Patience et songe de lumière - Sylvie Germain - Editions Flohic
En 1996 j’ai eu la chance de me rendre à La Haye pour voir l’exposition Vermeer au Mauritshuis. C’était la plus importante exposition avec 22 des 35 tableaux attribués à Vermeer.
Je me souviens du voyage en voiture jusqu’à Amsterdam, des canaux encore gelés car nous étions en mars, le ciel était bas, le train d’Amsterdam à La Haye pris tôt le matin, la foule qui se pressait à l’entrée malgré les billets achetés plusieurs mois auparavant , et ensuite...la magie de la peinture, de la lumière, des tableaux.
Il y avait presque tout : Le Géographe et la Dentellière du Louvre, « Le petit pan de mur jaune » cher à Proust, La laitière avant qu’elle ne devienne publicité, La jeune fille à la perle avant le roman et le film.
Les tableaux des grands musées du monde, ceux de part delà l’océan et que je n’aurai peut être jamais l’occasion de voir une seconde fois.
Avant cette exposition j’avais rêvé sur les tableaux de Vermeer grâce à Sylvie Germain, son livre est actuellement indisponible mais vous pouvez sans doute le trouver en bibliothèque et il vous proposera d’entrer dans l’atelier du peintre et de faire un voyage vers la lumière et une fois poussé le rideau de vous absorber dans la contemplation.
Tout d'abord il vous faut faire connaissance avec la ville.
« Il est sept heures dix au cadran de l’horloge de la porte de Schiedam. Le mât oblique d’une barque amarrée devant l’arche de la porte pointe le clocher de la Nouvelle Eglise que le soleil levant blondit doucement »
Vermeer est là dans son atelier, il cherche la perspective, les couleurs « Il a reçu le don de la lumière - l’amour et l’intelligence de la lumière montée des confins de la terre et de l’eau »
Suivons Sylvie Germain dans l’atelier. « Le rideau s’ouvre d’un grand coup d’aile marquetée sur la scène où oeuvre le peintre » le peintre est là « Il est le maître des couleurs et dicte à chacune son rôle dans le grand jeu du visible pour mieux en révéler la mission au sein de la dramaturgie de l’invisible »
Continuons la visite et approchons nous :
« Car c’est lui seul le peintre qui préside ici à la cérémonie des noces entre la poésie et la peinture, entre le chant et la lumières, entre la beauté et les couleurs, entre le visible et l’invisible »
S Germain nous emporte de l’atelier à la chambre, elle s’efface devant l' « Harmonie en bleu ardoise et ocre nuancé de roux et de rosé »
L’écrivain s’absente pour laisser place à un chant de lumière : « Les doigts égrènent des notes, des mots, des fleurs de dentelle, des gouttes de lait, des perles »
Mais elle peut aussi se pencher sur les cartes, compas en main et évoquer Spinoza « Le solitaire polisseur de verres d’optique, l’artisan philosophe dont la vision du monde et l’oeuvre qui en émane, font écho à celle de Vermeer : un écho de cristal, sec, net et limpide. »
C’est un parcours initiatique car « Vermeer ne raconte rien, ni narration, ni fable ni histoire. Il montre, réfléchit, il présente. Son oeuvre est une mise en miroir, sa peinture une vision. »
Laissez vous porter par les mots de Sylvie Germain, sobres, denses et par le génie de Vermeer dont la peinture est
« Un voyage dans l’immensité close au coeur de l’apparence, une lente dérive dans les remous de l’immobilité, un embarquement de l’instant dans l’absolu et pour l'éternité"
Bon voyage au pays des couleurs et de la lumière.