins, ses lacs, ses cygnes sauvages.

    Pour Kenneth White il s’agit d’un pèlerinage géopoétique dans les pas de Bashô pour « rendre hommage aux choses précieuses et précaires » mais aussi pouvoir observer les fameux « cygnes sauvages venus de Sibérie s’abattre avec leurs cris d’outre-terre sur les lacs du Nord où ils viennent hiverner » 

     

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                                 Lac Biwa 

     

    Le type même de livre qui vous laisse un souvenir magique, la nature, la poésie, des clins d’oeil vers la philosophie zen, tout le voyage est sous le signe de l’érudition, de celle qui vous donne envie d’ouvrir d’autres livres, de faire d’autres voyages virtuels ou bien réels.

     

    Après un petit tour à Tokyo au marché des libraires où les livres s’entassent partout, un peu comme Alan Booth, c’est un Japon profond que propose Kenneth White, petit ryokan, rencontres hasardeuses, saké et poisson.

    ll en profite pour nous faire faire connaissance avec des auteurs japonais inconnus comme Nagai Kafû ou des peintres comme Kobayashi Kiyochika.

     

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                   Pont sur la Sumida Katsushika Hokusaï 

     

    Mais Bashô me direz-vous, et bien il emplit tout le livre, une même perception de la beauté, un goût certain pour le voyage, l’amour des paysages de la Sumida, partout Bashô est présent et Kenneth White nous invite à nous « laisser aller avec les feuilles et le vent » sur cette ’île d’Hokkaido, île aux  paysages enchanteurs.

     

     

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    « L’automne se changeait en hiver, le jaune-rouge en blanc, la feuille en flocon, à mesure que je gravissais les pentes du Daisetsuzan »

     

    On se promène dans les paysages d’Hiroshige « Je me sens vraiment dans le vieux Japon du nord, je sens toute la conjugaison du riz et de la glace, la présence des maisons aux épais toits de chaume du pays de neige »

     

    Il s’enfonce de plus en plus vers le nord, longtemps considéré comme le pays des Aïnous, il va aborder un lac où sa patiente sera récompensée. 

    « Un miroitement et un frémissement sur les eaux bleu sombre, le vent dans les herbes dorées… (…) Je restais tapis au milieu des roseaux, à les regarder, à les écouter — Puis l’un deux s’est levé dans l’air (…) Je les ai

    suivi des yeux et de l’esprit » 

     

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    Sur lac vide

    Ce matin du monde 

    Les cygnes sauvages

     

    J’ai aimé ce livre alliance de poésie et de récit de voyage qui ouvre vers des espaces infinis. Un livre qui incite au rêve.

     

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    Le livre : Les cygnes sauvages - Kenneth White - Traduction Marie-Claude White - Editions Le Mot et le Reste 

     
  • Le Chemin étroit vers les contrées du Nord - Bashô

     

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    Dans les années cinquante Nicolas Bouvier passa plusieurs mois au Japon, quelques Vingt années plus tard il entreprit la traduction du journal de voyage  Oku no hosomichi  de Matsuo Bashô.

     

    ll n’est pas étonnant que le poète voyageur soit traduit par un des maîtres du récit de voyage. Leur marche n’est certes pas la même mais l’un comme l’autre ont l’oeil et l’esprit bien ouvert pendant leur vagabondage. Un périple de cinq mois et quelques 2000 km sans carte aucune, 

    Bashô est déjà un poète reconnu quand il prend Le chemin étroit vers les contrées du nord, il a envie de laisser là une vie devenue trop citadine à son goût.

     

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    ll va pouvoir faire l’expérience même de la poésie à travers la marche. ll veut atteindre la « terre du bout des routes » 

    Manifestement il y a connivence entre Bashô et sont traducteur.

