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Daniel Deronda - George Eliot

Il y a quelques mois j'ai fait connaissance avec George Eliot, j'ai aimé son style, son art de dresser de beaux portraits psychologiques.
Il était temps de la retrouver dans son roman sans doute le plus abouti mais aussi celui qui souleva le plus de polémiques.

Middlemarch nous avait emporté dans une ville de province, ici c'est l'Europe qui est le terrain de jeux de George Eliot. On voyage de l'Angleterre aux villes d'eaux allemandes, de Gênes à New-York.

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La romancière de plus joue avec la chronologie classique de façon un peu déroutante au début du roman et elle y intègre les grands événements de l'époque : la guerre de Sécession et les péripéties de l'indépendance italienne.

 

Mais venons en au coeur du roman.

Le personnage central, comme le titre l'indique, est Daniel Deronda, un beau jeune homme, c'est le héros type, jeune aristocrate un brin idéaliste, bon, chevaleresque avec les dames, intelligent. 
Mais l'auteur aime les détours aussi le personnage qui apparait en premier c'est Gwendolen Harleth.

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Gwendolen Harleth

Dans une station balnéaire en Allemagne Gwendolen perd son argent à la roulette et dans le même temps apprend que sa famille est ruinée et que seul un mariage pourrait lui permettre de sortir de cette impasse. La jeune fille belle et pleine d'esprit est ainsi poussée dans les bras d'un homme riche, Mr de Grandcourt, qui va lui mener une vie impossible, un mari que l'on qualifierait aujourd'hui de manipulateur pervers !

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Et voilà le méchant mari, vous l'avez reconnu ?

C'est ainsi qu'elle fait la connaissance de Daniel Deronda qui va tenté de soutenir la jeune femme enferrée dans un mariage désastreux.
Si D Deronda est brillant, il est aussi inquiet car il redoute d'apprendre la vérité sur sa naissance. Il aime et respect son tuteur, Hugo Mallinger, mais soupçonne qu'il est son fils illégitime, un bâtard, ce qui dans la société de l'époque est pire que tout.

En preux chevalier il a sauvé la vie à une jeune fille, Mirah, qui tentait de mettre fin à ses jours. Il la confie à une famille amie et petit à petit apprend son histoire. Il fait ainsi connaissance avec un milieu bien différent du sien, Mirah est juive et artiste.
Il va peu à peu être fasciné par le judaïsme, ses pratiques religieuses, sa culture et sa littérature. Il devient ami avec Mordecaï le frère de Mirah.

 

L'intrigue romanesque est agréable à suivre mais ce qui fait l'intérêt de ce roman c'est surtout le rôle de passeur de Daniel Deronda, passeur entre deux cultures, entre deux traditions religieuses. 

En Italie quelques années auparavant Giuseppe Verdi a créé Nabucco et son célèbre choeur des Hébreux inspiré du Psaume 137.

 

         

Le sujet était osé pour l'époque et a dérouté bien des lecteurs de George Eliot. 
Ce roman est une belle et grande fresque qui s'aventure en terrain inexploré. C'est un volet de l’histoire des juifs anglais plutôt nouveau dans la littérature de l’époque, même si Benjamin Disraéli a été nommé premier ministre,  les juifs étaient toujours victimes des préjugés les plus habituels.

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Caricature de Benjamin Disraeli 

Ainsi le rêve de Mordécaï d' « une nouvelle Judée, située entre l'Est et l'Ouest - une alliance de réconciliation - un lieu d'arrêt des inimitiés, un terrain neutre » reflète l'intérêt de l'auteur pour ce sujet et son absence de préjugé, elle publia un essai contre l'antisémitisme ce qui n'était pas franchement dans l'air du temps.

Quelques années plus tard Théodore Herzl va écrire et militer pour la création d'un état juif et plus tard encore  le gouvernement anglais par la voix de Lord Balfour 

« va envisager favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif et emploiera tous efforts pour faciliter la réalisation de ce projet, étant bien entendu qu’il ne sera rien fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des communautés non juives existant en Palestine et aux droits et au statut politique dont jouissent les juifs dans tout autre pays. » 

 

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L'adaptation de la BBC

  

Roman ambitieux et profond. George Eliot n'a pas sa pareille pour la profondeur des analyses psychologiques de ses personnages.
Ici elle élargit considérablement son éventail en se tournant vers des catégories sociales jamais mises en avant sauf parfois pour les caricaturer.
Si vous ajoutez à cela qu'elle fait d'un bâtard le héros du livre et qu'elle dépeint le mariage comme un enfer pour la femme ! Il y a là tous les ingrédients d'un livre scandaleux.

