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Rechercher : la petite lumière

  • Cent ans - Herbjørg Wassmo

    Portraits de femmes

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    C’est moins l’envie d’obéir à la mode des récits nordiques que le plaisir de retrouver une vieille connaissance qui m’a fait lire Cent ans. Herbjørg Wassmo est un écrivain très attachant, le Livre de Dina et la Véranda aveugle sont d’excellents souvenirs de lecture.
    La retrouver sur le deuxième versant de sa vie était une tentation à laquelle je n’ai pas résisté.
    Comme dans ses autres romans les femmes ici ont la part belle, et même plus que belle puisque quatre d’entre elles animent tout le récit. Quatre femmes qui dessinent l’arbre généalogique de l’auteur. Un arbre généalogique vrai ou parfois rêvé, mais qu’importe. Nous allons donc de sa mère à son arrière grand-mère, ou dans l’autre sens de 1860 à 1960.

    Quatre portraits de femmes et celui d’une région, un pays au nord du nord, une région dure, désolée, l’archipel des Lofoten, le Nordland objet de déconsidération par les Norvégiens du sud, dont on moque l’accent et le parler.

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    Vue panoramique du fjord Bas, un paysage typique des îles Lofoten.

    Par ordre de préséance voyons d’abord Sara Susanne, dotée d’un beau tempérament elle épouse Johannes Krog, un peu par obligation, un peu aussi parce que, bien qu’atteint d’un fort bégaiement, il est capable de sensualité et Sara elle a « un appétit scandaleux »
    Avec elle vous vivrez la dure vie des femmes de pêcheurs, vous connaîtrez les jours de disette et ceux de pêche miraculeuse, les grossesses qui se succèdent, les bouches à nourrir. Mais sur cet archipel fouetté par les vents il y a des moments de pur bonheur comme ces séances de pose auprès du Pasteur parce que Sara sert de modèle à l’ange du retable de l’église des Lofoten « Elle rayonnait comme si Dieu en personne lui avait attribué le rôle de l’ange. »
    Tenaillée par l’envie de prendre son envol  elle va transformer à jamais les veillées de toute la famille, des voisins, des domestiques le jour où ouvrant un livre elle prend la parole.« les mots trouvaient leur voie dans la pièce comme les ruisseaux d’un lac de montagne débordant. Et elle entra au coeur du sujet »
    Viendra ensuite Elida, fille de Sara, celle qui regimbe, qui se marie contre l’avis de sa mère, qui va voir aussi les enfants arriver plus vite que nécessaire et voir Frederik son amant, son époux, son ami, tomber malade. Frederik qui ne peut être soigner qu’à condition de partir à Kristiania la capitale.

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    Kristiania au XIX ème siècle, aujourd'hui Oslo

    Elida va prendre la plus difficile des décision « Elle partirait avec lui pour Kristiana. Plus elle y pensait, plus l’idée lui plaisait. Car n’était ce pas ce dont elle avait toujours rêvé ? S’évader  »
    Vite on vend la vache, mais il n’est pas question d’emmener la trop nombreuse famille et certains des enfants devront rester, placés, abandonnés.....

    Hjørdis la mère de l’auteur, celle qui placée à 2 ans ne fera connaissance avec sa famille qu’à 6 ans, ce qui ne l’empêche pas de revenir vers le Nordland de son enfance une fois adulte.
    Je vous laisse découvrir la dernière femme, Herbjørg et la naissance de son goût pour l’écriture grâce à ses petits carnets jaunes cachés sous le plancher de l’étable.

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    Eglise sur les Lofoten

    Un vaste tableau brossé que ces quatre portraits de femmes. Découvrez leur soif de liberté, leur inquiétude devant les sacrifices à consentir, leur peur face à la violence qui souvent leur est faite.
    L’alternance entre les différentes histoires et les différentes époques rythme très heureusement le récit.
    J’ai retrouvé dans ce roman tout l’art d’ Herbjørg Wassmo qui donner chair et vie à ses personnages, qu’elle sait nous  rendre très proches. Un roman attachant qui vous lie pour longtemps à ces quatre destins de femmes.


