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  • Darwin et le bouleversement du monde - Jean-Claude Ameisen

    Embarquez vous sur le Beagle sur les traces de Darwin

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    Un livre scientifique qui a des allures de polar, une biographie qui se lit comme un roman, oui je vous fait l’article, oui je veux vous convaincre de lire ce livre !

    Darwin : j’ai laissé passé les festivités liées aux anniversaires car j’éprouve vite un certain ras le bol quand tous les journaux, toutes les revues se donnent le mot, mais je dois dire qu’il y a un avantage c’est de voir fleurir les publications et les livres.

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    Sur les traces de Darwin : magnifique voyage proposé par le CNRS

    Cette biographie s’attache à nous livrer un portrait en pied, sans occulter les difficultés, les doutes, les erreurs parfois, du grand savant. On est invité dans son intimité, on le suit de son voyage sur le Beagle à l’élaboration de sa théorie ....

    Embarqué en 1831, il ne revient en Angleterre que cinq ans plus tard, entre temps il a amassé une quantité d’observations, d’expériences, d’échantillons qui  suffirait à remplir la vie d’un homme, mais pour Charles Darwin ce n’est que le début de l’aventure.

    Jean Claude Ameisen nous fait toucher du doigt le combat intérieur mené par Darwin, ses doutes, ses questionnements, tout ce qui le fait hésiter à porter à la connaissance de tous sa théorie. Vingt ans, il lui faudra vingt ans !
    En même temps il nous restitue un aspect de Darwin que pour ma part j’ignorais, son combat contre l’esclavage, le combat d’une vie. On suit avec passion le parcours de Darwin, ses relations avec d’autres savants de l’époque, Cuvier, Buffon, Lamarck qui fut son grand rival. On est touché par les doutes en matière religieuse et la véritable épreuve que représentent les conséquences de sa théorie sur ses convictions.

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      Le dessin original tiré des carnets de Charles Darwin montrant sa réflexion concernant les différentes lignées d'espèces dont certaines s'éteignent et d'autres mutent.

     

    Plusieurs chapitres nous entraînent du côté de la lumière : les sciences de la vie doivent tout à Darwin et Ameisen fait un vaste tour d’horizon des acquis que nous lui devons : la biologie, la génétique. Mais il y a aussi une face sombre, c’est le dévoiement de la théorie de l’évolution, son utilisation pour servir la cause de l’eugénisme ou du racisme.

    Jean Claude Ameisen est un passeur exceptionnel, son écriture est d’une grande élégance sans nuire à la simplicité, ses propos éclairés par la philosophie et la poésie sont pleins de ferveur, d’admiration.

    C’est un livre riche, plein, un livre savant et pourtant à la portée de tous, j’ai été captivé et je vous propose de vous embarquer vous aussi sur le Beagle vous ne le regretterez pas.

    Si vous voulez écouter JC Ameisen dans une conférence sur Darwin c'est sur Canal U


    Le livre : Dans la lumière et les ombres Darwin et le bouleversement du monde - Jean Claude Ameisen - Editions Points Seuil

     

  • Père et fils

    Flaubert et Maupassant, le père et le fils, le maître et l'élève

                      

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    Gustave Flaubert à Guy de Maupassant

    " Quant à moi je travaille avec violence, ne voyant personne, ne lisant aucun journal, et gueulant dans le silence du cabinet, comme un énergumène."

    " Enfin, mon cher ami, vous m’avez l’air bien embêté et votre ennui m’afflige, car vous pourriez employer plus agréablement votre temps. Il faut, entendez-vous, jeune homme, il faut travailler plus que ça. J’arrive à vous soupçonner d’être légèrement caleux.
    Trop de putains, trop de canotage, trop d’exercice ! "

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    Micheline Presle dans Boule de Suif de Christian-Jaque

    " Mais il me tarde de vous dire que je considère Boule de Suif comme un Chef d’oeuvre ! Oui jeune homme ! Ni plus, ni moins, cela est d’un maître. C’est bien original de conception, entièrement bien compris et d’un excellent style. Le paysage, les personnages se voient et la psychologie est forte. Bref je suis ravi."

    Guy de Maupassant à Gustave Flaubert

    " Mon cher Maître, j’ai vu Zola hier soir et il m’a dit que vous ne viendriez pas cet hiver ! Cette nouvelle m’a tellement étonné et désolé que je vous prie de me dire tout de suite si elle est vraie. Passer l’hiver sans vous voir ne me paraît pas possible ; c’est mon plus grand plaisir de l’année d’aller causer avec vous chaque dimanche pendant trois ou quatre mois."


