C’est toujours une aventure d’entrer dans un roman de Henry James. Après les Ambassadeurs Roderick Hudson et Washington Square j'ai repris contact avec le romancier des tourments du coeur, qui aime conduire son lecteur au fond des âmes mais par des tours et détours souvent longs, délicieux et mensongers.
Portrait de James ©Michel Maire
Pour ce roman Henry James nous gratifie d’une préface mais elle est tellement fouillée que l’éditeur très justement l’a reportée en fin de volume.
Si vous êtes prêt à vous embarquer pour 800 pages d’amours interdites, d’illusions perdues, d’amitiés tortueuses alors vous prendrez le chemin de Londres puis de Venise à la suite de James qui est par excellence le romancier de l’Italie.
Les personnages du film
Kate Croy est amoureuse de Merton Danser un jeune journaliste sans le sou, elle n’a aucune dote et sa famille lui cause bien des tourments. Sa tante, la redoutable Mme Lowder, a cette singularité que « son visage lorsqu’elle parlait, était comme une fenêtre éclairée dans la nuit, mais sur laquelle le silence immédiatement tirait les rideaux ». Elle lui cherche un parti convenable et si possible argenté.
Merton Densher n’entre aucunement dans les vues de tante Maud !
Milly Theale jeune et charmante américaine, à l'inverse elle « est riche de tout (...) elle possède la liberté, la fortune, une vive intelligence, le charme personnel, le don d’intéresser et de s’attacher les êtres. ».
« C’était un visage de jeune femme, merveilleusement dessiné, un buste, en robe splendide; un visage de teinte presque livide, d’une beauté triste et couronné d’une haute masse de cheveux, tirés en arrière, qui avaient dû, avant que le temps n’en atténuât la couleur, ressembler à ceux de Milly. »
Elle a fait connaissance avec Merton à Boston pour son journal et même si elle n’est pas prête à l’avouer, son envie d’Europe est sans doute liée à l’envie de revoir le jeune homme.
Elle part en Europe avec un chaperon bien intentionné Susan Stringham qui a des liens très anciens avec Mme Lowder et qui compte sur elle pour introduire Milly dans la bonne société londonienne, entendez par là la société où l’on peut trouver un possible mari. Kate et Milly deviennent amies proches.
Pour compléter le tableau il y a Lord Mark que l’on verrait bien fiancer avec Kate si celle ci ne s’obstinait pas à refuser ses avances.
Jusque là rien que de très classique, amoureux transis, coureurs de dote, jeune fille à marier et familles imposant leur volonté.
Mais Henry James sème quelques grains de sable qui vont gripper la machine, Milly la fraiche ingénue deviendra-t-elle victime ou imposera-t-elle ses choix ? les chassés croisés vont être multiples. L’auteur fait varier les tempos, le temps s’étire, apparaissent des sentiments moins nobles : cynisme, férocité des ambitions, manipulations subies ou consenties.
A Venise
Une lecture où il est bon de prendre son temps, de peser tous les changements, de suivre tous les méandres du récit. Ce qui couve là dessous c’est l’argent, son rôle, son pouvoir, les raffinements des complots, les démarches clandestines. James n’abat jamais ses cartes et nous laisse jusqu’au bout dans le doute.
Si vous aimez les explorations de l’âme humaine alors plongez dans ce roman dont on ressort enchanté.
Ah dernier détail, le titre fait référence à un psaume, je vous met sur la piste c’est le cinquante cinq.
Le livre : Les ailes de la colombe - Henry James - Traduit par Marie Tadié - Editions Gallimard Folio
Commentaires
Je suis allée sur internet pour chercher le psaume 55, j’ai eu la surprise de trouver un très joli texte, j’ai toujours eu du mal avec la Bible car on ne m’en a pas transmis la lecture mais parfois j’en lis des passages que je trouve poétique.
je suis comme toi mais les psaumes sauf ceux qui ont un accent guerrier, j'aime assez la poésie est souvent magnifique
Je ne l'ai pas encore lu, celui-ci.
Sans doute à mon avis l'un des romans les plus difficiles d'accès mais il vaut l'effort
Un jour un jour je le lirai! je n'en ai lu qu'un, qui ne m'avait plu qu'à moitié. (l'héroïne meurt de la malaria, oui, ça te dit quelque chose?)
