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Les Ambassadeurs - Henry James

Je vous propose un retour aux classiques

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L’occasion d’une nouvelle et magnifique traduction de jean Pavans, d’une belle édition, le tout associé à quelques jours de vacances et voilà l’occasion de savourer un des grands romans, avec La Coupe d’or et Les Ailes de la Colombre, d' Henry James  qu'il considérait comme son meilleur roman.

La trame du roman
Lewis Lambert Strether est un américain de cinquante cinq ans, issu de la meilleure société de Woollett petite ville de la côte est. Il vient en Europe à la demande expresse de Mme Newsome, une riche veuve, pour ramener à bon port Chadwick, son fils promis à un brillant avenir et à une non moins éclatante fortune, qui s’est laissé séduire par Paris et une femme qui ne peut être qu’une redoutable intrigante et  une vile corruptrice.
Strether compte pour parvenir à son but sur l’aide de son ami Waymarsh et de Maria Gostrey une américaine vivant en Europe et connaissant parfaitement la société et les moeurs parisiennes.
Lambert Strether tient beaucoup à la réussite de sa mission car à son retour, si le voyage est couronné de succès, il épousera Mme Newsome
Il parvient après bien des atermoiements à faire la connaissance de Madame de Vionnet, qui se révèle être bien différente du portrait qu’il avait imaginé. Ses rapports écrits prennent chaque soir le chemin de Woollett, ses propos volontairement rassurants " on avait imaginé des horreurs "  finalement ce n’est pas une mauvaise femme ! ses propos finissent par intriguer puis par contrarier fortement Mme Newsome et c’est bientôt un deuxième  train d’ambassadeurs qui prend le chemin de Paris pour rétablir la situation.

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Le Paris d'Henry James - Camille Pissaro - L'avenue de l'Opéra


Les personnages
Lambert Strether, directeur de revue littéraire à Woollett, revue qu’il signe mais dont Mme Newsome tient les finances bien serrées.
Il n’a vécu que pour son devoir, ne s’est jamais laissé emporté par ses sentiments, un homme raisonnable en tous points.
Maria Gostrey est d’une fine intelligence, un peu rouée et sachant écouter comme personne, elle se qualifie " d’agent de rapatriement " Mais elle n’est pas dénuée de charme et même de sensualité lorsqu’elle  reçoit Strether autour d’ " une petit table où les bougies allumées projetaient des ombres rosées "
Chadwick est un jeune homme " brun, massif et vigoureux" plein de charme, de prévenance et de distinction et prêt, on en jurerait, à obéir en tout à Strether.  Il va suffire à se dernier de parler d’une voix ferme pour que tout rentre dans l’ordre. Mais il se révèle avoir " le comportement, l’allure et les propos d’un homme assez pesamment, peut-être même un peu sombrement, mais néanmoins fondamentalement et confortablement libre". Ce qui ne fait pas l'affaire de Lambert Strether
Enfin, enfin il y a Mme de Vionnet , la femme, qui donne " une impression de légèreté de de transparence "  qui est "extrêmement blonde"  merveilleusement aimable "magnifique — Strether fit une pause —  le mari est mort ?  — Mon Dieu non ! Vivant "  Tout est dit !.

Paris est le dernier personnage du roman, Strether est conquis " Il descendit au soleil la rue de la Paix et, traversant les Tuileries et la Seine, il s’accorda plus d’une fois — comme avec une soudaine détermination — un arrêt devant les bouquinistes de l’autre rive."
Il est littéralement absorbé par Paris, pour la première fois il vit "Dans les jardins du Luxembourg, il s’arrêta ; là du moins il trouva son recoin, et là, sur une chaise de louage en face de quoi les terrasses, les allées, les fontaines, les trouées, les petits arbustes en pots verts, les petites femmes en bonnets blancs et les petites filles piailleuses composaient un tableau ensoleillé, il passa une heure durant laquelle la coupe de ses impressions sembla vraiment déborder."
Il va même (magnifique chapitre XII) s’aventurer hors de Paris, au bord de l’eau, dans une guinguette qui pourrait appartenir à un tableau de Monet, de Pissaro ou de Renoir. A nouveau il va jouir d’un bien être inconnu jusqu’alors "La confiance qui s’était établie en lui s’intensifia avec le clapotis de l’eau, les reflets en surface, le bruissement des roseaux sur l’autre rive, la petite fraîcheur diffuse et le léger balencement des deux barques arrimées à un embarcadère sommaire tout proche."