    Le livre : Gustave Flaubert /Guy de Maupassant - Correspondance - Editions La Part Commune

  • Le Fils de Bakounine - Sergio Atzeni

    La Sardaigne au temps du fascisme

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    Lors d’un petit passage à ma librairie favorite j’ai reçu un conseil de lecture, je l’ai suivi et banco c’était du tout bon

    Quand votre père a juré d’inviter Bakounine à incendier l’église du village avec lui, il ne faut pas s’étonner après d’être surnommé « le fils de Bakounine » par tout Guspini, en Sardaigne on ne plaisante pas avec la politique.

    Son vrai nom est Tullio Saba et je vous propose de découvrir « Ce qui reste d’un homme, après sa mort, dans la mémoire et les paroles d’autrui. »
    C’est compliqué de faire le portrait de Tullio Saba car il est devenu une quasi légende.
    Est-il uniquement ce bel homme qui aime paradé devant les dames, est-il un meneur de grèves communiste toujours près à bouffer du curé, est-il celui qui a gravé « Vive Staline » sur un madrier au fond de la mine , est-il ce fils de cordonnier toujours prêt à défendre les humbles.

    Parce qu’il est un peu tout ça Tullio Saba. Il est beau oui c’est certain « Le plus beau du pays, les yeux noirs et rusés, aux mouvements vifs comme ceux du renard  » et plus d’une femme de Guspini lui doit son bonheur !
    Un des meilleurs mineurs et qui « savait beaucoup de choses qui n'étaient pas écrites dans les journaux et que la radio ne disait pas sur la guerre d'Espagne, sur le communisme russe ; il savait et il parlait, il racontait » mais aussi « arrogant et mal élevé »  donc le premier licencié quand il s’agit de remettre de l’ordre.

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    Le portrait du héros apparaît petit à petit à travers les récits de ses amis, de ses voisins. Enjolivé, déformé, par ceux qui ont peu ou prou partagé sa vie.
    Un portrait  tout en contradictions, démon athée pour les uns, saint laïque pour les autres. Où se situe la vérité, que reste-t-il d’un homme dans les souvenirs de ceux qui l’ont connu ?


    Ce court roman est très réussi, même si le procédé narratif n’est pas original, il est mené très habilement. Apparaît une Sardaigne, pauvre et fière, au temps du fascisme, ce temps qui autorise les hommes vêtus de chemises noires à terroriser mineurs et paysans et à leurs faire avaler « l’huile de ricin » pour les mettre au pas.
    Cette alliance entre le destin individuel de Tullio Saba et celui de la Sardaigne, est un des plaisirs de ce livre.
     
    atzeni.jpgLe livre : Le Fils de Bakounine - Sergio Atzeni - Traduit de l’italien par Marc Forcu - Editions Phébus libretto 2011
    première publication en 2000 Editions la Fosse aux ours

    L’auteur : Sergio Atzeni est mort prématurément en 1995, à l’âge de quarante-trois ans, emporté par une vague, alors qu’il contemplait une tempête. La critique avait salué dès la publication du Fils de Bakounine un écrivain de talent, au seuil d’une oeuvre majeure.



  • Les roses de Samode - Serge Airoldi

    A mi-chemin de la poésie, du récit de voyage, des réminiscences de l’enfance, ce livre doucement mélancolique invite à rêver, à se replonger dans le bonheur et la gravité des souvenirs.

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    Un lien existe entre le voyage en Inde de l’auteur et son enfance, les roses, les roses qui « embaumaient l’air » dont sa grand-mère faisait des bouquets semés dans toute la maison « dans sa chambre, près du missel ».
    Les pétales de roses que sa grand-mère éparpillait et glissait dans des endroits secrets « auge des vaches, dessus de l’armoire, tas de bûches » ces pétales de roses qu’il va retrouver à Samode comme si les lieux de l’enfance et ceux du voyage pouvaient dialoguer par dessus les mers et le temps.

     

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    C’est un livre nostalgique que celui-là, il tisse les brins de la mémoire ensemble, les rassemble et en fait un réseau secret où l’enfance répond au monde d’aujourd’hui, où la tendresse d’une grand-mère reste une musique indispensable devant les dureté des visions de l’Inde, où les paysages de l’enfance sont remplacés par « un minaret, des coupoles et des temples » souvenirs d’autres voyages « de Pienza à Jaïpur »
    La disparition d’un ami trouve son écho dans un bûcher funèbre indien près du Taj Mahal.

    J’ai tout aimé, la poésie, le voyage, les mots, la  « beauté altière » du récit. Un livre que l’on range dans un coin secret de sa bibliothèque pour le rouvrir un soir où le parfum des roses réveillera le souvenir.

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    Le livre : Les roses de Samode - Serge Airoldi -Cheyne Editeur

  • Eloge de l'ombre

     

                       陰翳礼讃

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    Jardins de Kyoto


    D’aucuns diront que la fallacieuse beauté créée par la pénombre n’est pas la beauté authentique. Toutefois, ainsi que je le disais plus haut, nous autres Orientaux nous créons de la beauté en faisant naître des ombres dans des endroits par eux-mêmes insignifiants.