Je suis allée voit ta référence, ah oui, les ailes de la colombe. J'ai lu il y a longtemps la 'traduction' de quelques psaumes par Clement Marot, un vrai délice
une mort par malaria ? ça ne me dit rien mais je n'ai pas lu tout Henry James
Celui là m'a plus mais il est difficile et il vaut mieux commencer par plus simple
par contre je ne connais pas les traductions de psaumes de Clément Marot ! A voir
Je n'arrive pas à lire James, je m'y ennuie, alors là, 800 pages .. Je ne crois pas avoir vu le film, les illustrations ne me rappellent rien.
le film est un peu ancien
il faut aime James pour lire ses gros romans mais par contre je te conseille Washington Square ou les papiers d'Aspern , ce n'est pas gros et très très lisible et magnifique
Moi aussi j'ai du mal avec Henry James et la société qu'il décrit. C'est vrai que le psaume 55 est un beau poème.
je n'ai pas du mal avec sa société car je crois qu'elle a un caractère très universaliste quant aux comportements humains même si en effet c'est une société de nantis un peu fermée et très collet monté
J'ai un peu "picoré" dans les oeuvres d'Henry James , la dernière fois c'était "Les Européens", que j'ai bien apprécié. C'est un auteur que j'aime beaucoup. Je vais donc un jour reprendre tout à zéro et lire, livre après livre, comme j'aime le faire. Bonne fin de dimanche Dominique.
C'est ce que je fais depuis maintenant quelques mois et c'est un grand plaisir de découvrir les romans jamais lus et de relire ceux qui m'avaient enthousiasmé
J'ai beaucoup aimé ma lecture de Les Ambassadeurs il y a deux ans environ, mais c'est sur qu'avec Henry James il faut prendre son temps et se concentrer... je me souviens de longues conversations dans lesquelles chacun s'acharnait a ne jamais dire ce qu'il voulait vraiment dire ... Un luxe d'écriture et de lecture.
j'ai beaucoup aimé les Ambassadeurs j'ai fait une chronique sur ce blog
il faut effectivement prendre son temps
on devient assez vite accro à James
Il me le faut !
j'ai beaucoup aimé même si ce n'est pas mon préféré
Pas encore lu ! Ton avis réchauffe mon lundi matin : que de beaux romans encore à découvrir !!
c'est moins drôle que Y Reza mais c'est vraiment un grand moment de littérature
800 pages, c'est énorme à première vue, mais je vois tout l’intérêt d'une lecture à emporter en voyage, explorer l'âme humaine et des contrées inconnues me semblent être un merveilleux programme... Merci Dominique, bises. brigitte
un roman qui exige du temps et un rien d'effort mais la récompense est belle
Il faut que je m'y mette. J'avais dit "à la retraite..." la retraite venue, je suis toujours aussi débordée de tentations de lecture; Pour 800 p il faut un bon moment!
bah il suffit de se jeter à l'eau
Ah voilà un auteur qui attend aussi la relecture, j'aime beaucoup me plonger dans ses romans touffus et lents, sans doute, mais si riches dans le rendu des personnages et des relations.
j'ai encore du plaisir devant moi avec plusieurs romans ou longues nouvelles jamais lues
Prendre le temps de lire ou relire Henry James.... Je n'ai pas lu celui-ci mais je crois en avoir vu une adaptation avec Isabelle Huppert....
Profitez bien de ce temps de relecture avec un auteur aussi talentueux.
je n'ai pas vu les films pour ma part
Je suppose que dans la postface, James explique que Milly lui a été inspirée par une cousine morte de la tuberculose, qu'il a tenu à lui rendre hommage par la beauté de l'art. Je n'ai jamais lu ce roman-ci, ni vu le film. Celui avec Isabelle Huppert est de Benoît Jacquot (1981).
oui en effet mais cette cousine si fameuse semble avoir inspiré plusieurs personnages, une dans Roderick Hudson, en partie le personnage de Portrait de Femme et Milly bien sûr
il semble qu'elle ait beaucoup compté pour lui