     

     

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    Le récit du voyage est ponctué de haïkus, certains très célèbres d’autres beaucoup moins. Le récit lui même est d’un grande poésie jugez-en :

     

     

    « Tandis que nous nous reposions au creux d’un rocher, j’eus l’oeil tiré par un petit cerisier, à quelques pieds de nous, qui commençait juste à fleurir. Penser que ce gringalet qui passe tout l’hiver sous la neige n’oublie pas de fleurir quand le printemps atteint ces hautes pentes ! »

     

    Evocations de sites célèbres, de rencontres, de temps pour la méditation.

     

    Ce texte de Bashô a été plusieurs fois traduit aussi pour vous que vous puissiez juger de la version qui vous plait le plus voici le début du voyage dans trois traductions différentes et vous noterez que les différences sont malgré tout importantes 

     

    * «  Les jours et les mois s’égrènent, passants fugaces. Les années qui surviennent et s’en vont voyagent elles aussi. Notre vie même est un voyage; quant à ceux qui la passent à naviguer, ou ceux dont les cheveux blanchissent à mener leur attelage, la route n’est-elle pas leur véritable demeure ? Sans oublier les poètes d’autrefois qui, nombreux trouvèrent la mort au cours d’une longue errance. Pour moi aussi un jour vint où la liberté des nuages chassés par le vent m’incita à partir pour aller vagabonder le long des côtes sauvages »

     

    ** « De l’éternité, jours et mois sont hôtes de passage et, de même, l’an qui fuit, l’an qui vient sont voyageurs. Qu’il mène une vie nomade, en bateau ou à cheval, l’homme accueille la vieillesse, le voyage quotidien est sa demeure. Nombreux sont les poètes d’autrefois qui sont morts en chemin, et moi, comme eux, depuis je ne sais quand, à l’invite du vent dans les nuages en lambeaux, je ne peux réfréner mon désir d’errance. »

     

    *** « Mois et jours sont passants perpétuels, les ans qui se relaient, pareillement sont voyageurs. Celui qui sur une barque vogue sa vie entière, celui qui la main au mors d’un cheval s’en va au-devant de la vieillesse, jour après jour voyage, du voyage fait son gîte. Des anciens du reste nombreux furent ceux qui en voyage moururent. Et moi-même, depuis je ne sais quelle année, lambeau de nuage cédant à l’invite du vent, je n’avais cessé de nourrir des pensers vagabonds.»

     

    Pour en lire plus sur Nicolas Bouvier c'est chez Tania 

     

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    Les livres

    *  Le chemin étroit vers les contrées du Nord - Traduction Nicolas Bouvier - Editions Heros-limite 

    ** L’Ermitage d’llusion - Traduction Jacques Bussy - Editions La Délirante ( avec le journal de Saga et l’ermitage d’illusion) 

    *** Bashô journaux de voyage - Traduction René Sieffert - Editions POF ( le plus complet rassemblent des notes de voyage à Kashima à Sarashina et le carnet de la hotte) 

  • Sur les chemins du Japon

    Sur les chemins du Japon

     

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    Je m'étais déjà baladé au Japon et je viens de récidiver grâce à un poète et aux réédition de ses livres

    L'un m'a donné envie de relire l'autre. 

    C’est parti donc pour quelques livres et haïkus

    Ici dès demain

  • Bribe de Mario Rigoni Stern

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    « L’humidité du bois, l’odeur de la terre humifère, les couleurs des feuilles de hêtre, de sorbier, du saule des chèvres, de l’aulne blanc tranchant sur le vert sombre des sapins et la splendeur flamboyante d’un merisier ; lui avec son chien ; et le silence amplifié par les brefs appels des oiseaux de passage, par le battement d’ailes d’une grive, par le tintement argentin du grelot attaché au collier de son chien. Marcher comme ça pendant toute la vie. Toujours. » 

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    « La couverture sur la tête, on marchait en silence ; en sortant de la bouche le souffle gelait sur la barbe et sur les moustaches. Mais l’air, la neige et les étoiles aussi semblaient soudés ensemble par le froid. La couverture tirée sur la tête, on continuait à marcher en silence. On s’arrêta, peut-être parce qu’on ne savait pas où aller. Le temps et les étoiles passaient au-dessus de nous, étendus sur la neige. »

