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  • Dans l'ombre de la lumière - Claude-Pujade Renaud

    L'amour dans l'ombre

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           Les ruines de Carthage © JEAN-PAUL GARCIN / PHOTONONSTOP

    J’ai déjà par deux fois chroniqué des livres de Claude Pujade-Renaud. Pour les deux ce fut un grand plaisir de lecture et tout naturellement j’ai acheté celui à qui vient de sortir.

    Fidèle à ses romans précédents l’auteur nous transporte ailleurs et loin dans le temps.

     

    Carthage aux alentours de l’an 400 après JC. Le monde romain vit ses dernières années, le monde chrétien s’est rapidement étendu, le monde païen se métamorphose, les croyances ont évoluées, de nouvelles sectes ont vu le jour, les chrétiens s’opposent entre eux. Le peuple hésite entre ses habitudes, ses certitudes et les promesses de la nouvelle religion.

    C’est une femme qui va prendre la parole, Elissa, une femme instruite, intelligente, encore belle. Elle vit près de Mégara (faubourg de Carthage ….vous vous rappelez ?) où elle pétrit l’argile pour gagner sa vie. Une rumeur va la ramener loin dans le temps, un évêque doit arriver d’Hippo Regius, un homme « tout feu tout flamme » et qui parait-il prêche bien.

     

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                   Saint Augustin - Palais du Latran

    Elissa le connait bien cet Augustinus, elle fut sa concubine pendant plus de quinze ans, elle fut la mère de son enfant. Tous deux appartenaient à la secte des manichéens.

    Liés par un amour fou, combien elle l’a aimé et admiré cet Augustinus qui « pouvait réciter à la suite plusieurs chants de l’Enéide ou un traité de Cicéron »

    Il l’a répudié pour un riche mariage, puis il s’est converti à la religion chrétienne sous la pression de Monnica sa mère, une mère aimante et inflexible et manipulatrice.

     

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                       La conversion de Saint Augustin - Fra Angelico

    C’est le portrait d’Elissa que nous dresse Claude-Pujade Renaud, une femme qui ne s’est jamais consolé de la perte d’Augustinus, qui a toujours suivi de loin son ambitieux compagnon, le début de sa célébrité, et aujourd’hui elle peut même le lire, chez Silvanus le scribe qui copie les discours, les sermons et lui permet d’entendre à nouveau la voix d’Augustinus à travers ses Confessions.

     

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             Benozzo Gozzoli. Chapelle Saint-Augustin. San Gimigniano.

     

    Un livre tout de passion. On passe du réel à l’imaginaire sans effort aucun, le tableau de cette période est très réussi, ce moment où comme le disait Paul Veyne « notre monde est devenu chrétien ».

     

    L’auteur a su parfaitement joué de l’absence totale de traces de la concubine d’Augustinus et elle en fait un portrait sensuel et vibrant mélangeant l’Histoire et leur histoire d’une belle écriture.

     

    Annie a également aimé ce livre.

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    Le livre : Dans l’ombre de la lumière - Claude Pujade-Renaud - Editions Actes Sud 

  • Bribes d'une île

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    « Paradis bien rude, certes, et stérile d’apparence, mais paradis pour celui qui sait regarder, jardin d’Eden au printemps lorsque dans toutes les fissures de la roche tranchante le miracle de la vie fait pousser des fleurs délicates et étranges. »

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    Falaises d'Aran : Dun Aengus

    « Paradis des oiseaux qui nichent dans les falaises l’abri des prédateurs depuis que le dernier renard de l’île a disparu comme par magie. »

     

    « Paradis de silence où l’on n’entend que le vient, l’océan et les cris des oiseaux, où l’on s’écoute surpris du rythme apaisé du coeur et de l’esprit. »

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    « Paradis de pierre, dur et si tendre à la fois qu’il tombe dans les plis des eaux »

    Le livre : Grain d’aran - Dominique Beugras - Editions La Bibliothèque

  • La Gloire de mon père

    gloire de mon père.jpgLa Gloire de mon père - Lu par Marcel Pagnol - Editions La Librairie sonore Frémeaux et associés
    « Je suis né dans la ville d'Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers » Lorsque la voix de Marcel Pagnol entame le récit de son enfance, c’est toute la Provence qui s’invite. Les plus beaux passages du livre sont dans toutes les mémoires : Joseph le petit instituteur si fier de son fils, l’amour filiale de Marcel pour Augustine la jolie couturière, l’oncle Jules fameux propriétaire du parc Borély, le déboutonnage de Tante Rose et surtout  surtout l’arrivée à la Bastide Neuve dressée au milieu d’un « désert de garrigues »

    Ecouter Pagnol lire « La Gloire de mon père » c’est pendant un moment être transporté au pays de l’enfance heureuse, retrouvé le petit Paul qui « abordait le soir dans son lit, la philosophie des Pieds Nickelés. » , c’est partir en escapade avec Lili des Bellons.
    Tous les personnages sont extraordinairement vivants auréolés des souvenirs de nos lectures, on ressent au fond de soi la fierté du fils pour son père bouliste amateur et on est impatient de refaire avec Joseph le magnifique doublé de bartavelles.

