Voir par delà les murs
Ce n’est pas souvent que la BD est à l’honneur sur ce blog, mais le thème rendait Chroniques de Jérusalem tout à fait incontournables.
Guy Delisle endosse le costume de Candide que Régis Debray portait dans mon premier billet.
C’est une BD qui vaut beaucoup beaucoup de livres très sérieux sur le sujet.
Une famille s’installe à Jérusalem, ce sont des expatriés du boulot, elle travaillant pour une ONG.
La femme au travail, les enfants à l’école, le père va lui explorer et apprivoiser peu à peu la ville, dépassant les surprises et les aléas. Il va nous la livrer en nous disant : voilà ce que j’ai vu et vécu, à vous de juger…
Vivre à Jérusalem est un expérience pas tout à fait comme les autres. Guy Delisle passe au crible la vie quotidienne, les logements difficiles à trouver , la voirie fluctuante selon que l’on habite un quartier 100% Casher ou 100% Halal , les transports qui s’arrêtent à la limite du quartier israélien, les chekpoints permanents, multipliés, ouverts ou fermés à l’envi, les jets de pierre avec des relents d’Intifada, les espaces de jeux des enfants où se mélangent les mères et leur progéniture.
On est tout de suite plongé dans la vie des quartiers qui palpite ou s’éteint au gré du shabbat ou du Ramadan, au gré de frontières qui ne sont pas que virtuelles.
Les dessins et les bulles valent tous les reportages télé, la haine et la hargne des colons sont illustrées par quelques dessins qui en disent long mais on a aussi la peur des israéliens, les dangers d’attentats.
L’absurdité de certaines situations, le ridicule de bien d’autres.
Lorsque l’auteur se transforme en touriste lambda il y a des pages drôles, ridicules, ahurissantes d’une justesse magnifique qui recoupent totalement le regard du Candide en Terre Sainte.
Témoignage forcément « arbitraire » dit l’auteur, une expérience personnelle qui s’habille de dérision, d’humour noir. Un regard aigu, persévérant, un regard empreint d’empathie mais qui sait mettre à nu les failles, les injustices, les défaillances, le côté kafkaïen du problème.
J’ai tout aimé dans cette BD et au fil des pages j’ai totalement oublié l’effet dessins/bulles qui parfois me gêne dans la lecture des BD, ici c’est tellement juste que l’on est emporté.
Ces Chroniques font parfaitement ressortir la complexité d’un possible vivre ensemble dans ce pays
©afp.com/Pierre Duffour
Les avis sont unanimes de Kathel à Keisha tout le monde a aimé et je ne peux que vous recommander de faire une place à ce livre dans votre bibliothèque
La BD : Chroniques de Jérusalem - Guy Delisle - Editions Delcourt
Commentaires
J'en avais vu de beaux extraits et avis positifs, peut=être chez les blogueuses que vous citez ?
Je trouve que vos trois documents explorent diversement et complètement le sujet.
@ christw : cette BD est très présente sur le Web suite surtout au prix à Angoulême l'an dernier
C'est ce qui me plait de lire autour d'un thème c'est que l'on peut soit approfondir comme ici soit étudier le thème sous des angles et avec des genres très différents ce qui 'élargit
C'est un peu exigeant mais cela fait penser à ses lectures avec moins de précipitation et plus de réflexion il me semble
Incontournable, en effet! Et pour une fois, ma LAL reste intacte!
@ keisha : un choix presque uniquement pour te faire plaisir, enfin ...presque ...
Sauf erreur involontaire de ma part, l'épouse de Delisle, Nadège, effectue une mission pour Médecins sans frontières non à Jérusalem mais dans la bande de Gaza. Quand ? A partir d'août 2008. Mais la famille ne s'installe pas à Gaza mais bien dans un quartier arabe de Jérusalem.
Des précisions qui ne sont sans doute pas inutiles mais ne remettent évidemment pas en cause les qualités et intérêts de cette BD.
