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Quand les lumières s'éteignent - Erika Mann

Taire ou dénoncer : paroles d'exil

 

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« La vie dans notre ville suivait son cours. La vieille place du marché aux maisons colorées encerclant la statue équestre,n’avait pas changé au cours des siècles. Au visiteur de passage s’offrait un tableau paisible et envoûtant. »

 

La guerre n’a pas encore éclatée, imaginons un touriste se promenant dans une petite ville riante, proprette, fleurie, une petite ville disons ...de Bavière. Un étranger qui la visite la trouverait pimpante, une ville où il fait bon vivre, « seuls les drapeaux rouges bruissaient dans le vent ».Ce n’est pas tout à fait une ville comme les autres. 

 

C’est le premier récit du livre qu’ Erika Mann écrivit en 1940.

Comment faire comprendre, expliquer, dénoncer ce qu’est devenu son pays sous la botte nazie ? Erika Mann va tenter de le faire à travers une dizaine de récits qui vont petit à petit passer de la douceur trompeuse, à l’inquiétude, à l’incompréhension, à la peur jusqu’à la terreur pure.

 

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                                 1935 Congrès du parti nazi à Nuremberg

 

Que va faire le patron d’une usine qui découvre que sa secrétaire, dont il est tombé amoureux, est à moitie juive ?

Pouvait-on imaginer qu’un paysan soit arrêté parce que dans le gosier de ses poules on a trouvé de l’orge, nourriture interdite par le régime en place, cela pourrait prêté à sourire si ...

Quand la bêtise s’en mêle une jeune fille est poussé au suicide par les ragots....

Que penser de cet homme qui la nuit falsifie ses livres de comptes non pour cacher des bénéfices mais au contraire pour enfler son chiffre d’affaire par crainte de voir son entreprise désignée comme inutile. 

 

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"De jeunes SS, sanglés dans leurs uniformes élégants,

défilaient dans les rues en ordre parfait"

 

Pas de grand plaidoyer, c’est à travers des scènes de la vie quotidienne d’une ville sans nom que l’on voit petit à petit se mettre en place le système qui broie les individus, qui les rend lâches, qui les pousse à l’indifférence coupable ou à la résistance héroïque. La délation devient la règle, la bêtise est récompensée, 

Pasteur, professeur d’université, médecin, tous les citoyens sont soumis au même dilemme, sont tentés par la même lâcheté.

 

Une préface et une post-face présentent très bien les circonstances dans lesquelles fut écrit ce livre, le parcours de son édition. Il est traduit pour la première fois en français.

 

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Le livre : Quand les lumières s’éteignent - Erika Mann - Traduit par Danielle Risterucci-Roudnicky - Editions Grasset

 

erika-mann2.jpgL’auteur : Erika Mann en 1933 choisit avec son frère Klaus et son père Thomas Mann, de fuir l’Allemagne. La famille trouve refuge en Suisse puis aux Etats-Unis. Toute sa vie Erika Mann parcourera le monde comme reporter de guerre.  

Commentaires

  • Encore une pépite chez toi... le première photo est fascinante...le phénomène de foule et de masse devait jouer à plein...
    Tu as vu cette photo où dans un rassemblement il y a un homme qui ne fait pas le salut nazi?

  • @ Keisha : les photos de foule en délire sont toujours fascinantes et effrayantes, j'ai lu un essai historique sur "l'opinion allemande sous le nazisme" de Ian Kershaw , c'est tout à fait passionnant de voir la manipulation de l'opinion et il est bon de s'en rappeler !!!

  • Quand on voit ces images d'archives, elles font toujours aussi peur et constituent toujours une énigme. Les enfants Mann n'ont pas manqué de courage et de lucidité, je note ce recueil de nouvelles.

  • @ Aifelle : La fuite, l'exil ont été difficiles mais j'aime cette volonté de continuer à parler ensuite, l'un comme l'autre ont écrit des choses très intéressantes sur cette période

  • Le titre du livre est si parlant: lumières qui s' éteignent, celles de l'âme des gens dont elle parle, celles des couvre-feu sûrement aussi....l'horreur s'installe.
    Bonne journée Dominique.

  • @ colo : j'ai apprécié ces courts récits car ils ont un ton très modéré presque froid qui les rend encore plus efficaces

  • Avec son frère Klaus, Erika Mann quitte l'Europe en 1936, ils étaient "comme des jumeaux". Je n'ai jamais rien lu d'elle, aussi ce livre m'intéresse beaucoup.

  • @ Tania : c'est aussi ma première lecture d'erika Mann, j'ai écouté une émission littéraire il y a un an ou deux à son propos et du coup j'ai repéré ce livre lors de cette sortie

  • J'ai lu des nouvelles de Klaus Mann, aussi suis-je intéressée par ce livre... je note !

