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  • Un arrangement tranquille - Benjamin Markovits

    Un arrangement tranquille - Benjamin Markovits - Traduit de l’Anglais par Catherine Richard - Editions Christian Bourgois
    un arrangement.gifAu mois de mai, je vous proposais de lire le premier tome d’une trilogie, Imposture, L’auteur nous contait  l’aventure de John Polidori, médecin de Lord Byron, qui le suivi dans son voyage et son séjour en Suisse alors que Byron fuyait l’Angleterre atteint par le scandale de ses rapports trop tendres avec sa demi-soeur.

    Benjamin Markovits est un fieffé malin, pas question pour lui de poursuivre la saga du héros de la poésie Européenne dans un ordre chronologique, ni de faire le portrait du poète, c’est de biais qu’il se propose de nous le dévoiler.
    Avec  Un arrangement tranquille nous remontons le temps, le temps où il fit sa cour à Annabella et obtint gain de cause.
    Le roman commence comme un pièce de Marivaux mais se poursuit sur un mode nettement plus acide.

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    Lady Byron


    Annabella la future Lady Byron a dix-neuf ans, il lui faudra trois ans pour faire tomber Byron dans ses filets, en tout cas c’est ce qu’elle imagine. Le mari dont elle rêve n’a pas les traits de Byron mais elle aspire à la célébrité  et est suffisamment ambitieuse pour accepter de l’atteindre par procuration. C’est aussi une joueuse d’échec et elle va manipuler habilement ses pions.
    Les rencontres avec Lord Byron se succèdent, enfin vient la première demande en mariage par l’entremise de Lady Melbourne, demande qui est repoussée " Je serais résolument indigne de l’estime de Lord Byron si je devais m’abstenir de dire la vérité sans ambiguïté. Croyant qu’il ne sera jamais l’objet de la profonde affection qui ferait mon bonheur dans la vie domestique... "
    Qu’en terme délicat ces choses-là sont dites mais est-elle réellement amoureuse ? Pas vraiment nous laisse entendre l’auteur, il entre plus de calculs que de sentiments dans ce marivaudage.

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    Augusta Leigh sa rivale

    Pourtant le mariage se conclu quelques mois après, cérémonie étrange, parodie de mariage, Annabella est punie de sa coupable naïveté et sa cage se referme avec un bruit sec. Sur les premières semaines de vie commune plane l’ombre d’ Augusta la demi-soeur de Byron, son époux se dévoile plus retord qu’elle même, souvent indifférent, cruel parfois, mais amoureux jamais ! Elle aurait du se rappeler sa première rencontre avec Lord Byron et sa soeur " Lord Byron contribuait indéniablement à attirer sur Mrs Leigh les regards de l’assemblée (...) le célèbre poète au pied infirme, s’efforçait de guider sa soeur au gré des pas de la toute dernière danse en vogue, tandis que la musique accompagnait à contretemps leur étreinte affectueuse et titubante."

    C’est un trio qui se constitue, le mari, la femme et la soeur, un subtil jeu de pouvoir se développe entre eux et Annabella y prend sa part. C’est un combat qui va s’engager et le scandale est inévitable.

    J’ai retrouvé avec un grand plaisir la plume de Benjamin Markovits, la construction est élégante et l’écriture raffinée, Le poète n’est pas épargné par Markovits qui fait un portrait sombre de cet homme en proie à des sentiments que la morale réprouve, manipulateur, sans scrupules, et d’une Annabella plus blessée dans sa vanité que dans son affection.
    J’attends avec impatience le dernier volet de cette trilogie

  • Reines et favorites - Benedetta Craveri

    Reines et favorites - Benedetta Craveri - Traduit de l’italien par Eliane Deschamps-Pria - Editions Gallimard Folio
    reinesetfavorites.gifUn peu d’histoire cela vous tente ? Pietro Citati nous a offert de magnifiques portraits de femmes écrivains, Benedetta Craveri, elle, nous propose des portraits de reines et de favorites, celles qui parfois ont fait l’histoire.