J'ai vraiment beaucoup d'admiration pour George Eliot, non seulement pour son talent d'écrivain mais aussi pour sa curiosité et son courage.

La BBC a fait une adaptation du roman mais hélas il n'y a pas de version sous-titrée en français.

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Le livre : Daniel Deronda - George Eliot - Traduit par Alain Jumeau - Gallimard folio 2 tomes

Commentaires

  • Je n’ai pas lu cette auteure. Pendant que je lisais ton article, je me disais que Disraeli devait parfois se sentir bien seul au parlement anglais à l’image du seul homme noir en haut à droite du choeur qui chantait ce soir là salle Pleyel

  • je ne connais pas la vie de Disraéli mais j'admire le courage de cet homme car l'époque était rude pour tous ceux qui ne rentraient pas dans le moule

  • Ah je lis l'auteur depuis des années, une époque où trouver ses romans était difficile (et donc je le faisais en VO), bien évidemment j'ai lu cet étonnant Daniel Deronda!

  • Veinarde bilingue
    on trouve la traduction des principaux mais une oeuvre ou deux ne sont plus traduites depuis longtemps

  • Découverte totale, ce matin !

    Ignorant tout de cette autre "George", je viens de parcourir un
    domaine inconnu qui m'a vivement intéressée !
    Merci pour cette ouverture : l'Angleterre est décidément
    un pays romanesque où, au milieu des paysages en
    "toiles de Jouy", surgissent des personnages que nous avons
    plaisir à observer et à intégrer à notre univers intérieur !

    Quelle joie d'avoir encore tant d'œuvres à découvrir et
    merci à vous, les "passeurs" de petits et grands bonheurs !

    P.S : la perfection de "Nabucco" ajoute encore à notre satisfaction...
    naturalmente !

  • Nabucco s'imposait et puis je ne me lasse jamais du Va pensiero ...
    une auteure à découvrir et je te recommande de lire ce que disent les visiteurs ici pour faire ton choix pour démarrer, Daniel Deronda est particulièrement long et n'est peut être pas parfait comme première lecture de l'auteure mais ça dépend un peu de la façon de lire de chacun

  • Tout cela me semble romanesque à souhait ! Je ne vais pas craquer sur l'adaptation par la BBC avant d'avoir lu le roman... il faut dire que sans les sous-titres, je risque en plus de passer à côté de biens des réparties ! Bon dimanche Dominique !

  • je ne tente pas le diable moi non plus, pour démarrer tu peux commencer par un roman plus court, voir les autres commentaires

  • Bonjour Dominique, moi qui ne connait George Eliot que de nom, ce roman en deux tomes me parait un bon début pour la découvrir. Je note que comme Amantine Aurore Lucile Dupin, baronne Dudevant, Mary Ann Evans a pris le pseudo "George" pour qu'elle soit plus prise au sérieux. C'est dur d'être une femme ... Bon dimanche.

  • Comme notre George à nous c'était une femme qui croyait en son talent et qui se moquait du quand dira t-on en vivant avec un homme marié !!! on imagine le scandale à l'époque

  • Décuverte totale aussi pour moi. Très intéressant, ce contexte culturel et historique. J'ai reconnu le méchant mari ;-)

  • il est plus à son avantage dans Downton Abbey

  • Je n'ai rien lu de cette auteure....et tant mieux, car c'est une découverte en vue. Comme j'aime énormément cette époque, je pense que c'est une mine en perspective. Merci Dominique.

  • une auteure à découvrir : si tu lis les commentaires il semble que le moulin sur la Floss l'emporte mais il y a aussi Adam Bede et Silas Marner qui ne sont pas trop gros pour un début
    Middlemarche j'ai fait un billet et j'ai vraiment beaucoup aimé, de même que celui là mais qui n'est peut être pas le meilleur pour commencer

  • Je ne connais l'auteure que de nom ; dommage qu'il n'y ait pas de version française de la dramatique, mais c'est sûrement mieux de se plonger directement dans le roman.

  • je préfère toujours commencé par le livre mais j'aime bien les bonnes adaptations de la BBC mais là en Anglais sans sous titre ...je cale

  • Je ne connais pas ce titre mais George Eliot est une écrivaine que j'aime beaucoup. J'ai très envie de relire Midlemarch mais aussi mon préféré : Le moulin sur la Floss.

  • tu vas me convaincre de retenter l'aventure du Moulin

  • J'ai eu du mal avec "Middlemarch", à reprendre un jour ou bien ouvrir un autre, comme celui-ci, peut-être.