  • @ Kathel : ces nouvelles sont excellentes et servent parfaitement le propos d'Erika Mann, une seule est un peu plus "technique" et explique un peu la vie économique sous le reich

  • J'ai lu "le tournant" beau journal de Klaus Mann son frère où l'on suit bien la montée du nazisme mais rien d'elle alors je retiens celui-là.

  • @ Nadejda : Le tournant est un livre tout à fait passionnant pour comprendre la montée du nazisme et ensuite la vie en exil, ces nouvelles là sont centrées uniquement sur la vie quotidienne sous le III Reich

  • Incroyable effectivement cette photo de 1935 représentant la foule !!! ça fait froid dans le dos tout cela, je crains au plus profond de moi ce tissage insidieux de la bêtise et de la méchanceté. Souhaitons que la lumière reste présente pour éclairer le cœur des hommes ! Je note moi-aussi ce livre Dominique, merci. Bises. brigitte

  • @ Plumes d'Anges : cette photo est extraordinairement parlante et à elle seule vaut bien des explications

  • En parallèle :
    - Klaus Mann, "Contre la barbarie, 1925-1948", Phébus.
    http://motsaiques.blogspot.com/2009/03/p-95-la-resistance-de-klaus-mann-face.html

  • @ JEA : merci de votre lien, tous les lecteurs intéressés pourront aller compléter leurs informations

  • Je n'ai rien lu d'elle.
    J'ai lu Mort à Venise écrit par son père par contre.

    La coïncidence j'écoutais cette nuit en podcast l'interview de Marceline Loridan Ivens pour son livre Ma vie Balagan que j'avais lu à sa sortie
    Si tu ne l'as pas lu je te le conseille.
    Surprenant la vitalité de cette dame à plus de 80 ans après tout ce qu'elle a vécu

    Bonne fin de semaine

  • @ autour du puits : chouette une référence, c'est ce que j'aime ici, sauter de livre en livre, je vais pêcher de l'info sur ce livre tout de suite

  • @ autour du puits : chouette une référence, c'est ce que j'aime ici, sauter de livre en livre, je vais pêcher de l'info sur ce livre tout de suite

  • @ autour du puits : sitôt dit sitôt fait, le livre est indisponible à ce jour mais présent dans ma médiathèque !!

  • L'histoire de la famille Mann est fascinante.Ces graves questions m'ont toujours passionné.Quand s'éteignent les lumières l'homme est-il capable de se regarder en face?

  • @ Eeguab : une famille hors du commun en effet

  • @ Enitram : si l'expression n'était pas aussi connotée je dirais : Le choc des photos

  • voici un livre qui m'intéresse... Justement, j'ai vu récemment un documentaire sur arte "white terror" sur la recrudescence du nazisme et les mouvements néo-nazi russes et les extrémistes américains... Ca fait froid dans le dos...

  • @ maggie : nous avons regardé le même docu !! les nouvelles d'Erika Mann sont très efficaces car elles montrent parfaitement la montée de la peur, la montée de l'oppression avec des riens, des petites choses au début qui endorment parfois la méfiance

  • Quand la mort est certaine seule deux chemins se présentent la lâcheté ou le courage. Il n'y a pas de troisième.
    Je retiens ce titre que je vais me procurer bientôt.

  • @ Armando : oui c'est bien cela et j'avoue me réjouir de n'avoir jamais eu à faire ce choix là

  • Je vais prendre note de ce livre. J'ai eu des frissons d'effroi dans le dos en découvrant la photo du congrès... Bon dimanche Dominique !

  • @ Florinette : oui c'est glaçant

  • Ionesco, dans Rhinocéros, évoque aussi très bien, à sa façon , ce phénomène de foule et de contagion des idées extrémistes chez des populations paisibles jusque là. Ceux qui résistent à la métamorphose sont rares, très isolés et dérangeants, alors on les traque. Terrible!

  • @ Mango : je ne connais pas Rhinocéros et je n'en connaissais pas le sujet , je vais le lire, merci à toi

  • Il est sur mon étagère... Rien à voir ou presque, je viens de terminer les chroniques de jerusalem de delisle. étonnant, déroutant, affligeant... une grande bd !

  • J'ai compris que JEA, que je visite de temps à autre avec plaisir, est une référence sur ce sujet.
    L'étroite intrication entre stratégies de pouvoir et psychologie des foules conduisent à à des situations qui nous dépassent. A posteriori l'histoire peut sembler explicable mais contrôler mieux celle que nous vivons pour éviter le pire reste un défi que l'humanité est loin d'avoir réalisé.