    Une galerie de portraits, elles sont toutes là ( ou presque ) des reines de mauvaise réputation, des reines  qui ne régneront jamais dans le coeur du roi, des reines sacrifiées et d’autres qui exerceront le pouvoir.
    Portraits des favorites qui rêvent d’une couronne et parfois l’obtiendront, qui devront affronter le mari « royalement cocufié » qui se verront renvoyées sans autre forme de procès, qui cacheront leurs enfants et parfois y perdrons la tête au sens propre du terme !
    Je vous fais une petite liste mais vous les connaissez toutes : Anne d’Autriche, la Montespan et la Pompadour, Marie et Catherine de Médicis, Louise de La Vallière, Mme de Maintenon, sans oublier la Reine Margot et bien sûr Marie Antoinette.
    Pas facile pour ces femmes d’être mère, amante, de remplir leur devoir en donnant un héritier à la couronne, de mettre au monde des enfants bâtards, de vivre dans l’ombre d’une favorite ou chassée par la Reine à la première occasion.
    L’histoire est parfois sévère avec certaines, la Saint Barthélémy, l’affaire des poisons, les guerres avec l’Espagne, les reproches pleuvent mais comment ne pas être touché par celles qui perdent leurs enfants, sont humiliées publiquement, qui finissent au couvent ou sous la guillotine

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    Mme Du Barry              Mme de Montespan       Mme de Pompadour

    j’avais beaucoup aimé le livre de Benedetta Craveri  Madame du Deffand et son monde celui-ci n’a pas la même envergure mais j’ai eu du plaisir à remonter le fil du temps et à suivre les parcours de ces femmes prises dans le carcan de la raison d’ Etat et toujours maintenues dans une position inférieure. Sans doute ma fibre féministe qui parle !

    L’auteur
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    Benedetta Craveri est professeur d’université en Italie, spécialiste de la civilisation française du XVIIè et XVIIIè siècles.
    Elle a publié Madame du Deffand et son monde en 1986, livre pour lequel elle a reçu de nombreux prix.

     

  • Lark et Termite - Jayne Anne Phillips

    Lark et Termite - Jayne Anne Phillips - Traduit de l’américain par Marc Amfreville - Editions Christian Bourgois
    Lark et termite.gifDeux périodes, cinq personnages, une guerre et des inondations mais aussi des secrets enfouis dont vous serez seuls dépositaires, voilà ce que propose ce roman.
    En 1950 en Corée le soldat caporal Leavitt est blessé et réfugié dans un tunnel, il a été touché par ses compatriotes, à côté de lui une jeune coréenne essaie de le garder en vie. Il délire, il rêve au passé. Il entend la musique du club de jazz où chantait Lola, sa femme si belle " Ses cheveux roux foncés ont comme une teinte cuivrée" Elle attend un enfant, un enfant qui doit naître en ce moment pendant que lui agonise au fond du tunnel.

    Neuf ans plus tard en Virginie dans la touffeur de l’été nous faisons connaissance avec Lark, une séduisante adolescente. Elle n’a jamais connu son père, sa mère Lola a disparu. Dans la vie de Lark son frère handicapé tient la meilleure part, elle le choie, le protège lui voue un amour total et refuse que les services sociaux le place "pour son bien" en établissement spécialisé. Elle invente le monde pour lui, lui donne  de la chaleur, cuisine pour lui des gâteaux colorés.
    Termite son frère est un enfant de neuf ans, blond et bouclé, à moitié aveugle et hydrocéphale. Il ne marche pas, ne parle pas " on dirait qu’il psalmodie" Lark communique mystérieusement avec lui, elle entre dans le monde de bruits et de sensations où "Il est enfermé à l’intérieur de lui-même comme un termite dans un mur". Il entre en contact par les objets, des bandes de plastique qu’il regarde voler, un petit flacon de porcelaine.
    C’est Nonie, leur tante, qui a élevé Lark et Termite. Nonie c’est la sécurité, la solidité,la générosité. Elle se dévoue corps et âme pour eux, elle travaille dur dans le restaurant de Charlie l’homme qui veille sur eux tous.
    Enfin le dernier personnage de cette histoire, Lola, la mère fantôme, disparue en emportant ses secrets,  elle a confié Lark et Termite à Nonie qui est devenue leur mère car comme elle le dit "ces enfants n’ont rien à voir avec Lola, sauf qu’ils sont passés par elle pour venir à moi"
    A la faveur d’une inondations les secrets bien cachés vont remonter à la surface.