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    Paravent à six feuilles en laque noir décoré au laque d'or. Canton, 18ème siècle

    Je crois que le beau n’est pas une substance en soi, mais rien qu’un dessin d’ombres, qu’un jeu de clair-obscur produit par la juxtaposition de substances diverses. De même qu’une pierre phosphorescente qui, placée dans l’obscurité émet un rayonnement, perd, exposée au plein jour, toute sa fascination de joyau précieux, de même le beau perd son existence si l’on supprime les effets d’ombre.

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    En fait, la beauté d’une pièce d’habitation japonaise, produite uniquement par un jeu sur le degré d’opacité de l’ombre, se passe de tout accessoire.

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     ''La cuisine japonaise, a-t-on pu dire, n'est pas chose qui se mange, mais chose qui se regarde ; dans un cas comme celui-là, je serais tenté de dire: qui se regarde, et mieux encore, qui se médite !''


    Le livre : Eloge de l'ombre - Junichirô Tanizaki - Editions  Verdier

  • La Berge des rennes déchus - Jovnna-Ánde Vest

    Voyage au pays Same

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    Les lectures faites dans l’enfance sont de celles que l’on oublie pas, Frison-Roche m’avait emporté chez les sames il y a bien longtemps et j’ai fait avec lui un voyage au pays des lapons (Le rapt et La Dernière migration) romans sans doute un peu folkloriques mais que je n’ai jamais oublié.
    Me revoilà  aujourd’hui en Laponie Finlandaise avec un auteur né dans le petit village de Roavesavvon.
    Jovnna-Ande Vest nous fait franchir d’un bond le temps et l’espace, il nous introduit dans une société de l’immédiate après-guerre loin au nord du nord.
    C’est son père le héros de ce récit largement autobiographique, un père pour le moins extraordinaire, aimé et honni à la fois par son fils.
    Loin de l’attachement permanent aux traditions, ce père est un précurseur, lui le lapon qui vit et fait vivre sa famille de la pêche au saumon, de l’élevage des rennes est en même temps un passionné fou de technique et de modernité « Il était porté par la fascination fantasque du progrès technique. »

    La fascination du père s’exerce d’abord sur une moto, mais la fièvre le tient et il passe ensuite à des voitures pour lesquelles il lui faut tenter cinq fois le permis car « Il réussissait chaque fois l’épreuve écrite, mais quand on abordait la conduite les choses se gâtaient. »
    Bien sûr il a le premier magnétophone à cassettes, il apprend le suédois à distance, fait l’acquisition d’une machine à écrire. Mais la modernité a un prix : l’incendie de la maison « En somme, nous avions gagné la lumière, mais le feu détruisit nos habitations. »
    Même dans les activités traditionnelles, comme la cueillette des mûres arctiques, le père est un incorrigible rebelle :

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    « Papa était un cueilleur de moréales hors pair, mais je ne me rappelle pas qu’il ait une seule fois rempli un seau d’airelles ou de myrtilles au point d’en recouvrir le fond.(...) On connaissait bien sûr des marais dans lesquels il poussait toujours des moréales, pour peu que ce fût une bonne année à moréales. Mais ces marais-là n’intéressaient guère mon père. Il voulait chercher et découvrir lui-même ses coins à moréales. Du fait de son obstination, plus d’une moréale a échappé à notre cueillette. »

    D’essai en fiasco total, le père curieux impénitent entraîne sa famille dans ses tribulations. Se dessine une vie marquée par la fracture entre traditions et vie nouvelle, entre regrets et espoir.

    J’ai beaucoup aimé ce récit-témoignage, entre conte drôlatique et souvenirs émouvants, entre histoires truculentes et péripéties pitoyables. La langue dont la traduction est assurée par l’épouse de l’auteur, spécialiste des langues nordiques, est riche, inventive et reflète la truculence du personnage.
    Souhaitons que l'éditeur publie la trilogie du même auteur.

    Le livre : La berge des rennes déchus - Jovnna-Ande Vest - Traduit par Jocelyne Fernandez-Vest - Editions Cénomane

    Vest-Jovnna-Ande.jpgL’auteur : Né en 1948, en Laponie finlandaise, Jovnna-Ánde Vest est écrivain et traducteur. Son premier roman, La berge des rennes déchus (1988), est aussi le premier traduit en français. Sa trilogie Les héritiers (Árbbolaččat, 1997-2006), a été nommée en 2006 pour le Prix de Littérature du Conseil Nordique. Vest a traduit en same plusieurs romans d’écrivains finnois et scandinaves, dont ceux de Timo K. Mukka.(source l’éditeur)