@ JEA : je n'ai pas dit que sa femme travaillait à Jérusalem mais qu'ils y logeaient en effet, je n'aime pas donner trop de détails pour ne pas ôter le plaisir de la découverte aux lecteurs qui n'ont pas encore lu le livre en question
mes excuses pour un commentaire qui n'était aucunement une mise en cause de votre billet et n'appelait surtout pas la moindre justification de votre part
donc ma maladresse est entière et malvenue
je supposais seulement que travailler à Gaza en logeant à Jérusalem ne pouvait entraîner que problèmes sur problèmes (points de contrôles etc)
mais mes phrases étaient trop peu explicites
@ JEA : je ne suis pas du tout fâchée, vrai que parfois j'ai du mal à me décider de dire ou ne pas dire certaines choses car je respecte trop les lecteurs pour leur gâcher un peu la découverte
j'ai trouvé cette BD remarquable dans sa concision et par exemple quand un soir sa femme ne peut pas quitter Gaza, cette simple info par une bulle en dit plus long sur la restriction de liberté des habitants que mille reportages télé
du grand art
Je note cette BD. J'avais hésité à l'acheter mais ton billet m'a convaincue.
@ nadejda : une lecture tout à fait pertinente
Cela me tente. je ne suis pas du tout lectrice de BD, quoique....
@ miriam : je ne suis pas une grande lectrice de BD car on n'arrive pas à tout lire, mais de temps en temps certaines BD sont un peu indispensables, je pense à Maus ou à Persépolis , celle ci appartient à cette famille là
J'ai hésité à l'acheter, je craignais de retrouver encore une fois, les bons et les méchants... et comme les "bons" de mes concitoyens bien pensants ne sont pas forcément mes "bons" à moi... mais étant très fan de BD, j'ai voulu avoir comment cet artiste avait traité le sujet et je n'ai pas été déçue, c'est très impartiale, personnel, et plein d'humour... un ouvrage touchant, à lire absolument !
@ Marie : Guy Delisle fait preuve d'un recul tout à fait méritoire et c'est ce qui donne toute sa force à cette BD, il n'occulte rien mais ne montre pas du doigt gratuitement, il montre des faits
Très intéressants, (et beaucoup de boulot j’imagine) ces billets autour d'un thème! Merci.
Je ne connaissais pas du tout cette BD que tu présentes si bien, dont j'aime les illustrations; vous avez l'air unanimes, je note!
J'ai lu une excellente BD qui s'appelle en español "Palestina" de Joe Sacco. Comme un journal de voyage dessiné lors d'un séjour de deux mois en Palestine dans les années 1991-1992. Mais je n'ai pas trouvé sur la toile l'équivalent en français.
Belle soirée Dominique.
@ Colo , détrompe toi Joe Sacco a été traduit en français et au moins deux de ses BD sont accessibles
Reportages chez Futuropolis Gaza 1956 par contre Palestine a été traduit mais n'est plus disponible
Dominique, il te reste à lire TOUTES les autres BD de l'auteur qui voyage beaucoup (puisqu'il suit sa femme...) : Corée du Nord, Chine,...
@ cathe : c'est bien mon intention et je les emprunterai à mes filles qui les ont dans leur bibliothèque et qui en disent grand bien
De cet auteur, je dois avoir au moins 3 BD qui trainent dans ma PAL (Jérusalem, Pyongyang et Birmanie). Va savoir pourquoi je ne les ai pas encore lues, malgré les éloges et les thèmes qui m'intéressent beaucoup. Allez, ton billet m'encourage à les mettre à côté de mon lit, histoire de ne plus passer à côté...
@ zarline : j'ai l'impression que la lecture de celui ci va te pousser à lire le reste illico presto
Une très bonne BD, tant pour les dessins que pour le côté "Candide à Jérusalem"... Merci pour le lien.