    L’avis de Lettres exprès et celui de La Ruelle bleue  et de Margotte  ou alors la balade touristique de Theoma

    Le livre : Cent ans - Herbjørg Wassmo - Traduit du norvégien par Luce Hinsch - Editions Gaïa

    L’auteur
    Herbjørg Wassmo est l’auteur d’une œuvre considérable, des livres pour enfants à l’écriture théâtrale en passant par la poésie. Œuvre inscrite aux programmes scolaires et universitaires, et qui, traduite en de nombreuses langues, connaît un succès populaire exceptionnel. Elle est, en Scandinavie, l’écrivain mondial le plus lu, et Dina a pris place aux côtés des grandes héroïnes de la littérature.(source l’éditeur)

    photo : Rolf M. Aagaard

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  • En Egypte avec Pierre Loti

    Dans la série Tour du monde et pour suivre un peu l'actualité direction l'Egypte

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    J’ai lu beaucoup sur les voyages en Egypte car c’est une destination qui m’a toujours fait rêver. Alors bien sûr j’ai lu Flaubert, Théophile Gautier ou Lady Gordon Duff.
    Je n’ai pas résisté à Pierre Loti qui vient d’être publié dans une toute nouvelle collection de récits de voyage.

    Nous sommes au début du siècle et Pierre Loti amoureux de l’orient voyage en Egypte, il n’est pas un voyageur ordinaire, d’abord sa plume est celle d’un véritable écrivain mais surtout il a un regard très particulier sur ce qui vient de naitre en Egypte : Le tourisme

    Il arpente l’Egypte du Caire à Assouan, de Thèbes aux rives du Nil,  de Louxor à Philæ.
    Tout son voyage est marqué par le terrible constat, les beautés naturelles, les paysages, les sites : tout va disparaître. L’Egypte et les Egyptiens vont perdre leur âme, en Inde l’auteur avait déjà eu la dent dure contre les anglais, mais ici c’est un réquisitoire en règle, tout y passe : le vol des oeuvres d’art, les maladies apportées à la population, l’exploitation des sites par « les désoeuvrés, les parvenus du monde entier » et que dire des hordes de touristes qui grâce à Monsieur Cook envahissent le désert « jeunes anglaises phtisiques, ou vieilles anglaises simplement un peu gâteuses ».

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                                                                 Philae  au temps de Loti

     

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    philae aujourd'hui

    Le paroxysme est atteint avec l’île de Philae « L'embarcadère pour Philae. Quantité de barques sont là prêtes, car les touristes alléchés par maintes réclames, affluent maintenant chaque hiver en dociles troupeaux. Toutes, sans en excepter une, agrémentées à profusion de petits drapeaux anglais, comme pour quelque régate sur la Tamise; il faut donc subir ces pavois de fêtes foraines, - et nous partons avec une nostalgique chanson de Nubie que les bateliers entonnent à la cadence des rames. »

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    les pages de Miriam sur Assouan et Philae

    Il écrit en polémiste et il invite les Egyptiens à se rebeller  « Réagissez avant qu’il soit trop tard (...) tout ce qui fut la grâce et le mystère de votre ville.(...) il y va de votre dignité nationale. »
    Dans beaucoup de pages c’est son amour du pays, de la population, son admiration qui l’emportent.
    Sa visite à Al-Azhar la mosquée Fatimide et son université « Cette cour, où le soleil de onze heures darde son feu blanc, est un enclos sévèrement et magnifiquement arabe ; il nous a isolés soudain du temps et des choses ; il doit porter à la prière musulmane, de même que jadis nos cloîtres gothiques portaient à la prière chrétienne. Il est vaste comme un carrousel » il est sous le charme puissant de l’endroit  « Malgré soi on lève la tête, fasciné par toute cette beauté qui est en l'air : rien d'autre pourtant que ce carré de ciel merveilleux, sorte de limpide saphir tout enchâssé dans des crénelures d'Al-Azhar, et où montent se perdre les si audacieuses tours fuselées »