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    Un désert de garrigues

    Même si vous l’avez lu de nombreuses fois, laissez vous séduire par la voix de Pagnol qui dit Patrick Frémeaux  « nous révèle un imaginaire intemporel qui est l’un des plus beaux chants d’amour à la Provence de notre patrimoine littéraire; un véritable hymne à la vie devenu l’un des fleurons de la mémoire collective des Français de toutes générations."


    Retrouver le livre chez Bénédicte

  • bribes de champs et de grèves

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    « La nuit était douce, une belle nuit d'été, sans lune, mais scintillant des feux du ciel, embaumée de brise marine. La ville dormait, les lumières, l'une après l'autre, disparaissaient des fenêtres, les phares éloignés brillaient en taches rouges dans l'ombre qui sur nos têtes était bleue et piquée en mille endroits par les étoiles vacillantes et rayonnantes. On ne voyait pas la mer; on l'entendait, on la sentait, et les vagues se fouettant contre les remparts nous envoyaient des gouttes de leur écume par le large trou des mâchicoulis. »

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    « La marée baissait ; il fallait, pour passer, attendre le retrait des vagues. Nous les regardions venir. Elles écumaient dans les roches, à fleur d'eau, tourbillonnaient dans les creux, sautaient comme des écharpes qui s'envolent, retombaient en cascades et en perles, et dans un long balancement ramenaient à elles leur grande nappe verte. Quand une vague s'était retirée sur le sable, aussitôt les courants s'entrecroisaient en fuyant vers des niveaux plus bas »

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    « On avait retrouvé un homme perdu à la mer il y avait trois semaines ; on l’a apporté à l’église sur une charrette à boeufs. Il faisait presque nuit, quatre cierges aux coins du catafalque, enfant avec sa chandelle tenant la porte ouverte, clochettes des porteurs ; les femmes se sont mises au fond, les hommes au haut, plus près, ordre qui a été conservé au cimetière ; les femmes du reste en bien plus grande quantité. L’office fut court, tout le monde à genoux dans le cimetière sur la terre des tombes. Froid des soirs d’été, crépuscule vert, bonnets se levant au vent. »par les champs.jpg

     

    Le Livre : Par les champs et par les grèves - Gustave Flaubert - Maxime Ducamp - Editions de l’Aube

  • Le Démon de Saint Jérôme - Lucrèce Luciani

    Une auteure que j’ai apprécié, un éditeur qui mérite d’être connu, c’est pas mal non pour un tout petit livre.

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    Saint Jérôme - Leonello Spada 

    Même si depuis quelques temps j’ai un peu perdu mon envie de lire, il faut bien que j’avoue que j’ai le vice de la lecture, celui que Larbaud dénommait Ce vice impuni. 
    Sans vouloir faire de comparaison, je n’oserai pas, voilà un autre adepte de ce vice.

     

    Saint Jérôme, érudit absolu, lettré magnifique, était parmi ses contemporains une exception, celui qui a tout lu, tout absorbé et qui bientôt sera celui qui traduit.

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    Saint Jérôme   Albrecht Dûrer 

     « Jérôme lisait Cicéron le jour et Platon la nuit, les préférant au style négligé des livres saints »,  

    Et voilà le problème qui surgit, grand lecteur certes mais qui avait un préférence pour Cicéron plutôt que pour les écrits des livres saints c’est plutôt mal vu ça.

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    Saint Jérôme  - Simon Vouet

    « Jérôme n’en fait qu’à sa tête. Il lit ce qu’il veut, il écrit ce qu’il veut, de la satire à la caricature en passant par la polémique ou la dogmatique, dans une liberté totale et sans partage. »

     

    Il va rater d’un cheveu la tiare de Saint Pierre, voilà où mène la lecture !! Il aura sa traversée du désert qui l’emmènera à Bethléem. Mais comme on ne se refait pas il emporte Virgile avec lui.