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    La voix de chaque personnage est différente, chacun sa partition: la voix exaltée de Lark, la voix grave de Nonie.
    L’auteur réussi le tour de force de nous faire pénétrer dans le monde de l’enfant, sans pathos aucun elle nous fait entrer dans son monde de perception et de sensations, nous ressentons ce qu’il ressent "Lark dit le nom des fleurs, il redit les sons, mais les sons ne sont pas les fleurs. La fleur c’est la silhouette toute proche, elle ne bouge pas, il la voit bleue comme ça, longue et fine (...) Ensuite la silhouette bouge et la fleur est trop près ou la fleur est trop loin. Et la silhouette se fait couleur "
    C’est un roman tout à fait extraordinaire qui dégage une émotion intense, un roman profond et grave, un magnifique livre sur l’enfance et la puissance de la vie. Tous les personnages sont marqués par l’absence, les secrets, tous vivent grâce à la force de l’amour.
    Jayne A Phillips a magistralement construit son récit, elle nous tient en haleine avec virtuosité et sensibilité. Son récit est subtile, pudique et fort à la fois. Il traduit un optimisme et une générosité qui donne confiance dans le genre humain et procure un grand plaisir de lecture.

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque

    Si vous le souhaitez, retrouvez J A Phillips dans une interview à Médiapart

    L’auteur
    jayne-anne-phillips.jpgJayne Anne Phillips est née en 1952 en Virginie Occidentale. Elle vit à Boston. Elle a publié son premier recueil de nouvelles, "Black Tickets", en 1979 à l'âge de 26 ans. Il fut récompensé par le Prix Sue Kaufman. Nadine Gordimer l'a qualifiée, à cette occasion, du meilleur auteur de nouvelles depuis Eudora Welty. Depuis, "Black Tickets" est devenu un classique du genre. En 1984, elle publie son premier roman, Machine Dreams, salué par le "New York Times" comme le meilleur livre de l'année. "Shelter", son second roman, publié en 1994, fut sélectionné parmi les meilleurs livres de l'année par "Publisher Weekly". Jayne Anne Phillips a enseigné à Harvard, Williams College ainsi qu'à Boston University ( source l'éditeur)

  • Les Saisons de la solitude - Joseph Boyden

    Les Saisons de la solitude  - Joseph Boyden - Traduit de l’anglais par Michel Lederer - Editions Albin Michel

    chemins de solitude.gifJoseph Boyden écrivain canadien avait raconté l’histoire de Xavier Bird dans le magnifique  Chemin des âmes roman qui se situait pendant la guerre de 1914, dans son dernier roman nous retrouvons la famille Bird et c’est Will qui en est le héros, Will fils de Xavier.
    Will vit près de la Baie James, à Moonsonee réserve d’indiens Cree, nous sommes dans le grand Nord, si vous voulez y aller prenez le Polar Bear Express le seul train qui fasse le voyage jusqu’au "trou du cul de l’Arctique" comme le nomme Boyden.
    Will Bird est un ancien pilote de brousse, porté sur l’alcool,  il est aujourd’hui plongé dans le coma à la suite d’une agression, de son monde d’ombres et de fantômes il voit défiler sa vie. Le drame de sa séparation avec sa famille, la mort de sa mère qui refusa d’apprendre la langue des blancs, son père héros de la Première guerre qui va le trahir en l’envoyant à l’école. Ses souvenirs affleurent, ceux du Grand Nord, de sa vie de trappeur mais aussi sa propre dérive, son besoin de vengeance qui l’a conduit dans ce lit d’hôpital et son besoin de rédemption.

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    Indiens Cree

    A côté de lui, Annie sa nièce, elle ne croit pas au pouvoir des mots mais elle a une dette envers cet oncle qui l’a élevé ainsi que sa soeur. Petit à petit son récit se fait plus libre, plus sincère, elle confie à Will son amour/haine pour sa soeur Susan belle et magnifique, séduite par la vie clinquante de mannequin et aujourd’hui disparue.

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    Paysages de la Baie James

    Les deux récits vont se croiser, se répondre, dévoiler les sentiments de chacun, les rapprocher par delà la conscience.
    Le Grand Nord canadien est splendidement évoqué. En filigrane de ce roman Joseph Boyden met l’accent sur la destruction lente du peuple Cree par la maladie, l’alcool, la violence, la drogue. Les indiens tiraillés entre la modernité et la vie traditionnelle.

    Si vous n'avez pas lu "Le chemin des âmes" un billet chez Lettres Exprès et chez Art et Littérature précipitez vous et retrouvez ensuite ces Saisons de la solitude.

    Poursuivre votre lecture : Un article sur les enfants Cree enlevés à leur famille sous prétexte "d'éducation"


    L’auteur

    Joseph Boyden écrivain canadien vit en Ontario et enseigne la littérature à la Nouvelle-Orléans, il a reçu le Giller Prize pour ce roman