     

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    Al-Azhar

    Pourtant ici aussi la critique n’est pas loin devant le comportement des touristes  « Dans n’importe quelle église d’Europe, où des hommes prieraient agenouillés, je voudrais voir comment seraient accueillis des touristes musulmans, qui par impossible, se tiendraient aussi mal que ces sauvages là. »

    Pierre Loti est un bon guide et l'alernance entre admiration et colère rend le livre très actuel.Un beau voyage, un livre à glisser dans ses bagages lors d’une croisière sur le Nil.

    Pour compléter des pages et photos d’une exposition sur le voyage en Orient
    les pages de Miriam sur Assouan et Philae

    Le livre : La mort de Philae - Pierre Loti - Editions François Bourin

    L’auteur :
    loti.jpgPierre Loti (1850-1923) officier de marine et écrivain, a cultivé toute sa vie la passion du voyage. De l'Inde à Tahiti, de la Turquie au Sénégal, des déserts du Sinaï à ceux de Galilée, les inlassables pérégrinations de cet arpenteur des océans ont nourri une œuvre riche (Vers Ispahan, Aziyadé, Le roman d'un spahi ou encore Madame Chrysanthème) qui contribua à faire de lui, de son vivant, un romancier à succès et un mondain courtisé. (l’éditeur)


  • Nuit et jour - Virginia Woolf

    Trouver chez le libraire un roman de Virginia Woolf jamais lu c’est un vrai plaisir, Nuit et jour vient d’être réédité en poche que demander de plus

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    Comparé aux romans de la pleine maturité : La Chambre de Jacob, Mrs Dalloway et bien sûr Au Phare,  ce roman ci est encore marqué par un certain classicisme mais je le dis sans grande conviction, parce que s’y dessine déjà tout le talent de Virginia Woolf pour faire sentir une atmosphère, pour décrire les lieux. Ses convictions féministes, sa volonté d’une indépendance, le refus des conventions sociales de son milieu, tout est déjà là en prémices, on devine déjà l’auteur d’ Une chambre à soi, la romancière capable de nous faire pénétrer dans l’esprit des personnages, leurs émotions, leurs pensées.

    Elle est présente dans les deux personnages féminins : Mary Datchet la suffragette aux origines modestes, fière de son indépendance, rompant avec un milieu familial qui lui réserve la place habituelle de la femme  et Katherine Hilbery qui appartient à la bonne société et qui vit dans une famille un peu écrasée par la figure du grand-père poète comme la tribu Stephen vécu à l’ombre de Leslie Stephen

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     L'ombre tutelaire du père

    Il est temps que je sois un peu plus précise sur la trame du roman
    « Une comédie mélancolique » dit Hermione Lee la biographe de Virginia Woolf, une comédie à quatre personnages, un chassé-croisé amoureux.
    L’héroïne principale, Katherine Hilbery, issue de la bonne société edwardienne,  est la petite fille de Richard Alardyce véritable icône de la poésie de son temps qui jouit d’une célébrité qui se déverse aussi sur la famille au point de pousser Katherine à participer à la rédaction de la biographie du grand poète car « il fallait démontrer de façon irréfutable que son aïeul était un très grand homme ». Il y a de l’orgueil chez Katherine, une conscience aïgue de la position privilégiée de sa famile.
    Elle se fiance à William Rodney poète lui-même, elle ne ressent aucune passion amoureuse pour lui, c’est un choix sage et réfléchi, son rêve secret est d’étudier les mathématiques, elle ne se sent aucune disposition pour la poésie ni la littérature, il y a en elle une volonté farouche de se démarquer de sa famille, de sa mère qui était « la dernière personne à qui elle désirait ressembler »