  • ah je suis surprise mais parfois un livre n'accroche pas et il faut y revenir, pour George Eliot je tenterai à nouveau le Moulin sur la Flosse que j'avais abandonné

  • tu nous fait découvrir un titre qui me plairait bien! je vais le chercher tout de suite! Tout m'intéresse, l'auteure, les thèmes!

  • téléchargé et pour 99 centimes! ce serait dommage de s'en privéer. maintenant il va falloir le caser dans le programme des lectures

  • Bonne lecture par avance

  • J'ai été moins intéressé je l'avoue par la partie juive et les débats philosophiques autour. Sans cela, je crois que ce serait mon Eliot préféré.

    L'histoire qui m'a le plus touché est celle de Gwendolen, bien que son importance diminue au cours du roman. Je crois que c'est Henry James qui faisait remarquer que les vrais héros (ou en tout cas les personnages dont on suit l'évolution avec le plus intérêt) des romans de George Eliot ne sont jamais les personnages-éponymes, mais un autre. Dans Silas Marner, c'est en fait Godfey Cass qui est le personnage principal, dans Adam Bède, c'est Hetty Sorel qui prend surtout la lumière. On remarque que Gwendolen, Godfey et Hetty ont pour point commun de connaître de grandes souffrances au fil du roman pour leur égoïsme et leur méprise/incapacité à comprendre les intentions réelles des gens qu'ils rencontrent. La méprise de Gwendolen sur Grandcourt est en effet des plus colossales !

    Ton billet rend bien hommage à la finesse des analyses psychologiques de George Eliot. A titre personnel, je trouve que c'est l'une des meilleures (sinon la meilleure) dans ce domaine. Quelle largeur d'esprit, quelle compréhension de l'être humain on a avec cette auteure remarquable ! J'en ressors toujours pantois d'admiration.

    Je ne suis toutefois pas sûr que ce soit le roman idéal par lequel commencer pour les non-connaisseurs de George Eliot. Le Moulin sur la Floss ou Silas Marner me paraissent plus appropriés. Middlemarch d'après ce que j'ai pu en lire par-ci par-là semble poser bien des problèmes à de nombreux lecteurs (beaucoup s'arrêtent en cours de route), et je trouve que Daniel Deronda est encore plus difficile d'accès encore.

    Bonne continuation si tu poursuis la lecture de cette auteure à l'avenir !
    Dommage toutefois que toute son œuvre ne soit pas disponible en français (notamment Félix Holt et Romola)...

  • curieusement j'ai calé il y a quelques années avec le Moulin sur la Floss où je me suis ennuyée, par contre je partage ton avis sur les portraits très fouillés très fins
    Ici le problème juif m'intéressait de pas sa modernité, à l'époque rare était les écrivains qui mettait le sujet en avant
    je suis assez d'accord avec l'avis d'Henry James sur le décalage du personnage principale, il me reste plusieurs romans à lire et je m'en réjouis

  • Je n'ai jamais lu George Eliot, bien que "Middlemarch" et "Daniel Deronda" soient dans ma PAL depuis une dizaine d'années. Le premier m'effraie par sa taille, et j'ai peur de m'ennuyer à la lecture du second. J'ai vu l'adaptation il y a longtemps (certes, dans de très mauvaises conditions), je n'avais pas été plus emballée que cela.

  • je ne me suis ennuyée ni dans l'un ni dans l'autre, G Eliot fait de bons et longs portraits psychologiques mais ils sont d'une grande justesse et d'une observation très fine sans jamais forcer le ton

  • Une future découverte, un beau billet sur fond de musique de Verdi, c'est un merveilleux moment, merci Dominique, lumineuse journée. brigitte

  • Verdi était à l'honneur dans les écrits de George Eliot alors l'occasion était trop belle

  • Superbe présentation… Je note le nom de l’auteur. Désolé pour tous les autres, mais ton blog fait partie de mes préférés…

  • que c'est bon à lire ça, je rougis de plaisir

  • On ne peur s'empêcher de penser à G Sand : un prénom masculin pour être prise au sérieux... Merci pour cet aperçu complet,

  • on peut d'autant plus que ce sont deux femmes de tête qui ont lutté toute leur vie et à travers leurs oeuvres pour défendre la place des femmes

  • Je l'ai dans ma PAL. J'attends d'avoir du temps devant moi. En tout cas ton billet magnifiquement illustré et complet donne envie

  • merci pour ce commentaire sympa, les Pal de temps à autre il nous faut piocher dedans sinon elles s'écroulent

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