Vers douze ans grâce à mon premier argent de poche, j’ai fait deux découvertes.
Je me suis acheté mon premier disque de musique classique : La Pastorale de Beethoven et j’ai admiré pour la première fois un tableau de Corot Souvenir de Mortefontaine qui illustrait la pochette du disque.
Un souvenir qui a perduré jusqu’à aujourd’hui alors que le disque est perdu.
Quand j’ai trouvé en librairie le petit livre de Françoise Ascal j’ai fait avec elle la même promenade sous le ciel de Corot que celle que j’avais faite à douze ans.
Camille Corot le batelier de Mortefontaine
Dans ce petit livre Françoise Ascal nous promène dans les pas de deux Camille.
En tout premier il y a Camille Corot dont elle est sensible à la peinture.
Un peintre qui aime revenir dans des lieux bénis, les bosquets, les sous-bois. Il aime par dessus tout les arbres, les feuilles.
Il est attiré par les rivières, les eaux calmes, les reflets dans l’eau, c’est son enfance de paysan qui parle là.
Camille Corto l'Etang de Ville d'Avray
Corot est un homme de carnets, il note beaucoup, il se répète comme sa représentation plusieurs fois répétée dans son oeuvre d’une femme lisant.
« Ainsi, regardant ta Liseuse au bord de l’eau, on ne voit au premier coup d’œil qu’un paysage vaporeux, gaze ou tulle. Herbes, frondaisons, ciels dans de sourdes tonalités dont on ne sait si elles vont se dissoudre avec la lumière matinale, ou s’intensifier pour rejoindre l’obscur. Rivière étale, sans ride. Pas de vent dans les branches. Quelques pâles reflets esquissés sur une eau sans vertige. »
Il dit « Pour bien entrer dans mes paysages, il faut au moins avoir la patience de laisser le brouillard se lever ; on n’y pénètre que peu à peu et, quand on y est, l’on doit s’y plaire. »
Homère et les bergers dans un paysage - C Corot Saint Lô Musée des Beaux Arts
« Rien n’est inutile, rien n’est à retrancher » dit Baudelaire de la peinture de Corot.
Mais Françoise Ascal insert dans son texte un autre Camille, un jeune homme mort à la guerre « foudroyé à dix-neuf ans, deux trous rouges au côté droit »
Ce jeune homme lié à sa famille semble arpenter les chemins du peintre.
« Vous auriez pu arpenter les mêmes terres, longer les mêmes rivières, graver vos initiales sur les mêmes écorces de frêne.» nous dit-elle.
Manifestement Françoise Ascal nourrit un penchant particulier pour le peintre et elle sait à merveille mêler les deux destins, l’émotion et la beauté sont là
Ce livre est une douce réflexion sur le temps qui passe, la mémoire, et la beauté de la peinture, un livre qui est un bel hommage et un objet poétique riche de lumière, de rêverie, une jolie méditation où comme le peintre en ses tableaux elle « y suggère la vie ».
Le livre : La Barque de l’aube - Françoise Ascal - Editions Arléa
Commentaires
J'aime Corot. C'est un peintre qui m'émeut en raison justement de cet effet de gaze qu'on trouve dans ses paysages.
Bon dimanche.
je crois que c'est cet effet qui m'a séduite en premier, j'étais très jeune et cette douceur voilée m'a emporté
J'aime Corot pour sa douceur, son calme, en un mot
pour sa "force tranquille" : ses tableaux italiens me font
presque pleurer de...beauté !
Je transmets immédiatement à une amie dont le grand-père
peignit aux côtés de Camille Corot...
Vous êtes, Dominique, une découvreuse de trésors !
c'est un bien petit trésor mais je reviendrai je crois sur Françoise Ascal qui m'a enchanté avec son journal
J'aime beaucoup la poésie de Françoise Ascal qui a publié des livres magnifiques chez de nombreux "petits" éditeurs....Merci Dominique de mettre en lumière cette belle écriture
je suis séduite aussi par son journal
Un beau voyage au milieu des paysages de Corot que j'apprécie beaucoup, et c'est bien vrai qu'il faut attendre que le brouillard se lève pour goûter pleinement ses magnifiques toiles.
Bonne journée
un peintre d'atmosphère que j'aime infiniment
Le livre propose des illustrations?
non pas ce livre là, j'ai un petit livre à côté sur Corot et puis le web dispense tout ce que l'on veut
Il est rare qu'à 12 ans on aime ces¡ paysages romantique, aux couleurs pâles, à l'atmosphère feutrée...ou alors tu l'étais, romantique ! Bravo en tout cas !