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    Au désert - Lorenzo Lotto 

    Il faut dire que d’après Lucrèce Luciani, notre Jérôme était un rien ombrageux, colérique, préférant la solitude à ses contemporains, mettant toute sa hargne et sa passion dans ses lettres. Saint Augustin un de ses destinataires n’a pas vraiment apprécié.

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    D'irréductibles ennemis : Saint Augustin et Saint Jérôme 

    Pour l’époque Jérôme fait figure d’exception, il est trilingue et outre la latin qui est sa langue que l’on peut dire maternelle, il maitrise le grec et l’hébreu qu’il a apprit au prix d’efforts héroïques.
    Lucrèce Luciani dit de lui qu’il est « philosophe, rhéteur, grammairien, dialecticien »

    A la lire on peut ajouter qu’il était un polémiste opiniâtre, un styliste magnifique, un traducteur qui a laissé une trace indélébile avec sa traduction de la Bible.

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    Vu par Le Caravage

    « Chez Jérôme, la lecture engendre la lecture. Elle est en amont et en aval de lui, comme une eau qui l’entoure, le baigne, le pénètre et passe sans cesse dans le moulin de son esprit »

    Elle profite de cette sorte d’écrit biographique pour nous introduire dans la fabrique des livres de l’époque, le travail des copistes qui copient et recopient, une période nous dit-elle qui est comme « l’acte de naissance de la littérature occidentale ».

    J’ai découvert le rangement des livres , à plat ou vertical, la naissance des bibliothèques personnelles que l’on retrouvera chez Montaigne.

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    La bibliothèque d'Ivre de livres 

    Lucrèce Luciani à sa façon de ranger « Le rangement de ma bibliothèque c’est une longue guerre amoureuse, ceux qui enchantent, ceux qui procurent du plaisir, ceux que l’on peut oublier, ceux que l’on relira à coup sûr »

     

    Ce petit livre est à la fois érudit, drôle, impertinent, passionnant. D’une richesse qui vous embarque immédiatement vers cette naissance de l’écrit qui ne sera dépassée que par celle de l’imprimerie. C’est une ode à la passion de lire, aux livres, aux bibliothèques.

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    Vu par Antonello da Messina

    « Un lettré au milieu de ses livres qui lit et écrit comme il respire »

     

    Petit livre rare qui va trouver sa place naturellement dans ma bibliothèque.
    Et qu’on se le dise Saint Jérôme est le patron des traducteurs 

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    Le livre : Le Démon de Saint Jérôme - Lucrèce Luciani - Editions La Bibliothèque 

  • Une matinée chez le libraire - Carl Jacob Burckardt

    Liber, libraire, librairie........

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    Sur le thème de la librairie voici un petit livre que j’ai toujours gardé car il me réjouit.

     

    Imaginez deux amis flânant dans les rayons d’un bouquiniste, une vieille vieille librairie « Une boutique étroite et obscure où les livres s’entassaient des deux côtés, jusqu’au plafond. Ils occupaient aussi les longues tables branlantes et recouvraient le sol dans les coins. » 

     

    Le libraire « un petit homme âgé » s’approche à regrets car il a été contraint d’abandonné sa lecture.

    Là commence une conversation qui passe de Ronsard à Nietzsche, on vilipende Malherbe, le temps de s’extasier sur Racine et le libraire finit par poser la question : Qui êtes-vous ? 

    Et la réponse simple du client :  un poète allemand.

     

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                      Rainer Maria Rilke  © dessin de Christian Serrano

     

    Et voilà qu’arrive un autre client. Quelle guigne, mais non simplement la conversation s’élargie.

    Alors c’est l’effervescence et l’on saute allègrement de Villon à La Fontaine, Valéry et Hölderlin. On évalue les qualités des traductions.

    Parfois il y a dissension entre le poète, le libraire et le nouvel arrivant et cela donne lieu à des échanges enflammés. On finit pas se retrouver autour d’une poularde et d’une bouteille de champagne

    Un poète qui n'est autre que Rainer Maria Rilke, un historien, Monsieur Augustin le libraire et Lucien Herr bibliothécaire de l’Ecole Normale supérieure ……C’était dans le Paris de 1924. 

     

    Le livre de Carl Jacob Burckhardt a un charme certain et un peu suranné. Ce texte est complété par des « Souvenirs de Rainer Maria Rilke » 

     

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    Le livre : Une matinée chez le libraire - Carl Jacob Burckhardt - Editions l’Anabase 1994