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Littérature canadienne - Page 2

  • Le poids des secrets - Aki Shimazaki

    le poidsdessecrets.gifLe poids des secrets - Aki Shimazaki - Editions Actes Sud Babel
    Chacun des cinq tomes de cette série porte un nom différent, tous un peu mystérieux ce qui ajoute à l’atmosphère de mystère et de secret de ce récit.
    Bien que l’auteure soit Canadienne d’adoption c’est bien le Japon le centre de ses romans, le Japon avec ses codes, ses traditions et son histoire.
    Par un tissage savant et sensible l’auteure lie l’histoire d’un pays à l’histoire d’une famille, elle trouve cinq façons de la raconter et de faire appel à la mémoire, cinq mensonges aussi et pour le lecteur cinq regards portés pudiques et émouvants.

    Tout commence lors d’un tremblement de terre et par le choix que fait une femme de changer de nom et de nationalité, le temps passe et nous assistons à une adoption, à un adultère, à un amour interdit entre deux adolescents, à la perte d’un frère, d’un père, au terrible besoin de faire justice sois-même devant une trahison inacceptable.
    A travers le destin et les souvenirs de Mariko, Yukio, Tsubaki l’auteure explore les sentiments de perte liés à l’exil, la souffrance engendrée par la quête des origines, le racisme ordinaire avec son côté irrationnel mais aussi la fidélité par delà le temps illustrée très poétiquement par un coquillage.

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    Tout l’art de Aki Shimazaki réside dans ces changements de perspectives, le personnage central est différent à chaque roman, un même événement est vu ainsi par un personnage jeune puis par une femme âgée, par un homme puis par une femme, au fil des romans le tissu du récit s’enrichit et prends des reflets différents.
    J’ai aimé ces récits et j’ai apprécié l’art de Aki Shimazaki pour restituer en filigrane l’histoire de son pays, y compris les épisodes les plus douloureux comme la destruction de Nagasaki et les plus honteux comme la chasse aux Coréens installés au Japon.

    Bientôt la fête des mères ce coffret est une jolie idée de cadeau

    Vous pouvez trouver sur les blogs un billet pour chaque tome, chez Aifelle par exemple mais chez bien d’autres car cette série a connu un grand succès.

  • L'Enigme du retour - Dany Laferrière

    enigme.gifL’Enigme du retour - Dany Laferrière - Editions Grasset
    Un long récit mêlant poésie et prose comme si l’auteur ne pouvait faire le choix entre ces deux modes d’écriture, comme il ne peut faire le choix entre sa terre natale et son lieu d’exil.  C’est ainsi que Dany Laferrière met en mots l’indicible : la douleur de l’exil et  la volonté de se dire à nouveau "chez soi "
    A vingt ans d’intervalle son père et lui ont quitté Haïti, ont échangé la splendeur des couleurs pour le froid et le vide de l’exil. Vingt années durant l’auteur a été hanté par l’absence de ce père parti sans espoir de retour.
    A son tour lui aussi fait le choix du départ, laissant mère, soeur, amis.

     

     

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    Les femmes de Haïti sont celles qui restent

     

    Il n’y a plus de famille, un père aux Etats-Unis, un fils au Canada, la famille éclatée, dispersée.
    C’est son père dont " La mort expire dans une blanche mare de silence " (Aimé Césaire)  va provoquer le retour vers la terre d’origine, vers le bruit, les couleurs, les odeurs de la terre natale.
    C’est un retour difficile. Il reprend possession des lieux, il reconnait les rues, les bruits, la vitalité paradoxale de son île " Si on meurt plus vite qu’ailleurs, la vie est ici plus intense " C’est son pays et il y est comme un étranger. Sa soeur est restée, c’est sa blessure secrète :
    " Encore plus secrète que ma mère.
    A la voir toujours souriante on n’imaginerait pas
    qu’elle vit dans un pays ravagé par une dictature
    qui ressemble à un cyclone
    qui n’aurait pas quitté l’île pendant vingt ans "

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    Ce roman de l’identité est magnifique et terrible, le fantôme du père est partout présent, les changements sont profonds dans l'île mais la pauvreté, la faim, la peur sont toujours là.

    De brefs tableaux, croqués sur le vif, de la vie haïtienne, un poignant constat d’échec "Un fleuve de douleurs dans lequel on se noie en riant." et aussi " Les trois quarts des gens que j’ai connus sont déjà morts (...) Ils vont si vite vers la mort qu’on ne devrait pas parler d’espérance de vie mais plutôt d’espérance de mort."