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                                                        Highgate au début du XXème siècle

    Quand elle rencontre le beau Ralph Denham avocat issu d’un milieu modeste, elle est ébranlée dans ses certitudes et d’un seul coup  l’amour dont elle rêve a la  « splendeur d’un flot tumultueux »
    Ralph l’idéaliste est subjugué, mais conscient du fossé qui les sépare, tellement épris de Katherine qu’il est incapable de voir l’amour que lui porte Mary Datchet.
    Tout est réuni pour la romance mais on est chez Virginia Woolf et le combat va s’engager pour chaque personnage entre son idéal, ses désirs, son obéissance aux moeurs de la société et ses convictions.

     

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    Sir Alfred East - Clifford's Inn London

    Virginia Woolf n’est jamais loin derrière ses personnages. Mary et Katherine représentent à coup sûr les deux facettes de la personnalité de l’auteur. Une volonté d’indépendance et un respect des conventions par un mariage sans passion véritable.
    La description de l’appartement de William Rodney est plus qu’un simple cadre, il ressemble de très près à l’appartement que le couple Woolf occupa à Clifford’s Inn 
    Les lieux où Virginia Woolf place les héros, sont les lieux qui lui sont chers : Ralph à Highgate, Katherine à Cheyne walk, leur rencontre à Kew Gardens.

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     Kew Gardens au temps de Virginia Woolf

    "Nuit et Jour" reçut de la critique un accueil élogieux sauf de Katherine Mansfield qui sans doute blessée par le succès de son amie et rivale en littérature, eut la plume très acide à l’égard du roman.
    Si vous aimez Virginia Woolf vous aimerez la découvrir à ses débuts.

    Ce que Virginia Woolf dit de ce livre dans son journal
    « A mon avis Nuit et Jour est un livre plus mûr, mieux achevé, plus satisfaisant que La Traversée des apparences, et cela se comprend. Sans doute me vaudra-t-il l’accusation de fignoler des émotions qui n’ont vraiment aucune importance. »


    Le livre : Nuit et jour - Virginia Woolf - Traduit de l’anglais par Catherine Naveu - Editions Points Signature



  • Le Désert et la Grâce - Claude Pujade-Renaud

    9782742769032FS.gifLe Désert et la Grâce - Claude Pujade-Renaud - Editions Actes Sud
    Port Royal, Pascal, la Querelle janséniste - je suis certaine que tous ces noms évoquent quelque chose pour vous, peut-être des souvenirs plus ou moins ennuyeux (tout dépend de votre prof de français de l’époque !!)
    Si vos souvenirs sont très diffus je vous propose d’y revenir par un livre qui n’est ni un cours d’histoire - bien que le roman soit très fidèle à la vérité historique - ni un cours sur les tragédies de Racine bien que celui-ci soit au cœur du récit.
    Le roman embrasse un siècle entier, celui pendant lequel Richelieu, puis Louis XIV et les jésuites, vont lutter contre l’influence de ces hommes et femmes qui choisissent de vivre hors du siècle.

    Un petit rappel : Pour les jansénistes, Dieu accorde sa grâce par avance, à ceux qui la mérite par pure miséricorde. La liberté de l'homme existe encore, mais est très limitée. Ainsi, celui qui est prédestiné au mal, ne peut en aucun cas se retourner vers le bien.
    Le Jansénisme fut diffusé en France par Saint Cyran. Le mouvement gagna la famille Arnaud, les religieuses de Port Royal et une partie de la noblesse.