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Claude Monet - La Grenouillère

L’art d’Henry James est totalement envoûtant, la finesse des portraits psychologiques, le choix du monologue,  l’ambiguïté qu’il entretient tout au long du roman, la sensation permanente pour le lecteur d’être proche de comprendre les sentiments, les émotions des personnages.
L’opposition entre le monde neuf de l’Amérique et la civilisation policée de la vieille Europe est superbement rendue, James parle à propos de l’expérience de son héros de " profond chaos émotionnel " provoqué par le séjour parisien. Paris est une révélation pour Strether, à l’égal de James lui-même, son trouble intérieur va le faire basculer du côté de Chadwick, de Mme de Vionnet, de Paris.

La lecture n’est pas toujours aisée, Henry James aime les phrases à tiroirs, les contournements, les expressions précieuses. Il faut apprivoiser cette langue et ne pas se presser. James aime les évocations plutôt que les dévoilements, il aime laisser le lecteur dans l’incertitude. A travers le personnage de Strether le lecteur mesure à quel point sa perspicacité est prise en défaut. Avec quel art l'auteur parvient à laisser entendre le changement de point de vue du héros, arrivé pour "pourfendre" le vice et qui se rallie au " Carpe Diem" des anciens. Une belle et exigeante lecture.

Faites une place à ce livre dans votre bibliothèque


Le Livre : Les ambassadeurs - Henry James - Traduction et préface de Jean Pavans - Editions Le Bruit du temps- 2010
En fin de volume : Notes préparatoires de Henry James et préface de celui-ci à l’édition de 1909.

 



Commentaires

  • Tu proposes un "retour"aux classiques : mais parmi tes visiteurs, y en a-t'il qui auraient osé délaisser totalement les classiques? Je veux des noms! ^_^
    Quant à James, là, je devrais le lire, je sais, j'ai du mal avec lui... Ces ambassadeurs, peut être?

  • @ Keisha : il m'arrive de me laisser séduire par des nouveautés qui finalement se révèlent décevantes, avec ce genre de livre on sait où on va et on est certain de n'être pas déçu

  • Je n'ai lu que "portrait de femme" de lui et j'avais adoré, pourquoi pas celui-ci alors...

  • @ Hélène : Portrait de Femmes est le premier roman d'Henry James que j'ai lu, il m'avait donné envie de lire les autres

  • Avec cette course aux nouveautés, notamment en bibliothèque, je ne prends plus le temps de lire de "classiques" (sauf un peu de Proust de temps en temps...) et je le regrette !!!
    En tout cas tu me donnes (comme souvent) envie de lire ce livre :-)

  • @ Cathe : j'aime faire des poses de temps en temps et ce type de lecture est parfait avec plusieurs jours de vacances on peut savourer en ayant la tête libre

  • Dominique, votre billet m'a fait aussitôt bondir de ma chaise pour vérifier si "Les Ambassadeurs" étaient bien dans ma bibliothèque. Je me promets de rouvrir cette édition "Bouquins" pour une nouvelle plongée dans l'univers de James, exigeant, oui, mais fascinant quand on entre dans son rythme, comme dans un autre temps.

