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Les Golovlev - M.E Saltykov Chtchédrine

Famille je vous hais  

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Je voudrais vous faire découvrir un auteur russe peu connu et pourtant tout à fait épatant : M.E Saltykov Chtchédrine

Découverte que je vous propose de commencer avec Les Golovlev que les éditions Sillage ont eu la bonne idée de rééditer, le volume en pléiade étant indisponible depuis des lustres.

C’est un grand tableau, presque une fresque, que dresse l’auteur, d'une famille de la petite noblesse terrienne, ils appartiennent à la classe des marchands et la figure dominante de la famille est celle d’Arina Golovlev, la mère.

C’est une très sombre chronique que tient Saltykov « A côté de ces familles favorisées par le sort, il en existe un grand nombre d'autres, aux représentants desquelles les pénates domestiques n'apportent dès le berceau qu'une éternelle infortune.  »

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Cloche du soir - Isaac Levitant - Galerie Trétiakov

Arina Petrovna Golovlev mène la maisonnée à la baguette et pas seulement au sens figuré. " femme habituée au pouvoir et douée en surplus d'une puissante imagination " Elle est économe jusqu’à l’avarice, inflexible jusqu’à la cruauté  n’hésitant pas à envoyer au bagne un serviteur pour une pécadille.
Manipulatrice, elle s’ingénie à monter ses enfants les uns contre les autres, Stépane l’aîné qui dilapide sa fortune par bêtise "Cinq milles roubles et un petit village de trente âmes" et qui semble espérer que sa mère l’aidera, Paul le mou, le tiède, le faible, et enfin Porphyre, le plus proche de sa mère par le caractère, surnommé par ses frères  Judas  pour son côté servile ou  La sangsue  capable d'asphyxier ses interlocuteurs sous un tel flot de paroles hypocrites que ceux-ci sont noyés et prêts à tout pour arrêter cette avalanche verbale, incapables ensuite de résister à aux  manoeuvres machiavéliques de Porphyre.

Il est tellement bon dans le rôle que sa mère elle même sera prise au piège.
Les trois fils n’attendent qu’une chose : la mort de leur mère. L’envie les tient de faire main basse sur le domaine et la fortune des Golovlev, leurs rapports sont petit à petit marqués par la folie, la violence, la turpitude. Véritable débâcle familiale.

 

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Ermite russe - Mikaïl Nesterov

 

On oscille en permanence entre la farce et la tragédie, des scènes burlesques à la Tchékhov succèdent à des scènes noires et cruelles, tout le récit est imprégné du ressentiment de Saltykov envers une mère qui avait les traits d’Arina Golovlev et une société Russe qu’il critiquait violemment.
Pourtant la nature, comme dans beaucoup de romans russes, est présente, quelques figures féminines apportent un peu de douceur et elles aussi pourraient trouver être des personnages de La Cerisaie ou d'Oncle Vania.

C’est une chronique sans concession mais j’ai aimé cette peinture au vitriol pleine de lucidité sur la fin d’une époque et d’une société.

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Village - Valentin Serov

"Il est des familles sur lesquelles pèse une sorte de fatalité. Cela se remarque surtout dans la peite noblesse qui, dispersée sur toute la surface de la terre russe, sans travail, sans lien avec la vie publique, ni les pouvoirs dirigeants, s'abrita derrière le servage, et qui maintenant, privée de toute défanse, agonise dans ses manoirs en ruine."

Saltykov fera partie des réformateurs mais sera comme bien d’autres emporté par la tourmente révolutionnaire.

je ne peux que vous recommander l'autre roman de Saltykov  Le bon vieux temps dont je parlerai ici un jour ou l'autre

Un autre avis sur le livre celui de Dasola

Le livre : Les Golovlev - M.E Saltykov-Chtchédrine - Traduit du russe par Sylvie Luneau - Editions Sillage

Commentaires

  • Belle découverte que vous proposez, Saltykov, inconnu pour moi. J'ai visité les éditions Sillage (il y a des livres électroniques ai-je constaté), "Le bon vieux temps" n'est pas édité dans la même maison ?

    Coïncidence, je publie ce jour un billet sur la Russie (A. Makine).

  • @ christw : Saltykov est nettement moins connu, écrasé un peu par Dostoïevski et Tolstoï mais j'aime les deux livres que j'ai de lui, celui ci et Le Bon vieux temps édité chez l'âge d'homme mais je crois épuisé
    Dans les deux il prend pour modèle sa famille et ses relations extrêmement difficiles avec sa mère
    on est assez loin des images idylliques de la Russie, chez lui il est plutôt question de violence, de knout, de disette, de conflit familial mais en même temps il ressort de ses livres le parfum de la Russie avec ses traditions

  • J'oubliais, mes compliments pour le choix des illustrations ! Le village de V Serov baigne dans une lumière exceptionnelle.