     

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    C’est un spectacle macabre qui ouvre le roman : l’Abbaye n’existe plus mais le cimetière est toujours là ; les corps et ossements des hommes et femmes inhumés ici sont jetés à la fosse commune sur ordre du Roi. La volonté du pouvoir est d’effacer toutes traces du Jansénisme et des hommes et femmes qui y adhéraient.
    Le couvent a été rasé, les religieuses dispersées et contraintes d’abjurer leur foi sous peine d’être privées de sacrements et de sépultures chrétiennes.

    racine.jpgPascal, Racine, Messieurs les Solitaires, les religieuses « les Arnauld, les Le Maistre, laïcs ou religieux » sont les grandes figures qui traversent le roman.
    En but aux persécutions certains sont emprisonnés, d’autres sont partis en  exil,
    ils peuplent ce roman de leur ombre.

    Mais les  personnages centraux sont deux femme, deux personnages magnifiques de foi, d'orgueil et de dévouement.
    Françoise de Joncoux  dite «  l’invisible » qui porte secours, soigne, assiste et «  consacrait une partie de ses nuits à ce labeur : multiplier les copies afin d’éviter tout risque de perte, en répartir chez des connaissances sûres pour parer à l’éventualité d’une perquisition et d’une saisie, les expédier aux Pays-bas où ils seraient relus, préparés, annotés par les jansénistes exilés puis, une fois imprimés, seraient clandestinement diffusés en France. »

    Marie-Catherine Racine, fille de Jean, elle aurait voulu prendre le voile mais son père la força à quitter Port-Royal parce qu’il « défendait sa liberté d’écrire, sa carrière tout juste montante d’auteur de théâtre »
    Elle essaie de comprendre pourquoi son père après avoir été élevé par les Solitaires, a renié ses amis mais a choisi de se faire inhumer Port-Royal.

    Leurs amis : Claude Dodart médecin bien en cour et dont le père fut médecin de l'abbaye, Charlotte de Roannez, Jacqueline Pascal la soeur du philosophe, Angélique Arnaud enfin figure tutélaire de l'Abbaye

     

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    Angélique Arnauld peinte par Philippe de Champaigne

    Leur ennemie : Madame de Maintenon qui les poursuit de sa hargne « Il fallait absolument anéantir ce monastère et ce parti. Reste à les extirper des mémoires »

    Claude Pujade-Renaud ressuscite pour nous Port-Royal des Champs, haut lieu de résistance au pouvoir royal, elle restitue magistralement ces personnages qui vivent dans une atmosphère de secret, de crainte et de solitude.
    Elle sait faire d’un sujet austère une magnifique fresque tout en finesse et dans une langue qui se veut fidèle à l’esprit du temps.

    Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque

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    Le site de Port-Royal

     

    Pour en savoir plus

     

    L’excellent biographie d’Anne Delbée : Racine roman

    Lettres Provinciales de Blaise Pascal

     

  • Instants de guerre - Laurie Lee

    Instants de guerre (1937 - 1938) - Laurie Lee - Traduit par Laurent Langlade - Editions Phébus Libretto
    instants de guerre.gifCe livre est le dernier d’une trilogie qui commence avec « Rosie ou le goût du cidre » des souvenirs d’enfance, se poursuit sur les routes d’Espagne « Un beau matin d’été » et se termine avec ces souvenirs de la  guerre d’Espagne d’un jeune anglais de vingt ans.
    Laurie Lee « gribouilleur de poésie », c’est lui qui le dit, reprend en 1937 la route de l’Espagne, la guerre civile tonne  et le jeune anglais idéaliste veux payer une dette contractée sur les chemins ibériques quand jeune et sans le sou, il trouva toujours le vivre, le couvert et la chaleur humaine auprès des habitants.