  • @ Tania : c'est parce que j'avais ce livre tout décollé en collection 10/18 que je me suis décidé pour celui là, je ne regrette pas car la traduction est irréprochable et la préface et les notes préparatoires sont passionnantes

  • Heureuse de lire votre bel exposé sur ce livre que je ne devrais pas tarder à recevoir. J'ai hâte de me plonger dans sa lecture surtout après vous avoir lu.
    J'ai eu envie de lire Henry James après avoir lu "Le club des incorrigibles optimistes" de Guenassia où Michel Marini, lecteur compulsif, lit "Portrait de femme" en marchant dans le quartier latin et en cite de nombreux passages. J'ai beaucoup aimé Portrait de femme , moins Les ailes de la colombe.
    Bonne journée et bonnes lectures

  • @ Nadejda : j'aime à peu près tout mais j'ai vraiment des préférés , Portrait de Femmes, Whashington Square et les Ambassadeurs
    Je suis comme vous j'aime moins ( mais j'aime ) les Ailes de la Colombe

  • Je n'ai fait qu'une tentative, ratée, avec Henry James (ce que savait Maisie). C'est peut-être le moment de refaire un essai.

  • @ Aifelle : Pour commencer je trouve qu'il y a un petit roman ou grande nouvelle, comme on préfére, qui est très agréable et qui permet d'entrer dans l'univers d'Henry James : Les papiers d'Aspern
    Ensuite Portrait de Femme et Washington Square (celui là je suis certaine qu'il te plairait )
    Ensuite lorsque l'on a apprivoiser l'écriture : les grands romans
    Celui ci m'a posé des problèmes sur les 10 ou 15 premières pages, j'ai lu, relu, et petit à petit .....

  • Un petit retour aux classiques ne fait jamais de mal. Il m'arrive assez régulièrement de m'y replonger. Et tu t'en doutes, voir tous ces tableaux me fait très plaisir.

  • @ Dimitri : je n'ai pas résisté au plaisir des tableaux, James dans certaines parties du livre à des descriptions magnifiques

  • Ton billet est vraiment intéressant! J'ai plusieurs livres de Henry James en attente de lecture. Il faut vraiment que je m'y mette! Celui-ci, en plus, m'interpelle beaucoup!

  • @ Allie : c'est un magnifique auteur, parfois déroutant mais il faut persévérer cela vaut la peine

  • Je pensais lire tout prochainement Le tour d'écrou, en vo en plus. J'ai souvent entendu que Henry James était un auteur compliqué à appréhender, j'espère cependant être aussi séduite que toi pour ensuite enchainer sur ces ambassadeurs...

  • @ Zarline : Le tour d'écrou en VO : chapeau bas
    je n'aime que moyennent les nouvelles mais "le tour d'écrou' ou 'la bête dans le tapis" sont des chef d'oeuvres

  • Quel bon souvenir de lecture ...ça date un peu mais je me souviens qu'il m'avait beaucoup plu !

  • @ Malika : c'est ma deuxième lecture de ce roman et j'avais aimé, mais cette relecture m'a vraiment enchanté et mon plaisir a été plus aigu

  • Curieuse coïncidence ! Je suis en train de relire "Les ambassadeurs" dans cette nouvelle traduction. Le charme est toujours aussi grand. Elle met en parfaite valeur ce que dit l´un des personnages : "Le plus sage d´entre nous peut-il voir (en autrui) davantage qu´une belle apparence ?" (page 202)

    Bonne lecture ou relecture

  • @ BOL : je ne crois pas aux coincidences dans ce cas, nous avons plusieurs intérêts communs je crois, j'ai eu un grand plaisir à relire ce roman, et la traduction est vraiment de grande qualité

  • @ BOL : nous avons bien des lectures communes ou intérêts communs, j'espère que vous y prenez autant de plaisir, je dois dire que j'ai abandonné les personnages à regret à la fin du livre, j'aurais bien passer encore un peu de temps avec eux

  • J'avais été un peu échaudée par Ce que savait Maisie, et depuis je n'ai pas lu James. Mais bon ce billet donne envie, il augure peut-être d'une nouvelle tentative ...