  • @ JEA : Toujours difficile de savoir dans les mouvements dits spontanés quelle est la part de la spontanéïté réelle et la part de manipulation, comment peuvent être amplifié à des fins politiques, partisanes, électoralistes des expressions normales d'une population ? comme tu le dis un défi !

  • @ Christw : sur ma lancée je t'ai mis la mauvaise étiquette , pardon !

  • @ Violette : merci, la lecture vaut la peine vraiment !

  • je ne connaissais pas je vais le mettre au début de ma liste, longue très longue trop longue pour mes nuits trop courtes
    Luocine

  • je ne connaissais pas je vais le mettre au début de ma liste, longue très longue trop longue pour mes nuits trop courtes
    Luocine

  • @ Luocine : ah bon tu fais autre chose que lire la nuit ?

  • Je note ce livre.

    Justement je lisais quelques lettres de Stephan Zweig dirigées à sa première femme Friderike dans ce petit livre : el misterio de la creación artística (le mystère de la création artistique. Stephan Zweig) Ed : sequitur.

    Titre original : Das Geheimniss des künstlerischen Scaffens. Williams Verlag. Zurich.
    pour celles ou ceux qui seraient intéressés. Peut-être existe-t-il en français ?

    Je disais donc que j´étais en train de lire ces quelques lettres dont voici un extrait ; il commentait ses conférences en Argentine et notait :
    "Tout aurait pu me causer satisfaction, mais malheureusement ma joie s´éloigne (...). Le suicide de Ernst Weiss má bien affecté, c´était un si bon ami (...). Toujours les plus intègres, les meilleurs ! A tout cela vient s´ajouter la nouvelle de l´alliance de la Russie et de l´Allemagne... Ce qui nous attend !
    Je crois que je ne reviendrai jamais dans cette Europe et tout ce que j´ai perdu, mes livres et surtout mon Balzac... (...)

  • @ Alba : merci de ce généreux commentaire, Zweig a beaucoup souffert de la montée du nazisme effectivement, ses "Souvenirs" en témoignent par contre comme le montre ses biographes il n'a jamais vraiment pris la parole pour dénoncer, il choisit l'exil mais sans vraiement s'exprimer.

  • @ Anis : merci

  • Le livre a l'air intéressant dans cette manière d'aborder l'Histoire par la petite histoire! Quant à cette adhésion massive d'une foule autour de Hitler, cela fait froid dans le dos. Chaque fois que l'on essaie de nous manipuler, (ne serait-ce qu'aux infos, ça arrive tout le temps) j'y pense et je me dis qu'il est difficile de rester libre!

  • @ ClaudiaLucia : une seule nouvelle a un côté un peu plus didactique mais toutes sont intéressantes et certaines émouvantes

  • J'aime beaucoup quand les grands problèmes sont saisis dans le prisme du quotidien. Cela permet aussi de s'interroger sur tout ce que nous avons tendance à trouver normal, aujourd'hui... Nous passons à côté des SDF, les propos racistes font partie du paysage, les expulsions de Roms ne nous empêchent pas de dormir...
    Un tel livre nous appelle à la vigilance. Merci !

  • @ Annie : un livre qui ne se démode pas même si les problèmes actuels n'ont pas du tout la même coloration mais effectivement cela oblige à la vigilance

  • Bonsoir Dominique, après le père et le fils, voici la fille et soeur dont je connaissais le nom mais je ne savais pas qu'elle avait aussi écrit. Ces récits ont l'air émouvant. Je l'avais repéré chez un libraire. Je pense bien le lire un jour. Merci beaucoup de ce conseil. Bonne soirée.

  • la fille mérite la même attention que le reste de la famille !!

  • d’abord bravo pour les infos. Je m’offre la liberté de twitter ce lien. Je reviendrai lire vos messages avec plaisir sur votre blog et je l’ajoute à mes favoris.

  • J'ai lu ce livre pendant l'été. Les histoires racontées ne laissent plus le moindre doute sur l'horreur du nazisme.

  • Suite à l'article du jour "brulures d'enfance", j arrive sur la présentation du livre d'Erika Mann, et j'envisage de le lire...
    et j'ai été passionnée par l'autobiographie (un peu enjolivée ?) et surtout les carnets de son frère Klaus Mann;
    Quels destins que ceux de cette famille.

  • Suite à l'article du jour "brulures d'enfance", j arrive sur la présentation du livre d'Erika Mann, et j'envisage de le lire...
    et j'ai été passionnée par l'autobiographie (un peu enjolivée ?) et surtout les carnets de son frère Klaus Mann;
    Quels destins que ceux de cette famille.

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