    C’est en « décembre 1937, que je traversai les Pyrénées, depuis la France : deux jours à pied, à affronter les tempêtes de neige. Je ne sais pourquoi je choisis le mois dd décembre ; ce n’est qu’une des nombreuses absurdité que je commis à l’époque. »
    Là il faut placer le petit couplet admiratif : quel courage que ce garçon qui vient se battre aux côtés des républicains !
    Seulement voilà, les républicains en question ne l’entendent pas de cette oreille et un anglais qui voyage avec un violon, instrument qui l'avait accompagné sur les routes, en plein mois de décembre, cela sent l’espion à plein nez.« Les miliciens nous escortèrent jusqu’à la place, devant la mairie délabrée, où pendait le drapeau républicain. J’allais enfin recevoir un accueil convenable pensai-je.(..) on vous a amené l’espion dirent les frères en me poussant en avant »
    Par chance il n’est pas immédiatement exécuté mais est sous haute surveillance, durant tout son séjour en Espagne la suspicion ne cessera jamais.
    On le fait rejoindre un groupe des Brigades Internationales, écossais, polonais, hollandais, toute l’Europe est là. Sans armes, sans munitions, mangeant au gré des trouvailles et bizarrement sans combattre mais invités à entendre le discours du chef du parti communiste britannique « Nous avions aussi chaque jour une faim de loup, aiguisée par le froid de l’hiver et l’oisiveté » « dans l’oisiveté froide de nos vies, tous accroupis dans nos ponchos, occuper à nettoyer sans fin nos fusils, nous songions aux cent mille hommes qui livraient bataille dans ces montagnes en nous interrogeant sur la véritable utilité de notre camp d’entrainement »

    Barcelone 1936 Centelles.jpgLaurie Lee va suivre les troupes républicaines au gré des combats, Albacete où il occupera à nouveau une cellule de condamné à mort, Tarazona, Madrid où on l’envoie pour participer à des émissions de radio à destination des USA, il y vivra ses premiers bombardements par l’aviation franquiste « le sentiment de vivre une expérience irréelle disparut quand débuta le bombardement.On perçut d’abord un grondement métallique lointain, affûté par l’atmosphère glaciale, un silence, comme un souffle retenu, puis un gémissement qui grandit soudain et le rugissement bref d’un bâtiment qui explose »

    Sa guerre d’Espagne va se terminer à Teruel, la ville prise par les républicains, est bombardée sans merci par les franquistes « je ne sus que plus tard que cette accélération impressionnante du bombardement marquait la fin de la bataille de Teruel. Renforcés par les blindés et les avions italiens, les troupes de Franco lançaient une contre-attaque sur la cité forteresse. »
    C’est l’heure de la retraite, les républicains avaient espérés que la prise de Teruel serait décisive pour l’issue de la guerre civile «  elle y apposa, au contraire, le sceau de la défaite »

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    Laurie Lee dans une confrontation violente et un corps à corps, se défend « chacun pour soi, à bout de souffle(...) j’avais tué un homme et ne pouvais pas oublier son regard attéré, débordant de colère »
    C’est la fin, les Brigades Internationales dissoutes, Laurie Lee est renvoyé à Londres «  Vous nous seriez plus utile là-bas. Après tout, vous ne servez pas à grand-chose ici. Vous pourriez écrire sur nous, composer des discours, peindre des affiches ou des choses comme ça... »

    Tout au long du récit Laurie Lee a une parole libre, sa plume est sensible et parfois déchirante,  il rend très fort la sensation de chaos, de folie, et dénonce les horreurs, les désolations et les absurdités de la guerre.

    Vous pouvez le retrouver sur les chemins d'Espagne chez D'un livre l'autre

    Les livres de Laurie Lee sont tous chez Phébus

  • Lark et Termite - Jayne Anne Phillips

    Lark et Termite - Jayne Anne Phillips - Traduit de l’américain par Marc Amfreville - Editions Christian Bourgois
    Lark et termite.gifDeux périodes, cinq personnages, une guerre et des inondations mais aussi des secrets enfouis dont vous serez seuls dépositaires, voilà ce que propose ce roman.
    En 1950 en Corée le soldat caporal Leavitt est blessé et réfugié dans un tunnel, il a été touché par ses compatriotes, à côté de lui une jeune coréenne essaie de le garder en vie. Il délire, il rêve au passé. Il entend la musique du club de jazz où chantait Lola, sa femme si belle " Ses cheveux roux foncés ont comme une teinte cuivrée" Elle attend un enfant, un enfant qui doit naître en ce moment pendant que lui agonise au fond du tunnel.