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                 Asiago le pays de Mario Rigoni Stern

     

    Bribe de : Hommes bois abeilles - Mario Rigoni Stern - Editions la Fosse aux ours 

  • Trajectoire d'une comète : Marina Tsvetaeva

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    Il ne m’a pas fallu moins de trois livres pour rendre compte de cette femme hors du commun.
    Elle est comme bien des poètes de son temps, fille de la Révolution et fille de la répression qui s’abattit sur nombre d’entre eux.
    Insurgée dit Troyat, c’est certain, une femme, un poète qui toute sa vie refusa de se plier aux règles communes, règles politiques, règles familiales. Elle refusa le rôle de la bonne épouse, de la bonne mère.

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    Marina en 1916



    Née avant la Révolution dans un famille aisée, son parcours l’emporte vite par provocation, par choix vers l’opposition.
    Elle vit l’intolérable pauvreté au moment de la guerre de 14, une des ses filles paiera cela de sa vie. Une fois les bolcheviques au pouvoir elle refuse les diktats et ses poèmes sont refusés, censurés,  elle ne trouve aucun travail digne, obligée de mendier la nourriture, de mendier un abri à ses amis. Elle devient nomade entre Moscou et la Crimée.

     

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                                 Marina avec son mari sa fille Ariadna et son fils Mour

    Les fléaux qui s’abattent sur elle comme sur son mari, ne l’anéantissent pas, elle résiste, elle écrit, elle a la plume en main tout au long des jours. Son soutien principal pendant des années seront la poésie et les poètes, Mandelstam dont elle tombe amoureuse, Pasternak avec qui elle entretien une correspondance littéraire et amoureuse, Rilke qui forme avec Pasternak et Marina un triangle amoureux, ces lettres sont souvent évoquées dans sa poésie « lambeau de chiffon » mais surtout bonheur fou.

    Contrainte de quitter la Russie, elle prend le chemin de l’exil, l’Allemagne, Prague puis Paris. En France elle ne trouve pas auprès des immigrés le soutien qu’elle pourrait attendre, trop révolutionnaire pour eux, trop contestataire pour le régime soviétique ! Elle dit avec un humour noir « En Russie, je suis un poète sans livres, ici un poète sans lecteurs. »

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                                Boris Pasternak et Marina Tsvetaeva  © Lena Levin


    La mort de Rilke, le quasi reniement de Pasternak lui seront une douleur vive dont elle ne se remettra pas. Elle est à bout et sous la pression elle fera le choix du retour en URSS, son mari a été fusillé, elle s’enfonce en Russie fuyant l’avancée des allemands pour faire finalement le choix du suicide. On trouvera près d'elle des carnets de poèmes et « pardon de n'avoir pas supporté ».

    Toute sa vie elle a été « contre », toute sa vie elle a scandalisé par ses amours tumultueuses, ses coups de foudre,  ses amours scandaleuses avec une femme, elle qui choisit d’épouser un juif !! Une vie toute de passion, toute de tension, bercée par les soubresauts de l’Histoire.

    Pour faire votre choix entre ces trois livres : le petit livre de Linda Lê est celui qui rend le mieux compte de la poésie de Marina Tsvetaeva, Celui d’Henri Troyat est une belle biographie qui rend bien le parcours familial, personnel mais où je n’ai pas perçu la passion pour la femme.
    Mon préféré et de loin est celui de Rauda Jamis conseillé par Nadejda,  que j’ai trouvé d’occasion sans difficulté. L’auteur parvient totalement à faire aimer la femme, à nous donner l’envie de lire sa poésie. Elle fait revivre à merveille cette femme exceptionnelle.

    Mandelstam disait que les oeuvres se partagent en deux groupes « celles qui sont permises et celles qui sont écrites sans permission comme on dérobe un peu d’air » c’est le cas de toutes l’oeuvre de Marina Tsvetaeva.