Moi j'ai commencé à apprécier ses peintures bien plus tard, quand la contemplation , l'admiration ont pris le pas sur l'action.
Magnifique billet, un tout grand merci.
je crois que j'étais romantique en effet et ces paysages et cette musique se sont imprimés durablement en moi , je crois que ma passion pour l'art et la musique doit dater de ce moment là
c'est quelque chose que je n'ai pas oublié et auquel je pense quand j'offre un livre à mes petits enfants et enfants
Corot est un peintre que je connais peu et comme rien ne vaut la contemplation "en vrai" d'un tableau, je vais attendre de pouvoir retourner dans les musées pour découvrir ce titre, que je garde donc dans mes carnets.
rien ne vaut la confrontation directe avec l'oeuvre mais l'éparpillement dans les musées rend la chose difficile même sans problème d'épidémie
Le plaisir de tes billets promenades. J'ai découvert Corot avec cette même peinture Souvenir de Mortefontaine.
je crois que c'est une des plus célèbres et elle orne des couvertures de livres ou de disques souvent
Lié à votre souvenir d'enfance, vous présentez bien cette méditation sur la peinture et la mémoire par Françoise Ascal. J'apprécie aussi la peinture de Corot.
le lien avec l'enfance est très fort pour moi, j'ai eu peu de souvenirs heureux et ils me sont donc très chers
Je regrette que tu n'aies pas pu t'acheter un Corot avec ton argent de poche ! Un peintre que j'aime beaucoup, si délicat, avec un sens de la couleur si raffiné. Une tache de rouge ou de blanc dans un grand paysage et tout est habité.
j'ai ce regret en effet comme j'ai le regret de n'avoir pas fait de voyage aux Pôles malgré toutes mes lectures d'enfant :-)
Je me souviens de mon disque de La symphonie pastorale quand j'étais ado et il me semble, effectivement, que c'était un paysage de Corot qui l'illustrait ? Peut-être, Souvenir de Mortefontaine, mais juste un autre format, et un détail.
nous avons peut être écouté la Pastorale en même temps toutes les deux
J'aime bien les livres de la collection Arléa, ce sont souvent de belles surprises. J'ai eu plusieurs fois l'occasion de voir des toiles de Corot, toujours avec intérêt. Mais à 12 ans, je ne suis pas sûre que j'aurais apprécié.
je crois que je ne comprenais pas tout mais c'était un peu instinctif, je n'avais personne pour me guider donc comme on le fait parfois en tant que lecteur, j'étais influencé par une image, une couleur, une atmosphère
J'ai mis quelque temps à découvrir l'univers de Corot, que je trouvais trop peu coloré au début. A présent, ses paysages d'arbres et d'eau m'enchantent - je note immédiatement ce petit livre qui me tente fort. Merci, Dominique & bonne fête en cette journée internationale des droits des femmes.
et bien en choisissant ce disque ce jour là j'ai fait valoir mes droits je crois
Souvent tu présentes des livres dans lesquels on a immédiatement envie de se plonger. Encore une fois celui-là me tente beaucoup.. Pourtant Corot n'est pas un peintre que je connais bien, mais c'est une façon de mieux le connaître.
c'est un petit livre riche sans être didactique, ce n'est pas un cours sur la peinture, c'est un objet de sensation et donc de plaisir et c'est comme ça que j'aime les livres sur l'art
attention il n'y a pas de reproductions
Merci Dominique pour cet article si bien illustré.
J'aime Corot et ce livre semble avoir une vraie originalité, celle de lier ainsi les destinées des deux Camille.
parfois lorsqu'un auteur mélange les genres je reste un peu en retrait, mais parfois c'est réussi comme ici et alors c'est un plaisir
Merci pour toutes ces promenades champêtres!
j'aime la campagne même si je n'ai plus hélas la possibilité d'y courir
Oh la jolie balade, la peinture de Corot m'émeut par sa douceur. Il y a ses paysages, lumineux et détaillés et ses femmes aux traits apaisés. Sa peinture offre des moments de calme propices à une méditation.
Ton histoire est belle, une émotion vécue à l'age de 12 ans et qui vient se rappeler à toi ainsi, c'est merveilleux. Je ne connais pas du tout cette auteure - une de plus ! - Merci Dominique, à bientôt. brigitte
une auteure dont je reparlerai c'est certain
la douceur est la sensation la plus forte que je garde de cette photo de la pochette du disque et cette sensation s'est durablement imprégnée dans mes yeux et mon coeur je crois