    Neuf ans plus tard en Virginie dans la touffeur de l’été nous faisons connaissance avec Lark, une séduisante adolescente. Elle n’a jamais connu son père, sa mère Lola a disparu. Dans la vie de Lark son frère handicapé tient la meilleure part, elle le choie, le protège lui voue un amour total et refuse que les services sociaux le place "pour son bien" en établissement spécialisé. Elle invente le monde pour lui, lui donne  de la chaleur, cuisine pour lui des gâteaux colorés.
    Termite son frère est un enfant de neuf ans, blond et bouclé, à moitié aveugle et hydrocéphale. Il ne marche pas, ne parle pas " on dirait qu’il psalmodie" Lark communique mystérieusement avec lui, elle entre dans le monde de bruits et de sensations où "Il est enfermé à l’intérieur de lui-même comme un termite dans un mur". Il entre en contact par les objets, des bandes de plastique qu’il regarde voler, un petit flacon de porcelaine.
    C’est Nonie, leur tante, qui a élevé Lark et Termite. Nonie c’est la sécurité, la solidité,la générosité. Elle se dévoue corps et âme pour eux, elle travaille dur dans le restaurant de Charlie l’homme qui veille sur eux tous.
    Enfin le dernier personnage de cette histoire, Lola, la mère fantôme, disparue en emportant ses secrets,  elle a confié Lark et Termite à Nonie qui est devenue leur mère car comme elle le dit "ces enfants n’ont rien à voir avec Lola, sauf qu’ils sont passés par elle pour venir à moi"
    A la faveur d’une inondations les secrets bien cachés vont remonter à la surface.

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    La voix de chaque personnage est différente, chacun sa partition: la voix exaltée de Lark, la voix grave de Nonie.
    L’auteur réussi le tour de force de nous faire pénétrer dans le monde de l’enfant, sans pathos aucun elle nous fait entrer dans son monde de perception et de sensations, nous ressentons ce qu’il ressent "Lark dit le nom des fleurs, il redit les sons, mais les sons ne sont pas les fleurs. La fleur c’est la silhouette toute proche, elle ne bouge pas, il la voit bleue comme ça, longue et fine (...) Ensuite la silhouette bouge et la fleur est trop près ou la fleur est trop loin. Et la silhouette se fait couleur "
    C’est un roman tout à fait extraordinaire qui dégage une émotion intense, un roman profond et grave, un magnifique livre sur l’enfance et la puissance de la vie. Tous les personnages sont marqués par l’absence, les secrets, tous vivent grâce à la force de l’amour.
    Jayne A Phillips a magistralement construit son récit, elle nous tient en haleine avec virtuosité et sensibilité. Son récit est subtile, pudique et fort à la fois. Il traduit un optimisme et une générosité qui donne confiance dans le genre humain et procure un grand plaisir de lecture.

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    Si vous le souhaitez, retrouvez J A Phillips dans une interview à Médiapart

    L’auteur
    jayne-anne-phillips.jpgJayne Anne Phillips est née en 1952 en Virginie Occidentale. Elle vit à Boston. Elle a publié son premier recueil de nouvelles, "Black Tickets", en 1979 à l'âge de 26 ans. Il fut récompensé par le Prix Sue Kaufman. Nadine Gordimer l'a qualifiée, à cette occasion, du meilleur auteur de nouvelles depuis Eudora Welty. Depuis, "Black Tickets" est devenu un classique du genre. En 1984, elle publie son premier roman, Machine Dreams, salué par le "New York Times" comme le meilleur livre de l'année. "Shelter", son second roman, publié en 1994, fut sélectionné parmi les meilleurs livres de l'année par "Publisher Weekly". Jayne Anne Phillips a enseigné à Harvard, Williams College ainsi qu'à Boston University ( source l'éditeur)