    Quelques vers de Marina

    Si vous saviez, passants, attirés par d’autres regards charmants que le mien
    que de feu j’ai brûlé, que de vie j’ai vécu pour rien.

             *************

    Et je dirai - console-moi,
    Mon coeur blessé se tord,
    Et je dirai - le vent est frais,
    Le ciel brûle d’étoiles.
     

            *************


    L’un est fait de pierre, l’autre d’argile,
    Et moi je m’argente, je brasille,
    Varier est mon affaire, Marina mon nom,
    Moi périssable écume de mer.

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    Les livres
    Comment ça va la vie - Linda Lê - editions Jean Michel Place 2002
    L’espérance est violente - Rauda Jamis - Nil Editions
    Marine Tsvetaeva l’éternelle insurgée - Henri Troyat - Editions Grasset

  • Qu'a-t-elle vu, la femme de Loth ? Ioànna Bourazopoùlou

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    © merci Marie pour cette photo

    Librairie Rive gauche à Lyon

    Rencontrer l’auteur et le traducteur d’un roman avant sa lecture attise l’envie de lire et procure un petit supplément d'âme.

    Il y a quelques semaines j’ai passé ainsi une excellente soirée, excellente parce qu’entre amies, excellente parce que l’auteur Ioànna Bourazopoùlou a su nous faire découvrir son livre et enfin parce que cela m’a permis de faire connaissance avec Michel Volkovitch dont je connaissais déjà le nom, traducteur incontournable de la littérature grecque, et que cette rencontre fut sous le signe de l’intelligence, de l’humour et du bonheur de lire.

     

    Et me voilà embarquée dans un livre curieux, dérangeant mais surtout passionnant.

    Bon il va vous falloir accepter certaines petites choses extravagantes : une bonne partie de l’Europe est sous l’eau, une faille s’est creusée dans la Mer Morte, les relations entres les pays et les hommes sont pour le moins devenues terrifiantes. La « Compagnie des soixante-quinze » détient tous les pouvoirs, elle s’est enrichie grâce à un mystérieux sel violet qui sourd de la Mer Morte. Elle applique la loi du profit maximum et de la liberté minimum, elle manipule les hommes et s’enrichit à leurs dépends.

     

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    Une colonie s’est crée loin de toute terre pour exploiter le sel, une colonie digne de celle de Kafka avec des personnages violents, « rapaces » adeptes du mensonge mais habités par la peur et la culpabilité. Ils vivent coupés de tout, hors du temps. Ils ont créé ainsi une nouvelle société avec ses représentants, le prêtre, le médecin, le juge, le commandant, la femme du gouverneur et le gouverneur lui même, un monde où l’on se déchire à belles dents. Ils sont les bouffons de la farce. Lorsque le gouverneur disparait tout vacille. 

     

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    © Pierre-Yves Babelon

    La Compagnie va devoir étudier le problème de la colonie et pour cela faire appel à Philéas Book qui vit à Paris, seul survivant de sa famille après le grand Débordement et qui gagne sa vie en réalisant des « lettres croisées » pour le Times. Je vous laisse découvrir ce que sont ces lettres. 

     

    Ne croyez pas à un livre simple, les personnages sont nombreux, roman épistolaire pour une part, le récit est exigeant et l’écriture de Ioànna Bourazopoùlou est riche. Elle entretient volontairement le mystère et l’ambiguité autour de ses personnages. L’auteur vous manipule un peu aussi et lorsque l’angle de vue change vous découvrez que ce que vous aviez compris est ...faux. Attention car vous êtes comme la femme de Loth en grand danger .......

    Fable, parabole, roman d’après l’apocalypse, livre de mise en garde, ce livre est tout cela à la fois. Une belle entrée en littérature !

     

    Un grand merci à Michèle qui m'a ouvert les portes de ce livre

     

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    Le livre : Qu’a-t-elle vu la femme de Loth ? - Ioànna Bourazopoùlou - Traduction de Michel Volkovitch - Editions Ginkgo