    Un roman qui est comme un cri et qui devrait trouver place dans votre bibliothèque

    D'autres avis :    Chez AnnDeKerbu sibylline Bénédicte Luocine

    Une interview que m'a fait découvrir Colo

    Le blog Encres Noires avec une interview de Dany Laferrière

  • Les Saisons de la solitude - Joseph Boyden

    Les Saisons de la solitude  - Joseph Boyden - Traduit de l’anglais par Michel Lederer - Editions Albin Michel

    chemins de solitude.gifJoseph Boyden écrivain canadien avait raconté l’histoire de Xavier Bird dans le magnifique  Chemin des âmes roman qui se situait pendant la guerre de 1914, dans son dernier roman nous retrouvons la famille Bird et c’est Will qui en est le héros, Will fils de Xavier.
    Will vit près de la Baie James, à Moonsonee réserve d’indiens Cree, nous sommes dans le grand Nord, si vous voulez y aller prenez le Polar Bear Express le seul train qui fasse le voyage jusqu’au "trou du cul de l’Arctique" comme le nomme Boyden.
    Will Bird est un ancien pilote de brousse, porté sur l’alcool,  il est aujourd’hui plongé dans le coma à la suite d’une agression, de son monde d’ombres et de fantômes il voit défiler sa vie. Le drame de sa séparation avec sa famille, la mort de sa mère qui refusa d’apprendre la langue des blancs, son père héros de la Première guerre qui va le trahir en l’envoyant à l’école. Ses souvenirs affleurent, ceux du Grand Nord, de sa vie de trappeur mais aussi sa propre dérive, son besoin de vengeance qui l’a conduit dans ce lit d’hôpital et son besoin de rédemption.

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    Indiens Cree

    A côté de lui, Annie sa nièce, elle ne croit pas au pouvoir des mots mais elle a une dette envers cet oncle qui l’a élevé ainsi que sa soeur. Petit à petit son récit se fait plus libre, plus sincère, elle confie à Will son amour/haine pour sa soeur Susan belle et magnifique, séduite par la vie clinquante de mannequin et aujourd’hui disparue.

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    Paysages de la Baie James

    Les deux récits vont se croiser, se répondre, dévoiler les sentiments de chacun, les rapprocher par delà la conscience.
    Le Grand Nord canadien est splendidement évoqué. En filigrane de ce roman Joseph Boyden met l’accent sur la destruction lente du peuple Cree par la maladie, l’alcool, la violence, la drogue. Les indiens tiraillés entre la modernité et la vie traditionnelle.

    Si vous n'avez pas lu "Le chemin des âmes" un billet chez Lettres Exprès et chez Art et Littérature précipitez vous et retrouvez ensuite ces Saisons de la solitude.

    Poursuivre votre lecture : Un article sur les enfants Cree enlevés à leur famille sous prétexte "d'éducation"


    L’auteur

    Joseph Boyden écrivain canadien vit en Ontario et enseigne la littérature à la Nouvelle-Orléans, il a reçu le Giller Prize pour ce roman

  • Le miel d'Harar

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    Le miel d'Harar - Camilla Gibb - Editions Actes Sud

    Dépaysement garanti aujourd’hui , un voyage de couleurs, d’odeurs et de saveurs dans un pays soumis aux tourments des révolutions, des guerres, des famines.

    Le roman alterne entre deux époques et deux lieux : 1974 en Ethiopie dans les mois de chaos politique qui précèdent la chute d’Hailé Sélassié, et 1990 à Londres au sein de la communauté éthiopienne en exil.

    L’héroïne se nomme Lilly , fille d’un père britannique et d’une mère irlandaise, parents excentriques et irresponsables qui disparaissant au Maroc la laisse à la garde d’un maître Soufi.

    Le Grand Abdal, élève l’enfant et l’instruit dans le respect des textes et des lois de l’islam.

    La vie de l’héroïne prend un nouveau tournant lorsqu'elle fait un pèlerinage à Harar, en Éthiopie, un des lieux saints du soufisme, quatrième ville de l’Islam.

    Contrainte de rester à Harar, Lilly va devoir lutter pour trouver sa place dans une société qui la rejette parce qu’étrangère, parce que blanche et parce que femme. Elle mesure le gouffre existant entre un texte d’amour ce que le Coran a toujours été pour elle et la possible « fureur de l’islam ».

    Les difficultés sont immenses, elle partage la pauvreté, et la misère des harari. Pour gagner sa vie elle enseigne le Coran aux enfants pauvres du quartier, cueille le khat, coud des coquillages sur des paniers, donne des leçons d’anglais.

    Elle tente de s’intégrer à la vie de la communauté mais la situation politique du pays va l’obliger à s’enfuir à l’heure où le destin des éthiopiens bascule pour longtemps dans le sang et l’horreur.

    Réfugiée en Angleterre auprès d’émigrés éthiopiens Lilly va tenter de reconstruire sa vie, de faire le deuil d’un pays et d’un amour.

    Camilla Gibb qui a vécue en Ethiopie, campe une Lilly toute à la fois forte et fragile, sensible, et qui laisse voir une facette de l’Islam très différente des violences de l’intégrisme.
    Le roman est peuplé de personnages hauts en couleurs, les odeurs et les couleurs de l’Ethiopie sont rendues avec bonheur; la communauté londonienne exilée est très heureusement peinte.

    Roman de l’exil, de la tolérance mais aussi de la force de la vie spirituelle et de sa beauté, ce roman mérite une place dans votre bibliothèque



    L’auteur :
    Camilla Gibb est née en Angleterre et a grandi à Toronto. Elle a fait des études universitaires en anthropologie sociale, avec un intérêt particulier pour le Moyen- Orient. Ses deux romans précédents, Détails insignifiants d’une vie sans éclat (Plon, 2004) et La Bouche pleine de mots (10/18, 2004), ont été traduits en une douzaine de langues. Camilla Gibb est la vice-présidente du PEN-Club canadien, et a reçu de nombreux prix pour son oeuvre.