Les couilles d’adam - Edouard Dor - Sens & Tonka
C’est le troisième voyage que j’entreprends avec Edouard Dor, après les Deux vénitiennes et Une inquiétante étrangeté, je le retrouve aujourd’hui dans un essai sur Masaccio, on change d’époque mais toujours en gardant ce regard décalé, libre et passionné sur les oeuvres, loin des essais trop sérieux des historiens de l’art.
Comme dans les livres précédents plusieurs oeuvres sont regardées, rapprochées, comparées.
Le titre de ce livre prend sa source dans la fresque de Masaccio de la Chapelle Brancacci de Santa Maria del Carmine à Florence.
Dans la chapelle deux fresques se font face, celle de Masolino, La Tentation qui représente Adam et Eve avant la chute. Cette fresque qu’ Edouard Dor qualifie « d’art médiéval » correspond au canon esthétique et à la tradition de l’époque.
La tentation - Masolino - Chapelle Brancacci
En face l’oeuvre de Masaccio, Adam et Eve chassés du paradis terrestre, marque une rupture et le passage à l’art moderne.
Adam et Eve chassés du paradis terrestre
Avant et après restauration
L’analyse détaillée fait apparaître des détails ignorés, nous fait découvrir l’intention du peintre de faire de cet Adam le procréateur désigné par dieu, et d’Eve qui pousse un cri inaudible, qui revêt le masque de la douleur, le symbole de la punition divine.
Cet homme et cette femme ne sont plus des personnages habituels, ils ne sont plus des canons de la culture gréco-latine mais deviennent plus humains.
« Cette volonté de Masaccio d’humaniser ses héros fait qu’ils nous sont immédiatement compréhensibles et sympathiques. Nous compatissons à leur douleur, cette douleur qu’ils semblent partager et qui les rend solidaires l’un de l’autre (...) Oui nous saisissons bien, d’emblée, la précarité de ces créatures. »
Le titre choisi par E Dor pour cet essai trouve son origine dans la suppression des pudiques feuilles de vigne qui cachaient les attributs virils d’Adam avant la restauration de la fresque en 1984.
Masaccio dont Elie Faure disait « Celui-là même qui a inventé la peinture » inspirera Michel Ange, Raphaël, les tableaux de ceux-ci sur le même sujet sont examinés par Edouard Dor. Puis plus près de nous il nous propose un rapprochement avec Rodin mettant en regard, le visage douloureux d’Eve et la sculpture de Rodin "Tête de la douleur"
Tête de la douleur - Auguste Rodin
Comme pour les précédents j’ai aimé cette invitation à la découverte d’une oeuvre et cet essai est allé rejoindre les deux précédents sur les étagères de ma bibliothèque