@ Kathel : je trouve souvent chez toi des BD qui m'intéresse mais les obtenir en bibliothèque c'est une autre paire de manche, les lecteurs rendent souvent leurs BD avec un énorme retard c'est très agaçant
J'ai beaucoup de mal à être tentée par les bandes dessinées. Mes lectures remontent à plus de vingt ans et j'avoue n'en avoir emporté aucune dans ma cabane :-)
@ Rose : j'aime assez les BD (pas toutes) mais impossible de tout lire et tout acheter ce qui nous tente
Par contre ce type de BD est vraiment à lire au même titre qu'un essai sur le sujet : aussi efficace et beaucoup plus facile à lire :-)
J'ai beaucoup de mal à être tentée par les bandes dessinées. Mes lectures remontent à plus de vingt ans et j'avoue n'en avoir emporté aucune dans ma cabane :-)
Je n'ai toujours pas lu cet album. Il faudra que je le re-réserve à la biblio. La première fois, quand il a été disponible, je n'ai pas pu aller le chercher ....
@ kikine : ce n'est plus tout à fait une nouveauté et il devrait être plus facilement disponible encore que dans ma bibli ce ne fut pas le cas
Bonjour, ce billet est dans ma bibliothèque mais je ne l'ai toujours pas lu (honte à moi). Bonne journée.
@ dasola : vas y sans attendre, il arrive que l'on soit déçu à la lecture d'un livre encensé mais là pas du tout, il est parfait
Dans le même genre et du même auteur: "Pyongyang". Un régal au pays fermé qu'est la Corée du Nord
@ Damien : oui j'ai noté les deux autres chroniques de Delisle et je compte bien les lire Pyongyang et chroniques birmanes
C'est mon amie Marie Josée assez "branchée" BD qui me l'a fait découvrir à sa sortie.
Pas spécialement fan de BD j'avoue avoir été séduite
Bonne journée
Je suis désolée il me faudrait des journées de 48h en ce moment ,un peu de mal à suivre
Bonne journée
@ Aloïs : si tu trouves le filon des 48H en 24 je suis preneuse :-)
J'avais beaucoup aimé ce livre l'an dernier et ce regard de Candide, en effet !
Une très belle BD, plus de 300 pages très intéressant que je vous conseil. C'est le genre de livre qu'il faut lire plusieurs fois pour comprendre. Certes le sujet est rude... Bravo, je le conseil
@ Avis de lecture : merci de votre commentaire
C'est effectivement un ouvrage essentiel et incontournable. Je suis admiratif de la manière dont Guy Delisle parvient à traiter de sujets complexes et douloureux par le biais de sa vie quotidienne. Du magnifique travail !
@ Yohan , une BD très réussie sur tous les plans: le traitement du sujet et le graphisme
M'étant entrainée pendant ces vacances à lire l'intégrale des "Tintin" et des "Gaston la Gaffe" plus quelques "Boule et Bill" et autres "Quick et Flupke"à mes petits enfants, les BD ne me font plus peur !!! Bravo à cet artiste de traiter ainsi ce sujet, je vais m'empresser d'aller découvrir ses oeuvres. Que de gens chouettes dans le monde, merci Dominique. brigitte
@ Plumes d'Anges : j'ai lu pendant quelques années pas mal de BD car j'alimentais le rayon d'une bibliothèque depuis j'en lis moins mais celle ci est vraiment à l'égal d'un roman ou d'un essai sur le sujet
J'aime beaucoup le titre de ta note, il sonne juste par rapport à ce qui m'a paru être le positionnement de Guy Deslile, il reste soit, en dehors, mais nous donne une vision dont tous les fragments finissent par prendre un sens plus qu'éclairant. Pour moi, en tout cas, comme tu le dis aussi, plus que tous les reportages et les quelques essais que j'ai pu lire sur le sujet. Il y a quelques années, lors d'un festival de films consacrés à Jérusalem, il en ressotait le même désarroi interrogatif quant à la possibilité d'un "vivre ensemble" là-bas.