  • @ christw : merci merci

  • Bonjour Dominique, j'aime beaucoup les éditions Sillages, les textes sont assez originaux. J'avais hésité à acheter celui-ci, il y a tant à découvrir et redécouvrir ! je crois que je me laisserai tenter pour l'hiver prochain au coin du feu... à bientôt

  • @ Claude : oui moi aussi j'aime leurs rééditions de Tourgueniev, de Tchekhov
    Celui ci m'a immédiatement attiré pour l'auteur dont je n'avais lu qu'un seul livre

  • @ miriam : c'est un auteur plutôt confidentiel à découvrir absolument

  • Je ne connais pas du tout et ce que tu en dis est très tentant. J'attendrai l'édition de poche cependant pour l'un des deux titres. " Le bon vieux temps" n'est proposé qu'en broché également, pour l'instant, d'après ce que j'ai vu. Lequel conseillerais-tu pour découvrir l'auteur ?

  • @ Athalie : les éditions sillage ne sont pas vraiment des poches mais sont accessibles par contre le Bon vieux temps n'a jamais à ma connaissance été publié ailleurs que chez l'âge d'homme et c'est bien dommage

  • J'ai du même auteur "Histoire d'une ville" qui attend dans ma grosse pile à lire mais suite à la lecture de ton billet j'ai été fouiner et je viens de trouver les Golovlev d'occasion et n'ai bien sûr pas résisté.... Je crois que je commencerai par la lecture de celui-là.

  • @ nadejda : par avance bonne lecture, je n'ai pas lu Histoire d'une ville mais je vais le chercher du coup

  • Merci Dominique, un livre que je lirai sûrement, loin de ce que j'appelle "ces récits russes de belles enfances à cheval entre des samovars" dont j'ai un peu assez.
    Comme Christw, félicitations pour ces splendides illustrations, le village, l'ermite...tout!
    Bonne fin de journée.

  • @ colo : ici point de Russie idyllique, c'est noir et âpre au possible
    la recherche d'illustrations fait partie de mes petits plaisirs

  • @ Tania : un auteur qui devrait te plaire, un roman sans complaisance avec des portraits assez inoubliables

  • @ keisha : oui un brin de noirceur balzacienne ou quelque chose d'approchant

  • Je ne connaissais pas du tout... j'aime toujours les illustrations que tu trouves, si bien assorties à tes lectures !

  • @ kathel : merci , un auteur à découvrir

  • @ Claudialucia : quant à la haine il y a en effet un petit côté Atrides et un côté Balzac pour l'argent

  • Mazette, un auteur russe inconnu ! Et ce choix de peintures ! Et les éditions Sillage ! C'est pour moi :)

  • @ Marilyne : je pensais bien te voir à l'affut !!

  • Bonjour Dominique, merci pour le lien. Je conseille à nouveau ce roman qui se lit très bien. Et je voudrais attirer l'attention sur les éditions Sillage qui se sont spécialisés dans l'édition d'ouvrages jamais édités (en français) ou épuisés de grands auteurs connus ou non. Et le format est agréable. Bonne journée.

  • @ dasola : tu as raison c'est un éditeur intéressant, grâce à lu j'ai lu un roman de Thomas Hardy qui était devenu introuvable
    ici : http://asautsetagambades.hautetfort.com/archive/2011/09/18/le-maire-de-casterbridge-thomas-hardy.html

  • Cette Arina me fait trembler !!! Le caractère russe est vraiment fait de contrastes, cela est très présent dans la littérature mais aussi dans la peinture. Il s'en dégage une force assez unique. Une découverte que cet auteur, encore une fois merci Dominique de tracer de beaux chemins devant nous. Bises. brigitte

  • @ Plumes d'Anges : et l'on tremble plus encore quand on sait que c'est là le portrait à peine déformé de sa mère !!!!

  • Je ne connais pas du tout cet auteur. Ton article et tes magnifiques illustrations me poussent à le découvrir. La famille, quel sujet en effet !

  • @ Annie : une belle découverte d'un auteur russe un peu confidentiel

  • heureusement que dans le précédent billet tu avais promis une lecture plus riante, avec l'été qu'on nous promet tu te lances dans les lectures destruction du moral de ceux qui pourraient encore demeurer naïvement confiants dans la générosité humaine! j attends "la cousine Bette" "le père Grandet" , "Vipère au poing" !
    ceci dit je ne connaissais pas pourtant j'ai beaucoup lu les auteurs russes , si le soleil revient je m'y mettrai avec courage
    Luocine

  • @ luocine : il me semble avoir écrit : plus légère, je ne crois pas à la bonne littérature basée uniquement sur de bons sentiments car à ce moment là elle ne ressemblerait pas vraiment à la vie
    ce livre n'est pas du tout plombant, par endroit il est même franchement drôle car la bêtise peut l'être !!

  • On dirait vraiment Vipere au poing, non? Je note, en tout cas!

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