  • @ Freude : Ce que disait Maisie n'est pas le meilleur James à mon avis, lis ce que j'ai proposé à Aifelle, il me semble que c'est une bonne façon de rentrer dans l'oeuvre de James

  • Quelle bonne idée Dominique
    J'aime beaucoup Henry James
    Le dernier que j'a relu était Les Papiers de Jeffrey Aspern.
    Peut-être allez-vous pouvoir m'aider:
    Cela fait des jours que je cherche le titre d'un roman assez récent qui du reste m"avait assez plus inspiré de Portrait de Femme
    Mais peut-être que je confonds certaines choses, ce n'est pas pour rien que l'on me surnomme Aloïs!!!
    Bonne journée

  • @ autourdupuits: hélas hélas comme ça là je ne trouve rien mais si c'est un roman français je ne pourrais pas répondre car j'en lis peu
    mais dans les lecteurs de ce blog peut être cela dira quelque chose à quelqu'un

    Les papiers d'Aspern est de mes préférés même s'il a un côté un peu léger, le fait qu'il se passe à Venise y est sûrement pour quelque chose

  • J'ai lu plusieurs livres de cet auteur qui est un de mes préférés. Le dernier en date est justement "Les Ambassadeurs" mais c'était avant le blog et en un sens j'en suis bien contente car réussir comme toi un billet sur un livre aussi dense me semble difficile! N'empêche! J'ai bien envie d'en relire quelques pages, rien que pour le plaisir!

  • @ Mango : je vois que la lecture des billets de blogs te fait le même effet qu'à moi, une furieuse envie de relire un livre : c'est terrible

  • Je n'ai pas réussi à lire "La Coupe d'or", j'ai dû abandonner à la moitié bien que je connaisse l'histoire,(superbe film!) je l'ai trouvé difficile à lire..et je n'ai pas lu "Les Ailes de la Colombe"!
    Curieusement, j'ai adoré "Ce que savait Maisy" bien qu'il soit difficile aussi et bien sûr, il y a les livres de sa première période qui sont faciles à lire, comme "Washington Square" et "Portrait de Femme" que j'ai adorés, j'ai deux billets prêts à ce sujet!
    Je m'inscris à ta newsletter!
    Bisous

  • @ Veronique : je n'ai pas de newsletter mais je serai ravie si tu viens régulièrement sur ce blog
    James est un auteur qui n'est pas facile à aborder, chacun apprécie ce qui lui parle le plus, pour ma part la Coupe d'Or n'est pas mon roman favori même si comme toi j'ai aimé le film

  • J'ai relu recement As pupilas do Senhor Reitor (Les pupilles du doyen), un classique de la langue portugaise écrit par Julio Dinis en 1860. Malheureusement je ne sais pas si'il a été traduit en français ou en anglais.

    Est-ce que cela compte?...

    Bisous et une bonne année a tous les sympathiques lectrices et lecteurs de ton blog.

  • @ Armando : encore un effort à faire pour la traduction de classiques étrangers, Julio Dinis n'est pas traduit en français ...

  • Merci, Dominique, pour cette note sur un roman un peu difficile d'accès du "Proust américain. Quand on fait l'effort d'en poursuivre la lecture, on se passionne pour les études psychologiques et on se laisse prendre au charme des descriptions. J'aime beaucoup cette définition d'André Maurois : " Sous l'esthète déraciné nous retrouvons le puritain mystique de la Nouvelle Angleterre."

  • @ Catheau : je ne connaissais pas cette phrase d'André Maurois, Esthète c'est certain et puritain sans doute ses héros sont fortement soumis à la morale du temps

  • Vile tentatrice qui me remet en mémoire "Les Ambassadeurs" de ce très cher Henry James que j'apprécie par-dessus tout ! Il est dans ma PAL et attend patiemment d'être lu ... Il faudra encore que je patiente un peu, car je veux prendre le temps de profiter de son écriture et voyager avec l'auteur et ses personnages dans une époque de plus en plus éloignée de notre actualité !

  • @ Nanne : Que je suis contente de te retrouver ici, tes visites sont toujours intéressantes, j'ai profité de cette nouvelle édition pour me replonger dans Henry James et ce fut un réel bonheur

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